CLAUDE BERNARD DE LA NUTRITION TYPOGRAPHIE DE CH. LAHURE Imprimeur du Sénat et de la Cour de Cassation rue de Vaugirard, 9 ÉLÉMENTS DE MÉDECINE PRATIQUE DE LA NUTRITION COMME SOURCE UNIQUE ■■ DE LA SANTÉ ET DE LA MALADIE ou SEULS PRINCIPES desquels puissent être déduits la nature des maladies, leur traitement et les moyens de les prévenir I*AK Docteur en médecine de la Faculté de Paris Ancien interne de l’asile des aliénés de la Seine - Inférieure Membre de la Société de médecine de Rouen, Secrétaire du Comité central de vaccine de la Seine-Inférieure E. H. LE BRUMENT PARIS AMYOT, ÉDITEUR S, rue de la Paix ROUEN LE BRUMENT, LIBRAIRE 55, quai Napoléon M DCCC LVIII . TRADUCTION RÉSERVÉE PRÉFACE. Au moment où les travaux les plus remarquables et les recherches expérimentales les plus fécondes contribuent avec tant d’éclat à enrichir la physiologie, nous ne pouvons nous dissimuler qu’il serait fort dif- ficile d’expliquer l’opportunité de l’ouvrage que nous publions aujourd’hui, si, de prime-abord , nous n’ex- posions sous quelles inspirations et dans quel but il a été conçu. En effet, lorsque l’autorité des savants les plus distingués peut à peine attirer l’attention des praticiens sur des découvertes dont l’importance est telle qu’elles doivent, à notre avis, changer la face de la science, n’y aurait-il pas lieu de nous taxer de té- mérité et de présomption en nous voyant entrer en lice avec un nom inconnu? Mais, outre la convic- tion qui nous a guidé dans ces études, nous avons pour principe que dès l’instant où l’homme croit pos- séder une idée utile, il est de son devoir de la produire et de la propager, dût-elle être fertilisée par d’autres que par lui. C’est pour la ruche de la science surtout que chacun doit butiner, selon ses forces, et ne pas II imiter les frelons qui, dans leur égoïsme, ne travail- lent que pour eux. Depuis plus de vingt ans que nous sommes livré à la pratique médicale, nous avons toujours été saisi d’un profond sentiment de tristesse, lorsque nous con- sidérions le grand nombre de maladies réputées incu- rables que renferme le cadre nosologique. Mais ce qui surtout nous a inspiré de navrantes pensées, c’est le désordre et la confusion qui régnent dans les médica- tions ou dans les moyens qu’on oppose à ces maladies, et encore dans le but seulement d’en retarder les pro- grès. C’est donc une vérité triste à dire, en présence d’un tel chaos, dans le traitement des maladies dites incurables, comme dans celui d’un grand nombre de maladies chroniques, il est rare que les praticiens ne s’engagent pas exclusivement dans les sentiers battus dont l’insuccès est constamment le terme et que l’ex- périence des siècles leur crie d’éviter. Et même si l’un d’eux tente de s’en éloigner et que ses confrères soient appelés à l’aider de leurs conseils, il se voit blâmé par eux et bientôt contraint de rentrer dans les vieilles voies qui l’ont toujours égaré. Ces procédés sont si habituels, cette ligne de conduite si universellement adoptée, l’incurabilité de ces maladies paraît tellement avérée que si une guérison vient h être signalée, bien III loin de s’empresser d’en rechercher les causes et de se livrer à de nouveaux essais, il est d’usage de nier le succès obtenu en se retranchant derrière ce mot plein de douleur et de découragement: « C'est impossible!» Il faut le dire, toutefois, tant de médications , jus- que-là réputées héroïques, ont été réduites à néant par l’expérience, tant de revers ont suivi les tentatives les plus heureusement inspirées, et même les succès mo- mentanément obtenus, que ce n’est en définitive que de guerre lasse et de déceptions en déceptions que le scepticisme ou l’incrédulité a gagné tous les esprits. Nous n’en combattrons pas moins énergiquement ces tendances, car elles paralysent tous les efforts, elles s’opposent à tout progrès, elles sont contraires aux lois de l’humanité. Est-il rien de plus triste, en effet, de plus décevant pour le médecin, de n’arriver à l’aide de la science, de l’expérience qu’il a acquise et de celle de ses devanciers, qu’à découvrir qu’un do scs semblables, encore plein de force et de vie, mais qui porte un germe funeste, est atteint d’un mal qui doit progressivement le conduire au tombeau ? La science du diagnostic et du pronostic est parvenue, à cet égard, à un tel degré de certitude, qu’un habile pra- ticien peut fixer, pour ainsi dire, l’heure fatale du malheureux en proie à une de ces maladies contre IV lesquelles les secours de l’art sont constamment im- puissants. Mais si les maladies classées dans cette triste caté- gorie, telles que les affections tuberculeuses, le cancer, le ramollissement cérébral, les maladies de la moelle épinière, le diabète, l’albuminurie et tant d’autres, résistent à tous les traitements employés, nous ne som- mes pas beaucoup plus puissants contre un grand nombre de maladies chroniques d’une autre nature. Ce n’est pas que l’expérience en ait prouvé l’incurabi- lité ou que les moyens manquent pour les combattre avec succès, mais dans ce dédale de médicaments, de médications qui constituent la thérapeutique de ces maladies, le praticien, même le plus éclairé, ne sau- rait affirmer qu’il peut se tracer une voie certaine. Et d’ailleurs, fût-on doué d’une mémoire assez heureuse pour y classer la centième partie des médicaments qui, tour à tour, ont fait obtenir des guérisons, pour- rait-on y joindre ces milliers de circonstances, ces nuances infinies, ces innombrables détails qui, dans les maladies, rendent si variable et si difficile l’appli- cation des remèdes et qui, seuls cependant, sont pro- pres à fournir les indications qui conduisent à un choix rigoureux? Aussi, de tout temps, s’est-on efforcé de réduire aux lermes les plus simples les phénomènes V si complexes de l’étal morbide, afin d’arriver à établir, sur des règles invariables, les bases de la thérapeuti- que. N’est-ce pas sous de telles inspirations que sont nés tous les systèmes, depuis le célèbre disciple d’As- clépiade, Thémison, jusqu’à Broussais? Mais la pratique conduit bientôt à faire justice des systèmes exclusifs, et la plupart des médecins, dans l’impossibilité de constater par eux-mêmes les pro- priétés de cette immense quantité de remèdes, et de se souvenir de cette multitude de circonstances dans les- quelles ils pourraient être employés, se font chacun un formulaire souvent fort restreint, et se bornent à une série d’indications que le temps et l’expérience modifient sans doute , mais qui n’en constituent pas moins toute la somme des moyens qu’ils opposent aux diverses maladies qu’ils sont appelés à traiter. Les pharmaciens peuvent témoigner de la vérité de ces assertions, et, sur la copie d’une prescription sans si- gnature, il leur serait facile d’en nommer l’auteur, tant, le plus souvent, les prescriptions sont stéréoty- pées l’une sur l’autre! C’est là que conduit trop fré- quemment la pente si facile de la routine; mais par- fois le praticien, se faisant illusion sur la cause des bons résultats ainsi obtenus, se persuade, en cas d’in- succès, que les maladies étaient au-dessus des rcssour- VI ccs de l’art, et il persiste dans la voie qu’il s’est tracée. En signalant ces faits, nous n’avons pas pour but de blâmer la circonspection que le praticien peut ap- porter dans l’emploi des médicaments, mais bien de faire comprendre que l’insuffisance ou plutôt l’unifor- mité de telles prescriptions est la conséquence des difficultés que présente la recherche des indications et l’impossibilité de s’appuyer sur des bases bien déter- minées. Ce n’est pas, en effet, le grand nombre de médicaments qui fournit les armes les plus puissantes pour combattre les maladies, mais la connaissance bien raisonnée d’une quantité même restreinte d’a- gents médicamenteux, et l’habileté acquise pour les utiliser à propos. Les praticiens les plus éclairés ont toujours montré une grande réserve dans l’administra- tion des médicaments et surtout des médicaments très-actifs. Au reste, nous le répétons, il y a une telle confu- sion dans les médicaments , dans les médications ap- plicables aux maladies en général, un tel désordre dans les idées, dans les motifs qui président à leur choix, qu’on les adopte bien plus souvent sur la foi des récits pompeux qui ont été faits de leur efficacité, que d’après une sage appréciation des circonstances où VII l’on peut les employer avec succès. Pour ne citer que les eaux minérales dont on commence à reconnaître la puissante intervention dans le traitement des ma- ladies'qui ont résisté à toutes les autres médications, et dont, par cela même, l’action sur l’économie devrait être si attentivement examinée, il est certain qu’on n’en conseille pas l’usage avec plus de discernement. Sauf quelques médecins qui en ont fait une étude spé- ciale, les praticiens les plus distingués en sont encore, à cet égard, comme le faisait remarquer récemment le spirituel rédacteur en chef de V Union médicale, à se laisser influencer par les motifs les moins propres à inspirer une haute confiance dans leurs conseils. On ne tomberait pas dans cette étrange aberration si les moyens qu’on oppose aux maladies étaient sage- ment déduits des lois qui régissent l’organisme. Les médicaments perdraient de la valeur qu’on leur prête, car on leur attribue bien trop légèrement des succès qui reviennent de droit à la nature, c’est-à-dire aux tendances des fonctions organiques à s’équilibrer sans cesse. En effet, bien plus souvent qu’on ne le pense, les maladies sont guéries en dépit plutôt qu’à l’aide des médicaments. Qui ne sait que dans les affections identiques, les médications les plus dissemblables, et même complètement opposées, sont suivies d’un nom- VIII bre égal de guérisons? Et ces résultats ne se présentent pas seulement chez des sujets différents, mais encore sur le même individu . Le traitement des maladies aiguës en général offre à l’observateur de fréquentes occasions de constater ce que nous venons d’avancer. Aussi, n’est-ce pas, le plus ordinairement, dans ces maladies que se révèlent d’une manière évidente les ressources de la thérapeu- tique, ni l’habileté du praticien, quoique souvent de hautes réputations n’aient pas d’autre point de départ ni de bases plus solides. Mais il n’en est plus ainsi du traitement des mala- dies chroniques qui, nées plus particulièrement de l’état social, résultent presque toujours d’infractions aux lois de l’hygiène, et sont si souvent causées par ces empoisonnements latents que déterminent des lo- calités ou des habitations insalubres, et surtout les falsifications qui, maintenant, s’étendent à presque toutes les denrées alimentaires non moins qu’à toutes les boissons. Aussi, dans de telles circonstances , l’or- ganisme, profondément altéré, fait-il prendre aux ma- ladies les formes les plus variées, les nuances les plus difficiles à saisir, et c’est alors qu’un médecin éclairé trouve des sujets sérieux d’étude et qu’il déploie les ressources de son expérience. En effet, nous devons le IX reconnaître, le praticien peut bien , après de longues années, arriver, par l’observation répétée de cas sem- blables, à discerner des indications justes, à préciser l’application des remèdes ; mais, n’est-ce pas plus souvent le privilège de quelques hommes d’élite? Car la pratique de la médecine est tellement hérissée de difficultés, tant de laits, tant d’observations, tant de détails, doivent meubler la mémoire du médecin, qu’à peine conçoit-on que toutes les maladies inhérentes à l’espèce humaine puissent être traitées par le même homme. Quoi qu’il en soit, lorsque l’expérience ne repose pas sur des principes rationnels, sur l’étude approfon- die des lois de la nature, ce n’est plus qu’une aveugle routine qui peut bien faire obtenir quelques succès, mais qui, plus souvent, conduit à des revers. Exercer la médecine sans données théoriques, sans idées sur la nature de l’organisation et sur les causes qui peuvent en troubler l’harmonie, ne voir enfin que des remèdes à opposer au mal, sans autre guide que l’habitude, la mode ou tout autre mobile aussi futile, c’est pratiquer l’art médical en aveugle, c’est assimiler la thérapeuti- que à un recueil de recettes. Or, si ce n’est au lit du malade, ce livre ouvert au praticien, et qu’il ne peut jamais lire en entier, quel- X que longue et bien remplie que soit sa carrière, est-il une source à laquelle il soit assuré de puiser des indi- cations précises pour l’application des remèdes? En effet, s’il veut se renseigner dans les ouvrages de pa- thologie, sur le traitement à employer contre une ma- ladie quelconque, quel embarras n’éprouve-t-il pas en présence de la variété innombrable de médications et de médicaments recommandés? Et s’il étudie, dans un traité de thérapeutique, les propriétés d’un médica- ment, il n’est pas dans une moindre perplexité lors- qu’il considère la multitude de maladies contre les- quelles l’usage en est conseillé. Nous en avons dit assez, ce nous semble, pour faire comprendre qu’il est temps d’abandonner ces erre- ments qui, depuis les siècles les plus reculés jusqu’à nos jours, ont fait marcher la thérapeutique avec tant de lenteur, que, pour l’esprit le moins prévenu , elle semble être encore à son berceau. Il est temps de faire justice de ces remèdes, de ces médications qui, dues à des inspirations de toute espèce, et le plus souvent au hasard, se succèdent et se remplacent incessamment; il est temps enfin de rechercher s’il n’est pas de bases rationnelles sur lesquelles on puisse établir le traite- ment des maladies. Eh bien! nous en sommes intimement convaincu, XI l’étude de la nutrition, de cet acte fondamental, sous l’influence duquel s’accomplissent tous les phénomènes de la vie, peut seule conduire dans la voie que suit la nature pour conserver la santé, comme pour combattre la maladie. C’est qu’en effet, la nutrition a sous sa dé- pendance la constitution, le tempérament, les disposi- tions, les aptitudes individuelles, le travail des organes, le jeu des fonctions, l’harmonie dans leur bu t, dans leurs relations, enfin tous les actes de l’économie, toutes les actions qui s’y produisent. Dès le sein maternel même, la nutrition, suivant qu’elle s’opère régulièrement ou irrégulièrement, est pour le nouvel être le point de départ, la cause première de la force ou de la faiblesse de son organisation, delà vigueur de sa santé ou doses tendances morbides à venir. Aux différentes époques de la vie, dans l’enfance, l’adolescence, la jeunesse, l’âge mûr, la vieillesse, en un mot, à toutes les phases de l’existence, elle ne cesse de manifester son empire. Il est donc essentiel d’étudier un acte aussi important sous toutes ses faces, les phénomènes qui le consti- tuent, tant physiques, chimiques que vitaux, les in- fluences qu’il subit sous l’action des agents externes, enfin les lois qui le régissent. C’est ainsi que, parvenu à la connaissance des diverses actions qui se produi- sent dans l’organisme à l’état normal > il est possible XII d’arriver à une appréciation rigoureuse des modilica- lions apportées par l’état morbide, et de s’expliquer les appels et les nouveaux besoins qui en résultent. Tel est le but de nos études. Nous ne comprenons pas que l’on puisse établir le traitement rationnel des maladies, que l’on puisse jamais faire progresser l’art de guérir, tant que le diagnostic, ce flambeau de la thérapeutique, ne pourra éclairer qu’incomplétement les désordres de l’état morbide. Cet ouvrage étant écrit dans des vues exclusivement pratiques, nous avons dû nous efforcer d’en écarter tout ce qui ne paraissait pas se rattacher directement à notre sujet. Aussi, à plus forte raison, nous sommes- nous abstenu de toute discussion sur les divers systè- mes qui, depuis Hippocrate jusqu’à nos jours, ont été ou sont encore adoptés, sans nous arrêter à cette science de compilation qui peut offrir quelque alliait à la curiosité, mais qui ne nous eût conduit à aucun résultat utile. Nous ne repoussons d’ailleurs aucun système; car, dans chacun d’eux, il y a toujours de bons enseignements à recueillir. Mais nous ne cesse- rons de combattre tout ce qui peut tendre à faire ad- mettre exclusivement un système quelconque. C’est ainsi, à notre avis, que se produisent ces temps d’arrêt dans le mouvement progressif de la science. Le vita- XIII lisme, l’organicisme, le physiologisme, la chimialrie, etc., etc., ont leur raison d’être, et chacun de ces sys- tèmes fournit son contingent de vérités. Nous faisons profession d’éclectisme en médecine, et si, dans le cours de ce travail, nous paraissons nous élever plus particulièrement contre le vitalisme, c’est que les par- tisans de ce système, trop exclusifs pour poser entre les sciences physiques et les sciences métaphysiques la barrière infranchissable qui les sépare, tendent sans cesse, au contraire, lorsqu’il s’agit de l’étude physio- logique de l’homme, à faire intervenir des idées qui ont pour résultat de ramener à des causes occultes tous les phénomènes de la vie. Ils cherchent ainsi à divini- ser la matière , selon l’expression de Fourcault, et ils matérialisent la Divinité. Dieu et l’âme ne peuvent être conçus par l’esprit humain; ils sont au delà de la sphère de notre intelligence. Depuis la matière verte jusqu’à la sensitive, depuis la structure rudimentaire de la monade jusqu’à l’or- ganisation si complexe de l’homme, est-ce que tous les êtres organisés ne sont pas également placés sous cette puissance mystérieuse que l’on nomme le prin- cipe vital? Mais le principe vital n’exige-t-il pas aussi certaines conditions, en dehors desquelles il ne peut manifester son influence? Sans parler de l’état mor- XIV bide cl de toutes les causes qui déterminent des trou- bles si profonds dans l’organisme, le monstre otnpha- losite qui, dans le sein de sa mère, est doué de vie, cesse d’exister aussitôt qu’il en est expulsé. Certains rotifères ne présentent aucun signe de vie, lorsqu’ils sont desséchés, et peuvent même rester ainsi pendant plusieurs années; mais qu’un peu d’humidité les im- prègne, et bientôt ils sortent de cette mort appa- rente. Le principe vital, les forées vitales, pour révéler leur présence, doivent donc rencontrer dans les êtres organisés, non-seulement cette harmonie dans leur structure propre, sans laquelle les divers mouvements, les divers phénomènes qui constituent la vie ne peu- vent se produire, mais encore certaines circonstances dépendantes de la nature des agents extérieurs. En résumé, quand toutes les sciences accessoires de la médecine progressent chaque jour ; quand la connais- sance du corps humain, celle des éléments qui entrent dans sa composition et des usages auxquels ils sont des- tinés, s’étendent de plus en plus; quand les études mi- croscopiques, parles investigations les plus minutieuses, sont aussi appelées à leur tour à jeter tant de clarté sur l’histologie, pourquoi ne pas s’aider de semblables lu- mières pour pénétrer quelques-uns des phénomènes de XV la vie ; pourquoi isoler les actes vitaux, les forces vitales, lorsque, par l'enchaînement des lois qui relient entre eux tous les corps dans la nature, on peut, en suivant pas à pas les affinités ou les incompatibilités de ces corps, presque saisir le moment où la matière commence à s’organiser, où d’inerte qu’elle était, elle passe à la vie végétative, et de la vie végétative à la vie animale? A force de répéter que les phénomènes vitaux sont incompréhensibles, que ce sont des mystères impéné- trables devant lesquels il faut s’incliner, il est passé en habitude de ne pas faire un effort pour se rendre compte des moindres actes de la vie, de tout considé- rer comme ne devant jamais être du ressort de l’en- tendement humain. Ce serait sans doute une présomp- tion insensée de vouloir expliquer ou comprendre les mystérieuses influences du principe vital, ou de tenter d’assimiler l’organisme vivant à la nature inerte; mais s’efforcer de découvrir, par l’étude et par l’observation des lois de la nature, les diverses actions qui se pro- duisent dans l’économie, les modifications que les agents extérieurs impriment à notre être, les combi- naisons qu’ils forment avec nos humeurs, avec nos tissus, cela rentre dans le domaine des facultés de l’homme. Peut-être pourra-t-on nous accuser de faire une XVI trop large part à la chimie. Mais, en général, ou lui en fait une si restreinte, qu’on ne saurait trop, à no- tre avis, attirer l’attention sur les services qu'elle est appelée à rendre. C’est qu’en vérité nous ne pouvons nous expliquer l’éloignement que l’on manifeste, avec une si rigoureuse persistance, à l’égard des théories appuyées sur les connaissances chimiques, et surtout pour les inspirations thérapeutiques qu’elles peuvent suggérer, quand on admet avec une si déplorable fa- cilité les interprétations les plus bizarres des phéno- mènes physiologiques et morbides, les données les plus singulières pour la recherche et l’application des remèdes. Cependant, quand on considère la variété des substances qui constituent le corps humain, n’est- il pas étrange de négliger la recherche de la part qu’elles ont dans les actions organiques, et de s’éver- tuer, au contraire, à trouver dans d’autres matières des propriétés qu’inconteslablement ces substances seules doivent posséder au plus haut point? Et dans ce cas, quelle science mieux que la chimie peut con- duire à de féconds enseignements? Les grandes découvertes thérapeutiques ne sont pas dues à la chimie, dit-on ; les propriétés de l’opium, du quinquina, du mercure, de l’iode, etc., ont été trou- vées sans le secours de cette science. En effet, puisque XVII ccs decouvertes sont le fruit du hasard 1 Et d’ailleurs, la chimie organique est née d’hier, et la thérapeuti- que, telle qu’elle existe encore aujourd’hui, date des premiers âges du monde. Remarquez la lenteur des progrès de la thérapeutique; voyez quelle certitude elle vous donne; comptez avec elle. D’un autre côté, consi- dérez les découvertes que la chimie organique a faites, ou fait faire, en moins d’un quart de siècle, et, dès lors, ne la paralysez pas dans ses premiers efforts, quand déjà ils se révèlent par des traits de lumière. Vous craignez qu’elle ne vous induise en erreur, en cherchant à expliquer ce que vous croyez à jamais inexplicable; mais combien d’erreurs, combien de fautes, le vitalisme exclusif, qui ne voit que causes occultes dans tous les actes de la vie, n’a-t-il pas à se reprocher? Pourquoi donc ne pas montrer cet excès de prudence pour les hasardeuses tentatives qu’il inspire? En résumé, par quel motif la chimie organique n’a- t-clle pas encore apporté le secours puissant que la thérapeutique est en droit d’en attendre? Il faut bien dire la vérité, c’est que de toutes les sciences acces- soires delà médecine, la chimie est celle que nous tous praticiens nous négligeons le plus, c’est qu’en un mot nous ne sommes pas chimistes. L’opposition que l’on fait à la chimie, on l’a faite et XVIII on la fait encore à la physiologie, quoique ce soit un non-sens inqualifiable de vouloir pratiquer l’art de guérir sans connaître le mécanisme ni le but des fonctions organiques, sans chercher à comprendre les divers phénomènes qui se produisent dans l’économie, enfin, sans posséder aucune idée bien arrêtée sur la nature de l’organisation. Et pourtant, parmi les an- tagonistes de la physiologie, en est-il un qui ne taxe- rait d’inconséquence l’homme assez téméraire pour tenter de réparer un appareil dont il ignorerait le mécanisme? Que l’on reproche à la physiologie de n’avoir pas donné tout ce qu’elle promettait, nous le comprenons, et cela d’autant mieux que, toujours con- tenue par les barrières que lui opposait le vitalisme, elle ne pouvait prendre son libre essor. Seule d’ail- leurs, elle n’était pas assez forte pour oser lever le plus petit coin du voile qui couvre tous les mystères que ce système se plaît à trouver dans l’organisation de l’homme. Mais la physiologie n’est plus livrée à elle-même; la chimie organique a fait sa place au so- leil de la science, et elle se multiplie pour donner à la physiologie des preuves de son utile concours. Aussi, dans les recherches propres à éclairer les actions de l’organisme, la physiologie et la chimie se doivent un mutuel appui, et elles sont même devenues tellement XIX inséparables, que, si elles voulaient marcher isolé- ment, elles s’exposeraient à faire fausse route. Mais c’est précisément à partir de cette union que la phy- siologie est entrée dans une ère nouvelle, et que, pour la thérapeutique, s’ouvrira une voie plus sûre et se découvrira une mine plus féconde, si l’on arrive enfin à comprendre qu’il n’est plus possible, dans la prati- que de la médecine, de se passer des lumières de ces deux sciences. Mais, nous ne nous faisons pas illusion. Quels que soient les arguments que l’on puisse accumuler dans le but de démontrer l’indispensable nécessité des étu- des physiologiques et chimiques, pour fonder une thé- rapeutique rationnelle, longtemps encore on confiera au hasard le soin de trouver des remèdes propres à com- battre les maladies. Le merveilleux a tant d’attrait pour l’esprit humain, qu’aux yeux du plus grand nombre, un médicament guérit d’autant mieux que l’origine en est plus singulière, et que la cause de ses succès est plus incompréhensible. Nous avons donné aux considérations qui précèdent un développement trop étendu peut-être; mais nous tenions à justifier l’opportunité de notre travail, et à bien établir les motifs qui nous l’ont fait entrepren- dre. Nous aurions vivement désiré que l’exécution ré- XX pondît à l’importance du sujet. Si, malgré tous nos soins, nous n’avons pu réussir à mériter l’approba- tion du lecteur, nous espérons qu’il nous traitera avec indulgence, surtout s’il considère que les devoirs et les exigences de la profession ont encore ajouté aux difficultés que nous avions à vaincre. Mais ce que nous n’avons pu faire tout d’abord, nous nous efforcerons de l’exécuter dans un ouvrage plus complet, dont nous avons préparé de longue main tous les maté- riaux. Quant aux deux premières parties du travail que nous livrons aujourd’hui à la publicité , il nous im- porte de déclarer que nous n’avons pas eu la préten- tion d’en faire un traité de physiologie, mais bien de rassembler dans un certain ordre des faits , des idées, à l’appui de nos vues et de nos opinions sur les ques- tions de pathologie et de thérapeutique que nous au- rons à exposer ultérieurement. En les présentant sous la forme élémentaire, nous avons eu surtout pour but d’arriver progressivement à étudier avec plus d’ai- sance, de méthode et de clarté, certaines opinions, cer- tains faits physiologiques qui, bien qu’ayant grand cré- dit dans la science, ne sont pas encore assez vulgarisés toutefois, pour qu’on puisse saisir toute la portée de leur utilité pratique. Aussi, notre travail est-il, à vrai (lire, plutôt un programme détaillé qu’une étude ap- profondie des sujets que nous avons rassemblés. Néan- moins, cette esquisse, quoique très-rapidement tracée, constituera un aperçu général, dans lequel, nous en avons l’espoir, les diverses questions dont nous nous occuperons, groupées méthodiquement et présentées sous un aspect nouveau, amèneront le lecteur qui vou- dra bien nous suivre à partager nos convictions. Nous avons encore eu une autre intention, en agis- sant ainsi. C’est la forme élémentaire qui permet de traiter de la manière la plus intelligible les questions scientifiques souvent les plus ardues, et, dans un siè- cle où la diffusion des lumières s’étend de plus en plus, tous les hommes d’étude, par conséquent, peu- vent aborder la lecture de cet ouvrage. Or, il nous a semblé qu’il n’était pas sans intérêt pour l’humanité, et même pour notre profession, de nous attirer un aussi utile concours. On ne saurait trop s’efforcer, en effet, de répandre cette vérité que la médecine ne con- siste pas dans des recettes ou dans des spécifiques, comme en paraissent persuadés tant de gens assez té- méraires pour ne pas craindre de s’immiscer dans l’art qui, ajuste titre, doit être considéré comme le plus difficile de tous. Quand on se livre à l’étude de questions relatives à un XXI XXII art ou à une science, il est bien rare qu’on reconstruise de fond en comble cet art ou cette science. Le plus souvent, on se borne à grouper, dans un ordre parti- culier, les connaissances acquises, et à y ajouter quel- ques aperçus, quelques faits nouveaux qui perdraient de leur valeur ou de leur utilité, s’ils étaient présentés isolément. On a donc dû profiter des travaux de ses prédécesseurs, mais il est de toute justice qu’on fasse connaître la source à laquelle, souvent, on a puisé ses meilleures inspirations. C’est dans ce but qu’à la fin de ce volume, nous donnons la liste des auteurs que nous avons consultés, et, parmi eux, nous nous em- pressons de le reconnaître, il en est auxquels nous avons fait de nombreux emprunts. Nous agirons ainsi pour les autres parties de notre travail. Nous devons ajouter que, lorsque nous avons emprunté une idée, un fait, nous nous sommes bien gardé de chercher à nous l’approprier en en déguisant l’origine par un artifice de rédaction toujours facile et si communément em- ployé. Nous avons aussi mieux aimé faire de longues citations que de tronquer, par l’analyse, la pensée des auteurs, et de diminuer ainsi le mérite ou la portée de leur travail. Notre but nous paraît assez explicitement indiqué pour qu’il soit superflu de nous étendre davantage. Aussi, comme à la suite de cette préface, nous donnons un aperçu général desquestions que nous traiterons suc- cessivement nous n’ajouteronsplus que quelques mots. La présence du sucre dans l’organisme, la source et les usages de cette substance, grâce aux beaux tra- vaux de M. Cl. Bernard, à ceux de MM. Lebmann, L. Figuier, Colin, Chauveau, etc., sont autant de questions à l’ordre du jour, et dont quelques-unes peuvent être considérées comme résolues. Nous croyons en avoir compris toute l’importance au point de vue pratique. Nous nous sommes efforcé de la faire ressortir et même d’y ajouter encore davantage. Si nous n’a- vons pu, par des recherches expérimentales, corroborer les idées nouvelles que nous émettons à cet égard, nous les avons puissamment étayées des belles expé- riences que l’on doit aux savants que nous venons de citer. Il en est ainsi d’autres idées relatives au rôle de la fibrine, des corps gras et de quelques-unes des ma- tières inorganiques qui entrent dans la composition de nos tissus. Nous espérons en avoir effacé le caractère hypothétique en les appuyant de tous les faits et de tous les arguments que nous avons pu recueillir dans les œuvres des hommes que leurs travaux placent à la tête du mouvement scientifique, et parmi lesquels nous devons citer eu première ligue ; MM. Dumas, Liehig, XXIII XXIV Tiedemann, L. Gmelin, J. Muller, sur la trace des- quels marchent si glorieusement MM. Cl. Bernard, Lehmann, A. Becquerel, Rodier, C. Robin,Mialhe, etc. En résumé, si nous avons commis des erreurs dans les détails, si nous avons avancé des faits que l’expé- rience n’a pas encore confirmés, l’idée première de notre œuvre ne saurait en souffrir, puisque l’étude de la nutrition n’en restera pas moins incontestablement le point de départ des connaissances qui seules peuvent faire reposer un jour l’art de guérir sur des bases iné- branlables. Aussi, est-ce avec une conviction intime , une foi profonde que nous avons entrepris ce travail, et que nous nous efforcerons, par tous les moyens possi- bles, d’en propager les vues. La tâche que nous nous sommes imposée sera peut-être au-dessus de nos for- ces, mais elle ne lassera pas notre persévérance. Quoi qu’il en soit, si nous avons pu attirer dans cette voie un seul de ces hommes qui font jaillir la lumière de tout ce qu’ils touchent, nous nous estimerons assez récompensé de nos efforts; car c’est surtout alors que nous croirons avoir bien servi la cause de l’humanité. APERÇU GÉNÉRAL DU PLAN DE CET OUTRAGE ET DES PRINCIPALES QUESTIONS QUI Y SONT TRAITÉES. PREMIÈRE SECTION *. ÉTUDES PHYSIOLOGIQUES GÉNÉRALES SUR LA NUTRITION. PREMIÈRE PARTIE. NOTIONS D’ANATOMIE ET DE PD YSTOT.OOl K. Chapitre premier. Considérations préliminaires. Chapitre deuxième. Agents sous l’influence desquels s’opère la nutrition. Agents gazeux et agents impondérables. Agents nutritifs. Chapitre troisième. Appareils organiques de la nutrition. * La première section constitue le volume que nous publions aujourd’hui. Voir les sommaires de cette première section, page lv. XXVI Appareil respiratoire. — Tube digestif. — Organes de nutrition annexés au tube digestif. — Membranes muqueuses. — Peau. — Appareil urinaire. Chapitre quatrième. Sang. — Lymphe. Chapitre cinquième. Circulation. — Organes de la circulation. Chapitre sixième. Système nerveux. — Fluide nerveux. — Innervation. Chapitre septième. Voies par lesquelles pénètrent les agents extérieurs dans l’organisme. — Action de ces agents. — Appareil respiratoire. — Respiration. — Calorification animale. — Tube digestif. — Digestion. — Peau. Chapitre huitième. Absorption. Absorption pulmonaire. — Absorption intestinale. — Absorption cutanée. — Absorption interne. Chapitre neuvième. Sécrétions. Des sécrétions en général. Sécrétions dans les membranes séreuses et dans les articulations. — Sécrétions dans les voies pulmonaires, XXVII intestinales. — Glycogénie du foie. — Sécrétion cuta- née. — Sécrétion urinaire. SECONDE PARTIE. DE LA NUTRITION. Chapitre premier. Considérations préliminaires. Chapitre deuxième. Aliments albuminoïdes. — Aliments respiratoires. Chapitre troisième. De la fibrine. Chapitre quatrième. Aliments provenant des tissus gélatineux. Chapitre cinquième. Aliments dits respiratoires. — Sucre. — Corps gras. Chapitre sixième. Produits ultimes des métamorphoses des principes alimentaires. Chapitre septième. Matières incombustibles du sang. XXVIII Acide phosphorique. — Acide carbonique. Chapitre huitième. Sels terreux et sels alcalins. Chapitre neuvième. Fer. — Soufre. — Phosphore. Chapitre dixième. Eau. — Boissons fermentées. Chapitre onzième. Conclusion. DEUXIÈME SECTION. ÉTUDES PHYSIOLOGIQUES SPÉCIALES SUR LA NUTRITION. PREMIERE PARTIE. INFLUENCE DE L’iNNERVATION SUR LA NUTRITION. Chapitre premier. Généralités. Des propriétés électriques des matières et des divers appareils de l'organisme. —Des matières et des organes XXIX bons ou mauvais conducteurs, ou accumulateurs du fluide nerveux. — Étude des tissus sous ces rapports. Chapitre deuxième. Influence de l’innervation sur l’assimilation et la dés- assimilation. — Influence des nerfs sur l’absorption. — Influence des nerfs sur les sécrétions. Chapitre troisième. De l’intermittence. — Des sympathies. — Du som- meil. — Des rêves. Chapitre quatrième. Influences morales sur la nutrition. Sensations. — Imagination. — Passions gaies. — Passions tristes. DEUXIÈME PARTIE. DE LA NUTRITION CONSIDÉRÉE DANS LES TISSUS ET DANS LES ORGANES ISOLÉMENT. Chapitre premier. Des affinités et des incompatibilités des matières or- ganiques et des matières inorganiques de l'économie animale, entre elles. XXX Chapitre deuxième. De la nutrition dans les tissus. 1. Tissus fibrineux — gélatineux — mixtes — graisseux. 2. Substance nerveuse. — Tissu cellulaire — muqueux — séreux — musculeux — osseux — adipeux. 3. Rapports et antagonisme de nutrition des tissus entre eux. Chapitre troisième. De la nutrition dans les organes. 1. De la nutrition dans le cerveau — les muscles — les poumons — le tube digestif — le foie — la rate — le pancréas — la peau — les reins — le système glandu- laire lymphatique — les organes de la génération chez l’homme et chez la femme, etc. 2. Rapports et antagonisme de nutrition des organes entre eux. XXXI TROISIÈME PARTIE. DES PRINCIPALES CONDITIONS HYGIÉNIQUES RELAT1VE- MENT A LEUR INFLUENCE SUR LA NUTRITION. Chapitre premier. Température. — Vents. — Climats. — Saisons. Chapitre deuxième. De Tair dans les montagnes — sur les plateaux — dans les forêts — aux bords de la mer — dans les vallées — dans les villes. — Miasmes. — Changement d’air. — Voyages. Constitutions médicales. — Épidémies. Chapitre troisième. Alimentation. Régimes exclusifs. Régime animal. — Viandes rouges — blanches — noires. — Poissons. Régime végétal. — Légumes verts. — Farineux. — Aromatiques. — Racines. — Fruits. Régime mixte. Pain.— Bouillons. — Lait. — Beurre. — Fromage. — Œufs. — Café. — Thé. — Condiments. Chapitre quatrième. Boissons. Eau de pluie — de rivière — de source — des lacs — des marais — de neige. — Eau distillée. XXXII Boissons fermentées. — Boissons acidulés. Chapitre cinquième-. Des habitations. Des vêtements. Chapitre sixième. Des exercices en général. De la marche. — De la course. — De la danse. — De la gestation, — navigation, — équitation, — voiture. — De la natation. — De la gymnastique. Du repos. Professions — manuelles — sédentaires— insalubres. Bains. Bains chauds. — Bains froids. — Bains de mer. Des habitudes. Chapitre septième. Des forces qui concourent à maintenir l’équilibre dans les actes nutritifs. QUATRIÈME PARTIE. DE LA NUTRITION RELATIVEMENT AUX INDIVIDUS ET AUX PRINCIPALES PHASES PHYSIOLOGIQUES DE LA VIE. Chapitre premier. Des tempéraments. XXXIII Chapitre deuxième. De l’àge. Première enfance. — Deuxième enfance. — Crois- sance. — Dentition. — Adolescence. — Puberté. — Jeunesse. — Age mûr. — Vieillesse. Chapitre troisième. Du sexe. Du mariage et du célibat. Chapitre quatrième. Études physiologiques delà grossesse, de l’état puer- péral en général. Chapitre cinquième. De l’hérédité. TROISIÈME SECTION. DE LA NUTRITION DANS L’ÉTAT MORBIDE. PREMIERE PARTIE. DES MODIFICATIONS DE NUTRITION DÉTERMINÉES PAR l’état des principes de l’organisme. Chapitre premier. Généralités. De l’influence de l'oxygène, de l’hydrogène, du car- XXXIV bone, de l’azote et de leurs composés dans les désordres de nutrition. Chapitre deuxième. De l’albumine, de la fibrine, du sucre, de la graisse, suivant leur augmentation, leur diminution ou leur altération, dans les désordres de nutrition. Chapitre troisième. Du fer, du soufre et du phosphore dans les désordres de nutrition. Chapitre quatrième. Des sels alcalins, chlorure de sodium, carbonates de soude, de potasse, phosphates de soude, etc. dans les désordres de nutrition. Chapitre cinquième. Des sels terreux, phosphates de chaux, de magnésie, carbonates de chaux, de magnésie, etc., dans les désor- dres de nutrition. Chapitre sixième. De l’eau dans les désordres de nutrition. XXXV DEUXIÈME PARTIE. DES DÉSORDRES NUTRITIFS QUE PEUT DETERMINER LA. PRÉSENCE, DANS L’ORGANISME , DES PRINCIPES QUI DOIVENT EN ÊTRE ÉLIMINÉS. Chapitre premier. Études préliminaires. 1. Aperçu physiologique sur la circulation du sang arté- riel , du sang veineux et de la lymphe dans les diverses parties de l’organisme. 2. Aperçu physiologique sur le tronc cœliaque et les artères qui en naissent. 3. Aperçu physiologique sur le système de la veine- porte. Chapitre deuxième. De la fermentation. 1* Généralités. 2. De la fermentation dans le sang artériel, dans le sang veineux de la circulation générale, dans le sang de la veine-porte, dans la lymphe. XXXVI Ch api t re trois ième. De l’accumulation de l’acide carbonique dans les vaisseaux de la circulation générale et dans le système de la veine-porte. Chapitre quatrième. 1. De l’accumulation de l’urée dans les vaisseaux de la circulation générale et dans le système de la veine- porte. 2. De l’accumulation de l’acide urique dans les vaisseaux de la circulation générale, dans le système de la veine- porte et dans les diverses parties de l’organisme. Chapitre cinquième. De l’accumulation, de l’altération et des déviations des principes phosphores et des principes sulfurés dans les divers vaisseaux et dans les diverses parties de l’or- ganisme. Chapitre sixième. 1. De l’accumulation du fer, des matières alcalines et des matières terreuses dans les diverses parties de l’organisme. 2. De l’augmentation de l’eau, etc. XXXVII 3« De la présence, dans le sang, de la bile, de l’urine, des sécrétions morbides, etc. De la présence, dans le sang, de matières étrangères à l’organisme. TROISIÈME PARTIE. ÉTUDES DE PATHOLOGIE ET DE PATHOGÉNÎB GÉNÉBÀLHS. Chapitre premier. Des altérations du sang. De l’action du sang à l’état morbide sur l’innervation et sur la nutrition en général. Chapitre deuxième. . De l’innervation dans les désordres nutritifs. Des modifications dans les propriétés vitales des vaisseaux et des tissus. De l’irritation. — De la douleur. — Du frisson. Chapitre troisième. De l’absorption et des sécrétions dans les désordres nutritifs. — Hypercrinies. — Hétérocrinies. — Pneu- matoses. — Répercussion. — Métastases. Chapitre quatrième. Des déviations de nutrition. XXXVIII 1. De l’exercice excessif des organes. — Des écarts de régime. — De l’alcoolisme. — Des excès en général. 2. Des déviations dans l’emploi normal de l’albumine, de la fibrine, du sucre, des matières grasses, du fer, des sels alcalins et des sels terreux dans l’organisme. 3. Des déviations de nutrition sous l’influence desquelles se produisent les dispositions morbides, les diathèses. — Diathèse albuminique, glycosique, urique, phospha- tique, adipique, etc. Chapitre cinquième. Des vices de nutrition qui se rattachent à des causes mécaniques. QUATRIÈME PARTIE. ÉTUDES PATHOGÉNIQUES ET HISTOLOGIQUES DES PRIN- CIPAUX TYPES MORBIDES. Chapitre premier. Des modifications de nutrition qui constituent la pléthore. De la pléthore artérielle. — De la pléthore veineuse. — De la pléthore lymphatique. — De la pléthore dans le système de la veine-porte, — Hémorrhoïdes, XXXIX Chapitre deuxième. 1. Des modifications de nutrition qui constituent la fièvre. — Théorie de la fièvre. 2. Des modifications de nutrition qui constituent l’in- flammation. De l’inflammation. — Ses caractères. — Ses termi- naisons. — Théorie. De l’inflammation dans le système artériel — dans le système veineux — dans le système lymphatique — dans les divers tissus. — Hypérémie. — Induration. — Hypertrophie. — Atrophie. Chapitre troisième. 1. Des désordres de nutrition dans le système nerveux. Altérations de la substance cérébrale et de la sub- stance des nerfs. 2. De l’ossification à l’état morbide. 3. De la nécrose. — De la tuberculisation. — De la scro- fule. XL Chapitre quatrième. 1. De l’enchondrome. — Des tumeurs épithéliales — fibro-plastiques — colloïdes, ou gélatiniformes — po- lypeuses — ostéoplaxes, etc. Du cancer proprement dit. De la gangrène. — De la mélanose. 2. Des kystes. — Des parasites et des maladies qu’ils produisent. Des calculs, etc. Chapitre cinquième. Des vices de nutrition suivant l’âge, les constitutions, les tempéraments. Maladies de la croissance, de la dentition. — Mens- truation. — Ménopausie. Chapitre sixième. Des appareils organiques dans lesquels se produisent le plus fréquemment des désordres de nutrition. Voies respiratoires. — Voies digestives. — Peau. Chapitre septième. Des vices de nutrition sous l’influence desquels se développent les maladies infectieuses. De l’état typhoïque. — Des virus. — Des maladies épidémiques. — De la contagion. XLI Chapitre huitième. 1. Des désordres de nutrition dans la grossesse et dans l’état puerpéral en général. 2. Des vices de nutrition héréditaires. — Constitutions morbides congéniales. — Idyosincrasies. Chapitre neuvième. Des forces qui concourent à la résolution des mala- dies. — Forces médicatrices. — Voies médicatrices. QUATRIÈME SECTION. APPLICATION DES ÉTUDES SUR LA NUTRITION A LA PATHOLOGIE ET A LA THÉRAPEUTIQUE. PREMIÈRE PARTIE. APPLICATION DES ÉTUDES SUR LA NUTRITION A LA PATHOLOGIE. Chapitre premier. Considérations préliminaires. — Mode d’étude. 1. Étiologie. XLII 2. Symptomatologie. Des prodromes. — De l’incubation dans les maladies. — Des lassitudes spontanées. — Du frisson. — De la céphalalgie. — De l’hypéresthésie. — De l’anesthésie. — Du trouble de la calorification. — De l’algidité. — De la périodicité. — De l’intermittence. — Influence du cathétérisme et des maladies des voies urinaires sur l’intermittence. — De la marche des maladies. Chapitre deuxième. Maladies du système nerveux. Des névroses en général. Névroses du centre de la vie de relaliou et des cen- tres de la vie organique. Maladies mentales. Délire. — Coma. — Névroses de la moëlle épinière. Paralysie. Névroses des voies respiratoires. — Asthme. — Co- queluche, etc. Névroses des voies digestives. — Dyspepsie. — Gas- tralgie, etc. Névroses de la peau. Maladies convulsives. Ilystéricisme. Névralgies. XLIII Chapitre troisième. Des maladies inflammatoires. Maladies inflammatoires de l’encéphale et de la moelle épinière. Ramollissement cérébral. Ramollissement de la moëlle épinière. Maladies inflammatoires des voies respiratoires — des voies intestinales — de la peau. Chapitre quatrième. Des maladies constitutionnelles. 1. Chlorose. — Anémie. 2. Scrofule. —• Rachitisme. — Ostéomalacie. — Affec- tions tuberculeuses — rhumatismales — goutteuses — cancéreuses. — Diabètes. — Albuminurie. — Scorbut. 3. Maladies de la peau. Exanthèmes. — Bulles. —Vésicules. — Pustules. — Papules. — Squammes. — Tubercules, etc. Chapitre cinquième. Des maladies organiques et des modifications qu’elles déterminent dans les actes nutritifs. XLIV Maladies du cerveau — de la moëlle épinière — du cœur — des poumons — des organes digestifs — du foie — de la rate — du pancréas — des reins — des organes génitaux — de la peau. Hémorrhagies. — Hydropisies. Chapitre sixième. 1. Des maladies infectieuses. Généralités. — Fièvres. Fièvre intermittente. — Fièvre intermittente perni- cieuse. — Fièvre typhoïde. —Typhus. —Choléra. 2. Des maladies virulentes. Résorption purulente. — Variole. — Syphilis. — Pustule maligne. — Rage, etc. « Chapitre septième. 1. Rapports des maladies entre elles, relativement aux vices de nutrition qui les déterminent. 2. Essai d’une nouvelle classification des maladies basée sur les désordres de nutrition auxquels elles doivent leur origine. XLV DEUXIÈME PARTIE. APPLICATION DES ÉTUDES SUR LA NUTRITION A LA THÉ- RAPEUTIQUE. — ÉTUDES SUR LES PRINCIPALES MÉDI- CATIONS ET SUR L’ACTION PHYSIOLOGIQUE ET THÉ- RAPEUTIQUE DES AGENTS MÉDICAMENTEUX LES PLUS USITÉS. Chapitre premier. Médication expectante — anti-phlogistique — contre- stimulante — évacuante — altérante — substitutive — tonique — reconstituante. Chapitre deuxième. Du régime alimentaire comme moyen thérapeutique. 1. Généralités. — Du régime diététique. 2. Régime animal. — Viandes rouges. — Viandes blan- ches. — Gibier. — Porc. — Poissons. 3. Régime végétal. — Légumes verts. —Légumes secs. — Farineux. — Racines. — Fruits. U. Régime mixte. XLVI 5. Matières grasses. — Bouillons. — Lait. — Salines. — Aromatiques. — Condiments. 6. Boissons. Chapitre troisième. Des médicaments en général. Des voies d’introduction des médicaments. Des médicaments susceptibles ou non susceptibles d’être absorbés. Des modifications que les médicaments subissent dans l’économie. Des médicaments assimilables et non assimilables. Du mode d’administration des médicaments. — Du moment opportun pour l’emploi des médicaments. — Des doses. — De la température des médicaments. Chapitre quatrième. Des émissions sanguines. — Saignée. — Sangsues. — Ventouses. Chapitre cinquième. Des vomitifs et des purgatifs. 1. Des vomitifs. —- Leur mode d’action. — Leur utilité. - Leur but. 2. Des purgatifs. — Leur utilité. — Leur but. -- Dis- tïnction des purgatifs. — De la nécessité du choix des purgatifs. — De l’abus des purgatifs. Chapitre sixième. De l’application des principes de l’organisme animal à la thérapeutique. 1. Albumine. — Sucres. — Gélatine. — Corps gras. 2. Fer. — Manganèse. — Soufre. — Phosphore. 3. Sels alcalins. — Leurs dérivés et leurs composés. — Chlorures. — Chlorates. — Carbonates. — Lactates. — Acétates. — Phosphates. — Sulfates. — Azotates, etc. h. Sels terreux. — Leurs dérivés et leurs composés. —• Phosphates. —Carbonates. — Lactates. —Sulfates, etc. Chapitre septième. Eaux minérales et thermales. Eaux ferrugineuses. — sulfurées. — sulfurées sodiques. — sulfurées calciques. — chlorurées sodiques. — bi-carbonatées. — bi-carbonatées calcaires. XLVII XLVIII Eaux sulfatées. — sulfatées calcaires. — sulfatées magnésiques. Eau de mer. Chapitre huitième. Études physiologiques et thérapeutiques sur les mé- dicaments les plus usités. 1. Tisanes. — Boissons chaudes. — Boissons froides. — Glace. 2. Iode. — Brome. — Mercuriaux. — Antimoniaux. — — Arsenicaux. 3. Quinquina. — Tannin. — Résines. — Huiles essen- tielles. — Camphre. h. Opium. — Aconit. — Digitale. — Belladone. — Colchique. — Seigle ergoté. — Strychnées. 5. Éther. — Chloroforme. — Valériane.— Assa-fœtida. — Musc. Chapitre neuvième. Agents médicamenteux externes. 1. Cataplasmes. — Lotions. — Liniments. — Emplâtres. XLIX — Pommades. — Onguents. — Maniluves. — Pédiluves. — Lavements. — Injections. 2. bains. — Bains chauds — médicamenteux. — Bains froids. — Bains de mer. — Hydrothérapie. 3. Frictions. — Massage. — Gymnastique. — Électricité. TROISIÈME PARTIE. APPLICATION DES ÉTUDES SUR LA NUTRITION AU TRAI- TEMENT DES MALADIES EN PARTICULIER. Chapitre premier. Des bases sur lesquelles doit être établi le traitement des maladies. Indications. Chapitre deuxième. Études de thérapeutique spéciale. Généralités. — Traitement des maladies du système artériel — veineux — lymphatique. Chapitre troisième. 1. Traitement des maladies inflammatoires. L 2. Traitement de l’hypertrophie — de l’anévrisme — de l’asthme — de l’angine de poitrine, etc. Chapitre quatrième. 1. Traitement de la grossesse et de l’état puerpéral en général. 2. Traitement des maladies de Tenfance. — Croissance. — Dentition, etc. Chapitre cinquième. Traitement des maladies du système nerveux. Maladies du cerveau — de la moelle épinière. — Maladies convulsives. — Hystérie. — Névralgies. Chapitre sixième. Traitement de la scrofule, des tubercules. Chapitre septième. 1. Traitement du rhumatisme — de la goutte — de la gravelle — du diabète — de l’albuminurie, etc. cy Traitement des affections cancéreuses. Chapitre huitième. Traitement de la lièvre intermittente — de la fièvre LI intermittente pernicieuse — de la fièvre typhoïde — du choléra — de la résorption purulente, etc. Chapitre neuvième. Traitement des maladies virulentes. — Syphilis. — Pustule maligne, etc. Chapitre dixième. Traitement des maladies de la peau. Chapitre onzième. Des moyens prophylactiques. Soins hygiéniques.—Gymnastique. — Hydrothérapie. — Vaccine, etc. APPENDICE. Application des études sur la nutrition à la recherche des conditions topographiques et des coutumes locales sous l’inlluence desquelles se produisent les maladies inhérentes à certaines contrées de la France. PREMIÈRE SECTION. ÉTUDES PHYSIOLOGIQUES GÉNÉRALES SUR LL SUTRITiOI TABLE DES CHAPITRES ET DES SOMMAIRES. PREMIÈRE PARTIE. NOTIONS D’ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE. CHAPITRE PREMIER. CONSIDÉRATIONS PRÉLIMINAIRES. Mode de nutrition dans les corps organisés. — Différences qui caractérisent la nutrition chez les végétaux et les animaux. — Éléments qui constituent le corps de l’homme. — Fluide nerveux. — Fonctions de nutrition et fonctions de relation. —Aperçu succinct de l’importance de la nutrition. — Définition de la nutrition. — Mouvement de composi- tion et mouvement de décomposition. 1 CHAPITRE DEUXIÈME. AGENTS SOUS L’iNFLUENCE DESQUELS S’OPÈRE LA NUTRITION. — AGENTS GAZEUX ET AGENTS IMPONDÉRABLES. — AGENTS NUTRITIFS. 1. — Agents gazeux et agents impondérables. Oxygène. — Calorique. — Lumière. — Électricité. — In- fluence de ces agents sur la nature inerte et sur la nature vivante. — Distinction à établir à cet égard. — Oxygène, source du calorique et de l’électricité. — L’action de l’oxygène est incessante, et elle tend à réduire l’agrégat organique à des combinaisons plus simples. — Sa haute influence dans l’organisme 16 LVI 2. — Agents nutritifs. Forme et propriétés des agents nutritifs.— Forme gazeuse.— Air atmosphérique.— Pression atmosphérique.—Influence du calorique sur l’air atmosphérique. — Corps étrangers dans l’air. — Ozone. — Propriétés de l’air atmosphérique dans l’organisme. — Forme liquide. — Boissons. — Eau. — Classification des eaux. — Eau potable. — Caractères des meilleures eaux potables. — Propriétés de l’eau dans l’organisme. — Forme solide. — Aliments. — Principes élé- mentaires des végétaux et des animaux. — Plus les sub- stances alimentaires se rapprochent de la composition de l’homme, et plus elles sont propres à le nourrir. — Divi- sion des principes nutritifs en principes immédiats azotés et non azotés 20 CHAPITRE TROISIÈME. APPAREILS ORGAKIQUES DE LA NUTRITION. — APPAREIL RESPIRATOIRE. — TUBE DIGESTIF. — ORGANES DE NUTRITION ANNEXÉS AU TUBE DI- GESTIF. MEMBRANES MUQUEUSES. — PEAU. — APPAREIL URINAIRE. 1. — Appareil respiratoire. Poumons. — Plèvres. — Trachée-artère. — Larynx. — Bron- ches. — Artère pulmonaire. — Veines pulmonaires. — Glandes bronchiques. — Fonctions des poumons. — Hé- matose 34 2. — Tube digestif. Bouche. — Mastication. — Pharynx. — OEsophage. — Esto- mac. — Duodénum. — Intestins grêles. — Chylifères. — Veines mésentériques. — Gros intestin. — Leurs usages.. 36 3. — Organes de nutrition annexes au tube digestif. Foie. — Vésicule biliaire. — Fonctions du foie. — Rate. — Ses usages. — Veine-porte 40 LVII 4. — Membranes muqueuses. Distinction des membranes muqueuses. — Leur composition anatomique. — Leurs propriétés. — Leurs usages 44 5. — Peau. Composition anatomique de la peau. —Épiderme. — Derme. — Papilles, — Glandes sébacées. — Fonctions de la peau. 46 6. — Appareil urinaire. Reins, — Capsules surrénales. — Uretères. — Vessie...... 49 CHAPITRE QUATRIÈME. SANG. — LYMPHE. 1. — Sang. Propriétés physiques du sang. — Liqueur du sang, plasma. — Sérum. — Cruor. — Fibrine. — Globules. — Propor- tions de la fibrine, de l’albumine et de l’eau contenues dans le sang. — Gaz. — Différences entre le sang artériel et le sang veineux. — Circonstances dans lesquelles la compo- sition du sang varie. — Conditions qui déterminent la pureté ou l’altération du sang. — Composition chimique du sang 50 2. — Lymphe. Propriétés physiques de la lymphe. — Globulins. — Caillot et sérum de la lymphe. — Rapports de la lymphe avec le sang. — Composition chimique de la lymphe GO CHAPITRE CINQUIÈME. CIRCULATION. — ORGANES DE LA CIRCULATION. Cœur. — Oreillettes. — Ventricules. — Artères et veines.— Aorte. — Veine cave supérieure et veine cave inférieure. — Composition anatomique des artères. — Anastomoses. — Composition anatomique des veines. — Propriétés des organes de la circulation. — Pouls. — Contractilité des artères. — Mécanisme de la circulation. — Vaisseaux ca- pillaires. — Système capillaire. — Distinction des capil- laires. — Propriétés des capillaires. — Circulation dans les capillaires. — Usages des capillaires. — Vaisseaux lym- phatiques. — Chylifères. — Glandes. — Canal thoracique. — Circulation dans les vaissseaux lymphatiques. — Sys- tème lymphatique. — Ses usages 64 LVIII CHAPITRE SIXIÈME. SYSTÈME NERVEUX. — FLUIDE NERVEUX. — INNERVATION. 1. — Sensibilité et contractilité. — Appareils organiques nerveux. Cerveau. — Cervelet. — Protubérance annulaire. — Moëlle allongée. — Ganglions. — Nerfs cérébraux. — Nerfs spi- naux. — Grand sympathique. — Nerf pneumo-gastrique. — Composition du tissu nerveux 83 2. — Fluide nerveux. — Innervation. Fluide nerveux, agent analogue au fluide électrique. — Innervation. — Action afférente et action efférente. — Action réflexe. — Sympathies. — Action physiologique des agents extérieurs. — Excitation ou incitation.—Action et réaction physiologiques. — Phénomènes que détermine l’excitation sur les capillaires 87 CHAPITRE SEPTIÈME. VOIES PAR LESQUELLES PÉNÈTRENT LES AGENTS EXTÉRIEURS DANS L’ORCA- NISME. ACTION DE CES AGENTS. — APPAREIL RESPIRATOIRE. — RESPIRATION. — CALORIFICATION ANIMALE. — TUEE DIGESTIF. — DIGESTION. — PEAU. 1. — Appareil respiratoire. — Respiration. Influence de l’air atmosphérique comme agent de nutrition. — Des trois gaz que contient l’air atmosphérique, l’oxy- gène seul est propre à la respiration. — Mode par lequel l’oxygène pénètre dans le sang, — Dans l’acte respiratoire, LIX l’air atmosphérique est toujours en contact avec la muqueuse pulmonaire. — Phénomène chimique de la res- piration , hématose. — Conditions qui modifient la respiration. — Nécessité de la pureté de l’air atmosphéri- que. — Air confiné. — Influence de la viciation de l’air. — Influence de l’air, suivant son état de sécheresse ou d’humidité, suivant sa température. — Maladies endémi- ques ou sporadiques. — Constitutions médicales. — Mo- difications imprimées à l’acte respiratoire sous l’influence du sexe, de l’âge, de l’état de veille ou de sommeil, de l’exercice ou du repos, des impressions morales, etc 97 2. — Chaleur animale. L’oxygène est l’agent principal de la chaleur animale. — Tous les animaux ont une température qui leur est propre. — Des combustions dans l’organisme. — Influences sous lesquelles est placée la calorification animale.— Animaux à température constante et animaux à température varia- ble. — Hypothèse de Lavoisier sur le siège de la calorifi- cation animale, combattue par M. Cl. Bernard. — Circonstances qui déterminent la répartition inégale du calorique selon les différents points de l’organisme. — Siège de la chaleur animale. — Température du corps de l’homme. — Causes qui déterminent des oscillations dans le développement, la répartition et le maintien de la cha- leur animale 111 3. — Appareil digestif. — Digestion. Action des aliments dans les voies digestives, dans la bouche. — Mastication. — Insalivation. — Salive. — Action des aliments dans l’estomac. — Suc gastrique. — Ses pro- priétés. — Pepsine. — Action du suc gastrique. — Sub- stances attaquées par le suc gastrique. — Substances inat- taquées par le suc gastrique. — Chyme. — Action des aliments dans le duodénum. — Suc pancréatique. — Ses propriétés, ses usages. —Bile. — Action de la bile. — Suc intestinal, — Action du suc intestinal, — Résultat ultime LX des fonctions digestives.— Chyle.— Composition du chyle. — Produits digestifs dans le gros intestin . 121 4. — Peau. — Fonctions de la peau. Action des agents extérieurs sur la peau. — Respiration insensible ou perspiration cutanée. — La peau absorbe de l’oxygène et exhale de l’acide carbonique. — La sup- pression de la perspiration cutanée détermine l’asphyxie. — Transpiration ou sueur. — Conditions qui influencent les fonctions cutanées 143 CHAPITRE HUITIÈME. ABSORPTION. Définition et division de l’absorption. — Mode d’absorption. Imbibition. — Endosmose. — Caractère du mouvement d’absorption. — Causes qui modifient l’absorption. — Absorption dans les poumons. — Absorption dans les in- testins. — Forme sous laquelle sont absorbées les matières alimentaires. — Vaisseaux par lesquels s’opère l’absorp- tion intestinale. — Différence dans la propriété d’absorp- tion des vaisseaux chylifères et des veines mésentériques. — Conclusion. — Absorption cutanée. — Influences qui modifient cette absorption. — Absorption dans les glandes et dans les cavités closes. — Absorption interne ou de décomposition 147 CHAPITRE NEUVIÈME. Sécrétions. DES SÉCRÉTIONS EN GÉNÉRAL. — SÉCRÉTIONS DANS LES MEMBRANES SÉREUSES ET DANS LES ARTICULATIONS. — SÉCRÉTIONS DANS LES VOIES PULMONAIRES, INTESTINALES. — GLYCOGÉNIE DU FOIE. — SÉCRÉTION CUTANÉE. — SÉCRÉTION URINAIRE. 1. — Des sécrétions en général. Définition et division des sécrétions.— Appareils organiques des sécrétions. —Différentes dénominations des sécrétions. — Sécrétions alcalines et sécrétions acides. — Corps sur LXI lesquels s'effectuent les sécrétions. — Modifications que subissent les sécrétions. — Antagonisme des sécrétions.— Influence du système nerveux sur les sécrétions 165 2. — Des sécrétions en •particulier. Sécrétions dans les membranes séreuses et dans les articula- tions. — Synovie. — Sécrétions dans les voies respiratoires, dans les voies intestinales. — Gaz intestinaux. — Sécré- tions dans le foie, glycogénie. — Sécrétions excrémenti- tielles intestinales. — Sécrétion cutanée. — Sueur, com- position chimique. — Sympathies de la peau avec divers organes.... 172 3. — Sécrétion urinaire. Urine normale. — Composition de l’urine. — Urée. — Quantité de l’urée dans l’urine. — Influences qui modi- fient la proportion de l’urée dans l’urine. — Formation de l’urée.—Absence ou diminution de l’urée dans l’urine. — Acide urique. — Formation de l’acide urique. —• Influences qui font varier la proportion de l’acide urique dans l’urine. — Acide hippurique. — Urine des herbivo- res. — Matières qui se rencontrent normalement ou acci- dentellement dans l’urine. — Acidité et alcalinité de l’urine. — Influence de l’alimentation sur l’acidité ou l’al- calinité de l’urine. — Quantité de l’urine émise dans un temps donné.—Quantité d’eau dans l’urine. —Distinction des urines selon le moment de leur expulsion. — Quantité des principes solides contenusdans l’urine.— Causes d’aug- mentation des principes solides. — Diminution des prin- cipes solides.— État dans lequel les substances introduites dans le tube digestif sont trouvées dans les urines. — Substances dites diurétiques. — Influence des carbonates alcalins sur l’urine. — Diathèse urique. — Présence dans l’urine du sucre et de l’albumine.—Urine chyleuse ou lai- teuse. — Calculs. — De la rapidité avec laquelle les sub- stances passent du tube digestif dans la sécrétion urinaire. — Rapports de la sécrétion urinaire avec celle de la peau.. 185 LXII DEUXIÈME PARTIE. NUTRITION. CHAPITRE PREMIER. CONSIDÉRATIONS PRÉLIMINAIRES. Instruments de la nutrition. — La nutrition est incessante et tous les organes sont soumis à son influence. — Les tissus sont doués de propriétés vitales et de propriétés chimiques. — Le sang artériel contient tous les principes nutritifs de l’alimentation. — Des principes immédiats organiques contenus dans le sang. — Liquide nourricier. — Globules 213 CHAPITRE DEUXIÈME. ALIMENTS ALBUMINOÏDES. — ALIMENTS RESPIRATOIRES. Distinction des aliments en aliments albuminoïdes et en aliments respiratoires. — Cette distinction ne doit pas être considérée d’une manière absolue. — Considérations à l’appui. — Nécessité, pour l’accomplissement régulier de la nutrition, de l’emploi simultané des substances al- buminoïdes, des matières sucrées et des corps gras. — Principes immédiats albuminoïdes. — Protéine. — Prin- cipes nutritifs essentiels. — Albumine. — Fibrine. — Caséine. — Les matières albuminoïdes ne peuvent être utilisées à la nutrition qu’autant qu’elles ont subi des mo- difications spéciales dans l’organisme et qu’elles sont asso- ciées à d’autres principes 222 CHAPITRE TROISIÈME. DE LA FIBRINE. Distinction de la fibrine du sang et de la fibrine musculaire. LXIII — Distinction de la fibrine dans les trois principaux liquides de l’économie. — La quantité relative de fibrine est variable suivant le système vasculaire qui la renferme. — De la fibrine dans la lymphe, dans le sang veineux, dans le système de la veine-porte. — De la fibrine dans le système veineux général. — De la fibrine dans le sang ar- tériel. — Conclusion 233 CHAPITRE QUATRIÈME. ALIMENTS PROVENANT DES TISSUS GÉLATINEUX. Tissus gélatineux. — Sont très-répandus dans l’organisme. — Leur mode de vitalité. — Différence qu’ils présentent à cet égard avec les autres tissus de l’économie. — La fibrine proprement dite ne doit pas constituer toute la matière coagulable du système vasculaire. — Propriétés nutritives de la gélatine. — La gélatine est transformée en sucre dans l’organisme. — Expériences de M. Cl. Ber- nard.— Conclusion 264 CHAPITRE CINQUIÈME. ALIMENTS DITS RESPIRATOIRES. — SUCEE» — CORPS GRAS. 1. — Sucre. Propriétés chimiques de la glycose. — Usages attribués à la glycose dans l’organisme animal. — Usages et métamor- phoses des matières amylacées et du sucre chez les végé- taux. — Le sucre, en acquérant de l’azote, est utilisé à la nutrition des tissus. — Considérations à l’appui. — D’au- tres substances non azotées peuvent aussi acquérir de l’azote dans l’organisme. — Derniers termes des méta- morphoses du sucre combiné avec l’azote. —■ Conclusion. — Actions chimiques sous l’influence desquelles peuvent s’opérer ces métamorphoses. — Expériences et considéra- tions de M. Cl. Bernard. — Le sucre, transformé en ma- tière coagulable, n’est pas seulement utilisé à la nutrition des tissus. — Des autres usages du sucre. — Le sucre LXIV des féculents et le sucre de l’organisme ne doivent pas se comporter d’une manière identique dans les actes nutri- tifs. — Des usages du sucre comme aliment respiratoire. — De son rôle dans l’état morbide. — L’albumine et le sucre sont les principaux agents de la nutrition. — Emploi du sucre à la formation et à l’entretien du tissu osseux.— Des usages et des effets du sucre introduit en nature dans l’organisme 276 2. — Corps gras. Les corps gras ne sont pas seulement utilisés dans les com- bustions de l’organisme. — Les corps gras se rencontrent dans le règne végétal et dans le règne animal. — Proprié- tés chimiques des corps gras. — Glycérine. — Ses pro- priétés chimiques. — Nécessité des corps gras dans l’alimentation. — Comme les autres substances alimen- taires, les corps gras subissent des transformations spé- ciales pour être utilisés dans les actes nutritifs. — Origine des globules. — Opinions et considérations à l’appui. — Les corps gras contrebalancent l’action des sels calcaires et des sçls alcalins, et régularisent les métamorphoses du sucre. — Action des corps gras dans le mouvement de dé- composition , ils agissent comme agents désassimilateurs de la matière osseuse. — Circonstances dans lesquelles la graisse est utilisée ou accumulée dans les tissus. — La graisse, reprise par les voies de l’absorption, n’est utilisée dans l’économie qu’après avoir subi des transformations spéciales. — Usages de la graisse dans le tissu cutané. — Son rôle dans l’organisme, comme mauvais conducteur du calorique et du fluide nerveux 307 CHAPITRE SIXIÈME. PRODUITS ULTIMES DES MÉTAMORPHOSES DES PRINCIPES ALIMENTAIRES. Les substances albuminoïdes proprement dites ont pour der- nier terme de leurs métamorphoses l’urée, et de plus, selon les théories actuelles, l’acide urique. — Discussion à cet LXV égard. — Formation de l’acide urique. — Formation de l’acide hippurique. — Influence des sels. — Résumé 339 CHAPITRE SEPTIÈME. MATIÈRES INCOMBUSTIBLES DU SANG. — ACIDS PHOSPHOIUQUE. — ACIDE CARBONIQUE. 1. — Acide phosphorique. Les médiateurs des fonctions organiques sont les parties in- combustibles ou les sels du sang. — Tous les aliments propres à entretenir la vie contiennent de l’acide carboni- que ou phosphorique et des alcalis. — Du rôle de l’acide phosphorique. — Combinaisons de l’acide phosphorique et des phosphates terreux avec l’albumine et la matière gélatineuse. — Particularités qui en résultent. — Identité d’action des phosphates et des carbonates alcalins. — Pas- sage des principes minéraux du sang dans les urines et dans les fèces. — Urine acide et urine alcaline 1548 2. — Acide carbonique. Rôle de l’acide carbonique dans l’économie, par M. le docteur Mialhe. 357 CHAPITRE HUITIÈME. SELS TERREUX ET SELS ALCALINS. 1. — Sels terreux. Le phosphate de chaux concourt à, la formation et à l’entre- tien de la matière osseuse. — Il augmente la cohésion des matières avec lesquelles il est combiné. — La matière coagulable est surtout le véhicule du phosphate de chaux. — La quantité du phosphate de chaux utilisée dans l’éco- nomie est soumise à diverses influences. — Opinion de M. Mouriès sur le rôle du phosphate de chaux. — Impor- tance de l’emploi régulier du phosphate de chaux. — Du LXVI phosphate d : chaux dans la grossesse. — Son influence sur la sécrétion urinaire. — Conclusion 364 1. — Sels alcalins. Bôle des sels alcalins, selon M. Liebig. — Action des sels al- calins sur les tissus. — Action du chlorure de sodium sur l’absorption. — Les sels alcalins favorisent la combinaison de l’oxygène avec les matières organiques. — Influence, sur les actes nutritifs, des sels alcalins, suivant la propor- tion dans laquelle ils sont contenus dans le sang. — In- fluence des sels alcalins sur l’innervation. — Parmi les sels alcalins, le sel marin est le plus important dans la nutri- tion. — Opinions de divers auteurs sur les usages des sels alcalins 374 CHAPITRE NEUVIÈME. FEU. — SOUFKE. — PHOSPHORE. Le fer ne se rencontre que dans les globules. — Son impor- tance dans ces corpuscules.— Soufre et phosphore.—Leurs usages.—Distinction des usages du soufre et du phosphore. Élimination du fer, du soufre et du phosphore. —Leur emploi dans cette circonstance. — Elimination du fer, du soufre et du phosphore chez l’enfant, chez l’adulte. — Conclusion 387 CHAPITRE DIXIÈME. EAU. Usages de l’eau dans l’organisme. — Quantité d’eau conte- nue dans le corps humain.— Conditions qui la font varier. — De l’eau dans les substances alimentaires. — De l’éli- mination de l’eau hors de l’organisme.—Influence de l’eau dans les phénomènes nutritifs, suivant sa composition. — Boissons fermentées. — Leur action dans l’économie. — Action des boissons alcooliques concentrées sur le système nerveux et sur le sang 405 LXVII CHAPITRE ONZIÈME. CONCLUSION. Principes que doivent renfermer les aliments pour remplir toutes les conditions de la nutrition. — Il est souvent in- dispensable que la proportion des principes nutritifs varie dans l’alimentation. — Les substances albuminoïdes sont le point de départ des phénomènes chimiques de la nutri- tion. — Principales circonstances dans lesquelles la pro- portion des principes nutritifs varie dans l’alimentation. — Nécessité de la variété dans le régime alimentaire. — Influence du régime alimentaire sur la production des ma- ladies. — Ressources puissantes qu’il offre à, la thérapeu- tique. — Conclusion 419 PREMIERE PARTIE. NOTIONS D’ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE. CHAPITRE PREMIER. CONSIDÉRATIONS PRÉLIMINAIRES. Mode de nutrition dans les corps organisés. — Différences qui ca- ractérisent la nutrition chez les végétaux et les animaux. — Élé- ments qui constituent le corps de l’homme. —Fluide nerveux. — Fonctions de nutrition et fonctions de relation.—Aperçu succinct de l’importance de la nutrition. — Définition de la nutrition.— Mouvement de composition et mouvement de décomposition. Mode de nutrition dans les corps organisés. —Différences qui caractérisent la nutrition chez les végétaux et les animaux. 1. — Les phénomènes physiques de la vie, chez l’hom- me, comme dans tous les corps organisés, se confondent dans deux actes généraux : la nutrition et la reproduc- tion. Vivre et se reproduire est donc la loi commune à laquelle sont soumis tous les corps organisés ; cepen- dant sous le rapport de leur conservation individuelle, la nutrition est l’acte fondamental de leur être. 2. —Tous les corpsvivants, quoiqu’à différents degrés, selon l’état plus ou moins composé de leur organisation, 2 CONSIDÉRATIONS PRÉLIMINAIRES. possèdent la faculté de nutrition. Le végétal, par exem- ple, puise sans cesse dans le sol et dans l’air, par ses racines et par ses feuilles, des matériaux divers avec lesquels il fabrique la sève qu’il incorpore à ses organes; et, tandis qu’il approprie ce fluide à leurs tissus, il re- jette, sous forme d’excrétions, une proportion égale de la matière qui les formait. De même, l’animal prend, au dehors de lui, des aliments et de î’àir, dont il compose le sang qui sert à le nourrir ; et, tandis qu’il s’assimile ce fluide, il se débarrasse, par ses excrétions, d’une portion de matière égale à celle qu’il s’est appropriée. C’est ainsi que les proportions de son individu ne peu- vent s’accroître indéfiniment, et qu’il y a équilibre entre ses acquisitions et ses pertes. 3. —Cependant, quoiqu’il y ait entre le mode de nu- trition des végétaux et celui des animaux une analogie fort remarquable, toutefois ils diffèrent en ce que les premiers se nourrissent et s’accroissent par une absorp- tion toute extérieure ou de ‘périphérie, tandis que, sui- vant l’expression de Boërhaave, c’est par des racines intérieures que les animaux vont puiser sur leur cavité alimentaire, ou tube digestif, les éléments principaux de leur réparation. Une différence non moins notable sépare les végétaux des animaux, quant à l’appropria- tion à leur nature des principes de l’air atmosphérique. Pendant le jour, particulièrement, les végétaux décom- posent par leurs feuilles, Yacide carbonique contenu CONSIDÉRATIONS PRÉLIMINAIRES. 3 dans l’air, s’emparent du carbone, et rejettent à l’exté- rieur la plus grande partie de l'oxygène qui retenait ce carbone à l’état d’acide carbonique. Les animaux, au contraire, absorbent, par leurs poumons, l’oxygène de l’air et exhalent Yacide carbonique. C’est ainsi que les végétaux et les animaux, par un antagonisme merveil- leux, établissent à cet égard, l’équilibre qui règne dans les parties constituantes de l’air atmosphérique. h. — Mais il est unedifïérence non moins remarquable entre les végétaux et les animaux ; c’est irrésistiblement et sans qu’ils en aient conscience que les végétaux pui- sent dans le sol et dans l’air, les matériaux dont ils se nourrissent ; et c’est au contraire, par une volonté spé- ciale et sciemment que les animaux prennent les ali- ments destinés à les soutenir. C’est de même irrésisti- blement et sans qu’ils en aient perception, que les vé- gétaux accomplissent leurs diverses excrétions, quand, au contraire, les animaux perçoivent entièrement leurs excrétions, qui de plus sont laissées, sinon complète- ment, au moins en partie à leur volonté. 5. — Il ressort de ces considérations que les animaux en général et l’homme, dont il est surtout question ici, sont doués de deux facultés dont ne jouissent pa9 les végétaux, savoir : la sensibilité, par laquelle ils per- çoivent les corps extérieurs et préjugent les ser- vices qu’ils peuvent en obtenir, et la locomotivité, fa- culté par laquelle ils ëxéculent volontairement les tîiffé- 4 CONSIDÉRATIONS PRÉLIMINAIRES. rents mouvements nécessaires à leur conservation. Éléments qui constituent le corps de l’homme. 6. — Il ne peut entrer dans le plan de ce travail d’é- tudier le mode d’organisation des êtres les plus simples comparativement à l’organisation si complexe que pré- sente le corps humain; il nous suffira de faire remar- quer ici, que : tandis que dans les derniers degrés de l’échelle animale, un seul élément organique paraît quelquefois constituer l’individu, et une ou deux fonc- tions subvenir à l’entretien de la vie, chez l’homme, au contraire, c’est par des principes élémentaires variés, par une multitude d’organes dont le travail réciproque est tellement enchaîné, que la cessation ou même le simple ralentissement de ce travail apporte souvent des modifications nuisibles à l’accomplissement régulier des actes de la vie. En nous renfermant donc dans les bornes que nous nous sommes fixées, nous jetterons un coup d’œil ra- pide sur les bases qui constituent l’organisation de l’homme. 7. — Le corps de l’homme est composé d’éléments so- lides, liquides, gazeux et impondérables, savoir : Les éléments solides : phosphore, soufre, carbone, fer, potassium, calcium, sodium, magnésium, silicium, aluminium. Les éléments liquides : acide chlorhydrique, et l’eau qui, d’après Berzélius, entre pour les quatre cinquièmes dans l’organisation. Les éléments gazeux : oxygène, hydrogène et azote. De plus, le fluor. Enfin, les éléments impondérables : calorique, élec- tricité. Quelques-uns de ces éléments existent à l’état libre dans l’organisation de l’homme, mais le plus grand nombre se présentent sous forme de combinaisons, comme : acide carbonique ; phosphates sodique, cal- cique, magnésique ; carbonates sodique, calcique ; chlo- rures potassique, sodique ; lactates potassique, sodique; oxyde ferrique, etc., etc. En résumé, il n’y a guère que 16 corps qui entrent en jeu dans l’organisation humaine : parmi les métalloïdes, l’oxygène, l’hydrogène, l’azote, le soufre, le chlore, le phosphore, le carbone, le silicium, le fluor, et parmi les métaux, le potassium, le sodium, le calcium, le magné- sium, le fer. A ces corps, on pourrait ajouter, mais non sans restriction : le cuivre, l’arsenic et le manganèse. 8. — Mais sous un point de vue plus général, le corps de l’homme ne présente que des parties solides et li- quides. Tous les tissus appartiennent aux parties solides : le tissu cellulaire en est la base; il sert de moyen d’union entre toutes les parties du corps, et en détermine la forme. C’est dans sa trame que se produisent les dépôts CONSIDÉRATIONS PRÉLIMINAIRES. 5 6 CONSIDÉRATIONS PRÉLIMINAIRES. qui constituent la matière des os, la substance des mus- cles, des membranes, etc. Parmi les parties liquides, se trouve placé, en pre- mière ligne, le sang qui renferme dans ses éléments les principes de toutes les matières de l’organisation humaine; viennent ensuite la lymphe, la salive, les sucs gastrique, pancréatique et intestinaux ; la bile, la synovie, le suc médullaire ou moëlle, la graisse, etc., enfin les sécré- tions en général. Fluide nerveux. 9. — Il est en outre, dans l’organisme, un fluide qui plane sur tous les phénomènes de la vie, et en est, jusqu’à un certain point, le premier incitateur, le fluide nerveux. C’est en lui, en effet, que résident deux propriétés es- sentielles : la sensibilité qui donne aux tissus l’aptitude à recevoir une impression, et la contractilité qui les rend propres à manifester l’impression reçue par des mouvements caractérisés par la contraction et le rac- courcissement. Fonctions de nutrition et fonctions de relation. 10, — Les actes de la vie sont accomplis par des ap- pareils particuliers qu’on appelle organes. On donne le nom de fonction à l’action des organes, ou d’un système CONSIDÉRATIONS PRÉLIMINAIRES. 7 qui réunit un plus ou moins grand nombre d’organes pour le même but. Quoique les actes de la vie forment un cercle dont on ne peut indiquer ni le commencement ni la fin, néan- moins, pour en comprendre mieux l’enchaînement et pour en étudier plus facilement l’admirable mécanisme, il est nécessaire de les envisager sous deux aspects prin- cipaux : d’une part, les actes par lesquels l’homme indi- viduel se conserve en assimilant à sa propre substance les corps extérieurs à l’aide desquels sont réparées les pertes qu’il fait incessamment ; d’autre part, les actes par l’intermédiaire desquels il établit., avec les corps environnants, des rapports qui ont pour but de pourvoir aux moyens préparatoires que nécessitent les premiers. Ce sont ces actes qui constituent les fonctions vitales que Piicherand a si heureusement définies, des moyens d’existence. 11. — Les fonctions vitales sont divisées en deux clas- ses; Bichat les a caractérisées ainsi : Les fonctions nutritives ou fonctions de la vie orga- nique ; Les fonctions de relation ou de la vie animale. À la première classe appartiennent : 1° La respiration qui accomplit un des actes les plus importants de la vie : la transformation du sang veineux en sang artériel ; 2° La digestion qui fait subir aux aliments une éla- 8 CONSIDÉRATIONS PRÉLIMINAIRES. boration préparatoire essentielle, d’où résultent deux produits principaux : le chyme et le chyle; 3° L’absorption, fonction complexe, mais qui a sur- tout pour but de transporter dans le torrent de la circu- lation les produits dissous de la digestion ; k° La circulation, qui charrie le sang dans toutes les parties de l’organisme ; 5° Les sécrétions, fonctions ou actes par lesquels cer- tains organes forment, avec le sang, des humeurs spé- ciales, et rejettent au dehors, par différentes voies, les matériaux usés de l’organisation ; 6° La nutrition proprement dite, qui incorpore dans tous les tissus les éléments nécessaires à leur entretien ou à la réparation de leurs pertes. A la seconde classe se rapportent les fonctions de rela- tion : 1° Les sensations qui avertissent l’homme de ses rap- ports avec les corps environnants ; 2° Les mouvements qui l’en approchent ou l’en éloi- gnent ; 3° La voix et la parole, au moyen desquelles il peut communiquer avec ses semblables, sans qu’il lui soit nécessaire de se déplacer. 12. — Tel est l’ensemble des fonctions par lesquelles l’homme se conserve. 11 se reproduit et par conséquent, perpétue son espèce : CONSIDÉRATIONS PRÉLIMINAIRES. 9 1° Par la génération qui exige le concours des deux sexes; 2° Par la gestation, 1’accouchement et la lactation, fonctions exclusivement dévolues à la femme. 13. — En groupant ainsi les fonctions vitales, on voit d’un seul coup-d’œil qu’elles se confondent dans les deux actes principaux que nous avons signalés : la nu- trition et la reproduction. Cependant si l’on considère la nutrition au point de vue général de son influence sur tous les phénomènes de la vie, on arrive à reconnaître qu’elle seule est l’acte essentiel, l’acte fondamental sans le concours duquel nul autre ne peut se manifester dans l’économie. Vivre, pour une infinité de créatures, est-ce rien autre chose que se nourrir ? De là vient, comme le di- sait Virey, qu’en désignant la nourriture par le mot vivres, on s’exprime avec plus de vérité qu’on ne pense. C’est qu’en effet l’alimentation est un des premiers, des plus impérieux besoins de l’organisation. Chez les êtres les plus simples, les polypes par exemple, qui ne sont qu’un estomac vivant, toute la vie est dans l’appareil nutritif. Chez l’enfant, dont la vie de relation est pres- que nulle, tout ne semble concourir qu’à un seul acte, la nutrition. L’alimentation est très-fréquente et le som- meil qui facilite l’élaboration et l’assimilation des prin- cipes nutritifs suit immédiatement. L’alimentation et le sommeil sont les besoins essentiels de l’enfant, aussi 10 CONSIDÉRATIONS PRÉLIMINAIRES. tous les actes, toutes les fonctions, à cette époque de la vie, se confondent dans la nutrition. Dans un âge plus avancé même, si les nouvelles propriétés des organes, si les nouveaux besoins de l’économie semblent dimi- nuer l’importance de cette fonction et empiéter sur ses droits, c’est plutôt en apparence qu’en réalité, car la nutrition ne cesse de régner en souveraine et de prési- der à tous les mouvements de l’organisme, à tous les phénomènes de la vie. Cet ouvrage ayant pour but de démontrer qu’à la nu- trition se rattachent non-seulement tous les phénomènes de la vie physiologique, mais encore tous ceux de l’état morbide, il serait superflu d’entrer ici dans des déve- loppements plus étendus, puisque les arguments à l’ap- pui de notre proposition s’accumuleront à mesure que nous avancerons dans notre étude. Aussi il nous suffira d’énumérer les organes les plus essentiels qui concou- rent à l’accomplissement de cet acte fondamental pour en faire comprendre déjà la haute importance. En effet, les principaux organes sous l’influence desquels la nu- trition est immédiatement placée sont : les poumons, l’estomac, les intestins, le pancréas, le foie, la rate, le cœur, tout l’appareil vasculaire, le système nerveux viscéral, le système glandulaire lymphatique, les reins, la peau. Mais si nous poursuivions cette énumération dans ses points les plus extrêmes, nous arriverions à établir d’une manière péremptoire, qu’il n’est pas un CONSIDÉRATIONS PRÉLIMINAIRES. 11 organe dans l’économie qui, soit par son concours di- rect ou indirect, soit par son influence, n’apporte son tribut à cette fonction et n’en soit, en même temps, dépendant. En effet, non-seulement tous les organes reçoivent et s’approprient isolément le fruit du travail commun, mais encore, enchaînés l’un à l’autre, ils se prêtent un mutuel appui et concourent, chacun dans la mesure de ses attributions, à l’accomplissement du tra- vail général de la nutrition. Définition de la nutrition. 14- — Le mot nutrition, dans une acception très-géné- rale, exprime l’ensemble des actions par lesquelles les animaux assimilent à leur substance les matériaux nu- tritifs propres à leur conservation et à la réparation de leurs pertes, et rejettent au dehors les matériaux usés. Dans cette acception, le mot nutrition embrasse non-seu- lementle travail particulier par lequel le sang arrivé dans les tissus les nourrit, mais encore les diverses fonctions qui ont composé le sang, comme la respiration, la di- gestion, Vabsorption ; la fonction qui le conduit à tous les organes, la circulation; et enfin celles par lesquelles le corps se débarrasse d’autant de matériaux qu’il en a acquis, les sécrétions. Dans une acception plus restreinte, le mot nutrition exprime l’action occulte et profonde par laquelle les di- 12 CONSIDÉRATIONS PRÉLIMINAIRES. vers tissus de l’organisme saisissent, dans le sang ar- tériel, les éléments propres à leur substance et rejettent les matériaux usés qui ne peuvent plus en faire partie ; ce qui constitue deux phénomènes essentiels, l’assimila- tion et la désassimilation. De l’accomplissement parfait de ces deux actes, résulte l’équilibre dans le travail or- ganique général, c’est-à-dire la santé-, de son imper- fection, l’état contraire, en d’autres termes, la ma- ladie. Mouvement de composition et mouvement de décom- position. 15. — La nutrition, selon l’expression de Harvey, est une génération continue. La vie, en effet, se conserve et se prolonge en raison du renouvellement incessant de la substance des tissus. Ce renouvellement consiste dans un échange continuel entre la substance des tissus et la matière nutritive ; il s’effectue par deux actions, l’une par laquelle les tissus acquièrent les éléments propres à les reproduire, l’autre par laquelle ils subissent l’altéra- tion nécessaire pour opérer celte mutation. C’est à ces deux actions que l’on a donné le nom de mouvement de Composition et de mouvement de décomposition. Le corps de l’homme, dans toutes les parties qui le constituent, offre ce double mouvement, depuis l’époque de sa formation jusqu’au moment de la mort. Ce mou- CONSIDÉRATIONS PRÉLIMINAIRES. 13 vement est tel qu’il arrive une époque où le renouvel- lement matériel de notre corps est complet, c’est-à- dire, où nous ne conservons plus rien de la matière qui, à une époque antérieure, formait nos organes. C’est ce qui a suggéré à Richerand cette comparaison ingé- nieuse, que notre corps ressemble au vaisseau des Ar- gonautes, qui, radoubé mille fois dans sa traversée, n’avait plus, au terme de sa course, aucune des pièces de sa construction première. La découverte de ces deux actions constantes de l’é- conomie animale est due, comme tant d’autres, au ha- sard. Un chirurgien anglais nommé Belchier ayant ob- servé que les os d’un porc dont il mangeait, étaient fortement colorés en rouge, apprit que cet animal qui appartenait à un teinturier avait pris de la garance dans sa nourriture. Il soupçonna dès lors que cette couleur rouge des os pouvait dépendre de cette racine ; divers essais qu’il fit dans ce but confirmèrent entièrement cette conjecture qui, plus tard, fut mise hors de doute par des expériences nombreuses faites par Duhamel en France, Buzoni en Italie, Boëhmer, Ludwig, Délius en Allemagne. Ces expériences étaient d’autant plus con- cluantes qu’elles étaient dirigées sur des os, organes les plus durs de l’économie. Combien, à plus forte rai- son, les conséquences qui en découlaient, devaient-elles être vraies, relativement aux autres parties du corps dont les molécules sont beaucoup moins rapprochées et 14 CONSIDÉRATIONS PRÉLIMINAIRES. n’offrent pas, par conséquent, la force de cohésion qui caractérise celles du tissu osseux. On a certes exagéré les résultats de cette découverte, en voulant arriver à limiter le temps nécessaire pour le renouvellement entier du corps ; car la nutrition n’est pas plus que toute autre fonction de l’économie, identi- que et constante ; mille fois, au contraire, elle varie se- lon les conditions individuelles, selon les différences de structure des organes, sous l’influence de la gesta- tion, de l’état morbide, etc. Il est acquis seulement, et c’est un point déjà très-important, que le mouvement de composition est très-rapide dans le premier âge et qu’il se ralentit à mesure que l’homme avance dans la vie. 11 est en outre fort probable qu’aux époques prin- cipales de la vie, à la puberté, à la période de dévelop- pement complet de l’individu comme à la période de décroissance, le mouvementde composition et celui dedé- composition subissent des modifications soit simultané- ment, quant à leur activité ou à leur ralentissement, soit isolément, quant à leur prédominance l’un sur l’autre. Ces deux mouvements s’opèrent non-seulement dans l’économie en général, mais encore dans les tissus en particulier. Cependant ils sont plus ou moins actifs se- lon la nature des tissus, et selon les influences qui peu- vent en modifier l’aptitude de nulrition. En résumé, si le mouvement de composition est d’une haute importance pour la conservation du corps hu- CONSIDÉRATIONS PRÉLIMINAIRES. 15 main, le mouvement de décomposition a des relations non moins essentielles. C’est dans ce dernier, en effet, que résident les actions par lesquelles la substance des tissus subit l’altération qui l’amène à faire place aux éléments nutritifs apportés par le mouvement de com- position. Le mouvement de composition et celui de décompo- sition contribuent donc également au renouvellement de l’organisme ; aussi l’un et l’autre sont-ils le point de départ de la régularisation de tous les phénomènes nu- tritifs ou des déviations qui peuvent survenir dans leur accomplissement. CHAPITRE DEUXIÈME. AGENTS SOUS L’iNFLUENCE DESQUELS S’OPÈRE LA NUTRITION. — AGENTS GAZEUX ET IMPONDÉ- RABLES. — AGENTS NUTRITIFS. I. AGENTS GAZEUX ET AGENTS IMPONDÉRABLES. Oxygène. — Calorique. —Lumière. — Électricité. — Influence de ces agents sur la nature inerte et sur la nature vivante. — Dis- tinction à établir à cet égard.— Oxygène.— Source du calorique et de l’électricité. — L’action de l’oxygène est incessante, et elle tend à réduire l’agrégat organique à des combinaisons plus sim- ples. — Sa haute influence dans l’organisme. Oxygène. — Calorique. — Lumière. — Électricité. 16. —Quoiqu’il n’entre pas dans le plan de ce travail d’approfondir toutes les questions qui se rattachent à l’objet de nos études, néanmoins nous nous efforcerons constamment de n’en rien distraire d’essentiel. Dans ce but, nous devons, dès à présent, appeler l’attention sur des agents dont l’influence paraît planer sur tous les phénomènes de la vie. Tous les corps naturels sont incessamment soumis à AGENTS S. L’iNFL. DESQUELS S’OPÈRE LA NUTRITION. 17 l’influence de Yoxygène, du calorique, de la lumière et de Yélectricité. Aussi, de même qu’il est impossible d’étudier l’action des corps inertes les uns sur les au- tres, sans y comprendre l’intervention de ces agents, de même faut-il, dans l’étude de la nature vivante, tenir largement compte de leur influence. Mais ici, comme en d’autres points que nous avons déjà fait connaître, les corps organisés se distinguent des corps inorganiques ; ces derniers subissent l’action destructive des agents précités et ne peuvent s’y sous- traire, tandis que les corps organisés non-seulement luttent contre cette action, mais encore s’efforcent con- stamment, pour ainsi dire, de l’utiliser à leur profit; en d’autres termes, « les corps organiques cherchent con- tinuellement à faire équilibre aux influences chimiques. » (M. J. Muller.) C’est ainsi que chez les animaux, l’oxy- gène en se combinant avec le sang dans l’acte respira- toire, va porter dans les profondeurs de l’organisme un principe inflammable qui en consumerait la substance, s’il n’y rencontrait les matériaux nouveaux apportés par le travail digestif qui le forcent à s’unir à eux et à donner naissance à des combinaisons d’où résulte, au contraire, l’entretien de la vie. C’est donc avec juste rai- son que l’oxygène, malgré son action destructive, a toujours été considéré comme l’air vital par excellence; en effet, s’il détermine dans l’organisme sain, la com- bustion des matières avec lesquelles il se trouve en 18 AGENTS SOUS L’INFLUENCE contact, de cette combustion résultent les produits di- vers et les épurations qui constituent les phénomènes les plus essentiels de la nutrition. 17. —L’action de l’oxygène est incessante dans l’orga- nisme; aussi son influence est immense ; non-seulement l’oxygène joue un rôle des plus importants daus l’ac- complissement de l’acte respiratoire, mais encore par les actions et les réactions auxquelles il donne lieu, il est la source première, dans l’intimité organique, du calorique et probablement de Y électricité, car ces deux fluides, s’ils ne sont pas identiques, sont au moins in- séparables. Mais comme tout se lie et s’enchaîne dans l’ensemble des phénomènes naturels, le calorique et l’électricité n’en ont pas moins des propriétés essen- tielles dont la puissante intervention seconde l’action de l’oxygène, c’est-à-dire l’oxydation des corps avec lesquels ce gaz est en contact. En outre, quelque puis- sante que soit l’action de l’oxygène, cette action est toutefois subordonnée à des conditions diverses qui peu- vent l’activer ou la modérer, l’entraver ou même l’a- néantir. Nées de l’extérieur ou au sein de l’organisme, ces conditions ressortent, comme nous le verrons plus tard, soit de l’état propre de l’oxygène, soit de l’éléva- tion ou de l’abaissement de la température, de la sé- cheresse ou de l’humidité de l’air atmosphérique, ou bien encore de la présence de gaz anormaux en mélange avec ce fluide, etc. Des modifications analogues peu- DESQUELS S’OPÈRE LA NUTRITION. 19 vent encore être dues à la nature des corps extérieurs admis dans le canal alimentaire, à celle des produits fournis par l’acte digestif, au jeu plus ou moins régulier du travail général ou particulier des organes, etc. 18. — En résumé, introduit dans les corps vivants par les voies respiratoires, l’oxygène tend sans cesse à réduire l’agrégat organique à des combinaisons plus sim- ples, et par suite des actions qu’il détermine, il est en même temps la cause première de la calorification dans l’intimité de l’économie ; mais à l’extérieur comme à l’intérieur, l’influence plus ou moins vive des autres agents, fluides impondérables, gazeux, liquides ou so- lides, l’activité plus ou moins grande du travail orga- nique, favorisent ou combattent l’action de l’oxygène, d’où résultent l’accumulation, la diminution ou la dis- persion du calorique. A la présence de l’oxygène se rattachent donc les phénomènes les plus essentiels de la nutrition. Aussi est-ce avec bien juste raison que M. Mialhe dit que toute substance qui entrave l’oxygé- nation dans l’économie est toxique, que toute substance qui l’anéantit est mortelle. Nous bornerons ici ces considérations, car nous au- rons souvent occasion dans le cours de ce travail de nous occuper de nouveau de l’action de l’oxygène, et d’étudier l’influence particulière du calorique, de la lu- mière et de l’électricité. 20 AGENTS SOUS L’INFLUENCE II. AGENTS NUTRITIFS. Forme et propriétés des agents nutritifs. — Forme gazeuse. — Air atmosphérique.— Pression atmosphérique. —Influence du calo- rique sur l’air atmosphérique. — Corps étrangers dans l’air. — — Ozône. — Propriétés de l’air atmosphérique dans l’organisme. — Forme liquide. — Boissons. —Eau. —Classification des eaux. — Eau potable. — Caractères des meilleures eaux potables. — Propriétés de l’eau dans l’organisme. — Forme solide. — Ali- ments. — Principes élémentaires des végétaux et des animaux. — Plus les substances alimentaires se rapprochent de la composi- tion de l’homme, et plus elles sont propres à le nourrir. — Divi- sion des principes nutritifs en principes immédiats azotés et non azotés. AGENTS NUTBITIFS. Forme et propriétés des agents nutritifs. 19.—Les corps extérieurs au milieu desquelles êtres organisés puisent les éléments nutritifs nécessaires à leur conservation et à la réparation de leurs pertes, se présentent sous trois formes : La première, gazeuse , appartient à l’air atmosphé- rique ; La seconde , liquide, se rapporte à l’eau, tenant en dissolution des sels minéraux ou des substances orga- niques ; La troisième, solide, comprend les tissus végétaux et animaux. DESQUELS S’OPÈRE LA NUTRITION. 21 L’air atmosphérique ou l’eau contenant en dissolution quelques éléments nutritifs suffit aux besoins de l’orga- nisation des êtres les plus simples ; tandis que pour les êtres supérieurs, pour l’homme en particulier, l’air at- mosphérique, des corps liquides et des corps solides organiques sont absolument indispensables. Nous allons succinctement retracer, à cet égard, les propriétés de. ces corps. AGENTS NUTRITIFS. Forme gazeuse. — Air atmosphérique. 20.—L’air atmosphérique consiste dans une couche de corps gazeux qui entoure la surface du globe, et dont l’épaisseur est d’environ 80 kilomètres. C’est un fluide pesant, transparent, insipide, inodore, compressible et extrêmement élastique. 11 est composé principalement de deux gaz permanents, Y oxygène et Y azote ou nitro- gène, dans la proportion de 20,81 d’oxygène et de 79,19 d’azote; il contient en outre du gaz acide carbonique en très-faible quantité, de la vapeur d’eau, de l’électricité, du calorique et de la lumière. Pression atmosphérique. 21. —La pression que l’air atmosphérique exerce sur 22 AGENTS SOUS L’fNFLUENCE le corps de l’homme est d’environ 12,000 kilogrammes ; mais cette pression varie selon la quantité des couches qui constituent ce fluide, selon leur élévation, la vapeur d’eau qu’il renferme, suivant l’état de la température, etc., d’où résulte Sa condensation où sa raréfaction. Influence du calorique. 22. — Le calorique possède une influence manifeste sur l’air atmosphérique; aussi Pair atmosphérique est-il chaud ou froid selon la quantité de calorique qu’il ab- sorbe; sous la même influence, il est set, ou humide, relativement à la vapeur d’eau qu’il contient. Corps étrangers dans l’air. 23. —Des causes diverses peuvent modifier ou même altérer les propriétés de l’air, car, outre les gaz qui le composent, il peut aussi contenir des quantités variables de gaz permanents et des matières étrangères suscepti- bles de volatilisation. Ozône. 24. — Dans ces derniers temps, l’attention a été ap- pelée sur un corps qui paraît entrer aussi dans la com- position de l’air atmosphérique et y jouer un rôle im- DESQUELS S’OPÈRE LA NUTRITION. 23 portant ; nous voulons dire Vozone. Ce corps n’est rien autre chose que l’oxygène lui-même, mais dans un état particulier d’activité chimique qui lui est imprimé par l’électricité; aussi le considère-1-on généralement comme de l’oxygène électrisé. Selon un certain nombre d’observateurs, entre autres MM. Schœnbein, Bockel, Simonin père, Wolf, Billiard, Schapter, Besluberg, Gail- lard, Bérigny, ScouteLten, la présence ou l’absence de l’ozone ne serait pas sans influence sur le développe- ment des épidémies, notamment du choléra, des fièvres intermittentes, delà grippe, de la malaria, etc. Au reste, quoique rien de positif ne soit encore acquis à la science à cet égard, néanmoins l’importance de l’ozône prend chaque jour des proportions nouvelles, et il semble que, désormais, l’étude de ses variations dans l’atmosphère doive entrer dans les observations quotidiennes au même titre que celles de la température, de l’humidité, des vents, etc. Propriétés de l’air. 25. — Dans les phénomènes vitaux, l’air atmosphéri- que a pour propriétés de transformer, par l’oxygène qu’il contient, le sang veineux en sang artériel ; et par l’a- cide carbonique qu’il abandonne,de servir à la nutrition des végétaux. 24 AGENTS SOUS L’INFLUENCE AGENTS NUTBITIFS. Forme liquide» — Boissons. 26. — De même qu’il y a des aliments liquides, de même aussi il y a des boissons nourrissantes ; il est donc assez difficile de distinguer les boissons des aliments ; néanmoins les corps liquides qui concourent à la nutri- tion de l’homme sont nommés boissons : l’eau en est la base. Eau. Veau ou protoxyde d’hydrogène est un liquide trans- parent, inodore, incolore, dont l’action dissolvante est des plus étendues. L’eau est composée d’une partie d’oxygène et de deux parties d’hydrogène ; mais elle contient en outre de l’air et presque toujours des matiè- res salines. L’eau entre dans la composition de tous les corps organisés ; elle est même généralement une des conditions essentielles de leur aptitude à vivre. Elle entre à peu près pour 77 parties dans le poids général du corps humain ; un très-grand nombre d’animaux n’en contiennent pas moins de 80 à 90 pour 100 de leur poids total ; dans les végétaux, la proportion d’eau va- rie depuis 50 jusqu’à 95 parties. L’eau existe encore dans une foule de corps inorganiques. Aussi, après l’air DESQUELS S’OPÈRE LA NUTRITION. 25 atmosphérique, l’eau est un des fluides les plus répan- dus dans la nature. Boissons fermentées. 27. — L’eau est de toutes les boissons dont l’homme fait usage, le seul liquide véritablement indispensable aux besoins de son organisation ; mais l’état social, en modifiant les conditions de la vie naturelle, altère l’or- ganisme, allanguit les forces digestives et rend néces- saires des boissons qui, par leurs propriétés excitantes, viennent suppléer à l’inertie des organes de la diges- tion; telles sont les boissons fermentées, dont le prin- cipe actif est l’alcool. Classification des eaux. 28. — Dans l’état physiologique, l’homme ne fait usage que d’eau douce. Les eaux douces naturelles ont été classées, selon leur degré de pureté, en quatre groupes : Veau pluviale, l'eau de rivière, Veau de source, Veau de puits. Cette classification , quoique paraissant répondre au degré de pureté dont ces eaux sont pourvues, ne saurait être rigoureusement admise, car elle n’est basée que sur leur provenance, et l’on sait que l’eau de pluie même, qui est sans contredit la plus pure, offre néan- moins des degrés différents de pureté, selon les circon- 26 AGENTS SOUS t’iNFLUENCE stances dans lesquelles elle est recueillie. À plus forte raison, les eaux de rivière qui, dans leur trajet sur des terrains divers, peuvent dissoudre plus ou moins des matières avec lesquelles elles se trouvent en con- tact, doivent-elles offrir plus de variation encore. La même observation peut être faite à l’égard des eaux de source et de puits. Au reste, la pureté des eaux natu- relles, sous le rapport de leur concours dans les phéno- mènes nutritifs, est fort relative, car les eaux qui se rapprochent le plus de l’eau distillée par leur pureté, sont loin de pouvoir remplir les divers usages auxquels l’eau est destinée dans l’économie. L’eau distillée, en effet, qui ait point de vue chimique est de la plus grande pureté, n’est pas potable, non-seulement à cause de son goût fade et douceâtre, mais encore parce qu’elle man- que des principes excitants propres à favoriser les fonc- tions digestives et à satisfaire aux autres besoins de l’or- ganisme. Il en est ainsi de l’eau de pluie, qui est la plus pure des eaux naturelles et qui, néanmoins, doit être rejetée comme ne présentant pas les qualités que l’on recherche dans une eau potable. Eau potable. 29. — L’eau, pour être potable, doit contenir de l’air at- mosphérique et,en proportions convenables, certains sels, tels que les chlorures de potassium, de sodium et particu- DESQUELS S’OPÈRE LA NUTRITION. 27 lièrement du carbonate de chaux. On rencontre presque constamment, dans les eaux potables, du carbonate de magnésie, de la silice, du sulfate de chaux et d’autres sub- stances ; mais ces matières y existent en trop faible quan- tité pour altérer leur salubrité. Les eaux potables doivent dissoudre facilement le savon et cuire les légumes secs (haricots, pois, lentilles, etc.). Dans le cas contraire, les eaux sont dites crues, séléniteuses, parce qu’elles con- tiennent en quantités exagérées les sels que nous ve- nons de signaler comme utiles dans les eaux potables, ou bien encore des proportions considérables des autres sels qui ne se trouvent dans ces eaux qu’en très-minime quantité, tels que le sulfate de chaux, de magnésie, ou les chlorures de ces métaux. Aussi les eaux crues ne sont pas potables et leur usage détermine souvent des désordres graves dans la santé. Caractères des meilleures eaux potables. En résumé, voici les caractères que doivent présenter les meilleures eaux potables : « Une eau potable de bonne qualité doit être limpide, fraîche, sans odeur, incolore, exempte de saveur fade, salée ou styptique; elle est aérée, dissout le savon sans former de précipité opaque, et cuit bien les légumes secs. (M. Payen.) 28 AGENTS SOUS L’INFLUENCE Propriétés de l’eau dans l’organisme. 30. — Les boissons ont pour principale propriété de réparer les pertes de liquides que fait incessamment le corps humain, et par conséquent d’étancher la soif. Elles ont aussi pour but de faciliter la dissolution des matières nutritives ingérées dans lesanal digestif et de concourir à la formation du tissu osseux, et, en résumé, à toutes les actions physiques et chimiques de l’économie. AGENTS NUTRITIFS. Forme solide. — Aliments. 31. —Les corps solides essentiels à la nutrition de l’homme sont tirés du règne végétal et du règne ani- mal : ils constituent les aliments. Certains minéraux qui entrent dans la composition des végétaux et des animaux sont aussi incorporés, quoique en faible quan- tité, aux organes de l’homme; isolément, les minéraux sont utilisés comme assaisonnements. Par cette seule raison que les corps, pour nous nour- rir, doivent être assimilés à nos organes, il résulte que plus ces corps ont d’analogie avec la nature de nos tis- sus, plus ils sont aptes à en faire partie, et moins, par conséquent, ils offrent de résistance au travail de la di- DESQUELS S’üPtr.E LA MJIIUTiON. 29 gestion. Ce raisonnement, conforme d’ailleurs à l’expé- rience, donne lieu d’établir, dans les propriétés plus ou moins nutritives des tissus végétaux et animaux, une division toute naturelle résultant de leur composition élémentaire. Principes élémentaires des végétaux et des animaux. 32. — Les principes élémentaires des végétaux sont : Yoxygène, Y hydrogène, le carbone et souvent Yazote; le carbone cependant en est la base. Dans les principes constituants des végétaux, on ren- contre en plus ou moins grande abondance du phos- phore, du soufre, du potassium, du sodium, du calcium, et plus rarement de l’aluminium ; du silicium et du ma- gnésium ; très-communément du fer, du manganèse ; enfin du chlore, de l’iode et du brome. 33. — Les principes élémentaires des animaux sont : Yoxygène, Yhydrogène, le carbone et Yazote. Chez ces derniers, c’est l’azote qui prédomine. En outre, dans les principes immédiats du règne ani- mal se rencontrent les diverses substances que nous venons de signaler dans ceux des végétaux. 3ft. — L’organisation de l’homme présente la même composition élémentaire. L’azote en est donc le prin- cipe prédominant. Or, plus les substances organiques dont il se nourrit contiennent d’azote, plus elles se rap- 30 AGENTS SOUS L’JNFLUENCE prochent de la nature de ses tissus, et plus, par consé- quent, elles lui offrent de matériaux essentiellement nutritifs. Tandis qu’au contraire, si ces substances ne contiennent que peu ou point d’azote, elles ne le nour- rissent qu’avec difficulté ou imparfaitement, et encore sous un volume d’autant plus considérable que la pro- portion de l’azote est diminuée. Cependant il serait trop absolu de prétendre que la nutrition dans nos tissus ne peut s’effectuer que sous l’influence des principes nu- tritifs azotés, les aliments non azotés étant aussi indis- pensables, car c’est particulièrement dans la composi- tion variée des matériaux nutritifs que résident les con- ditions propres à favoriser le travail de la nutrition. DIVISION DES PRINCIPES NUTRITIFS. 35. — Les tissus végétaux et les tissus animaux qui servent à l’alimentation de l’homme sont divisés en substances azotées et en substances non azotées, divi- sion basée sur la composition de leurs principes immé- diats. 36. — Principes immédiats azotés des végétaux. 1° L'albumine végétale, qui se trouve dans le suc des végétaux et dans les graines émulsives : elle est soluble dans l’eau. 2° La fibre végétale ou gluten, que contiennent parti- culièrement les céréales et, en certaines proportions, les DESQUELS S’OPÈRE LA NUTRITION. 31 légumineuses ainsi que les parties tendres des plantes ; elle est insoluble dans l’eau et analogue à la fibrine animale. 3° La caféine végétale, qu’on rencontre dans les fruits des légumineuses ; de l’albumine l’accompagne dans les haricots, les lentilles, les pois et les graines oléagineu- ses ; l’eau la dissout. 37. — Principes immédiats non azotés des végétaux. 1° L'amidon ou fécule, que fournissent abondamment un grand nombre de plantes, telles que la pomme de terre, les céréales, les légumineuses ; elle est insoluble dans l’eau. 2° La dextrine, qui se trouve dans toutes les parties des végétaux contenant de la fécule, et qui résulte de la transformation de cette substance par un principe parti- culier, la diastase. 3° Le sucre, que renferment la canne, la bette- rave, etc., etc., et le raisin sous un autre état. U° La gomme, qui découle de certains arbres; l’eau la dissout. 5° La pectine-, principe gélatineux des fruits, groseil- les, cerises, etc. 6° L'huile, que produisent un grand nombre de grai- nes, etc. 38. — Principes immédiats azotés des animaux. lo Valbumine, que le blanc de l’œuf présente pres- que à l’état pur, qui fait partie du sérum du sang et que 32 AGENTS SOUS L’iNFLUENCE l’on trouve en grande quantité dans la substance du cerveau et des nerfs. 2° La fibrine, qui se trouve abondamment dans le sang, les muscles, etc. 3° La caséine, que le lait et le fromage contiennent en grande quantité. 4° La gélatine, que l’on extrait, par l’ébullition dans l’eau, des tendons, des ligaments, des membranes fibreu- ses, des os, etc. 5° La chondrine, qui résulte de l’ébullition prolongée des cartilages. 6° L’osmazôme ou osmozôme , produit de l’ébullition de la viande dans l’eau, matière extractive complexe, formée de substances azotées, de lactate de soude, d’a- cide lactique, et particulièrement de créatine, de créati- nine, et qui constitue, pour une partie, le liquide ali- mentaire connu sous le nom de bouillon, et lui donne son parfum. 39. —Principes immédiats non azotés des animaux. 1° La graisse, que l’on trouve abondamment répan- due sous la peau, dans les tissus nerveux et cellulaires, dans presque toutes les parties de l’organisme. 2° Le beurre, qui fait partie du lait de la femme et de celui des animaux. 3° Le sucre animal ou sucre de lait, que produisent le lait, le foie, etc. DESQUELS S’OPÈRE LA NUTRITION. 33 4° Le miel, substance mucoso-sucrée résultant du travail et des sécrétions des abeilles. 40. — Telles sont les sources auxquelles l’homme puise les éléments nécessaires à la conservation de son être. C’est donc déjà suffisamment élaborées et appropriées à la nature de ses tissus que l’homme rencontre les sub- stances qui lui servent d’aliments ; car, ainsi que le fait observer M. J. Muller, les plantes sont nécessaires aux animaux, parce que seules elles ont le pouvoir de pro- duire des combinaisons organiques avec les composés inorganiques ; qu’en conséquence ce sont elles qui in- troduisent, dans la grande économie de la nature , ces nouveaux matériaux, qui passent ensuite d’elles aux animaux herbivores et de ceux-ci aux carnivores. C’est ainsi que l’homme peut à son gré, en quelque sorte, par la variété des substances alimentaires qui lui sont offertes, par les propriétés plus ou moins nutritives qui les distinguent, baser non-seulement son alimenta- tion sur les besoins de son organisation et sur les forces de ses organes digestifs, mais encore régler jus- qu’à un certain point les résultats ultimes de l’assimila- tion des éléments nutritifs dans ses tissus. CHAPITRE TROISIÈME. APPAREILS ORGANIQUES DE LA NUTRITION. — AP- PAREIL RESPIRATOIRE. — TUBE DIGESTIF. — ORGANES DE NUTRITION ANNEXÉS AU TUBE DI- GESTIF. — MEMBRANES MUQUEUSES. — PEAU. — APPAREIL URINAIRE. I. APPAREIL RESPIRATOIRE. Poumons. — Plèvres. — Trachée artère. — Larynx. -- Bronches. — Artère pulmonaire. — Veines pulmonaires. — Glandes bronchi- ques. — Fonctions des poumons. — Hématose. 41. —Dans l’organisation de l’homme, trois appareils principaux donnent accès aux corps extérieurs pour l’accomplissement de l’acte général de la nutrition : les poumons, le tube digestif et la peau. Sans entrer dans des détails minutieux d’anatomie et de physiologie, nous allons nous efforcer de donner une idée générale de ces divers appareils et des fonctions auxquelles ils sont destinés. POUMONS. 42. — Les poumons sont deux organes mous, spon- APPAREILS ORGANIQUES DE LA NUTRITION. 35 gieux, cellulaires, compressibles et expansifs, renfermés dans la cavité nommée thorax ou poitrine; ils sont séparés l’un de l’autre : 1° par le médiastin, cloison membra- neuse formée par l’adossement des plèvres ; 2° par les 'plèvres elles-mêmes, membranes qui tapissent la sur- face des poumons ainsi que les parois de la poitrine 5 3° par le mur. Les poumons reçoivent l’air atmosphérique par un conduit commun, la trachée artère, qui communique à l’extérieur par le laryhx-, organe de la voix, par le pha- rynx, par la bouche ou par le nez ; ce conduit est di- visé, à son entrée dans la poitrine, en deux gros canaux qui constituent les bronches dont les ramifications di- visées à l’infini vont se terminer en culs-de-sacs arron- dis ou ovoïdes dans la substance propre des poumons, sous le nom de cellules pulmonaires ou mieux cellules bronchiques. Les poumons donnent accès à des vaisseaux conte- nant le sang noir ou veineux, dont le tronc principal vient du cœur et s’appelle artère pulmonaire/ ils en- voient au cœur d’autres vaisseaux chargés de sang -rouge ou artériel, qui se réunissent en quatre troncs, auxquels on a donné le nom de veines pulmonaires. Les poumons ainsi que les bronches sont accompa- gnés de glandes {glandes bronchiques) et pourvus de vaisseaux lymphatiques nombreux, et de nerfs qui pro- viennent du pneumo-gastrique et du grand sympathique. 36 APPAREILS ORGANIQUES DE LA NUTRITION. Fonction des poumons. 4 3. —Ces organes ont pour fonction l’accomplissement de l’acte par lequel le sang veineux est transformé en sang artériel par l’intermédiaire de l’air atmosphérique. Cette fonction qui constitue la respiration se manifeste par deux mouvements : Y inspiration, dont l’action a pour but l’entrée de l’air dans l’intérieur des poumons et l’absorption d’un des gaz qu’il contient, Y oxygène; Y expiration, qui fait rejeter au dehors les fluides im- propres à l’entretien de la vie, particulièrement le gaz acide carbonique. C’est à l’ensemble de ces phéno- mènes que l’on donne le nom d'hématose. II. TUBE DIGESTIF. Bouche. — Mastication. — Pharynx. —OEsophage.— Estomac. — Duodénum. — Intestins grêles. — Chylifères. — Veines mésen- tériques.—Gros intestin. — Leurs usages. hk. — Le tube digestif ou canal a lim entaire est desti- né à accomplir une des fonctions les plus importantes de la vie matérielle, la digestion; il est situé dans cette par- tie du corps que l’on appelle cavité abdominale, la- quelle est séparée de la poitrine par une cloison mus- culo-membraneuse, le diaphragme. APPAREILS ORGANIQUES DE LA NUTRITION. 37 Le tube digestif s’étend depuis les lèvres jusqu’à l’a- nus ; il comprend successivement ; 1° La bouche, cavité composée des lèvres, des dents, des joues, de la voûte palatine, du voile du palais et de la langue, parties auxquelles il faut ajouter les glandes parotides et salivaires, les cryptes folliculaires des pa- rois de la bouche et de la surface de la langue. La bouche a pour office la préhension, la mastication et Yinsalivation des aliments, actions par lesquelles la portion d’aliments contenue dans la cavité buccale, est transformée en une pâte agglomérée que l’on désigne sous le nom de bol alimentaire. 2° Le pharynx, sorte d’entonnoir mobile qui reçoit le bol alimentaire dans l’acte de la déglutition et le trans- met à l’œsophage. 3° L’œsophage, canal contractile contigu au pharynx, qui conduit et accumule les aliments dans l’estomac. U° L'estomac, organe principal de la digestion, réser- voir musculo-membraneux, dilatable, présentant assez bien la forme d’une cornemuse. Il a deux orifices; l’un orifice supérieur appelé cardia, communique avec l’œsophage, l’autre inférieur nommé pylore, fait com- muniquer l’estomac avec le duodénum. L’estomac est pourvu de glandes nombreuses et d’une grande quantité d’artères qui lui viennent de la coronaire sto- machique, des deux gastro-épiploïques, de la pylorique et de la splénique, de veines qui se terminent à la veine- 38 APPAREILS ORGANIQUES DE LA NUTRITION, porte, de vaisseaux lymphatiques qui vont aux ganglions placés le long de ses courbures, et enfin de nerfs de deux ordres, cérébraux et ganglionnaires, qui lui vien- nent des pneumo-gastriques et du plexus cœliaque. C’est dans l’estomac que les aliments subissent, à l’aide du suc gastrique, une élaboration particulière par laquelle ils sont transformés en une sorte de pulpe grisâtre et homogène, que l’on désignait sous le nom de chyme, mais dont la composition mieux connue actuellement a fait distinguer, comme nous le verrons plus tard, les di- vers produits qu’elle renferme. 5° Le duodénum, première portion de l’intestin grêle, organe parsemé d’une grande quantité de follicules muqueux, d’artères qui lui viennent de la mésentérique supérieure, de la pylorique et des gastro-épiploïques, de veines qui vont à la veine-porte, de vaisseaux lym- phatiques ou chylifères, qui, comme pour tout le reste de l’intestin grêle, se rendent dans le canal thoracique, et de nerfs qui naissent du plexus solaire. Le duodénum reçoit d’une part, par un orifice isolé, le suc pancréa- tique, produit d’une glande voisine appelée pancréas, de l’autre, par un orifice commun, du suc pancréatique et la bile, liquide sécrété par le foie. Le duodénum, sous l’influence du suc pancréatique, de la bile et des fluides que fournissent ces follicules, fait subir aux aliments convertis en chyme une élaboration nouvelle, à laquelle nous conserverons, quant à présent, le nom de chyle. APPAREILS ORGANIQUES DE LA NUTRITION. 39 6° Les intestins grêles, jéjunum et iléon, parties du canal alimentaire qui, avec le duodénum, forment à peu près les quatre cinquièmes de la longueur de ce canal, et qui présentent de nombreuses courbures. Leurs ar- tères viennent de la mésentérique supérieure, leurs nerfs (ganglionnaires) naissent du plexus mésentérique supérieur. Les intestins grêles sont attachés à une sorte d’éventail appelé mésentère, dans lequel sont lo- gées des artères et des veines nombreuses que l’on nomme artères et veines mésentériques, et les conduits du chyle, désignés sous le nom de chylifères. C’est dans cette partie du tube digestif que les radi- cules des veines mésentériques viennent pomper une certaine partie du chyle, qu’elles versent dans un tronc commun, la veine-porte,laquelle le charrie dans le foie; c’est encore dans les intestins grêles que les vaisseaux chylifères, espèce de suçoirs très-mu 1 tipliés, soutirent une autre partie du chyle, qu’ils transportent dans un canal particulier appelé canal thoracique. 7° Le gros intestin, composé du cæcum, du colon et du rectum, fait suite aux intestins grêles ; il est pourvu d’artères qui lui viennent des mésentériques; ses veines s’ouvrent dans la veine-porte; ses nerfs sont fournis par les plexus mésentériques. Le gros intestin est destiné à contenir, pendant un certain temps, les matières excré- mentitielles du chyle, à en extraire les derniers vestiges nutritifs qu’elles peuvent encore contenir ; enfin, à re- 40 APPAREILS ORGANIQUES DE LA NUTRITION. pousser au dehors ces matières dépouillées de tout ce qu’elles renfermaient d’alibile. C’est ce dernier acte de la digestion que l’on désigne par le mot défécation. III. ORGANES DE NUTRITION ANNEXES AU TUBE DIGESTIF. Foie. — Vésicule biliaire. — Fonctions du foie. — Rate. — Ses usages. — Veine-porte. 45. — Il est encore un ordre d’organes dépendant de l’appareil digestif et dont les fonctions, quoique parais- sant avoir une grande importance dans les actes nutri- tifs, ne sont pas bien déterminées; nous voulons dire le foie, la rate et le système de la veine -porte. Nous de- vons cependant excepter le foie, auquel les beaux tra- vaux de M. Cl. Bernard ont donné le rang élevé qu’il paraissait devoir occuper parmi les organes de la nutri- tion. 46. — Le foie, organe le plus volumineux de l’écono- mie, est situé dans l’hypochondre droit, qu’il occupe en entier, au-dessous du diaphragme, à droite, et au-des- sus de l’estomac. Cet organe est d’une forme irrégulière, d’une couleur brune-rougeâtre, et composé d’un tissu parenchymateux. La substance du foie est formée d’une immense quantité de granulations. Dans ces granula- tions naît, par un grand nombre de radicules qui se APPAREILS ORGANIQUES DE LA NUTRITION. 41 réunissent en branches successivement plus volumineu- ses, le conduit ou canal hépathique, qui s’unit au canal cystique, lequel s’ouvre dans la vésicule biliaire, réservoir membraneux où la bile s’accumule. La vésicule biliaire est pourvue aussi d’un conduit, canal cholédo- que, qui s’abouche, comme nous l’avons vu, avec le canal pancréatique. Les vaisseaux sanguins du foie sont l’artère hépati- que, qui naît du tronc cœliaque , les veines hépatiques ou sus-hépatiques, qui s’ouvrent dans la veine-cave infé- rieure, et enfin la veine-porte. Ses vaisseaux lympha- tiques sont très-nombreux, ses nerfs viennent du pneu- mo-gastrique, du diaphragmatique et du plexus hépa- tique. Fonctions du foie. 47. — Jusqu’à ces derniers temps, on avait générale- ment cru que les fonctions du foie se bornaient à la sécré- tion de la bile; mais M. Cl. Bernard,par de nombreuses expériences, a démontré d’une manière irrécusable que le foie est surtout l’organe générateur du sucre dans l’économie, et en outre qu’il y a lieu de penser que cet organe n’est pas étranger à l’accomplissement d’au- tres phénomènes physiologiques non moins importants, la formation des globules et celle de la graisse. Mais la fonction glycogénique du foie est déjà un fait immense, 42 APPAREILS ORGANIQUES DE LA NUTRITION, et cette découverte est une des plus remarquables et, sans aucun doute, une des plus fécondes qui aient été faites en physiologie depuis longtemps. US. — La rate est située dans l’hypochondre gauche; elle est d’un volume variable, d’une forme allongée, aplatie, et d’une couleur rouge-violette plus ou moins foncée. Sa texture est molle, spongieuse, granulée, parenchymateuse, parsemée de vaisseaux sanguins, qui sont : l’artère et la veine spléniques, et de vaisseaux lymphatiques nombreux qui rampent à sa surface. Ses nerfs viennent du plexus solaire et forment le plexus splénique. Usages de la rate. U9. — Les usages de la rate sont encore fort obscurs, toutefois on croit assez généralement que cet organe sert de diverticulum au sang de la veine-porte dans certaines conditions physiologiques; selon M. Beau, il contribuerait aussi au mouvement du sang dans ce système vasculaire. Des expériences dues à M. J. Bé- clard tendraient à éclairer les usages de la rate; ce phy- siologiste distingué a constaté en effet que le sang vei- neux qui revient de la rate contient toujours moins de globules que le sang veineux général et que, par consé- quent, les globules du sang se détruisent en traversant cet organe; en outre, que le sang veineux qui revient APPAREILS ORGANIQUES DE LA NUTRITION. 43 de la rate renferme plus d’albumine et surtout plus de fibrine, que le sang veineux général. Veine-porte. 50. —On appelle système de la veine-porte l’ensemble de deux ordres de vaisseaux réunis par un tronc commun, la veine-porte, et qui ont leur origine dans tous les or- ganes renfermés dans la cavité abdominale, les reins, la vessie et l’utérus exceptés. L’un est constitué par la veine mésentérique supérieure, et l’autre, qui prend naissance dans la rate, est formé parla veine splénique, qui reçoit les veines gastro-épiploïques droite et gau- che, duodénale, pancréatique, coronaire stomachique, et mésentérique inférieure. Les usages de la veine-porte et de ses annexes se rat- tachent sans aucun doute à ceux des organes avec les- quels elle est en rapport; mais il est fort probable qu’elle joue un rôle spécial dans les phénomènes nutri- tifs. Nous aurons occasion dans le cours de cet ouvrage de nous occuper de cette question, et alors nous ver- rons s’il ne serait pas possible d’y jeter quelque lu- mière. 44 APPAREILS ORGANIQUES DE LA NUTRITION. IV. MEMBRANES MUQUEUSES. Distinction des membranes muqueuses. — Leur composition ana- tomique. — Leurs propriétés. — Leurs usages. 51. — Toutes les parties des organes pulmonaires et di- gestifs qui donnent accès aux agents extérieurs sont re- vêtues d’une membrane tégumentaire que les anato- mistes, à cause du fluide visqueux qui en lubréfie con- stamment la surface libre, ont désignée sous le nom de membrane muqueuse. La membrane muqueuse, ou plutôt, les membranes muqueuses, car cette membrane prend le nom de l’or- gane qu’elle tapisse, muqueuse pulmonaire, muqueuse gastrique, muqueuse intestinale, etc., les membranes muqueuses, disons-nous, tapissent toutes les parties des organes soumises soit au contact de l’air, soit au con- tact des autres corps extérieurs avec lesquels elles peu- vent être mises en rapport. Elles revêtent toutes les ramifications des voies aériennes, la longueur entière du canal digestif et toutes les cavités dont les orifices viennent aboutir soit à la peau, soit à leur propre surface. Ces membranes forment une sorte de peau interne qui offre avec la peau proprement dite, une analogie frap- pante d’organisation, de fonctions et de propriétés vi- APPAREILS ORGANIQUES DE LA NUTRITION. 45 taies. Pourtant cette analogie ne permet pas de con- fondre ces deux membranes ; en effet, aux ouvertures naturelles où elles se réunissent et se continuent réci- proquement, une ligne de démarcation bien apparente les distingue. Cette ligne est surtout très-remarquable aux lèvres où la couleur d’un rouge vif de la membrane muqueuse tranche avec la couleur pâle de la peau. Au reste, « toute membrane muqueuse est essentiellement composée d’un chorion ou trame tapissée d’un épithé- lium ; c’est là tout ce que les muqueuses ont de com- mun avec la peau. » M. Robin. (Dict. de Nysten.) Les membranes muqueuses sont pourvues d’une très- grande quantité de nerfs, de vaisseaux artériels, vei- neux et lymphatiques, de follicules très-nombreux qui sécrètent sans cesse une humeur particulière appelée mucus. Ce fluide a pour but d’entretenir la souplesse de ces membranes, de faciliter le passage des corps étran- gers mis en contact avec leur surface et de les garantir de leur atteinte. 52. — Les membranes muqueuses sont douées d’une très-grande activité d’absorption ; c’est par leur inter- médiaire que, dans les voies pulmonaires, l’oxygène de l’air atmosphérique se combine avec le sang, et que, dans les organes digestifs, les éléments nutritifs pénètrent dans les veines mésentériques et dans les chylifères. On sait avec quelle rapidité sont absorbés les virus mis en contact avec ces membranes, combien 46 APPAREILS ORGANIQUES DE LA NUTRITION, sont fréquentes les maladies déterminées par les princi- pes délétères qui pénètrent dans l’organisation par cette voie. V. PEAU. Composition anatomique de la peau. •— Épiderme. — Derme. — Papilles. — Glandes sébacées. — Fonctions de la peau. 53. — La peau est une membrane dense, serrée, épaisse, flexible et très-extensible qui revêt toute la surface ex- térieure du corps et se moule sur toutes ses formes. Elle se continue avec les membranes muqueuses au ni- veau des yeux, des narines, de la bouche, enfin de tou- tes les ouvertures naturelles. La peau a deux surfaces, l’une, externe, est immédiatement exposée au contact de l’air ; l’autre, interne, est unie aux endroits qu’elle recouvre au moyen d’un tissu cellulaire, variable dans sa nature et dans sa disposition, selon les parties du corps. Deux couches distinctes composent la peau; 1° la couche superficielle, Vépiderme, est une membrane mince, dense, semi-transparente et grisâtre. Sa surface externe en contact avec l’air, est sèche, parfois légère- ment rugueuse et sa surface interne, villeuse et humide, constitue le corps ou réseau muqueux de Malpighi, ou APPAREILS ORGANIQUES DE LA NUTRITION. 47 aboutissent les extrémités des vaisseaux et des fibrilles nerveuses qui parcourent la peau. L’épaisseur de l’épi- derme varie suivant que la partie qu’il recouvre est plus ou moins exposée à l’air ou au contact des corps extérieurs. La composition de l’épiderme paraît être le produit concrété du corps muqueux et a pour base l’al- bumine. Aussi l’épiderme est dépourvu de sensibilité, mais il est assez mince pour transmettre l’impression des agents extérieurs aux parties sous-jacentes qu’il est, d’ailleurs, destiné à protéger. 2° Le derme ou chorion, couche en contact immédiat avec l’épiderme, dans la- quelle sont situées de petites éminences conoïdes appe- lées papilles qui sont le résultat de la réunion des ex- trémités des nerfs et des vaisseaux qui, après avoir tra- versé la peau, viennent aboutir à sa surface. Les papilles sont surtout apparentes à la face palmaire des mains où elles sont disposées en lignes courbes formant des séries concentriques. C’est en elles que réside le sens du tou- cher. Le derme est parsemé d’une immense quantité de vaisseaux sanguins et lymphatiques, de nerfs et de pe- tites glandes que l’on nomme glandes sébacées, les- quelles sécrètent un fluide oléagineux destiné à assouplir la peau. Cette couche constitue le corps de la peau et en forme presque toute l’épaisseur. Cette épaisseur varie toutefois selon le sexe et selon les parties du corps que le derme recouvre ; elle est plus considérable que par- tout ailleurs à la plante des pieds et à la paume des 48 APPAREILS ORGANIQUES DE LA NUTRITION. mains, au dos qu’aux parties antérieures de la poi- trine. Fonctions de la peau. 5 k. —La peau remplit des fonctions très-importantes et très-nombreuses. Non-seulement elle couvre, contient et protège toutes les parties du corps avec lesquelles elle est en contact, mais encore elle est l’organe du toucher, le siège de l’absorption des corps liquides ou gazeux apposés à sa surface, et d’une exhalation, per- spiration cutanée, qui consiste dans l’émission d’une va- peur invisible, laquelle constitue la sueur, lorsque, par diverses circonstances, cette perspiration augmente au point de s’écouler sous la forme liquide; par conséquent, la peau est une des voies d’élimination les plus essen- tielles de l’organisme. La peau a des relations sympathiques avec tous les organes de l’économie. Toutefois, ses relations sont, pour ainsi dire, plus naturelles entre les membranes muqueuses et le système des voies urinaires, les autres paraissent s’établir selon les habitudes et les dispositions individuelles. APPAREILS ORGANIQUES DE LA NUTRITION. 49 VI. APPAREIL URINAIRE. Reins. — Capsules surrénales. — Uretères. — Vessie. 55. — Nous devons encore signaler Vappareil uri- naire dont le but, conjointement avec la peau, est d’é- liminer au dehors les matières impropres à l’organisme, particulièrement les matières salines. Cet appareil est composé : 1° des reins, organes situés dans la partie profonde des flancs, et dont le tissu parenchymateux est formé de deux substances, l’une extérieure, appe- lée corticale, et l’autre intérieure, nommée tubuleuse. Les reins sont munis de nombreux vaisseaux sanguins, de vaisseaux lymphatiques et de nerfs fournis par le plexus rénal. 2° Des capsules surrénales, organes appli- qués sur l’extrémité supérieure des reins, et dont les usages sont encore inconnus. 3° Des uretères, longs conduits membraneux qui s’étendent depuis la partie du rein appelée bassinet, jusqu’au bas-fond de la vessie. k° De la vessie, réservoir situé à la partie antérieure de l’excavation du bassin, dont le tissu membraneux, com- posé de trois tuniques, est pourvu de vaisseaux san- guins et lymphatiques et de nerfs qui viennent des plexus sciatique et hypogastrique. CHAPITRE QUATRIÈME. SANG. — LYMPHE. [. SANG. Propriétés physiques du sang. — Liqueur du sang, plasma. — Sérum. — Cruor. — Fibrine. — Globules. — Proportions de la fibrine, de l’albumine et de l’eau contenues dans le sang.— Gaz. — Différences entre le sang artériel et le sang veineux.—Circon- stances dans lesquelles la composition du sang varie. — Condi- tions qui déterminent la pureté ou l’altération du sang. —Com- position chimique du sang. 56. — Les appareils sur lesquels nous avons appelé l’at- tenlion ont principalement pour but, la transformation des corps extérieurs en un fluide dont tous les éléments sont identiques à la variété des substances de nos tissus, en résumé, la fabrication du sang. Le sang est une des causes primitives de la vie. En lui sont contenus tous les éléments propres à la forma- tion non-seulement de tous les fluides de l’organisation, mais encore de tous les tissus quelle qu’en soit la con- texture, depuis l’organe le plus difïïuent, le cerveau, jusqu’aux organes les plus denses et les plus solides, les SANG. 51 os, les dents. C’est donc le fluide le plus essentiel, le plus indispensable de l’économie, aussi peut-on avec vérité, lui appliquer ces paroles de Moïse : anima omnis carnis in sanguine est. Propriétés physiques du sang. Le sang est un fluide visqueux, d’une odeur parti- culière, d’une saveur un peu salée, dont la couleur est vermeille, rutilante, lorsqu’il émane des artères et d’un rouge noir, lorsqu’il est tiré des veines. Sa température est celle du corps, de 37° environ ; sa pesanteur spéci- fique est un peu plus forte que celle de l’eau. Il existe une faible différence entre la densité du sang veineux et celle du sang artériel ; l’un et l’autre sont toujours à l’état liquide dans l’organisme vivant. Liqueur du sang, plasma. 57. — Dans cette condition, deux parties constituent le sang, l’une est liquide, transparente, on la désigne sous le nom de plasma ou liqueur du sang ; l’autre, solide, est formée par les globules ; le plasma est donc le li- quide qui tient en dissolution toutes les matières du sang et dans lequel nagent les globules. Sérum. — Cruor. 58. — Lorsque le sang est extrait de ses vaisseaux, il 52 SANG se sépare par le refroidissement en deux parties, l’une liquide, transparente, légèrement citrine, est le sérum, l’autre, solide, d’un rouge-brun, est le caillot ou cruor; ce phénomène constitue la coagulation du sang. Le sérum contient en dissolution de l’albumine en as- sez grande quantité, quelques matières grasses et ex- tractives et divers sels, tels que des phosphates, hydro- chlorates, lactates, carbonates, et surtout du carbonate de soude, sel qui joue un rôle important en donnant au sang la propriété alcaline qui le caractérise, propriété toutefois que lui donne aussi le phosphate de soude, particulièrement chez les animaux soumis au régime exclusivement animal. Le caillot est surtout formé de fibrine coagulée qui emprisonne une multitude de petits corpuscules appelés globules. Fibrine. 59. — La fibrine isolée est une matière d’un blanc gri- sâtre, composée de filaments feutrés, naturellement liquide, mais pouvant se coaguler spontanément. Il est encore incertain si la fibrine est en dissolution ou en suspension dans le sang à l’état de globules. Celte der- nière opinion paraît la plus probable. (MM. Becquerel et Rodier, Chimie pathologigue.) On a pensé que la fibrine est la matière plastique de l’organisme ; mais il sem- ble résulter des expériences actuelles que cette sub- stance est destinée à subir dans l’économie certaines transformations chimiques et à être expulsée ensuite. SANG. 53 Globules. 60. — Les globules se distinguent en globules rouges, globules blancs ou leucocytes et globulins. Les globules rouges, beaucoup plus nombreux que les blancs, ont la forme de disques aplatis, ils se composent 1° de globuline, 2° d’hématosine ; la globuline entre dans leur composition pour 87 pour 100, et l’hémato- sine pour 12 pour 100 ; c’est à cette matière qu’ils doi- vent leur couleur. Cette substance contient des matières salines et 7 pour 100 de fer qui en est un élément, comme l’oxygène, l’azote, le carbone et l’hydrogène. (M. Robin.) D’après M. Liebig, nulle autre partie vivante que les globules ne renferme de fer. La quantité moyenne des globules contenus dans 1,000 parties de sang peut être évaluée, pour les deux sexesà 135 ; pour l’homme à 140, pour la femme à 125. Les limites physiologiques peuvent être fixées à 145 et à 125, c’est-à-dire qu’au-dessus de 145 on noterait l’augmentation du chiffre des globules, et au-dessous de 125, sa diminution. (MM. Becquerel et Rodier, loc. cit.) Les globules blancs sont peu nombreux et ont la plus grande analogie avec les globules (globulins) qui se 54 SANG trouvent dans le chyle et dans la lymphe. Cette analogie donne lieu de penser, selon M. J. Béclard, que les glo- bules blancs ne sont que les globulins du chyle et de la lymphe, versés dans le torrent circulatoire par le canal thoracique et qui n’ont pas encore disparu. Proportions de l’eau, de la fibrine et de l’albumine conte- nues dans le sang. 61. — La proportion d’eau qui entre dans la composi- tion du sang est considérable ; sur 1,000 grammes de sang, il y a 790 grammes d’eau. La fibrine qui joue un rôle si important dans la for- mation du caillot, n’est cependant contenue dans le sang que pour une faible partie. Desséchée, elle est en moyenne de 2 à 3 grammes sur 1,000; Y albumine des- séchée s’y présente en plus grande quantité, 70 gram- mes environ. Gaz dans le sang. 62. — Trois gaz se trouvent dans le sang, l’oxygène, l’acide carbonique et l’azote ; on y rencontre quelque- fois des traces d’hydrogène. L’oxygène existe en plus grande partie dans le sang artériel, l’acide carbonique dans le sang veineux ; la quantité de l’azote semble ne pas différer dans les deux sangs. SANG. 55 Différences entre le sang artériel et le sang veineux. 63. — Le sang offre certaines différences selon qu’il est artériel ou veineux. Le sang artériel est plus chaud que le sang veineux, de 1° à 1° 1/2 selon J. Davy, Krimer, et Scudamor. Le sang artériel paraît électrisé positivement, et le sang veineux négativement. Le sang artériel est rouge-écarlate ; il doit cette cou- leur à l’oxygène qu’il contient en excès comparative- ment à la quantité qui se trouve dans le sang veineux, lequel est noir à cause de l’acide carbonique qui entre en plus grande proportion dans sa composition. Plusieurs auteurs attestent, Davy entre autres, que le sang artériel se coagule avec plus de promptitude que le sang veineux; selon MM. Mayer, Berthold, Denis et Muller, il contient plus de fibrine. Le sang artériel renferme généralement, selon cer- tains auteurs, une quantité un peu plus considérable de globules que le sang veineux, tandis que d’autres pré- tendent qu’il en contient moins, qu’il en est ainsi de l’albumine, de la graisse, des sels, et que les globules renferment moins de matière colorante. Quant aux ma- tières extractives, le sang veineux paraît, d’après MM. Si- mon et Denis, en être pourvu plus abondamment que le sang artériel. MM. Prévost et Dumas, et M. Lecanu ont 56 SANG obtenu des résultats opposés. La quantité d’eau que con- tiennent les deux sangs est à peu près la même pour l’un et pour l’autre. D’après M. Lehmann, le sang arté- riel contient toujours plus de sels minéraux que le sang veineux. Au reste, quoique l’on possède quelques ana- lyses comparatives du sang artériel et du sang veineux, dues à MM. Poggiale et Marchai, Denis, Simon, néan- moins on ne sait encore rien de positif quant aux diffé- rences qu’ils présentent dans leur composition. Circonstances dans lesquelles la composition du sang varie. 64. — On a évalué à environ 15 kilogrammes la quan- tité de sang en circulation que renferme le corps d’un adulte, mais cette appréciation n’a pas été établie sur des bases assez rigoureuses pour qu’on puisse l’admet- tre sans réserve. La composition du sang varie chez les individus, se- lon le sexe, l’âge, le tempérament et le mode d’alimen- tation. Jusqu’alors, c’est surtout sur la proportion d’eau et de globules que le sang contient que des différences ont été établies. Ainsi, d’après MM. Denis et Lecanu, la proportion d’eau est plus faible et la proportion de glo- bules, plus forte : Chez l’homme que chez la femme ; Chez les adultes que chez les enfants et les vieillards ; Chez les individus sanguins que chez les individus lymphatiques du même sexe ; Chez ceux qui ont une bonne alimentation que chez les individus qui sont peu ou mal nourris. Il en est encore ainsi chez la femme, dans la dernière période de la gestation. SANG, 57 Conditions qui déterminent la pureté ou l’altération du sang. 65. —L’élimination de certains matériaux du sang con- tribue beaucoup à maintenir intacte la composition de ce liquide. Ici se range l’éjection de celles d’entre les substances introduites dans l’économie qui sont super- flues ou incapables de servir, comme l’eau (par l’exha- lation pulmonaire, la transpiration cutanée et l’urine) les matières minérales mêlées aux aliments (la plupart du temps par l’urine), et celles qui contiennent un excès de carbone, d’azote, d’oxygène ou d’hydrogène ; ces derniers s’échappent par les poumons (acide carbonique) ou par le foie (combinaisons carbonées et hydrogénées) ou par l’urine (combinaisons azotées). La composition du sang peut aussi être altérée par des produits de dé- composition qui, se développant dans l’organisme, pas- sent dans le sang et rendent nécessaire un travail d’éli- mination, ce qui paraît être le cas de certains principes constituants de l’urine. (M. J. Muller.) 58 SANG. Composition chimique du sang. 66. — Or, le sang subit dans sa composition, selon l’é- tat morbide, des modifications plus ou moins profondes et dont la constatation est de nature à éclairer l’étiologie et le traitement des maladies; aussi, pour être mis à portée d’apprécier ces modifications, est-il de la plus haute importance de connaître la composition normale de ce liquide. Voici quelques-unes des analyses qui peu- vent être utilisées dans ce but : La composition du sang veineux normal a été ainsi établie sur 1,000 parties. Sérum 869,1547 Eau 790,3707 Albumine 67,8040 Matières grasses, extractives et sels 10,9800 Globules 130,8453. Fibrine 2,9480 Hématosine 2,2700 Albumine 125,6273 Voici d’après la table de H. Nase, la composition du sang en général : Eau 798,402 Globules 116,529 Albumine 74,194 Fibrine 2,233 Graisse 1,970 59 Phosphate alcalin 0,823 Sulfate sodique 0,200 Carbonate alcalin 0,956 Chlorure sodique 4,690 Oxyde de fer 0,834 Chaux 0,183 Acide phosphorique 0,201 Acide sulfurique 0,052 Magnésie 0,015 Silice 0,043 Composition du sang d’après MM. Becquerel etRodier : Analyse de 1,000 grammes de sang. Densité du sang 1060,00 Eau 781,60 Globules 135,00 Albumine 70,00 Fibrine 2,50 Matières grasses, matières extractives et sels li- bres 10,00 Phosphates 0,35 Fer 0,55 Analyse de 1,000 grammes de sérum. Densité du sérum 1028,00 Eau 908,00 Albumine 80,00 Matières grasses, matières extractives et sels li- bres 12,00 Analyse de 10 grammes de matières grasses, matières extractives et sels libres : Matières grasses. SANG. Séroline 0,025' Cholestérine 0,125 Savon 1,400 1,550 60 SANG Sels libres. Chlorure de sodium 3,5 Sels solubles de soude 2,5 6,00 Matières extractives indéterminées. . . . 2,450 Ajoutons que J. M. Nicklès a dernièrement constaté la présence du fluor dans le sang. II. LYMPHE. Propriétés physiques de la lymphe. — Globulins. — Caillot et sé- rum de la lymphe. — Rapports de la lymphe avec le sang. — Composition chimique de la lymphe. 67. — Quoique le sang soit le liquide initial de l’écono- mie, néanmoins il est un autre fluide qui, par l’élabora- tion qu’il subit dans un système spécial d’organes, à cause de sa nature sui generis, de ses propriétés géné- rales et de ses usages, mérite de fixer l’attention, nous voulons dire la lymphe. La lymphe est le liquide qui circule dans les vais- seaux lymphatiques généraux ; elle existe aussi, isolée, dans les vaisseaux chylifères, mais seulement lorsque l’animal est complètement à jeun, autrement la lymphe est mêlée avec le chyle. Propriétés physiques de la lymphe. La lymphe est très-fluide, claire, transparente, d’un LYMPHE. 61 blanc jaunâtre ou rosé, légèrement alcaline et d’une sa- veur salée. Elle contient des globules, mais en quantité infiniment moindre que le sang. Ces globules, globules blancs ou globulins, sont sphériques, lisses ; ils diffèrent de ceux du sang par cette forme, par leur moindre vo- lume et leur couleur. Bien évidemment les globules de la lymphe naissent au sein du système lymphatique, car les vaisseaux lymphatiques n’ont aucune communication avec les extrémités capillaires des vaisseaux sanguins, et la lymphe qu’ils contiennent est extraite du sang fil- tré, pour ainsi dire, dans la trame des tissus. La fibrine de la lymphe se forme aussi dans le système lympha- tique. Coagulation de la lymphe. 68. —La lymphe, extraite de ses vaisseaux, se coagule spontanément, et, comme le sang, se sépare en deux parties : le caillot et le sérum. Le caillot contient de la fibrine et des globules que cette matière emprisonne dans ses mailles. Le caillot rougit au contact de l’air atmosphérique; l’oxygène le fait passer au rouge-écar- late et l’acide carbonique au rouge-pourpre. Le sérum de la lymphe a pour base l’eau contenant une faible quantité d’albumine, de graisse et de sels divers. 62 LYMPHE. Rapports de la lymphe avec le sang. 69. — Comparée au sang, la lymphe contient sensible- ment la même proportion de fibrine, mais elle est beau- coup moins riche en globules, et une quantité considé- rable d'eau entre dans sa composition. Sur 1,000 gram- mes de liquide, on n’obtient guère par la dessication qu’un résidu de 1,3 et l\ grammes de parties solides constituées par la fibrine et les globules. La lymphe est le produit du travail commun des vais- seaux et des glandes lymphatiques, lesquels forment cette humeur de toutes pièces des matériaux saisis dans les profondeurs de l’économie et de la réunion de tous les sucs nécessités par l’organisation complexe de l’homme. Composition chimique de la lymphe. 70. — La difficulté de se procurer une quantité assez notable de lymphe pure n’a pas permis jusqu’à présent de faire de nombreuses analyses ; voici celles que l’on pos- sède et qui sont dues à Gmelin, Marchand etGolberg et à M. Lhéritier. Eau 961,0 Parties solides 39,0 Fibrine 2,5 Albumine. 27,5 Analyse faite par Gmelin. Chlorure de sodium Phosphate de potasse et de soude LYMPHE. 63 2,1 Matière extractive et lactate de soude. ... 6,9 Analyse de Marchand et Colberg sur de la lymphe ex- traite d’une plaie faite au cou-de-pied d’un homme : Eau • . . . . 969,26 Parties solides 30,74 Fibrine 5,20 Albumine 4,34 Matière extractive 3,12 Graisse fluide transparente 2,64 Chlorure de sodium et de potassium Sulfates et carbonates alcalins Sulfate et phosphate de chaux Peroxyde de fer. 15,44 Analyse faite par M. sur de la lymphe extraite du canal thoracique d’un homme mort d’un ramollisse- ment du cerveau, et qui n’avait pris qu’un peu d’eau trente heures avant de mourir : Eau 924,36 Parties solides 75,64 Fibrine 3,20 Graisse 5,10 Albumine 60,12 Sels 8,25 Au reste, comme le font observer MM. Becquerel et Rodier (loc. cit.), les analyses de la lymphe faites jus- qu’alors ne sont que des indications sur la composition probable de ce liquide. Aussi, comme ces auteurs, re- connaîtrons-nous que l’histoire physiologique et patho- logique de la lymphe est toute entière à faire. CHAPITRE CINQUIÈME. CIRCULATION. — ORGANES DE LA CIRCULATION. Cœur. — Oreillettes. — Ventricules. — Artères et veines. — Aorte. — Veine-cave supérieure et veine-cave inférieure. — Composition anatomique des artères. — Anastomoses. — Com- position anatomique des veines. — Propriétés des organes de la circulation. — Pouls. — Contractilité des artères. — Méca- nisme de la circulation. — Vaisseaux capillaires. — Système capillaire. — Distinction des capillaires. — Propriétés des capillaires. — Circulation dans les capillaires. — Usages des capillaires. — Vaisseaux lymphatiques. — Chylifères. — Glandes. — Canal thoracique. — Circulation dans les vaisseaux lymphatiques. — Système lymphatique. — Ses usages. Le sang, pour servir à la nutrition de l’homme, est charrié dans toutes les parties du corps, au moyen d’un système d’organes constitué par le cœur, les artè- res et les reines. La fonction qui résulte de l’action si- multanée de ces organes a reçu le nom de circulation. Pour faire comprendre plus facilement le mécanisme de cette fonction, nous allons étudier, très-succintement toutefois, les principaux organes qui concourent à son accomplissement. Cœur. 71. — Le cœur, organe principal de la circulation, est CIRCULATION. — ORGANES DE LA CIRCULATION. 65 un muscle creux, contenu dans un sac membraneux, nommé péricarde. Il est situé dans la poitrine, entre les deux poumons. A l’intérieur, il offre quatre cavités, deux supérieures peu étendues appelées oreillettes, deux inférieures plus grandes que l'on nomme ventricules. Relativement au côté que ces cavités occupent dans le cœur, on les distingue en oreillette droite ou gauche, en ventricule droit ou gauche. L’oreillette et le ventri- cule du même côté communiquent entre eux, mais il n’y a pas de communication d’une oreillette à l’autre ni d’un ventricule à l’autre, si ce n’est dans la vie fœtale où les oreillettes communiquent entre elles. L’oreillette droite reçoit, outre l’ouverture des deux veines dites cardiaques, l’extrémité de deux grosses vei- nes dont l’une est appelée veine-cave supérieure et l’au- tre veine-cave inférieure. Cette oreillette communique avec le ventricule droit au moyen d’une soupape ou valvule désignée sous le nom de valvule tricuspide. L’oreillette gauche reçoit l’extrémité des quatre vei nés pulmonaires que nous avons déjà signalées (42), et s’ouvrent dans le ventricule gauche par la valvule nom- mée mitrale. Le ventricule droit donne naissance à Yartère pulmo- naire (42), le ventricule gauche à l’artère aorte. Ces deux artères sont munies de valvules dites valvules sig- moïdes ou semi-lunaires. L’artère pulmonaire se partage en deux branches 66 CIRCULATION. dont chacune pénètre dans un poumon, s’y ramifie et s’y divise à l’infini. Des extrémités de ses divisions nais- sent les radicelles des veines pulmonaires qui se ras- semblent, se réunissent en augmentant successivement de volume et finissent par former quatre troncs princi- paux qui vont s’ouvrir dans l’oreillette gauche. Le cœur reçoit des artères qui lui viennent de l’aorte, ses veines se jettent dans l’oreillette droite, et ses nerfs proviennent du plexus cardiaque. Artères et veines. 72. —L’artère aorte, comme nous venons de le faire remarquer, naît du ventricule gauche du cœur; elle orme dès son origine une courbure appelée crosse de Vaorte ; de la fin de celte courbure jusqu’à ses deux di- visions principales, l’aorte prend le nom à'aorte descen- dante. C’est de la crosse de l’aorte et de l’aorte descen- dante que naissent les branches, les rameaux, les ra- muscules, enfin les dernières divisions artérielles qui, sous le nom de capillaires, vont se perdre dans la sub- stance de tous nos tissus ; c’est aussi des extrémités de ces capillaires que naissent les capillaires veineux qui se rassemblent d’abord en radicelles très-déliées, puis en racines dont le volume augmente à mesure que ces vaisseaux se rapprochent du cœur et finissent par for- mer deux troncs principaux dont l’un provenant de la ORGANES DE LA CIRCULATION. 67 réunion des vaisseaux veineux des parties supérieures de notre corps, est la veine-cave supérieure, et l’autre résultant de la réunion des vaisseaux veineux des par- ties inférieures est la veine-cave inférieure. Ces deux veines, comme nous l’avons vu, se terminent dans l’o- reillette droite du cœur. Artères. 73. — Les artères sont des canaux cylindriques, fer- mes, élastiques, contractiles, peu dilatables, faciles à déchirer. Elles sont composées de trois membranes ou tuniques surperposées ; 1° la tunique externe, seule vasculaire, fibro-celluleuse, formée de filaments comme feutrés, est dense, très-serrée ; elle est très-extensible et se confond avec le tissu cellulaire voisin; 2° la tuni- que moyenne ou tunique propre des artères, est une membrane dont les fibres sont dures, fragiles, élasti- ques et peu extensibles. C’est dans cette tunique que se forment les dépôts qui constituent l’ossification des ar- tères ; 3° la tunique interne, membrane transparente, lisse, comme séreuse, est, ainsi que la précédente, dé- pourvue de vaisseaux. Les artères communiquent souvent entre elles par des branches, des rameaux diversement abouchés et qui les réunissent de telle sorte que le sang peut facilement 68 CIRCULATION. passer des unes dans les autres. On appelle anasto- moses ces moyens de communication. Les artères sont elles-mêmes parcourues par des vais- seaux qui, ainsi que ceux des veines, portent le nom de vasa vasorvm, mais seulement dans une de leurs tuni- ques, la tunique externe qui est pourvue de petites ar- térioles, de vénules et de nerfs. Très-probablement, comme le pense M. Cruveilhier, les artères possèdent des vaisseaux lymphatiques. Veines. 74. — Les veines sont aussi des canaux cylindriques, très-dilatables et élastiques ; elles sont contractiles, mais à un bien moindre degré que les artères. Leurs parois beaucoup moins épaisses que celles des artères offrent généralement deux tuniques, l’une externe est semblable à celle des artères, mais plus mince de moi- tié, elle est très-vasculaire ; l’autre, interne est lisse, polie, formée de fibres lamineuses, lâchement unies. C’est de cette membrane que proviennent les renfle- ments ou valvules intérieures que présentent les veines de distance en distance dans leur parcours. Ces valvu- les sont plus nombreuses dans les veines des membres inférieurs que dans celles de la tête et des membres supérieurs. Certaines veines n’en sont pas pourvues, telles que les veines cérébrales et le système de la veine- ORGANES DE LA CIRCULATION. 69 porte. Les valvules ont pour but d’empêcher le sang veineux de refluer dans le système capillaire et de faci- liter la circulation. Les veines sont plus nombreuses que les artères et comme celles-ci, elles communiquent entre elles au moyen d’anastomoses. Les parois des veines contiennent des artérioles, des vénules et des vaisseaux lymphatiques. Leurs filets ner- veux sont moins nombreux que ceux des artères. L’ensemble des vaisseaux artériels constitue le sys- tème vasculaire à sang rouge, celui des vaisseaux vei- neux, le système vasculaire à sang noir. Propriétés des organes de la circulation. 75. —Avant de nous occuper du mécanisme de la cir- culation, nous devons faire connaître les principales propriétés des organes que nous venons de passer en revue. Le cœur, par sa contexture particulière, est doué des propriétés affectées aux muscles : il se contracte et se relâche alternativement; ces deux mouvements consti- tuent les battements du cœur ; le premier a reçu le nom de systole, et le second, celui de diastole. Le nombre des battements du cœur varie suivant l’âge; on en compte lüO par minute chez l’embryon, lâO à 180 après la naissance, 115 à 130 durant la pre- 70 CIRCULATION. mière année, 100 à 115 pendant la deuxième, 90 à 100 durant la troisième, 85 à 90 pendant la septième, 80 à 85 à 14 ans, 70 à 75 chez l’adulte. Des observations faites dans des hospices de vieillards ont montré qu’à cet âge, les battements du cœur, loin de se ralentir, pre- naient de la fréquence. Le nombre des battements du cœur est plus grand chez les sujets sanguins que chez les individus phlegmatiques, après les repas et surtout après les exercices corporels, enfin, chez les femmes que chez les hommes; il croît avec l’élévation des lieux : Parrot l’a trouvé de 70 au niveau de la mer, 75 à mille mètres au-dessus, 82 à 1,500, 90 à 2,000, 95 à 2,500, 100 à 3,000, 110 à 45000. [Dict. de Nysten.) Poulf, 76. — Tout ce qui vient d’être dit à l’égard des batte- ments du cœur se rapporte aussi au mouvement de con- traction et de dilatation que manifestent les artères sous l’inlluence de l’ondée de sang chassée par le cœur; on désigne ce mouvement sous le nom de pouls. Contractilité des artères. 77. •— Les artères sont douées aussi de la propriété de se contracter, mais comme nous l’avons vu, elles sont élastiques et fort peu extensibles, de sorte qu’une diffé- ORGANES DE LA CIRCULATION. 71 rence notable distingue la contraction des artères de celle du cœur : la contraction du cœur est musculaire, tandis que celle des artères est élastique. Les artères exercent une pression contractile constante sur le li- quide qu’elles contiennent, de manière à se trouver toujours pleines alors même qu’une quantité considéra- ble de sang a été perdue. Cette pression s’exerce par un effort contractile continu tant dans le sens longitudinal que dans le sens transversal du vaisseau, effort qui est surmonté par le cœur. Elles contribuent donc, pour leur part, à l’acte de la circulation. 78. — Les veines, dans le mouvement circulatoire, sont presque passives ; aussi de cylindriques et d’assez ré- sistantes qu’elles sont, dans l’état de plénitude, devien- nent-elles aplaties et flasques lorsqu’elles contiennent moins de sang. Mécanisme de la circulation, 79. —Dans l’exposition la plus simple, la circulation est cette fonction par laquelle le sang, après avoir subi, dans les poumons, l’influence de l’air atmosphérique, est amené par les veines pulmonaires, à l’état de sang rouge dans Yoreillette gauche du cœur, d’où il passe dans le ventricule du même côté ; par les contractions de ce ventricule, il est poussé dans Y artère aorte et ses divisions qui le conduisent dans la profondeur de nos 72 CIRCULATION. tissus. Le résidu non utilisé dans ces tissus est repris à l’état de sang noir par les veines et amené dans les vei- nes-caves supérieure et inférieure qui le versent dans Y oreillette droite du cœur; celle-ci le fait passer dans le ventricule correspondant, d’où il est poussé dans Y ar- tère pulmonaire et conduit de nouveau dans les pou- mons pour y être soumis au contact vivifiant de l’air atmosphérique. Le fluide nutritif décrit donc un véritable cercle dont le point de départ est aux poumons. Cependant, des poumons au cœur, le sang offre aussi un cercle circula- toire, mais beaucoup plus restreint; on a nommé ce par- cours du sang petite circulation, par opposition au grand circuit que le sang suit dans sa course par tout le corps, auquel on a donné le nom de grande circulation. On appelle circulation capillaire, le mode de transmission du sang dans nos tissus par les vaisseaux capillaires. C’est pendant le mouvement circulatoire que s’opè- rent les deux phénomènes que nous avons déjà signa- lés, l’acte de composition et celui de décomposition. Vaisseaux capillaires. 80. — L’apport et la reprise du sang dans la profondeur de nos tissus ont lieu par des vaisseaux d’une ténuité infinie que l’on nomme vaisseaux capillaires, du latin capillus, cheveu. Ces vaisseaux ne sont que les derniè- ORGANES DE LA CIRCULATION. 73 res extrémités des artères et le commencement des vei- nes, par conséquent, ils participent des propriétés de ces deux ordres de vaisseaux. La multiplicité et les entrelacements des vaisseaux capillaires dans nos tissus sont tels qu’on ne saurait concevoir, comme le dit Bichat, quelques molécules or- ganiques réunies sans des capillaires. Aussi, à la peau, la piqûre d’une aiguille la plus déliée même donne-t- elle lieu à l’écoulement du sang, résultant de l’ouver- ture d’un ou de plusieurs de ces vaisseaux. Cependant, certains tissus n’ont point de capillaires ni, en géné- ral, de vaisseaux sanguins ; mais cette exception se borne au tissu corné et dentaire et au tissu du cris- tallin. Système capillaire. 81. —Les vaisseaux capillaires comme le tissu cellu- laire forment un réseau qui s’étend dans tout l’orga- nisme et qui résulte de leurs ramifications entrelacées, et de leur réunion par des anastomoses très-multipliées. C’est ce réseau considéré dans son ensemble, qui con- stitue le système capillaire. Distinction des capillaires. 82. —Les vaisseaux capillaires sont rouges ou blancs selon qu’ils admettent les globules rouges du sang 74 CIRCULATION. comme les capillaires des muscles, de la rate, de cer- taines parties de la surface muqueuse, telles que la pi- tuitaire, ou qu’ils ne se laissent pénétrer que par les globules blancs ou par le sérum du sang, tels que les capillaires du tissu cellulaire, des membranes sé- reuses, des parois vasculaires, des nerfs, des car- tilages, des tendons, des ligaments, des os. Le diamè- tre du calibre des plus petits vaisseaux capillaires est en général équivalent au volume des globules. Cependant, il peut être inférieur à cause de l’élasticité des glo- bules, et lorsque, comme nous venons de le dire, les vaisseaux capillaires ne se laissent pénétrer que par les principes les plus fluides du sang. Il en est ainsi dans plusieurs parties transparentes de l’oeil. Après cet or- gane, les capillaires les plus déliés se trouvent dans le système nerveux, les poumons, la peau et les muscles. La quantité de capillaires varie suivant la nature des tissus. 83. — La quantité de capillaires qui parcourent nos tis- sus est variable selon la nature et les fonctions des or- ganes. Ils sont très-nombreux dans les poumons, dans la choroïde, moins déjà dans l’iris et le corps ciliaire, ensuite dans le foie, les reins, les membranes muqueu- ses et séreuses, et enfin dans le cerveau. I,çs cartila- ges, les ligaments, les tendons et les os qui reçoivent ORGANES DE LA CIRCULATION. 75 le moins de sang ont aussi moins de capillaires. Certains tissus n’en ont point, comme nous venons de le signaler plus haut. Eu résumé, les vaisseaux capillaires sont d’autant plus nombreux dans une partie de notre corps qu’il existe plus de fonctions à y entretenir. Propriétés des capillaires. 84. —Comme les artères, les vaisseaux capillaires sont élastiques, ils sont doués aussi de contractilité, mais à un degré beaucoup plus élevé. Ces propriétés contri- buent au mouvement du sang dans leur intérieur. Par des expériences faites sur la membrane natatoire des grenouilles, on a pu mettre en évidence la contrac- tilité des vaisseaux capillaires. C’est ainsi qu’au moyen de l'eau froide, de la glace, on a vu le calibre des vais- seaux capillaires diminuer de moitié ou même des trois quarts ; le sel marin, des irritations mécaniques, des solutions acides et alcalines très-étendues ont produit un résultat semblable. L,a contractilité des vaisseaux capillaires est paralysée au contraire par Veau chaude, Valcool, car se laissant distendre par le sang, leur dia- mètre augmente peu à peu. C’est en vertu de la contractilité dans les capillaires que les joues se colorent subitement d’une vive rougeur dans les émotions de la honte ou de la colère, et que la 76 CIRCULATION. muqueuse de l’estomac rougit au moment de la sécré- tion du suc gastrique. (M. J. Béclard.) « Le resserrement contractile des capillaires peut être porté au point de déterminer des arrêts de circulation, c’est ce qui arrive dans les parties congestionnées. Dans l’inflammation, le sang qui n’a plus ses qualités nor- males accole ses globules les uns contre les autres et obstrue en outre les capillaires. Le sang arrive toujours, mais ses voies de retour sont fermées. Au resserrement contractile des vaisseaux de la partie enflammée suc- cède un état de dilatation amené par la poussée de l’ondée sanguine contre les paroi s obstruées; surviennent alors Y engorgement et la tuméfaction de la partie. Les grumeaux sanguins qui remplissent les capillaires de- viennent plus tard le point de départ d’altérations diverses auxquelles viennent se joindre les produits d’exsudation qui s’échappent à travers les parois des capillaires voisins, restés perméables à la circulation. » (M. J. Béclard.) Circulation dans les capillaires. 85. —Le mouvement circulatoire dans les capillaires est beaucoup plus lent que dans les autres vaisseaux. En effet, le cours du sang est modifié par les résislances que lui offrent ces vaisseaux en raison de la ténuité de leur calibre, de leurs subdivisions infinies, de leurs ORGANES DE LA CIRCULATION. 77 courbures et de leurs entrelacements. Aussi, pour obvier à ces résistances, et suppléer même à la suspension mo- mentanée du cours du sang dans certains capillaires, les anastomoses sont-elles multipliées. Lès observations microscopiques ont démontré que le fluide sanguin coule avec plus de vélocité dans le centre même des vaisseaux capillaires que le long des parois. C’est pourquoi l’on voit les globules du sang se ralentir dans leur marche ou s’arrêter même s’ils s’approchent trop près de ces parois. Dans les vaisseaux capillaires très-déliés, la circulation est beaucoup plus lente que dans les autres. Le cours du sang dans les capillaires est relativement plus ou moins accéléré, plus ou moins ralenti selon la nature et les fonctions des organes. On comprend que ces variations résident dans la différence que présente le calibre de ces vaisseaux, de même que dans celle qui résulte de la texture des tissus qu’ils parcourent et de l’activité des fonctions organiques. Aussi ces variations se présentent-elles même dans l’état de santé, le repos ou l’activité d’un organe étant suffisants pour modifier la circulation capillaire. De même que la circulation générale artérielle et vei- neuse ne s’interrompt jamais, de même la circulation capillaire est continuellement active. Sans entrer dans aucune discussion à l’égard des opinions émises sur la circulation capillaire, nous établissons en principe que 78 CIRCULATION. le mouvement du sang dans ces vaisseaux est dû à l’ac- tion simultanée du cœur et des artères et à une action spéciale des capillaires eux-mêmes résultant de leurs propriétés vitales et des stimulants généraux qui in- fluencent celles-ci, tels que l’oxygénation du sang, le travail intime de la nutrition. Quoi qu’il en soit, de même que la circulation générale active ou ralentit le mouvement circulatoire dans les capillaires, de même celui-ci modifie la circulation générale. C’est ainsi, en effet, que les maladies du cœur, de l’aorte, etc., déter- minent des modifications dans la circulation capillaire, et que l’inflammation d’un organe important, en inter- rompant le cours du sang, dans les capillaires de cet organe, rend parfois si active la circulation géné- rale. Usages des capillaires. 86. — Les vaisseaux capillaires ont une haute impor- tance dans le mécanisme général de l’organisation. C’est par leur intermédiaire que le sang subit dans les pou- mons l’action vivifiante de l’air atmosphérique et que les éléments nutritifs qu’il contient sont portés dans la profondeur de nos tissus. En dernière analyse, c’est par eux que s’accomplissent les deux actes fondamen- taux de la nutrition, l’assimilation et la désassimilation ; en d’autres termes, le mouvement de composition et ORGANES DE LA CIRCULATION. 79 celui de décomposition. Aussi les capillaires sont à la fois les instruments de la nutrition organique et ceux de l’action morbide. Vaisseaux lymphatiques, chylifères, glandes. 87. — Il est un autre ordre de vaisseaux que les capil- laires sanguins, dont la ténuité est extrême aussi, et qui, même, en général, sont plus déliés. Ces vaisseaux dans l’intérieur desquels coule la lymphe (67) ont reçu le nom de vaisseaux lymphatiques. Ils sont transpa- rents, cylindriques, et leurs parois comme celles des autres vaisseaux, sont formées de plusieurs membranes. Les vaisseaux lymphatiques présentent do place en place, dans toute leur longueur, des renflements ou val- vules, dont ils sont, comme les veines., pourvus dans leur intérieur. Ils sont doués de contractilité, mais à un moindre degré que les veines et surtout que les artères. Ces vaisseaux existent dans toutes les parties du corps, cependant l’anatomie n’est pas parvenue à démontrer leur existence dans le cerveau. Ils prennent naissance à la surface et dans la profondeur de tous nos organes, où, en se repliant plusieurs fois sur eux-mêmes, ils for- ment un réseau à mailles très-serrées. On nomme vaisseaux chylifères ou veines lactées les vaisseaux lymphatiques qui naissent dans l’intestin et se terminent dans le canal thoracique/ ' 80 CIRCULATION. 88. — Les Xi aisseaux lymphatiques offrent des anasto- moses multipliées qui se réunissent en branches, les- quelles avant de se rendre dans leurs troncs principaux, traversent un nombre plus ou moins considérable de corps particuliers appelés glandes ou ganglions lym- phatiques, dans lesquels elles se divisent et se subdivi- sent à l’infini. Leurs troncs principaux sont d’une part: le canal thoracique qui reçoit près de l’ouverture aorti- que du diaphragme, là où ce canal présente une dilata- tion appelée réservoir de Pecquet, les vaisseaux lym- phatiques de l’abdomen ; il reçoit, en outre, ceux des membres inférieurs, du membre supérieur du côté gau- che, ceux de la poitrine, de la tête et du cou du côté correspondant, et va s’ouvrir dans la veine sous-clavicrc gauche; d’autre part, le grand vaisseau lymphatique droit ou grande veine lymphatique droite qui reçoit les lymphatiques du bras droit, ceux du côté droit de la tête, du cou et de la poitrine, et s’ouvre dans la veine sous- clavière droite. 89. — Les glandes ou ganglions lymphatiques sont des renflements situés en plus ou moins grand nombre sur le trajet des vaisseaux lymphatiques et surtout au pli des grandes articulations, les aisselles, les aînés, dans le voisinage des organes parenchymateux, les poumons, les mamelles, dans le mésentère et particulièrement aussi, au cou. Ce sont des corps ovoïdes, dont le vo- lume varie depuis celui d’un grain de millet jusqu’à ce- ORGANES DE LA CIRC.ULA'IION. 81 lui d’une amande environ; leur consistance est charnue et friable et leur couleur généralement d’un gris foncé est quelquefois différente selon l’organe qu’elles avoisinent. Les glandes ou ganglions lymphatiques ont leurs vais- seaux propres, leurs artères et leurs veines; des filets nerveux aussi les traversent. Ces corps paraissent avoir pour fonction l’élaboration des fluides cpii les parcourent, lymphe, chyle, etc., les- quels sont emportés par les vaisseaux lymphatiques et peut-être en partie par les veines qui naissent dans la substance de ces glandes. Circulation dans les vaisseaux lymphatiques. 90. —Dépourvue d’un organe central d’impulsion,la circulation dans les vaisseaux lymphatiques s’effectue en vertu de la contractilité de ces vaisseaux, de leur ca- pillarité, des divers mouvements du système musculaire de l’appareil respiratoire, et enfin de la cause de mou- vement que l’on désigne sous l’expression de vis à tergo. La lenteur, par conséquent, doit être considérée comme le caractère propre du mouvement circulatoire dans les vaisseaux lymphatiques. 91. — L’ensemble des organes que nous venons de décrire et des fonctions qui leur sont dévolues constitue le système lymphatique. Ce système est plus développé 82 CIRCULATION. ORGANES DE LA CIRCULATION. dans l’enfance et chez la femme, et lorsque sa prédo- minance est extrême, chez la femme comme chez l’homme, il constitue le tempérament lymphatique. Le système lymphatique a, dans l’économie, des re- lations très-étendues et très-diverses et, par consé- quent, son influence sur les phénomènes de la nutrition est des plus importantes. L’absorption et les sécrétions sont, en grande partie, placées sous sa dépendance. CHAPITRE SIXIÈME. SYSTÈME NERVEUX. —• FLUIDE NERVEUX. — INNERVATION. I. SENSIBILITÉ ET CONTRACTILITÉ. — APPAREILS ORGANIQUES NERVEUX. Cerveau. Cervelet. — Protubérance annulaire. — Moelle allon- gée. Moelle épinière. — Ganglions. — Nerfs cérébraux. — Nerfs spinaux. — Grand sympathique. — Nerf pneumogastri- que. — Composition du tissu nerveux. Sensibilité et contractilité. 92. — Nous savons que les phénomènes de la nutrition ne peuvent s’accomplir sans le concours des agents pri- mordiaux sous l’influence desquels sont placés tous les corps de la nature, l’oxygène, le calorique, la lumière et l’électricité (17). Mais si ces agents sont les moteurs les plus puissants des fonctions nutritives, leur influence, toutefois, est subordonnée à un principe aussi inconnu dans son essence qu’il est impénétrable dans son mode d’action, le principe vital ou la vie, d’où découle une propriété essentielle de la substance animale, la sensi- bilité. 84 SYSTÈME NERVEUX. La sensibilité est donc une propriété d’ordre vital et qui donne à la substance animale la faculté de ressentir l’action des agents extérieurs. La substance animale manifeste l’impression qu’elle a reçue par une autre propriété du même ordre, la contractilité, qui est ca- ractérisée par deux mouvements, l’un de raccourcisse- ment et l’autre d’extension qui se produisent alternati- vement et en sens opposé. Appareils organiques nerveux. 93. — Mais avant de rechercher la part que prennent ces propriétés dans les phénomènes de la nutrition, nous devons appeler l’attention sur l’appareil par l’in- termédiaire duquel elles se manifestent dans l’orga- nisme. L’appareil organique spécial auquel tous les tissus de l’économie doivent les propriétés que nous venons de signaler a reçu le nom de système nerveux. Le système nerveux se compose : 1° D’une masse centrale formée par le cerveau, siège des facultés intellectuelles, des sensations et des mou- vements volontaires ; par le cervelet, organe dont les usages ne sont pas encore bien déterminés, par la pro- tubérance annulaire et par la moelle allongée ; 2° De la moelle épinière ; 3° Des nerfs, cordons blancs qui se distribuent dans FLUIDE NERVEUX. INNERVATION. 85 les diverses parties de l’organisme et servent de con- ducteurs aux sensations et aux mouvements. Sur le trajet des nerfs se rencontrent souvent des renflements parti- culiers appelés ganglions nerveux. Les nerfs qui nais- sent de la masse cérébrale ont reçu le nom de nerfs cé- rébraux et ceux qui naissentde la moëlle épinière, celui de nerfs spinaux. Il y a trois sortes de nerfs, les nerfs qui servent de conducteurs au sentiment (nerfs de la sensibilité) ceux qui sont affectés aux mouvements (nerfsmoteurs), enfin les nerfs qui réunissent les propriétés des précédents (nerfs mixtes). h° Du nerf grand sympathique, appareil nerveux lié aux précédents par un système spécial de ganglions et qui paraît avoir pour point central les ganglions dits semi-lunaires. Le nerf grand sympathique préside aux fonctions de la vie organique ou végétative; 5° Du nerf pneumo gastrique, appareil nerveux inter- médiaire aux précédents et qui, né du cerveau, se dis- tribue dans les organes de la respiration, de la diges- tion et de la circulation. Tous ces organes sont parcourus par de nombreux vaisseaux artériels et veineux. L’action combinée du système nerveux général con- stitue Vinnervation, laquelle plane sur tous les phéno- mènes organiques. 86 SYSTÈME NERVEUX. Composition du tissu nerveux. 9k' —■ Le tissu nerveux est formé de deux substances, l’une blanche et l’autre grise , dont les principaux élé- ments sont : l’albumine et la graisse. Le canal dans lequel est située la moëlle épinière est lubréfié par un fluide auquel on a donné le nom de li- quide céphalo-rachidien ou cérébro-spinal; un des prin- cipaux éléments de ce liquide, comme l’a constaté M. CL Bernard, est la glycose. Les nerfs sont constitués par des éléments microsco- piques auxquels on a donné le nom de tubes nerveux primitifs; ces tubes contiennent une substance grasse demi-liquide appelée moelle nerveuse, au centre de la- quelle existe un filament solide et grêle que l’on désigne sous le nom d’axe central (cylinder axis) des tubes ner- veux. La composition de l’axe central réside dans une substance albuminoïde qui offre les réactions de la fi- brine. (M. J. Liebig.) La moëlle, par le refroidissement de l’animal, prend, d’après Gurkinje, l’aspect d’un caillot. Le filament central, par conséquent, et probablement le tube du cylindre nerveux entre lesquels se trouve la moëlle nerveuse ou la graisse, seraient donc formés de substance albuminoïde. La graisse entoure de tous côtés le filament central qui est évidemment la partie la plus FLUIDE NERVEUX. INNERVATION. 87 importante, et par rapport auquel elle joue le rôle de corps isolant : on sait que les graisses sont au nombre des isolateurs de l’électricité. II. FLUIDE NERVEUX. — INNERVATION. Fluide nerveux. — Agent analogue au fluide électrique. — Inner- vation. — Action afférente et action efférente. —Action réflexe. — Sympathies.— Action physiologique des agents extérieurs. — Excitation ou incitation. —Action et réaction physiologiques. — Phénomènes que détermine l’excitation sur les capillaires. Le fluide nerveux offre de l’analogie avec le fluide électrique. 95. — Quoiqu’il n’ait pas encore été possible de démon- trer d’une manière péremptoire la présence d’un fluide dans le système nerveux, tout donne lieu de croire à son existence. Aussi est-il généralement admis que les phénomènes qui appartiennent à ce système résultent de la présence d’un fluide dont le mode de mouvement est constitué par deux courants, l’un qui se porte de la périphérie vers le centre, l’autre du centre à la péri- phérie. Non-seulement nous admettons l’existence d’un fluide résidant dans le système nerveux, mais encore d’après des analogies et des inductions fort probantes, nous en 88 SYSTÈME NERVEUX. attribuons l’origine aux influences qu’exercent les corps extérieurs sur l’organisme, ainsi qu’aux actions intimes auxquelles la présence de ces corps donne lieu à la sur- face comme dans la profondeur de nos tissus. Telles sont, par exemple, les influences déterminées par l’oxy- gène en contact avec le sang dans les poumons, par les aliments et leurs métamorphoses dans l’appareil digestif, par l’air atmosphérique, le calorique et la lumière sur la peau, et enfin par Tacte général de la nutrition, sour- ces diverses et incessantes, dans l’intimité de l’orga- nisme, d’actions et de réactions physiques et chimiques, d’où résulte la production de deux fluides essentiels, indispensables à l'accomplissement des fonctions vitales, le calorique et Y électricité. Le premier, selon les lois qui le régissent, se répartit dans l’économie, le second est saisi par le système nerveux. Reil, Aldini, Cuvier, M. de llumbolt ont, depuis longtemps, émis l’opinion que le système nerveux est l’appareil formateur et con- ducteur d’un agent impondérable analogue au fluide électrique ou galvanique. INNERVATION. Action afférente. — Action efférente. 96. — Or, le fluide nerveux produit à la périphérie est amené et accumulé par des conducteurs spéciaux, les nerfs de la sensibilitédans des points centraux, les FLUIDE NERVEUX. INNERVATION. 89 ganglions, et dans un centre général, le cerveau, avec lequel ces derniers sont en communication. De ces ap- pareils centralisateurs, il revient par d’autres conduc- teurs, les nerfs du mouvement, à la périphérie où il se régénère. C’est ainsi que le fluide nerveux constitue deux courants, l’un qui vient des organes, marche vers les centres, l’autre qui revient des centres se dirige vers les organes. Dans ce double mouvement, deux actions se manifestent donc, l’une afférente, et l’autre, effé- rente. Sensibilité et contractilité. 97. — L’apport dans les centres du fluide formé dans les organes et la transmission des impressions que ceux- ci ont reçues constituent l’action afférente, l’expansion et l’emploi dans les organes du fluide accumulé dans les centres, établit l’action efférente. La première, indépen- dante de la volonté, embrasse les sensations en général, c’est-à-dire la propriété essentielle que nous avons si- gnalée, la sensibilité; la seconde, en partie soumise à la volonté, a sous sa dépendance les mouvements volon- taires et involontaires, en un mot, la contractilité. Action réflexe. Dans l’action afférente, le fluide nerveux est donc 90 SYSTÈME NERVEUX. transmis et accumulé, jusqu’à un certain point, dans un centre général, le cerveau , et dans des centres parti- culiers, la moëlle épinière et les ganglions. Ces der- niers cependant, placés soit sur le trajet des cordons conducteurs, les nerfs, ou à leur extrémité originelle, sont, toutefois, interposés de manière à recevoir le fluide de la périphérie avant le cerveau et à les rendre, sous certains rapports, indépendants de celui-ci. Cette disposition anatomique donne lieu à deux ordres de courants du fluide nerveux. Les courants du premier ordre sont généraux et ont leur point central dans le cerveau ; les courants du second ordre sont partiels et ont pour centre la moëlle épinière et les ganglions. Aussi le retour du fluide nerveux à la périphérie est-il soumis à deux modes de mouvement, l’un par lequel la volonté le dirige, l’autre par lequel il est réfléchi sans le concours de la volonté, c’est à ce dernier qu’on a donné le nom d'action réflexe. Sympathies. 98. — A la disposition anatomique que nous venons de signaler, il faut joindre des anostomoses nombreuses qui, en faisant communiquer certains nerfs entre eux, donnent encore lieu à des modifications dans les cou- rants du fluide nerveux dont les principales consistent dans une sphère d’action limitée à un système d’organes FLUIDE NERVEUX. INNERVATION. 91 réunis pour une même fonction, tel que l’appareil di- gestif, par exemple, et, dans l’épanouissement du fluide nerveux hors de cette sphère, ce qui constitue les sym- pathies. De ces considérations, il résulte que plus une fonction a d’importance dans l’économie et plus l’action ner- veuse sous laquelle elle est placée en étend les relations sympathiques. Le système organique qui préside à la génération chez la femme particulièrement peut être of- fert comme exemple. 99. — Ces divers mouvements du lluide nerveux ap- partiennent à l’action réflexe, mais cette action peut en- core avoir lieu dans une sphère plus restreinte; car, dans les phénomènes du travail intime des organes, il existe une activité nerveuse qui, pour n’être pas non plus entièrement indépendante du mouvement général du fluide nerveux, a néanmoins son mode particulier d’action, ce qui constitue une sorte d'atmosphère ner- veuse localisée dans le point où s’exerce le travail orga- nique. ACTION PHYSIOLOGIQUE DES AGENTS EXTÉRIEURS. Excitation ou incitation. 100. — Dans nos études précédentes, nous avons con- stamment envisagé du dehors au dedans, l'action des 92 SYSTÈME NERVEUX. corps extérieurs sur l’organisation. Nous trouvons d’au- tant plus rationnel de procéder ainsi, que la surface des tissus sur laquelle a lieu l’action immédiate des corps extérieurs étant plus accessible à nos sens, nous som- mes plus à portée d’étudier, jusqu’à un certain point, le mode par lequel les tissus peuvent être influencés. Et d’ailleurs, ne doit-il pas y avoir quelque analogie au moins, entre le mode d’action des corps extérieurs à la surface des tissus et celui qu’ils exercent dans les pro- fondeurs de l’organisme ? Quoi qu’il en soit, les agents extérieurs déterminent, sur la surface vivante, des modifications qui doivent se rapporter en partie aux actions physiques et chimiques qu’ils exercent semblablement sur les corps inertes ; mais ils ont en outre, une action essentielle, action phy- siologique, dont les tissus animaux seuls peuvent être affectés en raison des propriétés qui caractérisent la substance vivante. Cette action sur laquelle nous devons insister particulièrement à cause des phénomènes phy- siologiques dont elle est le premier mobile, consiste dans le stimulus particulier qui met en mouvement dans les tissus la sensibilité et la contractilité (92) ; cette ac- tion enfin, pour la caractériser en un mot, est l'exci- tation. Variable dans ses effets, selon le degré d’activité des agents extérieurs ou la susceptibilité des tissus, l’exci- tation donne lieu à des phénomènes de sensation plus FLUIDE NERVEUX. INNERVATION. 93 ou moins intenses et à des manifestations plus ou moins énergiques de la contractilité. C’est ainsi qu’elle est ou un stimulant salutaire des facultés sensitive et contrac- tile des tissus, ou bien au contraire une cause de trou- ble dans l’accomplissement des actes qui les caractéri- sent. On comprend dès lors combien est importante l’idée qu’on doit se faire du mode par lequel l’excitation se produit dans la substance vivante et des effets qu’elle y détermine, car, de cette idée découle l’interprétation plus ou moins lucide des phénomènes physiologiques les plus essentiels. Action et réaction physiologiques. 101. —Nous savons que la formation de tous les tissus et de tous les liquides de l’économie a lieu par l’inter- vention de trois fluides initiaux : le sang, la lymphe et le fluide nerveux (56, 67, 95), et que les instruments qui les conduisent dans les parties les plus intimes de l’or- ganisme sont les vaisseaux capillaires artériels et vei- neux, les vaisseaux lymphatiques et les nerfs (80, 87, 93). Les uns et les autres ont donc une haute impor- tance dans la manifestation des phénomènes vitaux, comme dans la part qu’ils prennent à l’accomplissement des actes organiques ; aussi devons-nous apporter une attention particulière dans l’étude de l’action qu’ils su- bissent sous l’influence des corps extérieurs. 94 SYSTÈME NERVEUX. Remarquons d’abord que si toute action physique ou chimique est suivie d’une action opposée que l’on nomme réaction, toute action physiologique présente le même phénomène, c’est-à-dire que l’action excitante des corps extérieurs se produisant sur un tissu vivant est immé- diatement contrebalancée par la résistance que ce tissu oppose en vertu des propriétés vitales dont il est doué. Or, l’excitation étant le premier phénomène apparent que les corps extérieurs déterminent sur la substance vivante, la sensibilité et la contractilité étant les pro- priétés par lesquelles celle-ci perçoit cette impression et en combat l’influence, c’est donc sur les nerfs, in- struments moteurs de la sensibilité et de la contractilité, que les corps extérieurs exercent primitivement leur action. Et comme toute action excitante met en mouve- ment les fluides, ubi stimulus, ibi fluxus, c’est, en ré- sumé, le fluide nerveux qui est mis en mouvement et accumulé dans les points où cette action se produit. En d’autres termes, l’excitation met en jeu dans la sub- stance vivante les deux propriétés primordiales sans le concours desquelles nulle action physiologique ne peut se manifester, la sensibilité et la contractilité. Phénomènes que détermine l’excitation sur les capillaires. 102. — Mais aux nerfs et au fluide nerveux ne se borne pas l’action des corps extérieurs, car les vaisseaux ca- FLUIDE NERVEUX. INNERVATION. 95 pillaires étant pourvus de nerfs sont, par conséquent, doués de sensibilité et de contractilité ; c’est donc en effet dans leur tissu que ces deux propriétés sont mises en mouvement. Et si nous cherchons à analyser les phénomènes que détermine l’excitation sur les vais- seaux capillaires, nous remarquons que, d’abord passifs, ces vaisseaux deviennent immédiatement actifs, c’est-à- dire que leur tissu, impressionné par les corps incitants, se contracte et diminue ainsi la capacité de leur cali- bre; de là, le refoulement des liquides qu’ils contien- nent. Mais à cette contraction succède Y expansion, et les liquides affluent dans les vaisseaux capillaires pour être de nouveau refoulés par les mêmes influences et par le même mécanisme. Telle est l’action physiologique des corps extérieurs sur les capillaires dans l’état normal, et tel est en même temps le mode par lequel s’opère la circulation dans ces vaisseaux, mouvement continu de va-et-vient, de reflux et d’afflux analogue aux mouve- ments du cœur, et dont l’activité dépend du degré d’ac- tion des corps incitants, et de l’excitabilité plus ou moins grande dont sont doués ces vaisseaux. 103. — L’organisation active est donc essentiellement constituée par les capillaires, aussi l’importance de ces vaisseaux dans l’accomplissement de tous les actes de l’économie est immense; car s’ils ne forment pas la substance propre des tissus, leurs relations avec cette substance sont telles, comme nous l’avons déjà fait 96 SYSTÈME NERVEUX. FLUIDE NERVEUX. INNERVATION. observer, qu’à peine peut-on concevoir quelques molé- cules de matières animales réunies sans capillaires. Comme nous savons d’ailleurs que les capillaires ne sont que des canaux par l’intermédiaire desquels les li- quides essentiels, le sang et la lymphe, pénètrent dans la substance des tissus, et que nous venons de recon- naître que c’est sur ces vaisseaux que se manifeste, en dernière analyse, l’excitation, nous devons donc, dans toute action des corps extérieurs, avoir constamment présente à la pensée cette considération que : les modi- fications exercées sur les tissus, par les agents exté- rieurs, ne s’effectuent, dans l’intimité organique, que par l’intermédiaire des vaisseaux capillaires et des li- quides contenus dans ces vaisseaux. CHAPITRE SEPTIÈME. VOIES PAR LESQUELLES PÉNÈTRENT LES AGENTS EXTÉRIEURS DANS L’ORGANISME. — ACTION DE CES AGENTS. — APPAREIL RESPIRATOIRE. — CALORIFICATION ANIMALE. — TUBE DIGESTIF. — PEAU. I. APPAREIL RESPIRATOIRE. —RESPIRATION. Influence de l’air atmosphérique comme agent de nutrition. — Des trois gaz que contient l’air atmosphérique, l’oxygène seul est propre à la respiration. — Mode par lequel l’oxygène pénètre dans le sang. — Dans l’acle respiratoire, l’air atmosphérique est toujours en contact avec la muqueuse pulmonaire. — Phénomène chimique de la respiration, hématose. —Conditions qui modifient la respiration. — Nécessité de la pureté de l’air atmosphérique.— Air confiné. — Influence de la viciation de l’air. — Influence de l’air suivant son état de sécheresse ou d’humidité, suivant sa température. — Maladies endémiques ou sporadiques. — Con- stitutions médicales. — Modifications imprimées à l’acte respi- ratoire sous l’influence du sexe, de l’âge, de l’état de veille ou de sommeil, de l’exercice ou du repos, des impressions mora- les, etc. 104. — Trois appareils organiques offrent un accès immédiat à l’action des agents extérieurs : les poumons, le tube digestif et la peau. Par l’intermédiaire de ces 98 RESPIRATION. appareils, les agents extérieurs pénètrent, plus ou moins modifiés, dans l’intimité de nos organes où ils déterminent des incitations et subissent des métamor- phoses diverses. Fidèle à l’ordre que nous avons suivi, nous allons rapidement passer en revue les différents phénomènes qui résultent de la présence des agents externes dans ces parties de l’organisme. RESPIRATION. Influence de l’air atmosphérique comme agent de nutrition. 105. —La vie et la flamme ont cela de commun, a dit Cuvier, que ni l’une ni l’autre ne peut subsister sans air. L’homme, en effet, peut vivre quelques jours, une semaine et plus même sans aliments, mais privé d’air, il ne saurait exister quelques minutes. Personne n’i- gnore cette rigoureuse nécessité, mais chacun ne se rend pas compte de l’immense influence que l’air at- mosphérique, selon les conditions qui peuvent en modi- fier la nature, exerce sur l’accomplissement régulier des actes vitaux. Cependant, si l’on considère que dans l’é- tat de veille comme pendant le sommeil, l’air atmo- sphérique est mis en contact avec le tissu pulmonaire par la respiration, environ seize à dix-huit fois par mi- nute, et qpe chaque mouvement respiratoire fait circu- RESPIRATION. 99 1er d’un tiers de litre à un demi-litre d’air dans les pou- mons, et, par conséquent, 488 à 500 litres par heure ; qu’enfin, le sang subit sous une telle influence, les mo- difications les plus essentielles, il est impossible de ne pas comprendre combien est importante la part dévo- lue à l’air atmosphérique dans les phénomènes de la vie. Des trois gaz que contient l’air, l’oxygène seul est propre â la respiration. 106. — Nous savons que l’air (20) est un mélange ga- zeux composé de 79 parties d’azote, de 21 d’oxygène, de quelques traces d’acide carbonique, et de plus, de va- peur d’eau, et que souvent, il contient des gaz et des vapeurs de diverse nature. Nous savons aussi que l’acte de la respiration a pour but la transformation du sang veineux en sang artériel ; mais cette transformation ne s’effectue que par un seul des gaz qui entrent dans la composition de l’air (l’acide carbonique étant impropre à la respiration et l’azote ne paraissant y jouer aucun rôle) ; c’est-à-dire par la combinaison de l’oxygène avec le sang veineux et par le dégagement de l’acide carbo- nique dont le sang s’est chargé dans le travail orga- nique. Mais si, à l’air libre, l’oxygène peut se combiner par simple contact avec le sang, il n’en est pas complète- 100 RESPIRATION. ment ainsi dans les poumons, c’est par l’intermédiaire de la muqueuse pulmonaire et des vaisseaux capillaires dont cette membrane est si abondamment pourvue que cette combinaison a lieu. Mode par lequel l’oxygène pénètre dans le sang. 107. —On sait que le mécanisme de l’acte respiratoire est constitué par deux mouvements : l’inspiration et l’expiration. Mais on se ferait une bien fausse idée du phénomène chimique de la respiration, comme le fait observer M. J. Muller, si l’on s’imaginait que pendant l’inspiration, l’oxygène de l’air passe à travers la tuni- que des vaisseaux capillaires dans les cellules pulmo- naires pour arriver jusqu’au sang, et que, pendant l’ex- piration, celui-ci laisse échapper de l’acide carbonique qui, à son tour, traverse les parois des vaisseaux. Les poumons ne sont jamais vides d’air, ils contiennent à la fois de l’air respirable et une certaine quantité de l’air qui doit être expiré. L’inspiration et l’expiration n’ont donc pour but que le renouvellement de l’air atmosphé- rique dans les poumons. Par conséquent, de même que le sang est sans cesse en mouvement dans l’acte respi- ratoire, de même l’admission de l’oxygène dans le sang ainsi que l’exhalation de l’acide carbonique , ont lieu continuellement, sans la moindre interruption, tant dans l’inspiration que dans l’expiration. L’air almo- RESPIRATION. 101 sphérique est donc en contact permanent avec la mu- queuse pulmonaire. Phénomcne chimique de la respiration. 108. —Or, par la loi de l’endosmose et de l’exosmose sous l’influence de laquelle les gaz, en vertu de leur élasticité, se pénètrent et se déplacent mutuellement, il y a échange de gaz dans le sang veineux parvenu dans les vésicules pulmonaires, l’oxygène de l’air est absorbé et l’acide carbonique se dégage. Mais là, selon les disciples de Lavoisier, ne se bornerait pas le phé- nomène chimique de la respiration ; l’oxygène, en pré- sence dans le sang veineux, se combinerait en partie avec une certaine portion des principes non azotés qu’il y rencontre, formerait de l’eau avec leur hydrogène, et de l’acide carbonique avec leur carbone. Quoi qu’il en soit, toujours est-il que la plus grande partie de l’oxygène est absorbée par les globules, probablement en raison du fer et du phosphore qu’ils contiennent, et c’est ainsi que ce gaz circule avec le sang jusque dans les vaisseaux ca- pillaires les plus déliés et qu’il parvient dans les pro- fondeurs de l’organisme où il est le mobile des actions chimiques qui s’y produisent. Mais, en même temps que s’accomplissent ces phénomènes, une certaine quantité de la vapeur d’eau contenue dans l’air atmosphérique est introduite dans le sang, et de la vapeur d’eau char- 102 RESPIRATION. gée de matières organiques diverses s’exhale de ce li- quide. Conditions qui modifient la respiration. 109.—Tel est bien sommairement le phénomène chi- mique de la respiration en considérant l’air atmosphé- rique dans un état de pureté, de température, d’hygro- métrie et de pression en rapport avec les forces orga- niques normales. Si succinct que soit l’exposé de ce phénomène, il suffit cependant pour faire comprendre la haute importance de l’acte respiratoire, car on voit que c’est dans cet acte que le sang, vivifié par l’oxy- gène et purifié par l’expulsion de l’acide carbonique particulièrement, devient réellement apte à porter la vie dans nos organes. Mais le phénomène de l’oxygénation et de la décarbo- nisation du sang ne se manifeste pas constamment avec la même régularité ; car diverses conditions peuvent en modifier l’accomplissement. Telles sont, comme nous l’avons fait pressentir ci-dessus, d’une part, relative- ment à l’air atmosphérique, la pureté ou l’impureté de ce mélange gazeux, la sécheresse ou l’humidité qui l’ac- compagne, le degré de pression des couches qui le constituent, l’état de la température ambiante, et peut- être la présence ou l’absence de l’ozône; d’autre part, relativement aux individus et à l’organisation : le sexe, RESPIRATION. 103 l’âge, les différences individuelles relatives au dévelop- pement des poumons, les rhythmes variés de la respira- tion, l’accélération ou le ralentissement du mouvement circulatoire, la nature du sang, l’état de nourriture ou d’abstinence, l’espèce ou la qualité de l’alimentation, le mouvement ou le repos, la veille ou le sommeil, les influences morales, c’est-à-dire l’état du système ner- veux, etc. Nous ne pouvons, en raison des bornes que nous nous sommes imposées, étudier avec détails ces diverses con- ditions, aussi nous contenterons-nous d’appeler l’atten- tion sur les points principaux qui se rattachent plus particulièrement aux idées que nous nous efforcerons de mettre en lumière. Nécessité de la pureté de l’air. — Air confiné. 110. —Il est tellement avéré que la pureté de l’air at- mosphérique est nécessaire à l’accomplissement régu- lier des phénomènes de la respiration, qu’il semblerait superflu d’insister de nouveau à cet égard, si chaque jour l’incurie et l’oubli les plus inconcevables ne ve- naient prouver combien nous sommes encore loin de comprendre qu’en cette condition réside une des sour- ces les plus puissantes de la vie. Pour ne citer que quel- ques exemples de la nécessité d’un air pur, pour l’en- tretien de la vie, il nous suffira de rapporter quelques 104 RESPIRATION. circonstances où la viciation de l’air, due à l’absence de ventilation, c’est-à-dire l'air confiné, s’est produite de la manière la plus évidente et a été suivie presque im- médiatement des effets les plus terribles. N’a-t-on pas vu, en 1750, comme nous le trouvons dans le traité de physiologie de M. J. Béclard, aux assises d’Old-Bailey qui se tenaient dans une pièce de 30 pieds carrés, la plupart des juges et des assistants périr asphyxiés ; ceux qui survécurent étaient près d’une fenêtre ouverte. En 1756, au mois de juin, là5 prisonniers de guerre ayant été enfermés dans une salle de 20 pieds carrés, 23 seulement sortirent vivants au bout de douze heures. A la suite des malheureuses journées de juin 18à8, les funestes effets de l’air confiné se firent sentir sur les prisonniers entassés dans les souterrains de la terrasse des Tuileries. Des faits semblables se sont reproduits dans la cale des vaisseaux négriers. Enfin, tout récem- ment encore, l’influence pernicieuse de l’air confiné s’est manifestée à Manille, le 9 novembre 1855, à bord d’un navire; sur Ù50 individus enfermés dans Fentre-pont, 251 furent trouvés morts par suffocation au bout de quelques heures. Ce sont là des exemples frappants de la terrible in- fluence de l’air atmosphérique arrivé à un état de vicia- tion extrême, plus d’ailleurs, par la quantité d’oxygène dont il est privé, que par les gaz étrangers et les vapeurs impures qu’il a acquis; mais ce n’est qu’exceptionnelle- RESPIRATION. 105 ment qu’il en est ainsi, tandis que très-souvent, au contraire, l’air est vicié dans ses éléments de telle sorte que ce n’est que d’une manière latente et graduelle qu’il altère l’organisme avec plus ou moins d’intensité. Si l’on est bien pénétré de ce fait que l’acte respira- toire a pour but essentiel la transformation du sang veineux en sang artériel, c’est-à-dire l’oxygénation et la décarbonisalion du sang par l’intermédiaire de l’air atmosphérique, on doit comprendre combien il est im- portant que ce mélange gazeux soit dans les conditions les plus propres à favoriser ce résultat. Influence de l’impureté de l’air. 111. — L’oxygène et l’azote sont à l’état de mélange dans l’air atmosphérique, cependant, dans certaines cir- constances, les temps d’orage, par exemple, ils se com- binent quelquefois ; dans ce cas, les nouveaux gaz for- més donnent lieu, par leur contact avec des gaz ou des vapeurs de nature particulière, à des composés divers encore peu connus, mais qui, cependant, doivent jouer un rôle dans certaines épidémies dont l’invasion semble coïncider avec ces commotions atmosphériques. Toute- fois, il est bien reconnu que c’est à la présence de corps vaporeux insolites, de miasmes que l’air doit sur- tout les modifications qui le rendent impropre à l’ac- 106 RESPIRATION. complissement parfait de l’acte respiratoire. On conçoit, en effet, que dans une quantité donnée d’air introduite dans les poumons, si une certaine proportion de va- peurs étrangères s’y trouve en mélange, la quantité d’oxygène en contact avec la muqueuse pulmonaire est diminuée et, par conséquent, l’oxygénation du sang s’etïectue imparfaitement. C’est dans ces conditions que se trouve constamment l’air dans les grands centres de population quand, en outre, il n’est pas plus vicié en- core par la présence d’émanations de matières organi- ques en décomposition. L’eau croupie dés ruisseaux, des interstices des pavés, dont qui que ce soit ne s’avi- serait, de faire usage comme boisson, n’est-elle pas ce- pendant, à chaque instant, introduite dans l’organisation, par l’acte respiratoire sous forme de vapeurs mélangées avec l’air atmosphérique? Telles sont fréquemment les modifications subies par l’air à l’état libre dans les gran- des villes, et particulièrement dans les quartiers ancien- nement bâtis où les rues et les maisons mal alignées entravent la ventilation et l’accès des rayons solaires. Mais, dans l’intérieur des habitations, où fort souvent le volume de l’air est mesuré par l’espace et les ouvertu- res, les modifications sont beaucoup plus importantes encore. Non-seulement l’air y perd sans cesse de l’oxy- gène, se charge d’acide carbonique, de vapeur d’eau et des produits organiques de l’exhalation pulmonaire et cutanée, mais encore par le mode de chauffage souvent RESPIRATION. 107 vicieux, par l’éclairage, il acquiert les propriétés les plus délétères. Lorsque l’on songe que l’air qui contient un peu plus de 10 pour 100 d’acide carbonique ne tarde pas à causer la mort et cela, sans provoquer la toux, sans déterminer aucun symptôme de suffocation, on doit comprendre quelles funestes influences de semblables causes doivent avoir sur l’organisme. De là, en effet, de nombreuses et profondes modifications imprimées à la constitution des habitants des villes; de là, une foule de maladies dont la forme est d’autant plus variable et plus complexe que les causes qui les ont fait naître ont elles-mêmes été plus diverses, et ont plus ou moins longtemps agi sur l’organisme; de là, enfin, l’impuissance des médications les plus rationnelles, si, tout d’abord, de semblables causes ne sont éloignées. Influence de l’air suivant son état hygrométrique et sa température. 112. — La sécheresse ou l’humidité de l’air atmosphé- rique, quel que soit d’ailleurs l’état de pureté dans lequel il puisse se trouver, peuvent aussi modifier les fonctions respiratoires et le sang, mais leur effet se manifeste surtout lorsque l’élévation ou l’abaissement de la tem- pérature viennent encore ajouter à leur influence. L’air sec et chaud entrave l’oxygénation du sang, ralentit les 108 RESPIR ATION. mouvements respiratoires, la circulation ; il accroît la chaleur générale, augmente l’exhalation des parties aqueuses du sang et diminue ainsi sa fluidité normale. Dans les climats dont la température est très-élevée, et chargée en même temps d’humidité, les maladies revê- tent cette forme particulière, caractérisée par la prédo- minance du système veineux, c’est-à-dire des principes carbonés dans le sang, telles sont les maladies du foie, les maladies intestinales spécifiques, etc. Sec et froid, l’air apporte une quantité plus considérable d’oxygène dans les poumons, il stimule trop activement la mu- queuse pulmonaire, provoque l’afflux du fluide sanguin dans cette membrane et donne lieu à une oxygénation qui, excédant les besoins de l’économie, accumule pro- gressivement dans le sang, des éléments inflammatoi- res. En outre, il diminue jusqu’à un certain point la somme de calorique de l’économie ; car si par les con- bustions que détermine l’oxygène absorbé par le sang, l’organisme peut trouver les moyens de lutter contre la perte de calorique que l’air froid lui fait subir, celte lutte ne s’étend pas au point d’annuler l’action réfrigé- rente de l’air à la périphérie. Aussi, par l’influence de l’air sec et froid, le sang refoulé de la peau vers les centres peut-il donner lieu à des désordres d’autant plus graves que son oxygénation est portée à un degré plus élevé. Si, à ces différents états de l’air, se joint l’aug- mentation ou la diminution de la pression atmosphéri- 109 que, l’acte respiratoire et le sang sont encore diverse- ment affectés. Dans les régions tempérées, l’air chargé d’humidité relâche les tissus, entrave l’oxygénation et la décarboni- sation, et accumule, dans le sang, des principes aqueux. C’est ainsi que les individus qui habitent les vallées, des lieux humides, privés de la lumière, de la chaleur so- laire qui raréfie la vapeur d’eau, acquièrent cette constitution particulière, caractérisée par la prédomi- nance de la lymphe et du système glandulaire : la con- stitution lymphatique, scrofuleuse. RESPIRATION. Maladies endémiques ou sporadiques. — Constitutions médicales. 113. — Isolées ou réunies l’une à l’autre, ces diverses conditions de l’air peuvent par leur permanence, non- seulement imprimer à l’organisation entière les modi- fications les plus essentielles ; mais lors même qu’elles ne se produisent que passagèrement, elles ont encore une influence des plus nuisibles. C’est sous l’empire des conditions atmosphériques que naissent ces affections inhérentes à une contrée, à une localité, que l’on nomme maladies endémiques ou sporadiques, et que se développent ces dispositions morbides qui, selon les climats et les saisons, impri- ment un caractère particulier aux maladies, et que l’on désigne sous le nom de constitutions médicales. 110 RESPIRATION. Modifications imprimées à l’acte respiratoire sous les influences individuelles. 11/j.—Relativement aux individus, à l’organisation et à Certaines circonstances habituelles ou fortuites, les phé- nomènes respiratoires ne sont pas moins soumis à des influences variées. L’âge et le sexe impriment au méca- nisme de la respiration des modifications importantes. Chez l’enfant, par exemple, les mouvements respiratoi- res sont plus accélérés que chez l’adulte. La femme présente aussi cette différence à l’égard de l’homme, et dans les deux sexes d’ailleurs, les mouvements respira- toires varient selon les époques de la vie. Ces dispositions individuelles ont une influence ma- nifeste sur l’accomplissement des phénomènes de la respiration, car l’accélération ou le ralentissement des mouvements respiratoires diminue ou augmente les con- ditions propres à favoriser le renouvellement de l’air atmosphérique dans les poumons, et donne lieu à des différences dans la quantité d’oxygène absorbé et d’a- cide carbonique exhalé. C’est à ces dispositions que se rapportent en partie les maladies particulières aux dif- férents âges et au sexe, de même que la forme sous la- quelle elles se manifestent. Telles sont, pour l’enfance, les maladies éruptives : pour la jeunesse, les affections pulmonaires; pour l’âge mûr et la vieillesse, les affec- tions organiques du cœur, du foie, etc. CHALEUR ANIMALE. 111 L’état de veille ou de sommeil, l’exercice ou le repos, les impressions morales modifient aussi l’acte chimique de la respiration ; leur influence s’étendant non-seule- ment sur les mouvements respiratoires, mais encore sur la circulation et sur l’innervation. Enfin, la quantité et l’espèce des aliments, la nature des boissons, en chargeant l’organisme de principes carbonés ou azotés, l’inanition ou l’alimentation insuffi- sante, en diminuant les matériaux propres à entrer en combinaison avec l’oxygène, l’état de maladie, font aussi subir à l’acte respiratoire, les modifications les plus im- portantes. II. CHALEUR ANIMALE. L’oxygène est l’agent principal de là chaleur animale. — Tous les animaux ont une température qui leur est propre. — Des com- bustions dans l’organisme. — Influences sous lesquelles est pla- cée la calorification animale. — Animaux à température con- stante et animaux à température variable. — Hypothèse de Lavoisier sur le siège de la calorification animale, combattue par M. Cl. Bernard. — Circonstances qui déterminent la répar- tition inégale du calorique selon les différents points de l’orga- nisme. — Siège de la chaleur animale. — Température du corps de l’homme. — Causes qui déterminent des oscillations dans le développement, la répartition et le maintien de la chaleur ani- male. L’oxygène est la source première de la chaleur animale. 115.—ftous avons vu (17) que l’oxygène est la source 112 CHALEUR ANIMALE. première de la chaleur dans l’organisme ; aussi, après avoir étudié la principale fonction par l’intermédiaire de laquelle ce gaz pénètre dans l’économie, devons-nous nous arrêter un instant sur un phénomène qui ne se produit que chez les êtres dont l’existence est liée à l’action de l’oxygène, c’est-à-dire, la chaleur animale. Tous les animaux ont une température qui leur est propre. Tous les animaux vivants ont la faculté de se mainte- nir dans une température qui leur est propre, et, pres- que constamment supérieure au milieu ambiant. En effet, tandis que tous les corps, dans la nature inorga- nique tendent sans cesse à se mettre en équilibre avec la température extérieure, les animaux possèdent une source de chaleur indépendante du milieu dans lequel ils vivent. La production et le maintien de la chaleur dans l’économie animale est donc un phénomène atta- ché à l’existence des animaux, un phénomène essentiel- lement vital. Des combustions dans l’organisme. Nous savons que l’oxygène de l’air introduit dans l’organisme par l’intermédiaire des poumons, et comme nous le verrons plus loin, par la peau, pénètre dans le sang veineux en prenant la place de l’acide carbonique; CHALEUR ANIMALE. 113 c’est ainsi qu’il circule avec le sang artériel et qu’il est conduit dans la profondeur des tissus. Aussi, ne se pro- duit-il de la chaleur que dans les parties de l’animal où peut arriver le sang artériel, et par ce liquide l’oxygène absorbé par la respiration ; les poils, la laine, les plu- mes, n’ont pas de température qui leur soit propre. « Cette chaleur est partout, et dans toutes les circon- stances, la conséquence de la combinaison d’un corps combustible avec l’oxygène. » (M. Liebig.) On se ferait une fausse idée des combustions qui s’o- pèrent dans l’organisme, si l’on croyait qu’elles s’effec- tuent comme celles de nos foyers. Les combustions dans l’économie ont pour caractère la lenteur, c’est-à-dire que l’oxygène en contact avec les matières organiques, les atteint progressivement, aussi a-t-on donné le nom de combustions lentes aux combustions de l’économie. Or, les diverses actions que détermine la présence de l’oxygène dans l’économie ne se manifestent que dans l’intimité organique, là où le sang change de nature et fournit des éléments à l’absorption et aux sécrétions, là où les liquides et les solides se composent et se décom- posent, là enfin où s’opèrent tous les phénomènes de la nutrition, c’est-à-dire dans les dernières ramifications du système vasculaire, les capillaires généraux. 114 CHALEUR ANIMALE. Influences sous lesquelles est placée la calorification animale. 116. — Le phénomène de la calorification animale est doncparticulièrementdépendant de la quantité d’oxygène admise dans l’intimité organique, de la composition du sang et du mode par lequel ce lluide pénètre dans la substance des tissus. En d’autres termes, la tempéra- ture du corps de l’animal est subordonnée aux fonctions respiratoires, à celles de la peau, à l’aptitude du sang à se charger d’oxygène, à la quantité d’éléments combus- tibles qu’il renferme, au mouvement et à la répartition de ce liquide dans les diverses parties de l’organisme, en résumé, à toutes les fonctions de nutrition. Aussi, l’activité de la calorification animale est-elle en rapport avec l’accélération des mouvements respiratoires, la quantité de globules et de corps combustibles contenus dans le sang, la richesse du système capillaire sanguin, la rapidité de la circulation. Chez les oiseaux, par exem- ple, où le plus souvent ces conditions sont réunies, la température s’élève à —[— 40 ou ùl°, tandis que les poissons et les reptiles qui se trouvent dans des condi- tions opposées, offrent à peine une différence de 1° 1/2 à 2° au-dessus de la température du milieu dans lequel ils vivent. CHALEUR ANIMALE. 115 Animaux à température constante, et animaux à. température variable. 117. —Tous les animaux, avons-nous dit, possèdent une source de chaleur indépendante de la chaleur am- biante, mais ils n’en sont pas moins soumis aux lois or- dinaires des échanges de calorique entre corps voisins, par contact ou par conductibilité, à distance ou par voie de rayonnement. Cependant, les animaux supérieurs luttent avec succès contre ces influences, car ils jouis- sent de la faculté de maintenir leur température propre d’une manière invariable, mais les animaux inférieurs, tout en produisant de la chaleur, subissent à un très- haut degré l’action de la température du milieu am- biant. On peut donc avec juste raison diviser les ani- maux en animaux à température constante et en ani- maux à température variable, tout aussi bien qu’on les distingue sous le nom d’animaux à sang chaud et d’a- nimaux à sang froid. Au reste, la différeuce que pré- sentent les animaux à température constante et les ani- maux à température variable, se rapporte particulière- ment d’ailleurs à la quantité d’oxygène absorbée et à l’intensité des combustions qui s’effectuent dans l’inti- mité organique. On peut ajouter que cette différence est en rapport aussi avec le degré de température que né- cessitent les actions chimiques propres au mode de 116 CHALEUR ANIMALE. nutrition qui distingue encore ces deux classes d’ani- maux. Hypothèse de Lavoisier sur le siège de la calorification animale, combattue par M. Cl. Bernard. 118.—On doit à Lavoisier cette hypothèse que des phénomènes de combustion s’accomplissent dans l’inti- mité organique sous l’influence de l’oxvgène et sont la source de la chaleur animale ; seulement au lieu d’avoir placé le siège de ces phénomènes dans les capillaires généraux, il l’avait mis dans les capillaires des pou- mons. Aujourd’hui encore ces idées sont admises par le plus grand nombre des chimistes, quant à ce qui a trait au moins au foyer principal de la calorification animale. Mais, contrairement à cette opinion, M. Cl. Bernard, dans un travail récemment présenté à l’Académie des Sciences, vient de démontrer que la température du sang qui traverse les poumons s’abaisse et que, par conséquent, l’appareil respiratoire au lieu de produire de la chaleur est une cause de refroidissement. Circonstances qui déterminent la répartition inégale dans les différents points de l’organisme. 119. —Dans l’état physiologique, la température est toujours la même au centre, mais elle se répartit iné- galement dans les différents points du corps selon leur CHALEUR ANIMALE. 117 position plus ou moins superficielle et leur distance des centres de la vie de nutrition ; par conséquent, la somme de calorique développé n’est pas semblable dans les parties profondes de l’économie. Ainsi, dans les or- ganes où les fonctions nutritives ont des relations très- étendues, où le travail qui s’y opère offre une plus grande activité, la quantité de chaleur développée est plus considérable que dans les autres parties du corps, puisque la température des divers organes est en rap- port avec leur importance dans les phénomènes nutri- tifs, la quantité de vaisseaux sanguins qui les parcou- rent, l’activité dont ils sont doués, la rapidité de la cir- culation, leur éloignement du milieu ambiant. C’est ainsi qu’il résulte des belles recherches expérimentales de M. Cl. Bernard, que le sang qui traverse l’appareil di- gestif et celui qui revient du foie, acquièrent une tem- pérature plus élevée que dans les autres parties du corps ; tandis que, comme nous venons de le rapporter, la température du sang s’abaisse lorsque ce liquide tra- verse l’appareil respiratoire. Il en est de même d’ailleurs sous l’influence de l’évaporation cutanée pour le sang qui circule dans la peau et dans les points qu’elle re- couvre. Siège de la calorification animale. 120. — D’après ces considérations, on comprend que le 118 CHALEUR ANIMALE. siège de la chaleur animale ne doit pas être placé dans un organe plutôt que dans un autre, et que c’est dans le mouvement incessant du travail nutritif qu’il réside, mais qu’il peut exister des foyers principaux, soit dans une série d’organes réunis pour une même fonction, l’appareil digestif, soit dans un organe isolément, l’es- tomac, le foie, la rate. D’où il résulte que la tempéra- ture animale est particulièrement subordonnée à la continuité et à l’activité du mouvement nutritif général, et qu’elle peut éprouver des oscillations sous l’influence des actions intermittentes qui se produisent dans l’éco- nomie. On sait aussi que la température s’élève dans les points de l’organisme où l’état morbide détermine une suractivité anormale, dans l’inflammation, par exemple. Température du corps de l’homme. 121.— La température moyenne du corpsde l’homme est de+ 36°, 50'à 37o centigrades. Les observateurs les plus dignes de foi ont constaté que cette température reste la même sous toutes les latitudes. Aussi celte fa- culté que possède l’homme de maintenir sa température lui permet de supporter un froid fort rigoureux et des chaleurs très-élevées. Toutefois, quant à sa température propre, la plus grande déperdition de chaleur que l’homme puisse subir ne peut excéder lk à 15», et la CHALEUR ANIMALE. 119 limite extrême de l’élévation de sa température est de 5 à 6°. Causes qui déterminent des oscillations dans le dévelop- pement, la répartition et le maintien de la chaleur animale. 122. — En nous reportant aux points que nous avons établis sur la production de la chaleur animale et sur les conditions générales dont ce phénomène est dépen- dant, on conçoit que la température propre de l’homme, de même que celle des animaux, doit subir des varia- tions. C’est en effet ce qui ressort des expériences de tous les chimistes et de tous les physiologistes qui ont étudié ce phénomène, tels que J. Davy, Wilson Phi- lipp, Martine , Hausmann, Brodie, MM. Prévost et Du- mas, Chossat, Dulong, Becquerel et Breschet, Gavar- ret, etc. Ainsi, des modifications dans la température propre de l’homme se présentent suivant l’âge ; aux deux extré- mités de la vie, par exemple, la puissance de calorifica- tion est particulièrement amoindrie. Les enfants nou- veau-nés et les vieillards ne résistent pas au froid comme les adultes, car ils perdent facilement de leur calorique. Quant au sexe, la femme présente peut-être une mi. nime différence en moins sur la température de l’homme. 120 CHALEUR ANIMALE. L’alimentation, suivant la nature et surtout la quan- tité des aliments, a une influence des plus prononcées sur la température du corps. Il en est ainsi dans l’état physiologique normal de la suppression totale des ali- ments, qui abaisse la température à un tel point que si cette suppression est prolongée jusqu’à la mort, l’ani- mal, au dire de M. Chossat, meurt de froid. C’est qu’en effet, chez l’animal soumis à une abstinence forcée, les poumons restent intacts, et l’animal, en absorbant con- tinuellement de l’oxygène jusqu’au dernier moment de sa vie, a brûlé sa graisse, son sang, ses tissus, et quand il a perdu un dixième de son poids, selon M. Gavarret, les éléments combustibles faisant défaut, la température s’abaisse et tombe au-dessous du degré nécessaire au jt u des fonctions. Dans les derniers moments de la vie, d’après les expériences de M. Chossat, le refroidisse- mentestsi rapide et si considérable, que la perte de caloi ique s’élève à 14°, et la mort arrive lorsque la température intérieure est descendue à 24°. Pendant la veille et pendant le sommeil, la calorifica- tion présente une différence qui n’est pas moindre d’un degré. (M. Gavarret.) Les exercices et le repos sont aussi des modificateurs delà chaleur animale. L’embonpoint, la maigreur, la gestation, l’état morbide, tous les phénomènes physio- logiques qui impriment des modifications au jeu des fonctions, et particulièrement à Pacte respiratoire, toutes DIGESTION. 121 les influences extérieures, l’état de l’atmosphère, les saisons, les climats, etc., déterminent des oscillations dans le développement et la répartition de la chaleur dans l’organisme. Telles sont, bien sommairement, les diverses condi- tions physiques et chimiques sous l’empire desquelles le calorique se développe et se meut dans l’économie ; mais à ces considérations, comme à tous les phénomè- nes qui se passent dans l’organisme, il faut joindre l’in- fluence du système nerveux, sans le concours duquel nulle action physique ou chimique ne peut se produire chez l’animal vivant. III. APPAREIL DIGESTIF. —DIGESTION. Action des aliments dans les' voies digestives, dans la bouche. — Mastication. — Insalivation. — Salive. — Action des aliments dans l’estomac. — Suc gastrique. — Ses propriétés. — Pepsine. — Action du suc gastrique. — Chyme. — Action des aliments dans le duodénum. — Suc pancréatique. — Ses propriétés, ses usages. — Résultat ultime des fonctions digestives. — Chyle. — Composition du chyle. — Produits digestifs dans le gros in- testin. 123. — Si l’action de l’air atmosphérique détermine dans l’organisme les plus importantes modifications et étend ses relations sur les phénomènes les plus essen- tiels de la vie, les corps extérieurs ingérés dans les 122 DIGESTION. voies digestives n’ont pas une moindre influence. En ef- fet, l’air atmosphérique peut se trouver dans l’état le plus pur, dans les conditions les plus favorables pour déterminer l’oxygénation parfaite du sang, et cependant cette oxygénation ne s’accomplira que d’une manière incomplète ou aura même une influence nuisible , si les corps extérieurs admis dans les organes digestifs n’ont pas les qualités propres à favoriser l’exercice régulier des fonctions dévolues à ces organes, ou si, sans altérer ces fonctions, leur incorporation avec le sang fait ac- quérir à ce fluide des propriétés anormales ou non équilibrées avec la quantité d’oxygène fourni par l’acte respiratoire. Il est donc fort important d’étudier non- seulement l’action des corps extérieurs sur les voies digestives, mais encore les modifications que ces corps subissent avant de faire partie du sang. Action de» aliments dans les voies digestives. A l’état normal, les corps extérieurs qui pénètrent dans les voies digestives (kb) sous la forme solide ou sous la forme liquide sont les aliments. L’action des aliments varie selon leur nature, et sou- vent selon la quantité introduite dans le canal digestif. Cette action est variable aussi selon les parties de ce canal avec lesquelles les aliments se trouvent en con- tact. DIGESTION. 123 Action des aliments dans la bouche. 12h. — Dans la bouche, les substances alimentaires ont une influence bien moins active que dans les autres portions des voies intestinales. Cependant à cette partie de l’appareil digestif appartient un rôle important, la mastication et l’insalivation, que sollicite plus ou moins activement la présence des aliments. Aussi, dès ce pre- mier point du travail de la digestion, se manifeste l’ac- tion des substances alimentaires selon leur degré d’exci- tabilité. Mastication. — Insalivation. 125. — La mastication étant un acte mécanique dé- pendant de la volonté ne semble pas soumise à l’in- fluence des aliments quant à leur excitabilité intrinsèque; néanmoins, l’impression produite par leur contact sur les parois buccales détermine de véritables excita- tions , auxquelles succède le travail de la mastica- tion. Quoi qu’il en soit, la mastication est un acte pré- paratoire important auquel tous les aliments solides doivent être soumis avant leur ingestion dans l’estomac, et plus particulièrement les aliments solides de nature végétale. Cet acte a pour but de diviser les aliments et de les imprégner des fluides qui s’écoulent des follicules 124 DIGESTION. muqueux des parois de la bouche et des glandes sali- vaires, en un mot de la salive. Salive. 126. — La salive est un fluide un peu visqueux, ino- dore, insipide, sécrété par les glandes parotides, sous- maxillaires, sublinguales, les glandes des joues, des lè- vres, de la face inférieure de la langue, du voile du palais, etc. Quoique la salive résulte du mélange de ces divers fluides, néanmoins chacun d’eux a une action spéciale. C’est ainsi que la sécrétion salivaire fournie par les sous-maxillaires sert à la gustation -, celle qui provient de la parotide, à la mastication, et les sécré- tions que produisent les glandes buccales et les sublin- guales, à la déglutition. Aussi M. Cl. Bernard, auquel on doit ces distinctions, admet-il quatre espèces de salive : 1° la salive mixte ou buccale; 2° la salive parotidienne; 3° la salive sous- maxillaire; k° la salive sublinguale , à laquelle il faut joindre les produits des glandes bucco-labiales et de la glande zygomatique ou de Nuch. Mais comme la salive mixte concourt seule à l’insalivation des aliments, c’est de ce liquide que nous allons nous occuper ici. La salive est légèrement alcaline, elle est fréquem- ment d’une acidité remarquable, surtout le matin, ce qui est dû, suivant M. Cl. Bernard, à une réaction des DIGESTION. 125 aliments restés dans les interstices des dents. Elle agit comme dissolvant sur les chlorures, les phosphates et les sulfates alcalins contenus dans les aliments divisés par la mastication ; mais son action est surtout importante sur les substances féculentes qu’elle transforme en dextrine et en glycose, selon Leuchs, par l’intermédiaire d’un fer- ment particulier, auquel M. le docteur Mialhe, dont les travaux ont jeté une vive lumière sur ce sujet, a donné le nom de diastase animale, et que l’on désigne aussi sous celui de ptyaline. La salive est sans action sur les corps gras, les huiles, le beurre, les aliments azotés. En résumé, le rôle de la salive se borne à l’humectation du bol alimen- taire, à son action dissolvante et à l’influence toute spé- ciale qu’elle exerce sur les matières amylacées. Selon les expériences de M. Cl. Bernard, la salive n’a plus la propriété de modifier l’amidon, lorsqu’elle est acide. Action des aliments dans l’estomac. 127. — Ainsi modifiées par l’insalivation, les sub- stances alimentaires parviennent dans l’estomac (UU), où elles donnent lieu, par leur contact avec la muqueuse de cet organe, à la présence d’un liquide particulier, que l’on désigne sous le nom de suc gastrique; car, pendant l’abstinence, l’estomac ne contient pas de suc gastrique proprement dit, les liquides qui l’humectent n’étant pas acides. 126 DIG£bTION. Suc gastrique. 128. — Le suc gastrique est sécrété par une multi- tude de petites glandes appelées follicules gastriques; suivant M. Cl. Bernard, il est le produit de la perspira- tion des capillaires sanguins à travers les corpuscules deGruby. Ce liquide est clair, limpide, d’une teinte lé- gèrement ambrée, d’une saveur à la fois un peu salée et acidulé ; sa densité est un peu plus forte que celle de l’eau. 11 contient une substance organique azotée fort analogue aux matières albuminoïdes, la pepsine, que l’on désigne aussi sous le nom de chymosine et de gas- térase, un acide libre, Y acide lactique, des sels, tels que le chlorure de sodium, de potassium, d’ammonium, et des phosphates de chaux en petite quantité. 100 parties de suc gastrique renferment 1,25 de pepsine et 1,75 de substances salines ; le reste se compose d’eau et d’acide lactique. La pepsine, dans le travail digestif, agit à la manière d’un ferment; c’est à l’action simultanée de la pepsine et de l’acide lactique que le suc gastrique doit les propriétés qui lui font jouer un rôle si important dans les phénomènes de la digestion. Sous l’action de la chaleur, le suc gastrique développe une odeur de bouillon ; soumis à une température de -f- 50°, il se trouble et perd ses propriétés digestives, DIGESTION. 127 L’alcool en sépare la pepsine, qui se précipite à l’état neutre. L’acide tannique, la créosote et quelques autres corps précipitent la pepsine et lui font perdre son influence catalytique sur les substances azotées gonflées par les acides. Il n’en est pas ainsi des sels métalliques qui pré- cipitent la pepsine, tels que les sulfates, les nitrates et les chlorures ; car, en la séparant de ces sels, on fait re- paraître ses propriétés. L’acidité du suc gastrique est constante, quels que soient l’âge de l’animal, son espèce et le genre de nour- riture dont il fait usage ; mais les proportions d’acide varient suivant la nature de l’alimentation, et elles sont généralement plus considérables quand les aliments sont plus chargés de principes amylacés. Par ses pro- priétés acides, le suc gastrique réagit sur les carbonates alcalins et sur la limaille de fer. La pepsine n’a d’action sur les substances alimentai- res qu’autant qu’elle est unie à un acide ; le suc gastri- que, par son acide, ne fait que ramollir et gonfler ces substances (les substances animales surtout), la pepsine seule en opère la liquéfaction par action catalytique. L’acide lactique n’est pas le seul acide capable de dé- terminer la digestion ; car l’action de la pepsine acidulée par les acides chlorhydrique ou acétique peut encore se produire ; mais la digestion n’est jamais aussi complète qu’avec l’acide lactique. 128 DIGESTION. La question de l’acidité ou de la neutralité du suc gastrique, au moment de sa sécrétion, divisait depuis longtemps les physiologistes; M. Boudault, dans un Mé- moire lu récemment à la Société de Pharmacie de Pa- ris , paraît avoir résolu ce problème. 11 résulterait en effet, des expériences auxquelles M. Boudault s’est livré, que la pepsine est sécrétée à l’état neutre, et que c’est sous l’influence de l’action fermentifère de cette sub- stance que se développe l’acidité du suc gastrique. La sécrétion du suc gastrique est provoquée par les aliments ; elle se produit aussi sous l’influence des sub- stances non alibiles, mais en moindre quantité. Comme la salive, le suc gastrique est un liquide récrémentitiel qui rentre dans le sang par les voies de l’absorp- tion. La quantité de suc gastrique sécrétée est très-proba- blement en rapport avec celle des aliments à dissoudre; elle diminue sans doute aussi à mesure que s’opère cette dissolution ; elle est considérable d’ailleurs, car MM. Bid- der et Schmist l’ont évaluée à plus de 500 grammes dans l’espèce humaine. D’après les expériences de M. Blondlot, le sucre, le poivre et divers autres condiments augmentent l’afflux du suc gastrique. Il en est ainsi des impressions vives et agréables sur le sens du goût, qui excitent à la fois la sécrétion salivaire et celle du suc gastrique. La sécrétion du suc gastrique est retardée ou diminuée DIGESTION. 129 par les acides; les alcalis faibles, au contraire, la provo- quent et l’avivent. Suivant M. Cl. Bernard, la chaleur modérée n’a pas d’action bien sensible sur la sécrétion du suc gastrique; mais une forte chaleur produit des effets funestes. Le froid la diminue d’abord, mais lorsque la réaction se produit, elle devient plus abondante ; il en est ainsi de l’eau à k ou 5°. Certains états fébriles, l’anorexie, ou l’embarras gas- trique, suspendent plus ou moins cette sécrétion. Action du suc gastrique. 129. — Le suc gastrique, comme nous venons de le dire, par l’acide lactique qu’il contient, a pour usage de ramollir et de gonfler les substances alimentaires azo- tées, et sous l’influence de la pepsine, d’en opérer la dissolution par aclion de contact ou catalytique. Le suc gastrique non-seulement se putréfie très-difficilement, mais encore il suspend la putréfaction des matières ani- males. Substances attaquées par le suc gastrique. 130. — Les substances alimentaires que le suc gas- trique est susceptible de dissoudre sont : la fibrine, le gluten, l’albumine coagulée, l’albumine liquide, la géla- 130 DIGESTION. tine, la caséine, lesquelles sont métamorphosées en une substance identique, dont la composition chimique est semblable aux matières albuminoïdes d’où elles provien- nent. C’est ce produit que M. Lehmann a désigné sous le nom àepept,one,Qt auquel M. Mialhe donne celui d'al- buminose. Substances inattaquées par le suc gastrique. 131.—Les substances inattaquées par lesuc gastrique sont les corps gras, l’huile, l’amidon, la gomme, la pec- tine et le sucre. Cependant si le suc gastrique n’a pas d’action sur les corps gras, il en prépare la digestion en dissolvant leur enveloppe albuminoïde ; en oulre, lors- que le sucre reste longtemps en contact avec le suc gas- trique, il se forme de l’acide lactique et de l’acide acé- tique, ce qui d’ailleurs a lieu aussi avec les matières albuminoïdes. Les substances inorganiques solubles dans l’eau, tel- les que les chlorures, phosphates, sulfates alcalins, le sont aussi dans le suc gastrique. Le phosphate de ma- gnésie, les sels de chaux, de fer, etc., peu ou point so- lubles, le deviennent dans le suc gastrique, grâce à son acidité. Les phénomènes dus à l’action du suc gastrique ont lieu dans l’estomac; néanmoins ce fluide, charrié avec les aliments, parcourt tout l’intestin. DIGESTION. 131 Chyme. 132. — Quoique les modifications que subissent les substances alimentaires dans le travail digestif de l’es- tomac, donnent lieu à des produits bien distincts, nous conservons néanmoins, quant à présent, l’ancienne dé- nomination de chyme à l’espèce de pulpe ou bouillie en laquelle paraissent transformées ces substances. Cette bouillie, plus ou moins homogène, est visqueuse au tou- cher, d’une couleur blanche, sale ou grisâtre, varia- ble , d’ailleurs, selon la nature des aliments introduits dans l’estomac, et dont la composition, par conséquent, ne peut être rigoureusement établie, Le chyme a une odeur fade et nauséabonde et une saveur douceâtre et acide qu’il doit aux transformations qu’ont subies les aliments et à la présence des acides développés pendant le travail digestif. L’élaboration du chyme a une influence des plus ma- nifestes sur les phénomènes ultérieurs de l’acte digestif; aussi est-ce avec juste raison que, dans tous les temps, on a considéré la digestion Stomacale comme une des fonctions les plus importantes de l’économie. Action des aliments dans le duodénum. 133. — La sécrétion que sollicitent les substances 132 DIGESTION. alimentaires dans l’estomac est donc des plus essentiel- les; néanmoins, le rôle de ces substances est loin d’être terminé; car leur présence, à l’état de chyme, dans l’intestin grêle, donne lieu à des excitations qui déter- terminent l’écoulement de fluides nouveaux. Et d’ail- leurs, comme nous venons de le voir, si la plupart des matières alimentaires ont subi les modifications les plus importantes, il en est cependant qui échappent à l’influence élaboratrice des organes et des liquides que nous venons d’étudier; or, c’est sur ces dernières que les fluides appelés dans l’intestin exercent leur action, en même temps que sont complétées les transformations des matières déjà si profondément modifiées par la sa- live et le suc gastrique. Le contact des substances alimentaires dans la pre- mière partie des intestins grêles, c’est-à-dire dans le duodénum (kk), donne lieu à l’épanchement de deux li- quides principaux, le suc pancréatique, que sécrète la glande pancréas, et la bile, dont la sécrétion se fait dans le foie. Suc pancréatique. 13k — Le suc pancréatique est un liquide incolore, visqueux, gluant, limpide, d’une saveur un peu salée, constamment alcalin, et qui se coagule en masse sous l’influence de la chaleur, des acides énergiques, de l’al- DIGESTION. 133 cool, etc. Il doit la propriété de se coaguler à une sub- stance analogue aux matières albuminoïdes, et que l’on a nommée pancréatine. Cette matière active du suc pancréatique, lorsqu’elle est coagulée par la chaleur ou l’alcool, est redissoute par l’eau, ce qui la distingue de la caséine. Le suc pancréatique s’altère rapidement; il laisse déposer alors des grains blancs formés de sulfate de chaux en aiguilles, répand l’odeur hydro-sulfurique et perd sa viscosité. Le suc pancréatique s’écoule du pancréas dans le duodénum par un canal divisé en deux branches; l’une, petite, a son orifice dans le duodénum, plus près de l’estomac que l’autre, et fait parvenir dans l’intestin le suc pancréatique à l’état de pureté ; la plus grosse a son orifice au niveau de celui du canal cholédoque (conduit biliaire), de sorte que le suc pancréatique et la bile se mêlent au moment de leur arrivée dans le duodénum. Action du suc pancréatique. 135. — Le suc pancréatique exerce une action spé- ciale sur les corps gras. Il agit aussi sur les substances féculentes et sur les matières albuminoïdes qui ont échappé à l’action du suc gastrique ; mais ce liquide a pour propriété essentielle d’émulsionner les corps gras, c’est-à-dire de les diviser en particules d’une ténuité extrême, ce qui les rend aptes à être absorbés par les 134 DIGESTION. chylifères. Cette propriété, suivant M. Cl. Bernard, se- rait due à la présence d’un ferment spécial, tandis que, d’après quelques chimistes, et selon M. Mialhe en parti- culier, ce ne serait pas sous l’influence d’un ferment, mais bien par une réaction alcaline qu’elle se manifes- terait. Quoi qu’il en soit, le suc pancréatique a bien évi- demment la propriété de dédoubler les graisses neutres, butyrine, oléine, margarine, stéarine, en glycérine et en acide libre, acides butyrique, oléique, etc. Le suc pancréatique exerce sur les substances fécu- lentes une action analogue à celle de la salive, mais bien plus rapide, c’est-à-dire qu’il transforme en dextrine et en glycose celles de ces substances qui ont échappé à l’action de la salive, propriété qui, toutefois, est contestée, quoique bien à tort, par plusieurs phy- siologistes. Au reste, les travaux de M. Cl. Bernard font, à tant de titres, autorité dans la science, que nous croyons de- voir reproduire ici les conclusions des belles expérien- ces de ce savant sur les fonctions du pancréas : « 1o Le suc pancréatique alcalin agit sur toutes les matières descendues de l’estomac ; « 2° 11 émulsionne les matières grasses et les rend aptes à être absorbées ; « 3° Il transforme la fécule en sucre ; « k° Enfin il agit sur les matières azotées, soit sur celles qui n’avaient pas été dissoutes par le suc gastri- DIGESTION. 135 que, soit sur celles qui, après avoir été dissoutes par ce fluide, ont été précipitées de nouveau par la bile.; ■ « En outre, le suc pancréatique a la propriété d’aci- difier la graisse. » 11 résulte de ces expériences, que Faction du pancréas n’est pas limitée à une seule classe de matières, mais qu’elle s’étend à toute espèce d’aliments végétaux et animaux. Comme on le voit, l’action du suc pancréatique dans les phénomènes de la digestion est des plus impor- tantes. Les expériences faites sur les animaux dans le but de suspendre plus ou moins complètement l’écoule- ment de ce liquide, ont déterminé l’indigestibilité des corps gras et leur expulsion dans les déjections, sans qu’ils aient été altérés, et de plus ont amené l’amaigris- sement progressif et la mort. Des expériences toutes récentes faites par M. Colin et répétées par M. Bérard, tendraient à infirmer les résul- tats obtenus par M. Cl. Bernard, dans ses recherches sur les fonctions du pancréas. Nous croyons, néanmoins, que jusqu’à plus ample informé, on doit conserver à cet organe les usages si bien déterminés par M. Cl. Bernard; car si, dans les expériences de M. Colin, le chyle s’est présenté émulsionné, quoique le suc pancréatique ait été détourné de l’intestin , n’en peut-on pas conclure que le pancréas, comme bien d’autres organes, peut être suppléé dans certaines circonstances ? La sécrétion 136 DIGESTION. biliaire et celle que fournissent les glandes si nombreu- ses de l’appareil digestif, pourraient offrir des argu- ments propres à soutenir cette interprétation. Bile. 136. — La bile exerce aussi une influence manifeste sur les phénomènes digestifs ; mais son action est com- plexe, comme nous le verrons plus loin. Ce liquide, sé- crété ou excrété par le foie, est accumulé dans la vési- cule biliaire (hh), d’où il s’écoule dans le duodénum par le canal cholédoque, dont l’orifice, comme nous l’avons dit, se confond avec celui du canal pancréatique le plus volumineux. La bile est une matière particulière, liquide, amère, d’une couleur brune -verdâtre, savonneuse. « Cette hu- meur est alcaline chez les herbivores et les omnivores pendant la digestion, et acide lors de la vacuité de l’in- testin. Elle est toujours acide chez les animaux carni- vores. » (M. Cl. Bernard.) Les éléments qu’elle renferme sont très-variés. Les principaux sont Yacide cholique et Y acide choléique, qui diffère du premier en ce qu’il contient du soufre. Il existe, en outre, dans la bile, des matières grasses neutres, la cholestérine, l’oléine, la margarine, des mucus, des sels minéraux , chlorure de sodium, phosphates alcalins et terreux, etc. DIGESTION. 137 Action de la bile. 137. — Quoiqu’il nous paraisse très-probable que la bilen’est qu’un produitexcrémentitiel éliminédans le tra- vail si important du foie, néanmoins, comme la nature met tout à profit dans l’organisme, la bile est utilisée, et ainsi que nous l’avons dit, a même des usages com- plexes. En présence dans le duodénum dès le début de la digestion stomacale, la bile se mêle au chyme et concourt avec le suc pancréatique à émulsionner les corps gras, à transformer les féculents en glycose, et, en même temps que les divers liquides digestifs, à dis- soudre les autres matières de l’alimentation ; mais, en outre, cette humeur, par son mélange avec les divers produits de la digestion gastrique et intestinale, opère, selon le docteur Billing, sur la masse qui les constitue, une sorte de clarification, à la manière du blanc d’œuf à l’égard de certains liquides, et en sépare les parties excrémentitielles en se confondant avec elles ; elle sti- mule la force absorbante des chylifères et des veines mésentériques, active le mouvement péristaltique des intestins et facilite ainsi le parcours des matières excré- mentitielles dans les voies intestinales, et par suite, leur expulsion ; de plus, selon certains auteurs , elle serait douée de propriétés antiputrides et s’opposerait a la fermentation, ainsi qu’au trop grand développement des 138 DIGESTION. gaz intestinaux; enfin, quelques-uns de ses éléments sont absorbés et rentrent dans la circulation. Suc intestinal. 138. — Outre les liquides dont nous venons de nous occuper, il en est d’autres qu’exhale la muqueuse intes- tinale et dont les usages sont variés. Confondus sous le nom de suc intestinal, ces fluides seraient le résultat de la sécrétion des follicules ou glandes de Lieberkuhn, ou un produit perspiratoire exhalé par les artères des in- testins. Le suc intestinal est légèrement alcalin dans tout le parcours de l’intestin grêle, mais la réaction al- caline ou acide des matières alimentaires dans cette por- tion du tube digestif dépend particulièrement de la na- ture de ces matières. Le suc intestinal est sécrété avec plus ou moins d’a- bondance, selon le degré d’excitabilité propre des ma- tières alimentaires, selon la quantité de bile qu’elles contiennent ou les modifications qu’elles ont subies. Action du suc intestinal. \ 39. — Le suc intestinal paraît avoir une influence semblable à celle de la salive et du suc pancréatique sur les substances féculentes; il émulsionne aussi les graisses, mais à un bien moindre degré. DIGESTION. 139 Il s’écoule, en outre, à la surface intestinale un autre fluide, mucus intestinal, qui a surtout pour propriété de protéger la membrane muqueuse contre l’action trop irritante des substances alimentaires. Résultat ultime des fonctions digestives. 160. — Tels sont, d’après les analyses chimiques, les divers fluides mis en mouvement par la présence des aliments dans les voies digestives. Mais, quoique dans les phénomènes naturels de la digestion, ces fluides n’agissent pas isolément et que très-probablement de leur action simultanée résultent des modifications in- connues, néanmoins, dans le laboratoire du chimiste comme dans l’organisme, les actions et les réactions qui se produisent en ces circonstances se résument particu- lièrement à ce dernier terme : la dissolution, par les sucs digestifs, des éléments nutritifs contenus dans les sub- stances alimentaires. Les diverses phases de la diges- tion ont donc pour but la dissolution des aliments, seule forme sous laquelle les fluides digestifs puissent s’empa- rer des éléments nutritifs, et en leur servant de véhi- cule, leur donner, pour ainsi dire, droit de domicile dans l’économie. En d’autres termes, l’acte digestif a pour résultat ultime le premier degré de transformation par lequel les principes nutritifs incorporés dans des fluides appartenant déjà à l’économie commencent à 140 DIGESTION. faire partie de l’organisme, c’est-à-dire constituent le liquide nutritif auquel on a donné le nom de chyle. Chyle. 141. — Des diverses actions que subissent les sub- stances alimentaires, féculents, corps gras, matières al- buminoïdes, dans l’estomac et dans la première portion de l’intestin grêle, résultent en réalité trois liquides que l’on peut désigner sous le nom de chyle glycosique, chyle graisseux et chyle albuminosique, et qui, à l’état de mélange dans l’intestin, constituent un liquide homo- gène en apparence, que l’on désigne sous le nom de chyle. Cependant, quoique les veines se chargent d’une partie du chyle dans le travail de l’absorption digestive, comme il n’est possible d’obtenir ce fluide à l’état à peu près pur que dans un ordre particulier de vaisseaux, le chyle proprement dit est le liquide qui circule lors de l’absorption des produits digestifs dans les vaisseaux dits chylifères. C’est donc ce fluide seul que nous pouvons étudier. Le chyle est un liquide blanc, opaque, lactescent, d’une saveur salée, alcaline, et d’une odeur particulière. 11 est plus clair chez les herbivores que chez les carni- vores. La couleur et l’opacité du chyle sont d’au- tant plus prononcées que ce fluide provient d’aliments plus riches en matières grasses; l’une et l’autre dépen- DIGESTION. 141 dent d’ailleurs des particules de graisse qu’il contient à l’état de division extrême. Cependant il renferme en outre des granulations analogues à celles que l’on trouve dans la lymphe; ces granulations ou glob-ulins sont plus petits et bien moins nombreux que dans le sang; ils sont en outre incolores. Très-probablement les globules du sang tirent leur origine de ces granulations, ainsi que de celles de la lymphe. Le chyle est peu coagulable, aussi ne contient-il qu’une très-faible quantité de fibrine ; mais se- lon MM. Tiedemann et Gmelin, il le devient, et cette coagu- bilité augmente même à mesure qu’il avance dans le sys- tème lympathique. C’est ainsi qu’il est complètement coa- gulable au-delà des ganglions mésentériques, et surtout dans le canal thoracique, où il prend une teinte rosée, propriété qu’il doit en grande partie à la lymphe avec laquelle il est alors mélangé, de même que c’est, sans aucun doute, par son mélange avec ce fluide qu’il ac- quiert la petite quantité de fibrine qui le rend coagu- lable. Les diverses analyses sur la composition du chyle laissent à désirer, en ce qu’elles ont eu lieu sur du chyle mélangé de lymphe; cependant, comme l’état chimique de ce fluide offre un intérêt particulier, nous reprodui- sons l’analyse du chyle de l’homme, faite par Rees. 142. — Composition du chyle: Eau 904 Fibrine traces 142 DIGESTION. Albumine 70 Matières grasses 9 Matières extractives et sels 1 h La composition chimique du chyle offre beaucoup d’analogie avec celle du sang; toutefois le chyle diffère du sang par sa couleur, par la forme et le volume de ses globules, par sa moindre proportion en parties solides ; enfin en ce qu’il contient des matières grasses à l’état libre. Produits digestifs dans le gros intestin. 143.— Les produits digestifs, après avoir terminé leur trajet dans l’intestin grêle, entrent dans le gros intestin. Dans le cæcum, ces produits reprennent le caractère acide, que leur communique, suivant M. Cl. Bernard, l’acide lactique développé sous l’influence des altéra- rations et des transformations successives qu’ont subies les matières féculentes. C’est dans le cæcum que les produits de la digestion arrivent à l’état d’excréments; ils acquièrent alors une plus grande consistance et une coloration plus foncée , par suite de l’activité de l’ab- sorption des liquides et des substances incolores. Dans le colon, les matières excrémentitielles perdent peu à peu leur acidité et redeviennent alcalines, sous l’influence de la sécrétion du système glandulaire, qui se rapproche de celle de l’intestin grêle. Les matières excrémenti- FONCTIONS DE LA PEAU. 143 tielles sont composées des résidus des diverses substan- ces alimentaires, tels que : le ligneux, les parties graisseuses excédantes, les tissus épidermiques, la ma- tière colorante des végétaux, enfin toutes les matières de l’alimentation réfractaires aux actes digestifs; elles contiennent aussi les diverses sécrétions intestinales. IY. PEAU. — FONCTIONS DE LA PEAU. Action des agents extérieurs sur la peau. — Respiration insensible ou perspiration cutanée. — La peau absorbe de l’oxygène et exhale de l’acide carbonique. — La suppression de la perspira- tion cutanée détermine l’asphyxie. — Transpiration ou sueur.— Conditions qui influencent les fonctions cutanées. Action des agents extérieurs sur la peau. 1Z|Z|. — La peau, comme nous l’avons vu (53), est une membrane protectrice étendue sur toute la surface du corps. Les influences extérieures qu’elle subit dans l’état normal, se bornent particulièrement à l’action de l’air atmosphérique et de la température. Mais la part qui lui est faite n’en est pas moins fort importante, puisque de la régularité avec laquelle elle accomplit les fonctions qui lui sont dévolues, dépend cet équilibre gé- néral qui harmonise les différents actes de la nutri- tion. 144 FONCTIONS DE LA PEAU. Respiration insensible ou perspiration cutanée. ] 45. — Pour bien nous rendre compte de l’action de l’air atmosphérique sur l’enveloppe cutanée , nous de- vons faire observer que cette membrane, dans l’accom- plissement de ses fonctions, offre une analogie des plus évidentes avec la muqueuse pulmonaire. Aussi a-t-on désigné les fonctions de la peau sous le nom de respira- tion insensible ou perspiration cutanée. En effet, sous le contact de l’air atmosphérique, la peau absorbe de l’oxygène et exhale de l’acide carbonique , en quantité fort minime, il est vrai, soit pour l’absorption de l’un ou l’exhalation de l’autre; puisque le sang, qui de la peau est reporté vers le cœur, n’en a pas moins les ca- ractères du sang veineux. Toutefois, cette source d’oxy- génation et de décarbonisation du sang a une valeur qu’il est nécessaire de constater, car de cette propriété résulte précisément une des conditions qui donnent lieu de comprendre l’importance des fonctions de l’enveloppe cutanée dans les phénomènes de la nutrition. Par des expériences nombreuses, il a été démontré que la suppression de la perspiration cutanée a déter- miné l’asphyxie, dans un espace de temps relativement assez court, autant peut-être en privant le sang de la quantité d’oxygène qu’il reçoit par cette voie, que par proportion d’acide carbonique dont il n’est pas dé- FONCTIONS DE LA. PEAU. 145 barrassé. Au reste, si la peau ne peut suppléer les poumons, elle leur vient en aide dans une des parties de l’organisme, au moins dans sa substance propre, où les capillaires, en raison de leur ténuité extrême, de leur emprisonnement dans des tissus très-denses et sou- mis à l’action immédiate des corps extérieurs, sont moins aptes à ressentir les influences auxquelles obéis- sent les capillaires des tissus profonds de l’économie. L’oxygénation et la décarbonisation du sang par la peau sont soumises aux diverses influences que subit l’acte respiratoire pulmonaire, mais à des degrés bien moindres, en raison de la nature du tissu qui constitue l’appareil cutané et des modifications imprimées à ce tissu par l’âge, par le contact incessant des agents externes, etc. Transpiration ou sueur. 146. — Mais à cette oxygénation et à cette décarboni- sation du sang ne se bornent pas les fonctions de la peau. La perspiration cutanée est surtout remarquable par une exhalation de vapeur d’eau qui s’effectue incessam- ment. La quantité d’eau ainsi dégagée du corps est con- sidérable ; elle a été évaluée en moyenne à 1 kilogramme en 24 heures* Aussi la peau, à cet égard, l’emporte sur les poumons, car ces organes ne font perdre à l’écono- 146 FONCTIONS DE LA PEAU. mie que h ou 500 grammes d’eau pendant la même du- rée de temps. Lorsque, sous diverses influences, l’exha- lation par la peau s’opère sous la forme liquide, elle constitue la transpiration ou sueur; or, sous cette forme, la quantité d’eau que perd l’organisme peut être portée à des proportions très-élevées. Conditions qui influencent les fonctions cutanées. La perspiration cutanée est variable suivant la tem- pérature et l’état hygrométrique de l’air; elle est donc soumise aux influences des saisons et des climats. Elle varie selon la température du corps acquise par l’ali- mentation, par la quantité et l’espèce de boissons dont l’homme fait usage, et selon qu’il se livre à l’exercice ou au repos. Elle est encore variable relativement à l’âge des individus, car on a observé que dans l’enfance la perspiration cutanée est plus active que dans la vieil- lesse, où, au contraire , la sécrétion urinaire prédo- mine. Nous bornons ici ces considérations sur les fonctions de la peau, l’étude de l’absorption et des sécrétions nous donnant lieu de les rendre plus complètes. CHAPITRE HUITIÈME. ABSORPTION. Définition et division cTe l’absorption. — Mode d’absorption. — Imbibition. — Endosmose. — Caractère du mouvement d’ab- sorption. — Causes qui modifient l’absorption. — Absorption dans les poumons. — Absorption dans les intestins. — Forme sous laquelle sont absorbées les matières alimentaires. — Vais- seaux par lesquels s’opère l’absorption intestinale. — Différence dans la propriété d’absorption des vaisseaux chylifères et des veines mésentériques. — Conclusions. — Absorption cutanée. — Influences qui modifient cette absorption. — Absorption dans les glandes et dans les cavités closes. — Absorption interne ou de décomposition. 147. —Jusqu’alors nous n’avons, pour ainsi dire, considéré l’action des corps extérieurs qu’à la surface externe de l’organisme ; maintenant nous allons étudier le mode par lequel ces corps, plus ou moins modifiés par les réactions organiques, pénètrent dans l’intimité de l’économie, c’est-à-dire la fonction vitale, que l’on désigne sous le nom d'absorption. Définition et division de l’absorption. L’absorption est cette propriété de l’organisme, par laquelle les corps extérieurs pénètrent dans la substance des tissus et sont assimilés à leur nature. L’absorption 148 ABSORPTION. s’effectue sur les corps gazeux ou liquides placés à la surface comme dans la profondeur de nos organes. Aussi l’absorption est-elle divisée en absorption externe ou de composition et en absorption interne ou de dé- composition. L’absorption externe ou de composition, s’opère par les muqueuses respiratoire, intestinale et par la peau ; elle a pour but de puiser hors des organes, les maté- riaux destinés à leur composition ; de là la dénomina- tion d'absorption pulmonaire, d’absorption intestinale et d?absorption cutanée. L’absorption interne ou de décomposition réside dans l’ensemble du travail organique par lequel sont extraits des tissus les matériaux destinés à être excrétés et rem- placés. On la dit encore interstitielle ou de nutrition. MODE D’ABSOBPTION. Imbibition. — Endosmose. 1 Zi8. — Deux lois physiques président au mécanisme des absorptions : l’imbibition et l’endosmose, lesquelles sont activées par la pression. C’est sous leur influence que s’opère l’absorption aux membranes muqueuses , pulmonaire et intestinale, à la peau et dans les cavités closes; car les parties animales humides, spécialement les membranes, sont perméables aux substances liquides ABSORPTION. 149 et gazeuses. Toutefois il résulte des expériences de M. Cl. Bernard, que l’absorption est soumise à la cou- che épithéliale qui tapisse les membranes, en vertu du phénomène vital par lequel cette couche se détruit et se renouvelle. Le rôle de cet épithélium consiste, d’une part, à limiter l’imbibition, et d’une autre part, à s’op- poser à la sortie des liquides intérieurs. Il suffit de la plus légère modification dans la destruction et le renou- vellement de la couche épithéliale pour changer com- plètement les règles normales du travail physiologique de l’absorption. En effet, si cette couche est détruite, le phénomène physique d’exosmose aura lieu tel qu’il se passe au-dehors de l’organisme; si, au contraire, l’é- pithélium est intact, l’absorption alors s’effectuera sous l’influence de l’action vitale et n’appartiendra plus aux phénomènes physiques. Caractère du mouvement d’absorption. 1ô9.— Au reste, quel que soit le mode d’absorption, les capillaires sanguins et lymphatiques, n’offrant pas d’ouvertures béantes, les liquides n’y pénètrent que par une filtration qui exige toujours un temps généralement assez long pour introduire une certaine quantité de li- quide dans le sang. Or, le caractère du mouvement d’absorption est la lenteur ; mais il faut, en outre, qu’il s’exécute à l’égard des substances à absorber, d’une ma- 150 ABSORPTION. nière successive et dans des proportions qui ne dépassent pas les appels du sang. C’est en raison de cette lenteur, que des substances alimentaires en quantité excédante sont rejetées au-dehers, sans avoir été complètement dépouillées de leurs principes alibiles. Mais c’est préci- sément aussi à cause de cette lenteur, que l’équilibre s’établit dans l’acte intime de la nutrition, à l’égard de la composition et de la décomposition des tissus. Causes qui modifient l’absorption. 150. —Diverses causes activent ou diminuent l’ab- sorption. Ainsi, la pression ou compression, par exem- ple, active l’absorption lorsque les capillaires vasculai- res sanguins ou lymphatiques ont perdu leur propriété contractile, et au contraire, elle la diminue, si elle est exercée sur un point du corps de manière à entraver la circulation. La pression diminuée ou supprimée peut encore entraver ou suspendre l’absorption; c’est ainsi qu’agit une ventouse appliquée sur un point de la peau atteinte par un virus. D’autres circonstances peuvent encore modifier l’ab- sorption ; telles sont : les proportions dans lesquelles certaines substances salines sont contenues dans les flui- des de l’économie, la quantité d’eau qu’ils renferment, toutes les causes débilitantes, les pertes de sang, l’ali- ABSORPTION. 151 mentation insuffisante, l’abstinence, etc., lesquelles ex- citent les propriétés d’absorption des tissus. Les diverses absorptions ont aussi réciproquement de l’influence les unes sur les autres. Ainsi, les modifica- tions survenues dans l’absorption intestinale auront du retentissement sur les absorptions pulmonaire, cutanée, et réciproquement. Comme il est facile de le comprendre, l’absorption joue un rôle très-important dans les phénomènes de la nutrition, et l’étendue de ses relations dans l’économie en rend l’étude indispensable pour éclairer les causes et la nature des maladies, ainsi que pour rechercher les moyens propres à les combattre. Absorption dans les poumons. 151. —L’absorption s’opère dans les poumons par l’intermédiaire de la membrane muqueuse qui tapisse la surface externe des bronches (42), et sur cette mem- brane au moyen des vaisseaux qui la parcourent. Cette muqueuse est pourvue d’un épithélium à cils vibratiles doués de mouvements toujours dirigés dans le même sens, poussant toujours de l’intérieur à l’extérieur; dis- position physiologique qui a pour but de modérer l’ab- sorption si active dans les poumons. Outre l’air atmosphérique, les poumons absorbent aussi des vapeurs de toute espèce ; c’est ainsi que, par 152 ABSOIîPTION. la respiration, sont introduites dans l’économie, les va- peurs d’éther, de chloroforme, d’alcool, des gaz, enfin une foule de substances volatiles. Les liquides sont aussi absorbés avec beaucoup d’énergie par les pou- mons. Chez les animaux, ce genre d’absorption s’effec- tue encore plus énergiquement ; M. J. Béclard a pu injecter impunément dans la trachée des chiens et des lapins 30, 40 et 80 grammes de liquide. C’est par la voie des poumons que des gaz délétères, que les miasmes marécageux et autres pénètrent dans l’organisme. Absorption dans les intestins. 152. — L’absorption intestinale a pour but l’introduc- tion dans le torrent de la circulation, des produits dis- sous de la digestion. L’absorption, dans le tube diges- tif, ne s’effectue pas également dans chacune des par- ties de ce canal. Dans la bouche et dans l’æsophage, le bol alimentaire ne perd guère que quelques mini- mes proportions d’eau et de sels en dissolution. Dans l’estomac, c’est sur l’eau, sur les sels solubles dans le suc gastrique, sur l’albumine liquéfiée, sur le sucre produit par la digestion des matières amylacées que l’absorption a lieu. Il en est ainsi dans l’intestin grêle, pour les mêmes matières que l’estomac n’a point absor- bées ; mais en outre cet intestin absorbe les matières ABSORPTION. 153 grasses et d’autres produits secondaires formés dans le travail digestif de l’estomac et de l’intestin grêle lui- même. L’absorption dans le gros intestin, comme nous l’avons déjà dit (UU), ne s’opère que sur le résidu des matières alimentaires qui, suivant les conditions d’absor- ption des organes précédents, ont conservé plus ou moins d’éléments nutritifs. Toutefois, quoique l’absorption du produit de la diges- tion s’effectue dans toutes les parties du canal digestif, depuis le cardia jusqu’à l’anus, c’est particulièrement dans l’intestin grêle que réside sa plus grande activité. Au reste, la faculté de l’absorption du tube intes- tinal est limitée, elle est en rapport avec la quantité de substances alimentaires que le travail digestif a mises dans les conditions exigées pour l’absorption, c’est-à- dire dissoutes, aussi lorsque celte quantité est excédante, elle est rejetée par les fèces. Forme sous laquelle sont absorbées les matières alimentaires. 153. — La forme sous laquelle les matières alimen- taires sont absorbées, varie selon leur nature : Les aliments féculents rendus solubles par leur trans- formation en dextrine et en glycose ou sucre de raisin, sont absorbés sous celte dernière forme. Valbumine liquide est absorbée en nature; 154 ABSORPTION. « Les aliments albuminoïdes solides, tels que la fi- brine', la caséine, l’albumine coagulée sont absorbés à l’état de peptone (albuminose). Mais en présence du sang, la peptone, qui ne diffère pas sensiblement de l’albumine sous le rapport de la composition, se trans- forme promptement en albumine. » (M. J. Béclard.) Les corps gras neutres, tels que les graisses, l’huile, le beurre, sont absorbés en nature ; ils sont seulement émulsionnés par les sucs digestifs et très-particulière- ment, comme l’a démontré M. CL Bernard, par le suc pancréatique. Les substances inorganiques, qui sont solubles dans l’eau, telles que les chlorures, les phosphates et les sul- fates alcalins, sont absorbées sous leur forme propre. Quant aux sels peu solubles ou insolubles, les sels de fer, de chaux, de magnésie, l’absorption s’en effectue sous l’influence du suc gastrique. Pour les boissons, telles que le vin, la bière, le cidre, le poiré, dans la composition desquelles il entre de l’al- cool, des matières organiques, salines, et de l’eau, elles sont absorbées en partie en nature par l’intermédiaire de l’eau, et probablement en partie, sous les métamor- phoses que subissent les substances qu’elles contiennent selon la nature azotée ou non azotée de ces substances. Toutefois, on ne connaît pas encore d’une manière positive, les modifications qu’elles peuvent subir, sous l’influence du suc gastrique. ABSORPTION. 155 Vaisseaux par lesquels s’opère l’absorption intestinale. 15è. — L’absorption intestinale s’opère par deux or- dres de vaisseaux, les vaisseaux chylifères et les radi- cules des veines mésentériques. Les vaisseaux chylifères pompent une portion du chyle dans le tube intesti- nal, verse ce chyle dans le canal thoracique où ce li- quide se mêle avec la lymphe et est porté par ce canal à son point de réunion avec la veine sous-clavière gauche dans le sang veineux, cl’où il passe dans la veine cave supérieure, pénètre dans le cœur droit et est lancé dans les poumons. Les veines mésentériques absorbent l’autre partie du chyle, charrient ce liquide avec le sang qu’elles contiennent dans la veine-porte, laquelle le verse dans le foie, puis il est saisi par les veines sus-hépatiques et porté dans la veine cave inférieure qui le conduit dans le cœur droit où il se mêle avec le sang apporté par la veine cave supérieure, et de là est poussé dans les poumons. Différence dans la propriété d’absorption des vaisseaux chylifères et des veines mésentériques. 155. — C’est donc par deux ordres de vaisseaux que s’effectue l’absorption des produits de la digestion, mais non d’une manière identique, quant aux substances qui sont extraites du chyle. Ainsi les chylifères absorbent 156 ABSORPTION. particulièrement les matières grasses, tandis que les veines mésentériques les absorbent d’une manière à peine sensible. En outre, il résulterait des expériences de M. Lehmann que, chez les animaux nourris avec des substances végétales, le sucre se trouve en si faible quan- tité dans la veine-porte, que le dosage en est fort diffi- cile ; ce qui donnerait lieu de conclure que le sucre des féculents est particulièrement puisé par les chylifères dans le tube digestif. Les résultats de cette expérience paraissent complètement opposés à ceux que M. Cl. Bernard a obtenus, car voici ce que dit ce savant (Le- çons de physiologie expérimentale) sur les voies que suivent les produits digestifs : « Il semblerait qu’il faut d’après leurs organes d’absorption distinguer les pro- duits de la digestion en deux groupes : 1° les matières sucrées et albumineuses absorbées exclusivement par la veine-porte et traversant nécessairement le foie avant de parvenir au poumon ; 2° les substances grasses absorbées par les vaisseaux chylifères et arrivant dans le système veineux général et dans les poumons sans avoir préala- blement passé par le foie. » Cependant, de même que les anciens physiologistes, en attribuant aux chylifères exclusivement l’absorption des produits de la digestion, donnaient à ces vaisseaux un rôle exagéré, de même, aujourd’hui, ce serait aller trop loin que de ne leur accorder que l’absorption des ma- tières grasses. Aussi, il nous paraît fort probable que le ABSORPTION. 157 rôle des chylifères se rapporte à celui que jouent les au- tres vaisseaux lymphatiques, c’est-à-dire qu’ils pompent dans l’intestin, outre les matières grasses, ceux des produits de la digestion qui se prêtent le plus à la té- nuité de leur calibre, et qui répondent au mode de vi- talité ainsi qu’aux usages du système organique auquel ils appartiennent. Nous croyons donc que, d’après la composition du chyle des chylifères, il y a lieu d’admet- tre que ces vaisseaux doivent absorber, outre les ma- tières grasses, de la glycose et en très-faible quantité, des produits albuminoïdes. Bien évidemment, la plus grande partie des ma- tières albuminoïdes est absorbée par les veines. Mais ces vaisseaux, en outre, absorbent bien plus facilement les substances salines que les chylifères ; il en est en- core ainsi des matières colorantes dissoutes, telles que l’indigo, la cochenille, le tournesol, la gomme-gutte, etc., et des matières odorantes, comme le musc, le camphre, l’alcool etc. ; par conséquent, pour un grand nombre de substances médicamenteuses, ou pour certains poisons, les veines paraissent être plus particulièrement la voie par laquelle ces substances pénètrent dans l’organisme. 156. —Mais, outre ces différences entre le chyle des chylifères et celui des veines mésentériques, il en est d’autres qui résultent des usages auxquels est exclu- sivement destiné le chyle des veines mésentériques. Nous avons fait remarquer que le chyle intestinal ab- 158 ABSORPTION. sorbe par les veines mésentériques est versé dans le sang de la veine-porte et de là, conduit dans le foie; aussi, est-ce dans cet organe, dont les admirables tra- vaux de M. Cl. Bernard ont révélé le haut rang dans l’économie, que le chyle des veines méesntériques ainsi que le sang de la veine-porte subissent les modifications les plus remarquables et d’où découle une différence tranchée entre le chylequi arrive aux poumons par l’in- termédiaire des chylifères et celui qui parvient au foie par la voie des veines. Il résulte en effet des recher- ches expérimentales de M. Cl. Bernard, que le sang de la veine-porte subit dans le foie une élaboration spé- ciale sous l’influence de laquelle une partie des matiè- res dont ce sang est composé est transformée en sucre ou glycose, et qu’en même temps que s’est opérée cette métamorphose, le sang de la veine-porte a perdu toute la fibrine qu’il contenait et renferme beaucoup moins d’albumine. Aussi a-t-on tout lieu de croire que c’est aux dépens des matières albuminoïdes du sang de la veine porte que le sucre se produit; car on sait que l’alimen- tation exclusivement animale ne modifie pas la produc- tion du sucre dans le foie. Il a d’ailleurs été démontré, d’une manière péremptoire, par les expériences de M. Cl. Bernard, corroborées de tous points par celles de M. Lehmann que, chez les carnivores, le sang de la veine-porte ne contient pas de traces de sucre. ABSORPTION. 159 Conclusions. 457. — Au reste, en raison de l’admirable mécanisme qui constitue l’organisation de l’homme, ce ne peut être sans un but important que les produits digestifs subis- sent par les chylifères et par les veines mésentériques une double répartition. En admettant même contre tous les faits acquis par l’expérimentation que les chylifères et les veines absorbent un chyle identique, il n’en exis- terait pas moins des différences très-particulières entre les liquides que contiennent ces deux ordres de vais- seaux et des raisons puissantes pour ne pas les con- fondre, soit dans leur composition, soit dans les usages auxquels ils sont destinés dans l’organisme. En effet, nous ferons remarquer : 1° Que les chylifères renferment un liquide blanc, le chyle, ou tout à la fois, du chyle et de la lymphe (produit élaboré dans le système lymphatique), tandis que le chyle que contiennent les veines est mélangé avec du sang noir (sang altéré ou sinon modifié au moins dans le travail organique), etqu’ainsi sous ce simple rapport ces liqui- des sont déjà dissemblables ; 2° Que, chez l’animal à jeun, la nature du liquide que contiennent les chylifères et les qualités de celui que renferment les veines, en même temps que les différen- ces relatives à la composition des tissus de ces vais- 160 ABSORPTION. seaux, doivent avoir, en raison des lois endosmotiques, une influence particulière sur leurs facultés absorbantes et que, par conséquent, il y a déjà lieu d’admettre une absorption élective dans ces deux ordres de vais- seaux ; 3° Que les chylifères conduisent presque immédia- tement dans la circulation un chyle élaboré seulement par les ganglions mésentériques, tandis que les veines versent leur chyle dans la veine-porte qui le charrie dans le foie d’où il n’arrive dans la circulation qu’après avoir été profondément modifié ; k° Que si, par leur mélange dans l’appareil circula- toire, le sang blanc des chylifères et le sang noir des veines finissent par constituer un liquide unique, néan- moins, il n’est pas présumable que les matières dont l’un et l’autre sont composés puissent être amenées à un état identique dans les poumons ou dans les autres par- ties de l’organisme ; 5° Que d’ailleurs, la prédominance dans l’apport des matières de l’alimentation par les chylifères et celle qui résulte de l’excès des principes nutritifs que fournissent les veines, se révèlent d’une manière évidente par les modifications qui se manifestent dans la nutrition gé- nérale ; 6° Qu’ainsi, le sang qui a traversé les poumons par- ticipe des propriétés du liquide des chylifères et de ce- lui des veines ; ABSORPTION. 161 7° Que, par conséquent, des différences notables doi- vent distinguer l’absorption des produits digestifs par les chylifères et par les veines mésentériques, non-seule- ment à cause de la nature des substances nutritives que les chylifères et les veines sont chargés d’amener dans le sang, mais encore par les modifications que ces sub- stances subissent selon qu’elles suivent l’une ou l’autre voie et par les usages auxquels elles paraissent desti- nées dans l’économie. Absorption cutanée. 158. — L’épiderme, qui protège la peau (53, lft'4) contre l’impression des agents extérieurs, semble des- tiné à modérer en même temps l’évaporation qui se pro- duit sans cesse à la surface du corps, et la faculté d’ab- sorption de l’enveloppe cutanée. Cependant la peau absorbe avec une certaine activité les corps liquides et gazeux. On a constaté que le poids du corps était aug- menté après une promenade par un temps humide et que la sécrétion urinaire était accrue. C’est aussi sous la même influence que le corps plongé dans un bain absorbe l’eau en certaine quantité. Les liquides agissent d’abord par imbibilion en ramollissant l’épiderme, ils passent ensuite par absorption dans les vaisseaux qui rampent dans les tissus sous-jacents et de là dans le torrent de la circulation. Toutefois, la température du 162 ABSORPTION. liquide modifie l’absorption cutanée selon que cette température est supérieure ou inférieure à celle du corps. Non-seulement la peau absorbe les liquides purement aqueux, mais encore les matières salines ainsi que d’au- tres substances tenues en dissolution; elle absorbe aussi des gaz comme un grand nombre d’expériences l’ont démontré et comme nous l’avons signalé (1/15). Aussi s’opère-t-il par la peau une sorte de respiration rudi- mentaire. Influences qui modifient l’absorption cutanée. 159. — La faculté d’absorption de la peau est modi- fiée par une foule de circonstances ; l’âge, le sexe, la force ou la faiblesse des individus constituent les prin- cipales. Artificiellement, l’absorption cutanée est facilitée par les frictions et par les corps qui ont une action dis- solvante sur l’épiderme. L’absorption s’opère avec beau- coup d’énergie lorsque la peau est dénudée, c’est-à- dire lorsqu’elle est privée de sa couche épidermique. Absorption dans les glandes et dans les cavités closes. 160. —L’absorption s’effectue encore dans les glan- des, elle s’opère aussi dans les cavités closes, telles que ABSORPTION, 163 les membranes séreuses, les capsules synoviales des ar- ticulations. C’est ainsi qu’à l’état normal, une exhalation et une résorption de fluides se produisent dans la cavité des plèvres, du péricarde, du péritoine, de la tunique vaginale, de l’arachnoïde, de même que dans les syno- viales articulaires, les bourses synoviales des tendons, les bourses sous-cutanées, etc. Des épanchements plus ou moins considérables se manifestent quelquefois dans ces cavités à l’état morbide, ils sont surtout très-fré- quents dans les plèvres. Ces épanchements offrent cela de remarquable, que la résorption s’en fait générale- ment avec beaucoup de lenteur. Nous verrons plus tard quelle en est la cause. Lorsque l’absorption a lieu sur des liquides ou des gaz accidentellement épanchés ou développés dans les ca- vités naturelles ou dans la substance des tissus, on la désigne souvent sous le nom de résorption. Absorption interne ou de décomposition. 161.'—L’absorption interne ou de décomposition (ab- sorption interstitielle ou de nutrition) s’exerce conti- nuellement. Elle a pour but d’éliminer les matériaux nutritifs usés dans le mouvement de composition des tissus et de saisir pour les utiliser ceux de ces maté- riaux qui n’ont pas été employés. C’est encore très-pro- bablement par deux ordres de vaisseaux, les veines et 164 ABSORPTION. les vaisseaux lymphatiques que s’opère cette absor- ption, mais dans un but particulier comme certains phé- nomènes physiologiques et pathologiques semblent le démontrer. CHAPITRE NEUVIÈME. SÉCRÉTIONS. DES SÉCRÉTIONS EN GÉNÉRAL. — SÉCRÉTIONS DANS LES MEMBRANES SÉREUSES ET DANS LES ARTICU- LATIONS. — SÉCRÉTIONS DANS LES VOIES PUL- MONAIRES, INTESTINALES, GLYCOGÉNIE DU FOIE. — SÉCRÉTION CUTANÉE. — SÉCRÉTION URINAIRE. I. DES SÉCRÉTIONS EN GÉNÉRAL. Définition et division des sécrétions. — Appareils organiques des sécrétions. — Différentes dénominations des sécrétions. — Sé- crétions alcalines et sécrétions acides. — Corps sur lesquels s’effectuent les sécrétions. — Modifications que subissent les sé- crétions. — Antagonisme des sécrétions. — Influence du système nerveux sur les sécrétions. 162. —Dans l’acte de ia nutrition, chaque organe a, pour ainsi dire, une mission double, l’une qui lui fait utiliser pour sa propre substance, les matériaux nutri- tifs qu’il reçoit du travail commun des autres organes, et l’autre par laquelle il concourt à ce travail, dans la mesure de ses attributions. L’estomac, par exemple, reçoit du travail commun, par l’intermédiaire de son appareil vasculaire, les principes nutritifs nécessaires à 166 SÉCRÉTIONS. ses tissus, et d’un autre côté, il concourt à ce travail en participant aux fonctions digestives, dont plus tard lui-même il recevra le fruit. Tous les organes sont donc dans l’économie, tributaires les uns des autres ; et, de l’ordre dans lequel s’accomplissent leurs actions réci- proques, résulte cette harmonie si indispensable entre les deux mouvements qui constituent l’acte intime de la nutrition , nous voulons dire le mouvement de com- position et celui de décomposition. Jusqu’alors, nous avons presque exclusivement étudié les divers actes et les divers phénomènes qui se rappor- tent à la composition de nos tissus, nous allons mainte- nant nous occuper de ceux qui ont trait à leur décompo- sition et rechercher si, avant d’être rejetés au dehors, les matériaux non employés dans le mouvement de compo- sition ne sont pas encore utilisés. C’est ainsi que nous sommes amené à étudier les actes organiques auxquels on a donné le nom de sécrétions. Définition et division des sécrétions. 163. —Par le mot sécrétions, on comprend l’acte par lequel des organes spéciaux fabriquent avec le sang des liquides particuliers destinés à divers usages, et l’en- semble des actions organiques par lesquelles les ma- tières usées ou inutiles sont rejetées au dehors. Dans celte définition, deux actes différents sont confondus; SÉCRÉTIONS. 167 cette confusion cependant est inévitable, car s’il est des matériaux nutritifs qui, après avoir été employés dans les tissus, sont immédiatement rejetés hors de l’or- ganisme, il en est d’autres qui, avant d’être expulsés, sont encore utilisés; de Là, deux principales divisions des sécrétions en excrémentitielles et en récrérnentitielles. Appareils organiques des sécrétions. 16&.— Les organes chargés d’accomplir les sécré- tions sont les glandes, les follicules ou cryptes muqueux, les membranes séreuses. Les glandes sont des organes particuliers dans lesquels le sang subit diverses métamorphoses dont le résultat constitue la sécrétion, et comme toute sécrétion ne s’ac- complit que sur des surfaces, les glandes les plus com- pliquées ne doivent être considérées en définitive que comme de larges surfaces ménagées dans le plus petit espace possible. (M. J. Muller.) Différentes dénominations des sécrétions. 165. — Le nom des sécrétions varie suivant l’or- gane qui leur donne naissance; c’est ainsi que l’on nomme salive le fluide fabriqué par les glandes salivai- res ; suc gastrique, celui que sécrètent les follicules de 168 SÉCRÉTIONS. la muqueuse stomacale; sérosité, le liquide que laissent transsuder les membranes séreuses, etc. Sécrétions alcalines et sécrétions acides. 166.—Relativement à leur caractère chimique général, les sécrétions peuvent être distinguées en deux classes, les sécrétions alcalines qui sont : les larmes, la salive, le suc pancréatique et labile, etc., et les sécrétions acides que représentent la sueur, le suc gastrique, l’u- rine, etc. Cependant, sous ce rapport, des modifica- tions ont lieu dans les sécrétions, comme nous l’avons remarqué à l’égard de la salive qui parfois présente des caractères acides. Au reste, c’est surtout dans l’état morbide que les sécrétions sont modifiées à cet égard. Corps sur lesquels s’effectuent les sécrétions. 167. — Les sécrétions s’effectuent sur les gaz et sur les liquides. C’est ainsi que peuvent être éliminés les matériaux impropres à l’organisme, soit définitivement, comme l’acide carbonique par les poumons, l’urine par les voies urinaires, etc., soit momentanément, et pour être utilisés, comme la salive, le suc gastrique, etc. SÉCRÉTIONS. 169 Modifications que subissent les sécrétions. 168, — La quantité de liquide sécrété dans un temps donné varie selon le degré de vascularité des glandes ou des membranes, c’est-à-dire, selon la quantité de sang que reçoivent ces organes et, par conséquent, re- lativement aussi à la vitesse de la circulation. Les sécrétions sont encore accrues ou diminuées sui- vant l’état morbide qui, en outre, en modifie également la qualité. C’est ainsi que l’irritation augmente d’abord la sécrétion,comme on le voit si manifestement lorsqu’un corps irritant, venant affecter la conjonctive, les lar- mes sont sécrétées en abondance. Mais si à l’irritation succède l’inflammation, les vaisseaux se contractent, la sécrétion diminue et est supprimée même jusqu’au mo- ment où le relâchement survient et donne lieu au re- tour de la sécrétion, mais alors avec des modifications résultant du désordre apporté dans le tissu sécréteur. La connaissance des modifications que présentent les sécrétions dans l’état morbide est de la plus haute im- portance ; car non-seulement les sécrétions sont modi- fiées sous l’influence de l’altération des tissus sécréteurs, mais elles le sont encore par les fluides de l’économie dont ces tissus se laissent pénétrer anormalement, flui- des qui récèlent quelquefois soit des produits morbides provenus d’autres parties de l’organisme, soit les ma- 170 SÉCRÉTIONS. tériaux usés que doivent rejeter les émonctoires, com- plications qui viennent encore ajouter aux désordres survenus dans la fonction de sécrétion, et qui rendent si difficile le traitement de certaines affections, telles que celles delà peau, des voies pulmonaires, gastriques, etc. Antagonisme des sécrétions. 169. — I/accroissement d’une sécrétion entraîne la diminution d’une autre sécrétion. Ce phénomène con - stitue Vantagonisme des sécrétions. C’est sur cet anta- gonisme qu’est fondée la méthode de provoquer artifi- ciellement certaines sécrétions pour en faire cesser d’autres qui ont un caractère morbide. Cet antagonisme s’observe surtout entre les sécrétions de la peau et celles des reins, entre cette enveloppe et les muqueuses pul- monaire et intestinale. influence du système nerveux sur les sécrétions. 170. —Les nerfs exercent une influence manifeste sur les sécrétions, comme l’ont démontré les expériences de MM. Brodie, Krimer, J. Muller et Peipers, celles de Ma- gendie et de M. Cl. Bernard, etc., etc. La section de la paire vague, par exemple, fait cesser la sécrétion du suc gastrique ; après avoir fait la section de la moëile épi- SÉCRÉTIONS. 171 nière aux régions lombaire et dorsale, Krimer remar- qua que l’urine devint claire et limpide. On sait d’ailleurs que , dans les affections nerveu- ses, l’urine est limpide et bien moins chargée de ses principes naturels. Les passions ont aussi une influence marquée sur les sécrétions comme, par exemple, celles des larmes, de la bile, du lait, etc. Dans les fièvres où l’action nerveuse a perdu de son énergie et pendant la période de froid des fièvres intermittentes, la peau ne sécrète plus, devient sèche. Le trouble apporté dans le mouvement du fluide nerveux à la suite d’une violente émotion, d’une syncope, détermine au contraire un accroissement con- sidérable des sécrétions, comme la sueur froide, la diar- rhée, etc. Au reste, l’accomplissement régulier des sé- crétions, sous l’influence de l’innervation, dépend du cours normal du fluide nerveux dans les organes sé- créteurs, des actions qui attirent ce fluide ou le repous- sent, de l’ensemble de ses mouvements généraux dans l’économie ; car le tissu des organes sécréteurs, comme tous les tissus mous de l’organisme, est doué des pro- priétés qui caractérisent la vie animale, la sensibilité et la contractilité. 172 SÉCRÉTIONS. H. DES SECRÉTIONS EN PARTICULIER. Sécrétions dans les membranes séreuses et dans les articulations. — Synovie. — Sécrétions dans les voies respiratoires, dans les voies intestinales. — Gaz intestinaux. — Sécrétions dans le foie, glycogénie. — Sécrétions excrémentitielles intestinales. — Sé- crétion cutanée. — Sueur, composition chimique. — Sympathies de la peau avec divers organes. Sécrétions dans les membranes séreuses et dans les articulations. — Synovie. 171. — Les parties de l’organisme où les sécrétions s’opèrent avec le plus de simplicité sont les membranes séreuses. Les membranes séreuses sont constituées par des fibres lamineuses généralement disposées en faisceaux et s’entre-croisant sous des angles très-nets. Des fibres élastiques flexueuses les accompagnent ; ces membra- nes sont très-vasculaires et ne sont pas pourvues de fol- licules. Les membranes séreuses qui forment des sacs sans ouverture, telles que les plèvres, le péritoine, le péricarde, etc., revêtent non-seulement certains or- ganes, mais encore, en se repliant sur elles-mêmes, les cavités qui contiennent ceux-ci, d’où il résulte qu’en certains points, leur surface interne se trouve en contact avec elle-même. Celte disposition anatomique nécessite que cette surface soit lubréfiée par un fluide SÉCRÉTIONS. 173 qui favorise le glissement des parties en contact. De là, la nécessité de la sécrétion dont les membranes séreuses sont le siège, sécrétion qui s’opère par la simple transsudation à travers les parois des capillai- res qui les parcourent, de celte partie du sang qui constitue la sérosité. C’est donc par imbibition que s’ef- fectue la sécrétion dans ces membranes; aussi, dans l’état morbide, la résorption des liquides épanchés dans les cavités qu’elles constituent sont-elles fort lentes à s’opérer et ne s’opèrent même pas quand l’inflamma- tion, après avoir développé leurs vaisseaux, a donné lieu à l’épanchement de liquides modifiés eux-mêmes par le travail inflammatoire. En effet, lorsque l’inflam- mation a cessé, ces vaisseaux reprennent leur capacité normale et leur état ordinaire et ne peuvent plus s’em- parer, à moins toutefois d’une dilution particulière, du liquide épanché. De là, les maladies connues sous le nom d’hydropisies, auxquelles succèdent quelquefois, lorsque la partie la plus fluide de l’épanchement peut être résorbée, des dépôts albumineux ou plutôt fibri- neux qui, en s’agglomérant, constituent les fausses membranes. On doit aussi ranger dans la même classe de sécré- tions celles qui s’effectuent dans l’intérieur des articu- lations mobiles, sécrétions dont le produit a reçu le nom de synovie. CeLte humeur qui, dans sa composition, diffère surtout de la sérosité par une plus forte propor- 174 SÉCRÉTIONS. lion d’albumine combinée avec de la matière grasse, est un liquide onctueux, diaphane, incolore, et qui a pour but d’enduire les surfaces articulaires, d’en maintenir le poli et d’en faciliter le glissement. Sécrétions dans les voies respiratoires. 472. — Lasécrélion dans les poumons a reçu le nom de perspiration pulmonaire. Cette secrétion s’effectue sous la forme de gaz et de vapeurs. La membrane mu- queuse qui tapisse les ramuscules et les vésicules bron- chiques en est le siège. Dans l’acte respiratoire, comme nous l’avons vu (108), s’exhalent de l’acide carbonique et de la vapeur d’eau chargée de diverses matières ani- males. Il y a donc bien évidemment une sécrétion qui s’effectue dans cet acte ; mais cette sécrétion est es- sentiellement excrémentitielle, car elle a pour but de rejeter au dehors des corps complètement impropres à la nutrition. Pour s’effectuer sous la forme gazeuse, la quantité du produit sécrété n’en est pas moins considé- rable, et donne lieu de comprendre la viciation de l’air atmosphérique par l’accumulation d’un grand nombre d’individus dans un espace limité (110). Diverses influences font varier la perspiration pulmo- naire, c’est-à-dire la quantité de produits sécrétés par les poumons, telles sont celles qui naissent des condi- tions atmosphériques, de l’alimentation, des exercices, SÉCRÉTIONS. 175 des émotions,etc. ; les unes en s’exerçant sur la muqueuse pulmonaire elle-même, les autres en modifiant le mou- vement respiratoire. Sécrétions dans les voies intestinales. 173. —Les sécrétions dans les voies intestinales sont constituées par le suc intestinal, le mucus intestinal, les déjections ou matières fécales et les gaz intestinaux ; mais comme elles ont été étudiées lorsque nous nous sommes occupé des liquides propres à la digestion, nous n’y reviendrons que très-sommairement. Les fonctions digestives ont pour but non-seulement la dissolution des substances alimentaires et l’absorp- tion des produits nutritifs, mais encore le rejet au de- hors des diverses matières impropres à la nutrition, qui ont accès dans les voies intestinales, telles que la bile, les parties non alibiles des substances alimentaires, certains matériaux de l’acte de décomposition, etc. Aussi les parties excrémentitielles que rejette le canal ali- mentaire varient-elles beaucoup dans leur composition. L’âge, le sexe, la constitution, le tempérament, le genre de nourriture, le climat, leur impriment des modifica- tions particulières. Voici, d’après les recherches ana- lytiques faites en 180â parBerzélius, les matières qu’on y rencontre. 176 SÉCRÉTIONS. Eau 733,0 Parties solides 267,0 Bile 9,0 Albumine 9,0 Matière extractive particulière 27,0 Sels 12,0 Résidu d’aliments solubles 70,0 Matière animale particulière 140,0 Les sels étaient constitués par : Carbonate (lactate de soude) 3,5 Chlorure de sodium 4,0 Sulfate de soude 2,0 Phosphate de magnésie 2,0 Phosphate de chaux 4,0 Gaz intestinaux. 174. — Les intestins fournissent encore des gaz di- vers. Ces gaz ont seulement pour but de maintenir le tube intestinal dans le développement nécessaire à la circulation des matières alimentaires dans sa capacité. Ils sont le plus souvent formés d’oxygène, de gaz acide carbonique, d’azote, d’hydrogène pur, d’hydrogène proto-carboné et d’acide sulfhydrique. Sécrétions dans le foie. >— Glycogénie. 175. — Nous avons déjà appelé l'attention sur les sécrétions qui s’effectuent dans le foie (47), mais pour SÉCRÉTION î. 177 faire ressortir toute l’importance de celle qui a trait à la formation du sucre dans cet organe, nous allons re- produire ici les principaux faits établis par les recher- ches expérimentales deM. Cl. Bernard. D’après cet éminent physiologiste, le foie est le siège de deux sécrétions, l’une, externe, produit la bile, qui s’écoule au dehors par les conduits biliaires, l’autre, in- terne, forme le sucre , dont les veines sus-hépatiques s’emparent et qu’elles versent dans la circulation géné- rale. Voici maintenant les conclusions que M. Cl. Bernard a déduites de son beau travail : « Premier fait. 11 y a du sucre dans le foie de l’homme et de tous les animaux en état de santé. Ceci n’a jamais été contesté. « Deuxième fait. Le sucre existe dans le foie-des car- nassiers comme dans celui des herbivores, à jeun ou en digestion. « Corollaire. La présence du sucre dans le foie est donc indépendante de la nature de l’alimentation. « Troisième fait. Chez un carnivore, on ne trouve point de sucre dans le sang de la veine-porte. « On en trouve toujours, au contraire, des quantités considérables dans le sang des veines hépatiques. b Corollaire. Le sucre se forme donc dans le foie. » Quatrième fait. Le sucre versé dans le sang se dé- truit successivement à mesure qu’il s’éloigne du foie, 178 SÉCRÉTIONS. sans toutefois, chez l’animal sain, apparaître dans les urines. « Cinquième fait. Le sang qui sort du foie, en même temps qu’il contient davantage de sucre, ne ren- ferme plus du tout de fibrine et beaucoup moins d’albu- mine que le sang qui y entre. « Corollaire. Le sucre semble se prod uire dans le foie aux dépens des matières albuminoïdes du sang. « Tous les faits qui précèdent sont établis par des expériences chimiques; elles prouvent déjà qu’il y a formation de sucre dans le foie. Mais comme cette fonc- tion se passe dans l’organisme, il en résulte que cette production glycogénique doit, par conséquent, subir toutes les influences de diverse nature qui agissent sur les fonctions organiques. « En effet, nous constatons, au point de vue physio- logique : « Premier fait. La fonction glycogénique subit des oscillations, comme toutes les sécrétions, et en particu- lier comme celles qui sont liées à l’appareil digestif. « Elle est plus active au moment de la digestion. « Elle diminue dans les intervalles. « Elle peut finir par disparaître à la suite d’un jeûne prolongé. « Deuxième fait. Les influences extérieures agissent sur la sécrétion du sucre. SÉCRÉTIONS. 179 « Le froid la fait disparaître, soit complètement, soit en partie, suivant son intensité. « La chaleur la rétablit. « Troisième fait. Les actions sur le système nerveux retentissent sur cette fonction pour l’exagérer , pour la diminuer, pour la pervertir. « Quatrième fait. La fonction glycogénique est en sympathie d’action avec les autres fonctions de l’écono- mie, et en particulier avec la respiration. « Cinquième fait. A l’état morbide, la fonction glyco- génique s’exagère ou s'anéantit. « Son exagération produit le diabète. « Son anéantissement a lieu sous l’influence de tout état fébrile. « Le foie des individus morts de maladies ne contient généralement pas de sucre. » (M. Cl. Bernard, Leçons de physiologie expérimentale. ) Sécrétions excrémentitielles intestinales. 176. — Les sécrétions dans la canal intestinal, de même que dans les glandes qui l’avoisinent, et qui con- courent pour une si grande part à l’acte digestif et à la formation du sang, ont pour usage, outre les attribu- tions essentielles que nous venons de signaler, d’élimi- ner les produits inutiles et les matériaux’usés de l’orga- nisme ; ces sécrétions sont importantes, non-seulement 180 SÉCRÉTIONS. au point de vue de la régularisation des phénomènes de la nutrition dans l’état normal, mais encore de la part très-grande faite à l’appareil digestif dans l’état morbide et des ressources offertes à la thérapeutique. Sécrétion cutanée. 177. — La peau (53, 166) est le siège d’une double sé- crétion, l’une, grasse, se produit dans les follicules séba- cées et paraît avoir pour but de contribuer à sa souplesse et à celle des poils ; l’autre, aqueuse, a lieu par les glandes sudorifères, et est constituée par la transpira- tion qui s’effectue à l’état vaporeux et à l’état liquide. La quantité de liquide qui s’échappe par la transpira- tion est soumise aux influences du travail organique in- terne, de l’alimentation, de l’état hygrométrique de l’air et de la température. Cette quantité de liquide est très- considérable ; elle s’élève dans l’état normal à 1 kilo- gramme environ dans les 26 heures. L’évaporation con- tinuelle qui s’effectue à la surface de la peau, établit l’équilibre dans la température du corps, soit en le proté- geant contre l’action du calorique ambiant, soit en s’em- parant du calorique interne excédant. Aussi, dans l’état morbide, la chaleur interne est-elle augmentée lorsque les fonctions de la peau sont suspendues. La peau, comme nous l’avons dit (165), exhale de l’acide carbonique et absorbe de l’oxygène, mais en sécrétions. 181 quantité fort minime pour l’un et l’autre gaz ; aussi l’a- nalogie qu’elle offre sous ce rapport avec les poumons a fait considérer la perspiration cutanée comme une sorte de respiration supplémentaire. On a déterminé l’asphyxie chez les animaux en suspendant les fonctions cutanées; un canard plongé dans l’huile meurt en peu de temps, Transpiration. —- Sueur. 178. — La transpiration ou sueur, la perspiration cu- tanée sont de véritables excrétions, car elles débarrassent l’économie de toutes les matières susceptibles de volati- lisation à la température du corps ; les urines, au con- traire, entraînent les substances qui prennent la forme liquide. Au reste, la sécrétion cutanée est liée de la manière la plus intime avec la sécrétion urinaire. La sueur fraîche est légèrement acide; elle doit cette propriété à deux acides volatiles, l’acide caprylique et l’acide caproïque, d’après MM. Redtenbacher et Leh- mann. Ce sont des acides gras qui se rencontrent d’ail- leurs dans le beurre uni à la glycérine. La sueur con tient diverses matières salines, des substances animales volatilisables, et, comme dans l’urine, on y trouve de l’urée, mais en bien moindre quantité. Au reste, voici, d’après M. Favre, l’analyse de la sueur faite sur 10 kilo- grammes de liquide, ainsi que les conclusions du travail 182 SÉCRÉTIONS. remarquable que cet habile chimiste a publié dans les Archives générales de médecine (juillet 1853). Eau 9955,73 Sudorates alcalins 15,62 Chlorure de sodium 22,30 Lactates alcalins 3,17 Chlorure de potassium 2,66 Urée 0,63 Matières grasses 0,16 Autres sels divers, sulfates, phosphates alcalins et terreux 0,17 « 1° Les matériaux de la sueur sont, à l’exception de faibles traces, entièrement solubles dans l’eau pure. « 2° La matière minérale , de beaucoup prédominante dans la sueur, est le sel marin, ainsi que cela avait été constaté antérieurement. « 3° La proportion de sulfates alcalins est extrême- ment faible ; celle des phosphates alcalins ou alcalino- terreux, presque nulle dans la sueur. « 6° L’analyse y démontre d’une manière incontesta- ble l’existence de l’acide lactique à l’état de lactates alcalins, ainsi que cela avait été annoncé, mais non com- plètement démontré, par l’analyse élémentaire. « 5° Les expériences rapportées dans ce travail si- gnalent la découverte dans la sueur d’un nouvel acide azoté, Yacide sudorique, et qui s’y trouve à l’état de sudorat.es alcalins. La formule de cet acide le rapproche, SÉCRÉTIONS. 183 à certains égards, de l’acide urique, acide qu’on ne re- trouve pas dans la sueur. « 6° La découverte de l’urée dans la sueur ressort également de ce travail ; ce principe n’avait pu encore y être reconnu. « 7» La proportion de matière grasse et de matière al- bumineuse à l’état d’albuminates alcalins est extrême- ment faible dans la sueur. « 8° La proportion de potasse, par rapport à la soude, est relativement plus élevée dans les sels à acides or- ganiques que dans les sels minéraux contenus dans la sueur. « 9° La sueur, provenant du même sujet, et recueil- lie à différentes époques a présenté sensiblement la même composition à la condition de provoquer l’ex- pulsion de volumes de sueur à peu près égaux. « 10° Lorsqu’on fractionne la sueur d’une transpira- tion en plusieurs parties, correspondant à deux ou trois périodes égales à partir du commencement de l’expé- rience, on trouve des différences dans les proportions relatives de sels minéraux et de sels à acides organi- ques, les premiers étant plus abondants pendant les der- nières périodes. « 11° Le rapport de l’eau à la somme des matériaux solides ne change pas sensiblement aux différents mo- ments où la sueur est recueillie durant la transpiration forcée. » 184 SÉCRÉTIONS. Sympathies de la peau avec divers organes. 179. — Ca peau ne vit pas pour elle seule, elle a des rapports très-intimes avec les organes internes, particu- lièrement avec les poumons, les intestins et les reins ; aussi il en résulte que ses impressions ou ses maladies ont du retentissement sur ces organes. En supprimant la transpiration chez les animaux, dit Fourcault, leur sang s’altère, sa combinaison molécu- laire est profondément modifiée, l’urine et les autres fluides sécrétés sont également altérés, des lésions lo- cales se forment, des symptômes graves se développent, et la mort est le résultat de la suppression prolongée de l’exhalation cutanée; les expériences physiologiques comme les recherches statistiques démontrent que la plupart des maladies aiguës et des affections chroniques sont dues à cette suppression et à ces altérations. SÉCRÉTIONS. 185 III. SÉCRÉTION URINAIRE. Urine normale. — Composition de l’urine. — Urée. — Quantité de l’urée dans l’urine. — Influences qui modifient la proportion de l’urée dans l’urine. — Formation de l’urée. — Absence ou diminution de l’urée dans l’urine. — Acide urique. — Forma- tion de l’acide urique. — Influences qui font varier la propor- tion de l’acide urique dans l’urine. — Acide hippurique. — Urine des herbivores. — Matières qui se rencontrent normale- ment ou accidentellement dans l’urine. — Acidité et alcalinité de l’urine. — Influence de l’alimentation sur l’acidité ou l’alca- linité de l’urine. — Quantité de l’urine émise dans un temps donné. — Quantité d’eau dans l’urine. — Distinction des uri- nes selon le moment de leur expulsion. — Quantité des prin- cipes solides contenus dans l’urine. — Causes d’augmentation des principes solides. — Diminution des principes solides. — État dans lequel les substances introduites dans le tube digestif sont trouvées dans les urines. — Substances dites diurétiques. — Influence des carbonates alcalins sur l’urine. — Diathèse urique. — Présence dans l’urine du sucre et de l’albumine. — Urine chyleuse ou laiteuse. — Calculs. — De la rapidité avec laquelle les substances passent du tube digestif dans la sécrétion urinaire. — Rapports de la sécrétion urinaire avec celle de la peau. 180. —Les reins, comme nous l’avons vu (55), sont les organes qui sécrètent l’urine. La sécrétion urinaire a pour usage d’éliminer du corps les matériaux usés ou formés dans l’acte de décomposition et devenus inuti- les, et aussi de rejeter au dehors soit en nature, .soit al- térées, des substances étrangères admises accidentelle- 186 SÉCRÉTIONS. ment dans la circulation. La sécrétion urinaire joue donc un rôle très-important dans l’économie à l’état physiolo- gique comme à l’état morbide. Urine normale. 181. — On doit entendre par urine normale ou dans l’état physiologique, l’urine rendue dans l’espace de vingt-quatre heures, par l’homme en état de santé. Vurine, à l’état normal, est un liquide limpide, d’une couleur jaune variable en intensité, d’une saveur salée particulière, d’une odeur caractéristique. Fraîche, l’urine présente une réaction acide, mais abandonnée à elle- même pendant un certain temps, elle devient alcaline. Composition de l’urine. 182. — La composition moyenne de l’urine normale chez l’homme et chez la femme, d’après les analyses de M. A. Becquerel, est représentée dans le tableau sui- vant : SÉCRÉTIONS. 187 ÉLÉMENTS CHIMIQUES COTENNUS DANS l’URINE. HOMMES (moyenne) FEMMES moyenne) MOYENNE GÉNÉR. URINE DBS 24 heures. COMPOSI- TION SUR 1000. URINB DES 24 heures. COMPOSI- TION SUR 1000. URINE DES 24 heures. COMPOSI- TION SUR 1000. Quantité d’urine, Densité, Eau, Matières autres que l’eau et données par l’évaporation directe, Urée, Acide urique, / Hilnniroa / ChaUX, Sels fixes et indécomposables j pî'°nhatf., ) de soude, à la température rouge : 1 Sulfates ( de potasse, ' ' de magnésie,. , Acide lactique, Matières organiques qu’on j Lactate d’ammoniaque, ne peut isoler et doser / Matières colorantes, séparément : / Matières extractives, ' Hydrochlorate d’ammoniaque,.. 1367,3 1018,900 1237,779 39,521 17,537 0,495 9,751 11,738 1000 968,815 31,185 13,838 0,391 7,695 9,261 1371,7 1015,120 1337,489 34,211 15,582 0,557 8,426 9,655 1000 975,052 24,948 10,366 0,406 6,143 8,033 1319,8 1017,010 1282,634 36,866 16,555 0,526 9,089 10,696 1000 971,935 28,066 12,102 0,398 6,919 8,647 COMPOSITION DES SELS FIXES SUR L’ÉMISSION DES 21 HEURES ET SUR 1000 PARTIES D’URINE. URINE DES 24 HEURES. COMPOSITION SUR 1000. Chlore, 0,659 Chlore. 0,502 Acide sulfurique, 1,123 Acide sulfurique, 0,855 Acide phosphorique, 0,417 Acide phosphorique, 0,317 Potasse, 1,708 Potasse, 0,300 C Soude, j r Sonde, ■> Bases alcalines et terreuses : < Chaux, > 5,181 Bases alcalines et terreuses : < Chaux, I 3,944 I Magnésie, ) t Magnésie, ' Somme 9,089 Somme 5,919 188 SÉCRÉTIONS. Comme on le voit par ce tableau, l’urine contient, outre des matières animales et des sels divers, de l’u- rée particulièrement et une certaine quantité d’acide urique. Cescorps jouant un rôle fort important dans les phénomènes physiologiques et morbides, nous allons succinctement en tracer l’histoire. Urée. 183. — L’urée est une substance particulière, neutre, Irès-soluble dans l’eau, moins dans l’alcool, et à peine so- luble dans l’éther; elle se combine avec quelques acides et forme des composés salins cristallisables. L’urée est le corps le plus azoté de tous les produits animaux ; voici sa composition, d’après MM. Woehler et Liebig : Carbone 20,02 Hydrogène 6,71 Azote 66,73 Oxygène 26,56 L’urée a été trouvée dans le sang par MM. Prévost et Dumas, après l’extirpation des deux reins, de sorte que si on ne le rencontre pas à l’état normal, dans ce li- quide , c’est parce que , dit M. J. Muller, elle est con- tinuellement éliminée. D’après les travaux de M. Si- mon et de M. Verdeil qui, il est vrai, ont agi sur une grande quantité de liquide, il est constant que l’urée existe à l’état physiologique dans le sang, mais en pro- SÉCRÉTIONS. 189 portion très-faible, et fort probablement, par la même raison que donne M. Muller, c’est-à-dire que la circula- tion étant rapide, le sang se débarrasse de l’urée au fur et à mesure de son passage à travers les reins. L’urée s’accumule dans le sang sous l’influence de troubles profonds dans la sécrétion urinaire, comme dans le choléra, l’albuminurie, et dans ce cas, l’élimination de l’urée tend à s’effectuer par d’autres voies que celles qui lui sont ordinaires. C’est ainsi qu’on rencontre de l’urée dans les glandes, dans les liquides de l’économie, la salive, le liquide céphalo-rachidien, les épanchements séreux, etc. On a trouvé de l’urée dans les liquides vo- mis par des chiens auxquels on avait lié les uretères, et chez les animaux qui ont subi cette mutilation. MM. Cl. Bernard et Barreswil ont constaté que l’excrétion de l’urée s’effectue souvent par l’intestin. Quantité de l’urée dans l’urine. 18Z|. — La quantité moyenne de l’urée contenue dans l’urine de l’homme est, d’après M. A. Becquerel, de 13 gr. 838 pour 1000 gr., et de 10 gr. 366 pour l’urine de femme; en 24 heures elle est de 17 gr. 537 pour l’homme, et de 15 gr. 582 pour la femme. On peut ad- mettre, d’après le même auteur, que la quantité d’urée contenue dans 1000 gr. d’urine peut osciller entre 190 SÉCRÉTIONS. 10 gr. et 1 lx gr., et la quantité rendue dans l’espace de 2li heures, entre 15 et 16 gr. Influences qui modifient la proportion de l'urée dans l’urine. 185. — Le genre d’alimentation exerce une influence manifeste sur la proportion de l’urée contenue dans l’urine. Le régime animal et les exercices musculaires en déterminent l’augmentation. Selon M. Liebig, la pro- portion d’urée est augmentée dans l’abstinence, la pierre, l’amaigrissement. Sous l’influence de l’âge, la proportion de l’urée subit des variations en rapport avec le mouvement de nutri- tion. Dans la première enfance, où l’accroissement est très-actif, l’assimilation des principes nutritifs l’emporte sur la désassimilation; aussi la quantité d’urée contenue dans l’urine est bien moindre que celle qui se trouve dans l’urine de l’homme dont le développement est complet ; chez le nouveau-né et chez l’enfant à la ma- melle, l’urine présente à peine quelques traces d’urée. Remarquons aussi qu’à cet âge, le lait constitue exclusi- vement l’alimentation. L’urine, chez l’enfant de quatre ans, ne donne en 2â heures que h gr. d’urée; à huit ans, 12 ou 13 gr. à peine. Les vieillards, qui consom- ment une quantité d’aliments bien moindre que les SÉCRÉTIONS. 191 adultes, n’offrent pas dans leur urine plus de 8 ou 10 gr. d’urée dans l’espace de 1k heures. Quant au sexe, la proportion de l’urée est relative à l’activité des phénomènes nutritifs, aussi l’urine de la femme, comparée à celle de l’homme, renferme, comme nous venons de le voir, quelques grammes d’urée en moins dans les 1 k heures. Formation de l’urée. 186. — L’urée que renferme l’urine est l’un des résidus de la nutrition interstitielle des tissus. D’après M. Ch. Robin, l’urée, ainsi que nombre d’autres prin- cipes de la môme classe, naît par catalyse dédoublante durant la désassimilation, l’un des côtés du double acte continu de la nutrition. Selon M. J. Béclard, l’urée pro- vient de deux sources. Une certaine partie résulte de la décomposition des tissus azotés de l’organisme et cor- respond au renouvellement de ces tissus. C’est cette partie de l’urée qui persiste à être sécrétée chez l’ani- mal à jeun et chez l’animal qui fait usage d’une alimen- tation non azotée, c’est celte partie de l’urée que le mouvement musculaire augmente en accélérant les com- bustions de nutrition. Une autre partie de l’urée pro- vient de l’oxydation directe des aliments azotés, 192 SÉCRÉTIONS. Absence ou diminution de l’urée dans l’urine. 187. — L’absence ou la diminution seulement de l’u- rée constitue très-souvent un phénomène important sous le rapport pathologique. Il est en effet plusieurs maladies dans lesquelles l’urine ne contient pas d’urée. Telles sont les affections nerveuses, pendant le cours desquelles ce liquide devient aqueux : les matières or- ganiques y manquent alors et on n’y trouve que les sels. Cependant, il n’en est pas toujours ainsi, dit M. A. Bec- querel, et dans certains cas, la quantité d’eau reste normale, ou bien elle éprouve un effet inverse, elle di- minue, et l’urine est plus dense, plus chargée. Au reste, dans la plupart des maladies capables d’al- térer la sécrétion urinaire, la loi générale est la diminu- tion de la quantité physiologique de l’urée sécrétée dans l’espace de 2k heures. Quand l’urée semble augmenter, il paraît que c’est uniquement parce que l’eau ayant proportionnellement beaucoup plus diminué qu’elle, elle se trouve plus concentrée, malgré la diminution réelle qu’elle a éprouvée. Acide urique. 188. — L’acide urique se présente sous forme d’é- cailles cristallines, blanches, douces au toucher, sans SÉCRÉTIONS. 193 saveur et sans odeur. 11 existe dans l’urine de l’homme et des animaux carnivores ; c’est encore cet acide qui constitue la partie blanche des excréments des oiseaux et des serpents. L’acide urique est à peine soluble dans l’eau ; il est insoluble dans l’alcool et dans l’éther; tous les urates, les urates alcalins mêmes, sont très-peu so- lubles; mais ils le deviennent davantage dans un excès d’alcali; il faut excepter l’urate de magnésie qui, dans certaines limites, est soluble dans l’eau. La composition de l’acide urique, d’après M. Liebig, est de : Carbone 36,083 Hydrogène 2,4âl Azote 33,361 Oxygène 28,126 L’acide urique est contenu dans l’urine sous forme d’urate de soude. Il est tenu en dissolution dans l’urine chaude ; il se précipite par le refroidissement. Dans cer- tains cas, l’acide urique se précipite presque pur de l’u- rine refroidie ; il est d’abord pulvérulent et gris , mais peu à peu il devient rosé. La teinte rougeâtre ou bri- quetée qu’il présente dans certaines affections est due, selon M. J. Muller, à une grande quantité de matière co- lorante combinée avec lui. La quantité de l’acide urique contenue dans l’urine n’est guère que la vingtième partie de celle de l’u- rée. 194 SÉCRÉTIONS. Formation de l’acide urique. 189. — La formation de l’urée est, comme nous l’a- vons vu, le résultat de la combustion des tissus azotés de l’organisme et des matières albuminoïdes de l’alimen- tation ; l’acide urique résulte aussi de cette combustion, mais portée à un degré bien moins élevé. En effet, si l’oxygène pénètre dans les tissus en quantité suffisante pour opérer la combustion complète des matières qu’il y rencontre, il y a production d’urée; tandis qu’au contraire, si l’oxygène est en trop faible proportion, la transformation de ces matières n’arrive qu’à l’état d’a- cide urique, c’est-à-dire à un degré inférieur d’oxyda- tion. La production de ces deux corps est donc en rap- port avec la quantité d’oxygène admise dans l’intimité organique et celle des matières des tissus propres à su- bir ces métamorphoses. Aussi, plus il y a d’urée de for- mée, et moins il y a d’acide urique et réciproquement. C’est dans ces conditions que ces deux substances se trouvent dans l’urine. Telle est la théorie admise à cet égard ; mais dans la seconde partie de ce travail, nous verrons s’il n’y a pas lieu d’y apporter quelques modi- fications. SÉCRÉTIONS. 195 Influences qui font varier la proportion de l’acide urique dans l’urine. 190. —D’après cette théorie , on comprend que la quantité d’urée et d’acide urique doit varier dans l’u- rine sous certaines influences. C’est ainsi, en effet, que tout ce qui tend à faire admettre plus d’oxygène dans l’organisme, à activer les combustions intimes, en fai- sant pénétrer ce gaz dans la substance des tissus, dé- termine la formation d’une plus grande proportion d’u- rée, tandis que des conditions contraires donnent lieu à la production de l’acide urique en excès. Les exer- cices, par exemple, qui accélèrent les mouvements res- piratoires et les combustions intimes, augmentent la quantité d’urée, pendant que le repos et l’état séden- taire la diminuent et augmentent au contraire celle de l’acide urique. La nature de l’alimentation qui fait varier la quantité de l’urée rendue par les urines, agit aussi sur celle de l’acide urique; c’est ainsi que le régime animal, long- temps soutenu, en favorise l’augmentation, tandis que le régime végétal la diminue. Dans l’état morbide, la quantité d’acide urique subit aussi des variations; l’augmentation a été surtout signa- lée dans la goutte, maladie dans laquelle l’urine est or- dinairement très-acide et sédimenteuse, et se fait re- 196 SÉCRÉTIONS. marquer par la composition des concrétions formées dans les articulations par de l’urate de soude avec un peu d’urate de chaux. « On a encore observé cette augmen- tation dans la fièvre typhoïde, la péritonite, dans la forme inflammatoire des maladies, dans les accès de colère, les émotions vives, l’ivresse, etc.; et la diminu- tion dans la chlorose, l’anémie, chez les sujets plongés dans un état adynamique, affaiblis par les évacuations sanguines ou des pertes quelconques. » (M. A. Becque- rel.) Acide hippurique. — Urine de» herbivores. 191. — L’urine des mammifères présente, en géné- ral, les mêmes éléments que celle de l’homme; cepen- dant l’urine des herbivores en diffère en ce qu’elle con- tient de l’acide hippurique, au lieu d’acide urique. Tou- tefois l’urine de l’homme et celle des enfants renferment souvent de l’acide hippurique, mais en faible quantité; de même que l’urine des herbivores à jeun offre de l’acide urique. L’acide hippurique présente une propriété fort re- marquable; traité par des acides énergiques, il se dé- double en acide benzoïque et en glycocolle (sucre de gélatine). En outre, sous l’influence des ferments, il su- bit des transformations dont l’une d’entre elles est en- core de l’acide benzoïque. Voilà pourquoi on ne trouve SÉCRÉTIONS, 197 d’acide hippurique que dans l’urine fraîche, les matières animales que renferme ce liquide agissant par la putré- faction comme des ferments, décomposent l’acide hip- purique, qui produit alors de l’acide benzoïque. Matières qui se rencontrent normalement ou acciden- tellement dans l’urine. 192. — Outre les matières exposées dans les analyses que nous avons reproduites, et celles dont nous venons de nous occuper, l’urise contient d’autres substances, soit normalement, soit accidentellement, telles que de la créaline, delà créatinine, des matières grasses, du mucus, de l’acide butyrique, du chyle, de l’albumine, du sucre, de l’oxalate de chaux, du sous-carbonate de chaux et de magnésie , du phosphate neutre de chaux, des phosphates ammoniaco-magnésiens neutres etbiba- siques, des matières colorantes, etc. Acidité et alcalinité de l’urine. 193. — L’urine est acide ou alcaline selon certaines conditions que nous allons signaler. L’urine de l’homme et des carnivores est acide lorsqu’elle est récemment rendue; elle devient alcaline quelque temps après son émission. L’acidité est due à la présence des phosphates acides, et l’alcalinité provient de la transformation de l’urée en carbonale d’ammoniaque, sous l’influence de 198 SÉCRÉTIONS. la fermentation que détermine la présence du mucus contenu dans l’urine. D’après les observations de M. Andral, l’urine est toujours acide dans l’état mor- bide, mais si elle séjourne dans la vessie ou que cet or- gane soit malade, par la fermentation qui s’établit, l’u- rine se décompose et devient ammoniacale. Au reste, toutes les fois que les urines deviennent alcalines, selon M. A. Becquerel, ce changement dans les qualités de ce liquide est le résultat de la décomposition de l’urée. Influence de l’alimentation sur l’acidité et l’alcalinité de l’urine. 19fr. — Sous l’influence de la nature de l'alimenta- tion, l’urine peut être tantôt acide et tantôt alcaline. L’homme qui ne se nourrit que de matières animales émet toujours de l’urine acide ; mais si son régime est exclusivement composé de substances végétales, son urine est alcaline; cette alcalinité est due à la présence des carbonates alcalins. L’urine des herbivores est gé- néralement alcaline. Dans l’état normal, l’urine de l’homme et des mammifères à jeun est toujours acide. Pendant la digestion, suivant M. Cl. Bernard, la réac- tion des urines traduit celle de l’intestin; aussi, chez les herbivores, le contenu de l’intestin est constamment alcalin, comme les urines; chez les carnivores, il est, au contraire, acide comme les urines. Chez les animaux SÉCRÉTIONS. 199 à jeun, herbivores ou carnivores, les urines sont exces- sivement acides et contiennent énormément d’urée. M. Lehmann a fait sur lui-même un grand nombre d’expériences dans le but d’apprécier l’influence de la nature de l’alimentation sur la composition de l’urine, nous allons reproduire ici le tableau dans lequel sont exposés les résultats moyens auxquels cet habile chi- miste est arrivé pour l’espace de 2k heures : Nourriture mixte. Œufs, Nourriture végétale. Nourriture non azotée. gr. gr. gr- gr. Quantité, 989,95 1202,5 990,0 977,1113 Pesanteur spécifique, 1,0220 1,0270 1,0275 ■» 7> Parties solides, 67,82 87,44 59,24 41,68 Urée, 32,198 53,198 22,481 15,408 Acide urique, 1,183 1,478 1,021 0,735 Acide lactique et lactates, 2,725 2,167 2,669 5,276 Matière extractive, 10,489 5,196 16,499 11,854 Phosphates terreux, 1,130 3,562 Quantité de l’urine émise dans un temps donné. 195. — La quantité de l’urine rendue dans un temps donné est subordonnée à la proportion de boissons, à l’action de la température et aux exercices qui influent sur la sécrétion cutanée, ou l’absorption plus ou moins active dans les voies digestives. En moyenne toutefois, 200 SÉCRÉTIONS. la quantité d’urine sécrétée en 24 heures peut être éva- luée à 1250 gr. environ. Quantité d’eau dans l’urine. 196.— L’urine contient une grande quantité d’eau, 93 à 95 pour 100 environ. Suivant M. A. Becquerel, la quantité d’eau rendue en 26 heures par les urines est en moyenne de 1227 gr. 779 chez les hommes, et de 1337 gr. 689 chez les femmes: en moyenne générale de 1*282 gr. 636, chez une personne saine. Les oscilla- tions autour de ces chiffres sont assez considérables dans l’état de santé parfaite, et pour admettre une al- tération morbide de la quantité d’eau, il faut que celle- ci soit au-dessous de 800 ou au-dessus de 1500. La quantité d’eau peut atteindre et dépasser 1500 par l’effet : 1° De l’introduction d’une grande quantité de liquide dans l’économie par les voies digestives, et alors la quantité d’eau rendue dans l’espace de 26 heures est généralement en rapport avec la proportion d’eau ava- lée ; 2° De la polydipsie; chez une femme de vingt-trois ans, le terme moyen de la quantité d’eau rendue en 26 heures s’est trouvé être de 2956 gr. 361 ; 3° Du diabète, dans lequel la quantité d’eau va quel- quefois à plusieurs litres; SÉCRÉTIONS. 201 U° Dans un accès d’hystérie ou d’accidents nerveux quelconques, ce qui n’est pas constant. La quantité d’eau diminue plus souvent qu’elle n’aug- mente, comme on a lieu de l’observer : Dans la fièvre et dans toutes les circonstances capa- bles de déterminer un mouvement fébrile, spécialement les phlegmasies aiguës et chroniques ; Dans les maladies du cœur et du foie, surtout si elles sont capables de produire une perturbation générale dans l’organisme ; Dans les maladies, de quelque nature qu’elles soient, qui déterminent un trouble fonctionnel général ; Dans le cas de sueurs abondantes ; Enfin aux approches de la mort. Le plus souvent les urines qui contiennent beaucoup d’eau sont pâles, peu denses, peu acides et assez abon- dantes, tandis que celles qui en contiennent peu sont foncées en couleur, très-denses, très-acides, souvent spontanément sédimenteuses et toujours diminuées de quantité. Distinction des urines selon le moment de leur expulsion. 197. — L’eau introduite dans les voies digestives passe avec une grande rapidité dans les urines, et dans ce cas, par conséquent, l’urine est moins chargée de 202 SÉCRÉTIONS. ses principes constituants. De là les distinctions sui- vantes que les anciens ont établies, et qui sont encore admises : 1° L’urine des boissons est celle que l’on expulse après avoir bu. Elle est très-aqueuse , ce qui rend sa pesanteur spécifique moindre ; elle contient les princi- pes constituants des boissons, et parfois les dix onzièmes de l’eau qui a été bue. 2° L’urine de la digestion ou du chyle, qui est expul- sée à la fin de la digestion, est saturée de matières étrangères qui sont entrées dans la composition des ali- ments; 3° L’urine du sang qui est émise le matin, est plus foncée en couleur, plus dense, plus concentrée et d’un poids spécifique beaucoup plus considérable que dans les autres conditions. Quantité des principes solides contenus dans l’urine. 198. — La quantité de principes solides tenus en dissolution dans l’urine a été trouvée parM. A. Becque- rel, dans les 24 heures, de 39 gr. 521 pour les hommes, 34,211 pour les femmes, ce qui donne pour moyenne générale 36 gr. 866. Ces moyennes, déjà dissemblables suivant le seve, ne sont pas non plus constamment identiques chez un même individu. Les oscillations peuvent être entre 36 SÉCRÉTIONS. 203 et 41 chez l’homme, 32 et 36 chez la femme, ce qui fait pour termes moyens chez les deux sexes les extrê- mes de 32 et 41. La quantité des principes solides imprime à l’urine des qualités variables ; selon qu’ils sont dissous dans plus ou moins d’eau, l’urine est plus ou moins dense et plus ou moins chargée en couleur. Causes d’augmentation des principes solides. 199. — Les causes qui déterminent l’augmentation des principes solides sont : 1° Une alimentation abondante et azotée; 2° L’introduction dans l’économie d’une quantité anormale d’eau ; car alors non-seulement les reins se débarrassent de cette quantité insolite de liquide, mais encore le travail inaccoutumé auquel ils se livrent dé- termine une augmentation dans la somme totale des matières tenues en dissolution. M. A. Becquerel a vu en pareil cas cette somme s’élever à 43 et 45; 3° La polydipsie, qui rentre dans le cas précédent: une femme faible et délicate, atteinte de cette maladie, a donné au lieu de 34 gr., chiffre moyen dans le sexe féminin, 43 gr. 659 ; 4° Les flux d’urines, qui ont lieu quelquefois sous l’influence d’affections nerveuses, et spécialement d’ac- cès d’hystérie : chez une chlorotique, la somme des 204 SÉCRÉTIONS. matériaux solides rendus un jour qu’elle eut plu- sieurs accès d’hystérie et un flux urinaire, s’éleva presque au double de la quantité qui existe ordinaire- ment dans la chlorose (43,083); après la guérison, la moyenne fut de 35,5/|5 ; 5° Le diabète. Ces principes solides, ainsi augmentés , impriment à l’urine des caractères différents, selon la quantité d’eau dans laquelle ils sont dissous. Diminution des principes solides. 200. — Les principes solides diminuent beaucoup plus fréquemment qu’ils n’augmentent dans les mala- dies. Cette diminution se remarque : lo Sous l’influence de la fièvre, des phlegmasies ai- guës, des désordres fonctionnels peu intenses, des ac- cès de maladies du cœur ou des poumons, des maladies de foie, etc., etc.; et l’urine offre également alors des qualités différentes, suivant la proportion variable de l’eau; le plus ordinairement l’eau diminue en plus forte proportion que les principes solides, et alors l’urine est plus dense et plus foncée en couleur; mais il arrive aussi que l’eau a très-peu diminué ou que même elle n’a pas été sensiblement influencée ; 2° Sous l’influence des causes débilitantes ; 3° Sous celle de l’épuisement déterminé par les ma- ladies chroniques. Quelquefois la somme des matières dissoutes dans l’eau reste normale dans les maladies. SÉCRÉTIONS. 205 Etat dans lequel les substances introduites dans le tube digestif sont trouvées dans les urines. 201. — Des expériences nombreuses ont été faites dans le but de rechercher les modifications que pou- vaient subir les substances introduites dans le canal di- gestif et transmises par ces organes dans les voies uri- naires. Le plus grand nombre de ces expériences sont dues à M. Woëlher; en voici les résultats classés par catégories : 1° Matières qu’on ne peut pas retrouver dans l’u- rine. L’alcool, l’éther sulfurique, le camphre, l’huile de Dippel, le musc et les matières colorantes de la co- chenille, du tournesol, du vert de vessie et de l’orca- nette, auxquelles il faut ajouter la caféine, l’asparagine, l’amygdaline. M. Woëlher avait signalé le ferej le plomb, mais M. Becquerel a constaté qu’une bonne partie du fer administré aux chlorotiques passe par les urines, et d’après Orfila, le plomb s’v retrouve aussi. L’acide carbonique, après l’usage des boissons qui en sont chargées ne se rencontre pas plus abondam- ment non plus dans les urines. 2° Matières qu’on retrouve dans l’urine, mais alté- 206 SÉCRÉTIONS. rées, décomposées. Cyanure ferrico-potassique (converti en cyanure ferroso-polassique), tartrates, citrates, raa- lates et acétates potassiques, convertis en carbonates, sulfhydr,ate potassique, en grande partie convertie en sul- fate. Le soufre passe dans l’urine à l’état d’acide sulfu- rique et sulfhydrique, l’iode à celui d’iodures, les acides oxalique, gallique, succinique et benzoïque à l’état d’oxalates, gallates, succinates et benzoates. Les acides acétique, malique, citrique, tartrique sont encore dans ce cas; mais ils sont transformés en partie en acide carbonique et éliminés alors sous la forme de carbonates alcalins ; la salicine est convertie en acide oxalique et rejetée sous forme d’oxalate ; l’acide tan- nique est transformé en acide gallique, etc., etc. 3° Matières qu’on retrouve dans l’urine sans qu’elles aient subi aucun changement. Carbonate, chlorate, azotate et sulfate potassiques ; sulfhydrale potassique, en grande partie décomposé , cyanure ferroso-potassi- que, borate sodique, chlorure barytique, silicate potas- sique, tartrate niccolo-potassique; beaucoup de matières colorantes , comme celles du sulfate d’indigo, gomme- gutte, rhubarde, garance, bois de Campêche, betteraves, baies d’airelle, mûres, merises; beaucoup de matières odorantes, en partie altérées, l’essence de térében- thine (sentant la violette) , les principes odorants du genièvre, de la valériane, de l’assa-fœtida, de l’ail, du castoréum, du safran, de l’opium ; les principes stupé- SÉCRÉTIONS. 207 fiants du bolet du Kamtschadala, et aussi, dans l’état de maladie, l’huile grasse. D’après les expériences d’Orfila, il faut encore ajou- ter les préparations d’antimoine, d’arsenic, de zinc, de plomb, de bismuth, d’argent, d’or; le mercure (M. Cantu), le fer (M. Becquerel), le sulfate de quinine et la strychnine (Quevenne), le chlore (M. Chevalier), la silice, l’acide succinique, le sous-carbonate de soude, le chlorate de potasse. Au reste, il ne passe dans l’urine que des substances dissoutes, et aucune qui soit grenue. M. Woëlher appelle aussi l’attention sur une circon- stance importante, c’est que les sels qui sont éliminés par l’urine activent aussi pour la plupart la sécrétion de ce liquide. Substances dites diurétiques. 202. —Pour ce qui concerne d’autres substances, qu’on a décorées du nom de diurétiques, il faut remar- quer , ce que les médecins prendront sans doute en considération, qu’elles n’y ont aucun droit fondé; la digitale, entre autres, agit en supprimant la cause de l’hy- dropisie; de sorte qu’ensuite l’eau s’échappe d’elle-même par son émonctoire ordinaire. Le quinquina employé contre les hydropisies qui succèdent à la fièvre inter- mittente serait dans ce sens un diurétique. (M. J. Muller.) Lorsque l’élimination de l’eau par les reins est em- 208 SÉCRÉTIONS. pêchée par l’accumulation de ce liquide sur d’autres points, comme dans l’hydropisie, l’urine prend une teinte plus foncée due à la concentration plus grande de la matière colorante ordinaire, sans qu’on puisse con- clure de là autre chose, sinon qu’il se sécrète moins d’eau. Influence des carbonates alcalins sur l’urine. — Diathèse urique. 203. — L’introduction des carbonates alcalins dans les voies digestives rend l’urine alcaline et donne lieu à la dissolution de l’acide urique. L’administration de ces sels, selon M. J. Muller, serait un moyen assez certain de combattre la diathèse urique. Mais, comme le fait observer Jourdan , cette assertion est peut-être hasardée, car aucun fait positif n’a jusqu’ici établi l’ef- ficacité des boissons alcalines contre la diathèse d’acide urique, et, au contraire, il y en a qui constatent qu’elles peuvent accroître le volume des calculs d’acide urique, sinon même déterminer la formation de calculs d’urates alcalins, ainsi que sembleraient le prouver les observa- tions de M. Civiale. M. J. Muller fait encore la remarque suivante : « Comme les acides végétaux et leurs sels alcalins se convertissent en carbonates alcalins pendant leur pas- sage des voies digestives dans l’urine, on peut les em- ployer aussi contre la diathèse urique. Cependant ce moyen ne convient guère que dans le cas de gravelle et sécrétions. 209 de petites pierres, car dans celui des gros calculs vési- caux, l’alcalescence de l’urine rend les phosphastes terreux insolubles, de sorte qu’ils peuvent contribuer à grossir le corps étranger. » L’acide benzoïque fait repasser l’urine alcaline au ca- ractère acide, suivant le docteur Dre, et empêche le dépôt des phosphates terreux. Présence dans les urines, du sucre et de l’albumine. — Urine chyleuse ou laiteuse. 20h. — On rencontre quelquefois dans l’urine du su- cre ou glycose, ce qui constitue un état morbide qui a reçu le nom de diabète sucré ou glycosurie. Cependant la glycose peut se rencontrer quelquefois dans l’urine, mais en proportion très-faible, après une alimentation riche en sucre et en substances féculentes. En outre, il résulterait d’un travail récemment présenté à l’Acadé- mie des sciences, par M. H. Blot, qu’il existe une gly- cosurie normale chez toutes les femmes en couches, chez toutes les nourrices, et chez un certain nombre de femmes enceintes. La présence du sucre dans l’urine, d’après les expé- riences de M. Bouchardat, n’a pas d’influence notable sur les proportions normales de l’urée : car dans le dia- bète, elle varie beaucoup non-seulement chez les ma- lades différents, mais encore chez le même malade. 210 SÉCRÉTIONS. L’albumine se trouve aussi anormalement dans l’u- rine, comme on a lieu de le remarquer dans quelques affections nerveuses, dans certaines maladies du cœur, dans l’anasarque, dans quelques cas de grossesse, chez les nouvelles accouchées, dans l’hépatite, ainsi que vers la fin de toutes les maladies consomptives ; mais la pré- sence de l’albumine, dans l’urine, est liée le plus sou- vent à une altération profonde de la substance des reins à laquelle on a donné le nom de maladie de Bright (al- buminurie). L’urine qui, à l’état normal, présente quelques traces de matières grasses, en renferme quelquefois en pro- portion assez élevée pour que ce liquide présente une apparence émulsive. On donne le nom d’urines laiteuses ou chyleuses aux urines qui offrent ce caractère. Selon M. Cl. Bernard, elles constitueraient une sorte de dia- bète, dépendant de l’excès de matériaux graisseux sé- crétés par le foie. Calculs. 205. — Des dépôts particuliers se forment dans cer- taines circonstances, dans l’urine, on les désigne sous le nom de calculs. Les corps qui entrent dans leur compo- sition sont le plus- ordinairement l’acide urique et les urates alcalins, l’oxalalede chaux, le phosphate ammo- niaco-magnésien, etc,, etc. SÉCRÉTIONS. 211 De la rapidité avec laquelle les substances passent du tube digestif dans la sécrétion urinaire. 206. —La rapidité avec laquelle les substances intro- duites dans les voies digestives passent dans les urines, est dépendante de conditions multiples. La vitesse de la circulation, l'influence desphénomènes digestifs, le travail de l’absorption, la durée de l’élimination, les propriétés des substances, leur affinité pour les tissus du corps, etc., sont autant de conditions qui augmentent ou diminuent la rapidité avec laquelle apparaissent dans les voies uri- naires les matières introduites dans le canal alimentaire. Rapport de la sécrétion urinaire avec celle de la peau. 207. — La sécrétion urinaire comparée à celle de la peau relativement à la quantité de matières organiques rejetée au dehors présente les rapports suivants : selon M. Favre, 14 litres d’urine donnent 140 gr. de matières organiques, la même quantité de sueur n’en produit que 23 grammes. Sans amoindrir l’importance de la peau dans les phé- nomènes qui ont pour but l’élimination de l’organisme des matériaux usés ou inutiles, néanmoins faut-il re- connaître que la sécrétion urinaire a, sous ce rapport, des relations beaucoup plus étendues. Nous terminons ici ces courtes considérations sur la 212 SÉCRÉTIONS. sécrétion urinaire. Si tronquées qu’elles soient, elles doivent faire comprendre jusqu’à quel point l’étude ap- profondie d’une pareille question peut éclairer le diag- nostic et le traitement des maladies. En comparant la composition du sang avec celle de l’urine, il est permis d’espérer, dit M. Liebig, qu’à l’avenir une simple opé- ration chimique pourra faire connaître la composition du sang à l’aide de la composition de Burine, Quelques expériences comparatives sur le sang et sur l’urine, dans différentes maladies, donneront au médecin des moyens de diagnostic très-précieux pour la détermination des altérations du sang et pour l’appréciation de l’influence que ces altérations exercent sur les fonctions vitales les plus importantes. Aussi renvoyons-nous le lecteur aux sources auxquelles nous avons puisé en grande partie ce qui concerne la sécrétion urinaire, c’est-à-dire au traité remarquable de la séméiotique des urines, de M. A. Becquerel, ainsi qu’au traité de chimie patholo- gique que cet auteur a publié en commun avec M. A. Rodier. Des sécrétions spéciales ont encore lieu dans diverses autres glandes, telles que les capsules surrénales, le thymus, le corps thyroïde, mais leurs usages étant en- core fort hypothétiques, nous ne trouvons pas utile de les signaler ici. SECONDE PARTIE. NUTRITION. CHAPITRE PREMIER. CONSIDÉRATIONS PRÉLIMINAIRES. Instruments de la nutrition, — La nutrition est incessante et tous les organes sont soumis à son influence. — Les tissus sont doués de propriétés vitales et de propriétés chimiques. — Le sang ar- tériel contient tous les principes nutritifs de l’alimentation. — Des principes immédiats organiques contenus dans le sang. — Liquide nourricier. — Globules. INSTRUMENTS DE LA NUTRITION. 208. — Quel que soit le mode intime par lequel la nutrition s’effectue dans l’organisme, les instruments essentiels à l’aide desquels elle s’accomplit sont : les capillaires artériels et veineux (80), les vaisseaux lym- phatiques (87), influencés les uns et les autres par les fibrilles nerveuses qui les accompagnent. Les capillai- res artériels apportent, dans les tissus, les éléments nu- tritifs, les capillaires veineux réunissent les matériaux usés et les versent dans les émoncloires, les vaisseaux lymphatiques intermédiaires aux artères et aux veines, pompent, dans les tissus, des fluides particuliers (la 214 NUTRITION. lymphe), les transforment en humeurs nouvelles qui, après avoir servi à divers usages, sont rejetées au de- hors; enfin les fibrilles nerveuses donnent aux capil- laires artériels, veineux et lymphatiques, la faculté d’ac- complir leurs fonctions en les douant de propriétés spéciales (92). C’est ainsi que le sang charrié jusque dans les parties les plus ténues de nos organes, fournit à chacun d’eux, sous la forme moléculaire, les éléments qui constituent leur substance, aux muscles, de la fibri- ne, aux membranes, de l’albumine, aux os, des principes calcaires; tandis que les organes sécréteurs y puisent les moyens de produire des fluides divers, et qu’enfin, les matériaux usés ou devenus inutiles sont expulsés de l’économie. Tels sont, en résumé, les instruments à l’aide desquels s’effectuent les phénomènes qui consti- tuent le mouvement de composition et celui de décom- position, en un mot, la nutrition proprement dite. La nutrition est incessante, et tous les organes sont soumis à son influence. 209. — Placée sous Faction continuelle de la circula- tion et de l’innervation, la nutrition, par conséquent, est incessante, et il n’est pas un organe, un tissu dans l’économie où la circulation et l’innervation se manifes- tent, qui ne soit doué de la propriété de nutrition. Tous les tissus sont donc soumis, dans la mesure de leur CONSIDÉRATIONS PRÉLIMINAIRES. 215 activité, aux mouvements de composition et de décom- position qui constituent la vie nutritive. Ces deux mou- vements s’effectuent non-seulement dans l’organisme en général, mais ils s’opèrent encore dans chaque organe, dans chaque tissu isolément, c’est-à-dire que les orga- nes, que les tissus assimilent à leur nature les corps homogènes et désassimilent ceux qui ne le sont plus ; d’où il résulte qu’à la propriété de nutrition des tissus se rattachent deux autres propriétés, l’absorption et la sécrétion. Les tissus sont doués de propriétés vitales et de propriétés chimiques. 210. —Mais outre ces propriétés vitales, les tissus ont des propriétés chimiques qui résultent de la nature de leur substance, et d’où dérivent des affinités spéciales à chaque tissu, pour les éléments particuliers apportés du dehors, par le sang, dans l’intimité organique. De ces pro- priétés découlent aussi des actions et des réactions con- tinuelles, lesquelles, en dernière analyse, donnent lieu, pour leur part, à la combinaison et à la décombinaison qui s’effectuent sans cesse. Il ne serait pas rationnel, en effet, de distraire de la substance vivante, les propriétés chimi- ques dont sont doués tous les corps dans la nature, par cela seul que la vie en modifie les manifestations et les rend ainsi moins accessibles à nos sens. Or, il est incon- 216 nutrition. testable que la substance vivante, outre des propriétés vitales, est pourvue de propriétés ehimiques et, par conséquent, soumise aux actions de même nature que les corps extérieurs subissent et peuvent exercer sur elle. Le sang artériel contient tous les principes nutritifs de l’alimentation. 211. — Nous avons vu (132-141) que les substances alimentaires introduites dans les organes digestifs sont transformées en chyme et en chyle, et que le chyle, avant de faire partie du sang, suit deux voies, l’une, les vais- seaux chylifères et les glandes lymphatiques du mésen- tère, dans lesquelles il subit une élaboration spéciale, est mêlé avec la lymphe dans le canal thoracique et de là, versé dans le torrent circulatoire veineux ; l’autre, les veines mésentériques et le système de la veine-porte par lesquels il est conduit dans la rate peut-être, mais assurément dans le foie, où il subit avec le sang les mo- difications les plus importantes, et enfin est charrié comme la première portion dans la circulation vei- neuse, que c’est ainsi que les deux portions du chyle réunies pénètrent avec le sang veineux dans le cœur et sont chassées dans les poumons où, après avoir subi l’influence de l’air atmosphérique, elles prennent part à la formation du sang artériel. Le sang artériel est CONSIDÉRATIONS PR ÉLIMINA! RES. 217 donc chargé de tous les principes nutritifs extraits des corps extérieurs admis dans l’organisme, et c’est ce liquide qui les porte dans nos tissus. Des principes immédiats organiques contenus dans le sang. 212.— La plupart des principes immédiats des or- ganes, suivant M. J. Muller, existent déjà dans le sang, tels sont : Y albumine que l’on rencontre surtout dans le cerveau, dans les glandes, et qui, plus ou moins modi- fiée, entre dans la composition d’un si grand nombre de tissus ; la fibrine qui fait partie des muscles et or- ganes musculeux et qui, en outre, constitue une cer- taine partie de la matière coagulable que le sang et la lymphe tiennent en dissolution; la graisse non azotée, qui existe déjà à l’état libre dans le chyle ; la graisse, azotée et pliospliorée combinée dans le sang avec Y al- bumine, la fibrine et Yhématine, et que l’on trouve dans le cerveau et les nerfs, le fer des poils, du pig- ment noir et du cristallin existe aussi déjà dans le sang ; il en est ainsi du manganèse, et comme M. J. Nicklès l’a récemment démontré, du fluor. Mais il est des ma- tières qu’on n’a pu y découvrir, telles que la gélatine des os et des cartilages, lar substance de la corne et celle du tissu élastique dont jusqu’alors on ne voit pas d’analogue dans le sang. Toutefois, selon M. Cl. 218 NUTRITION. Bernard, la fibrine du sang ne constitue pas toute la ma- tière coagulable que renferme ce liquide, aussi avons- nous lieu de croire que des expériences ultérieures pourront faire découvrir non pas la matière propre de ces tissus, mais celle qui sous l’influence des actions vitales, sert aies constituer. Au reste, les tissus qui donnent de la gélatine ou de la chondrine offrent à quelques égards des relations avec certains pro- duits de sécrétions tels que l’épiderme, la corne, les poils, etc., et dans ce cas, ces tissus constitueraient des principes immédiats dus au travail de l’organisme et dont il serait fort difficile de trouver la source dans le sang. Cependant, nous le répétons, nous croyons que la fi- brine du sang ne forme pas toute la matière à laquelle ce fluide doit sa coagulabilité, aussi chercherons-nous plus loin à étayer cette opinion. Quoi qu’il en soit, si le sang ne contient pas en na- ture toutes les matières qui entrent dans la composi- tion des tissus, il renferme tous les éléments qui, sous l’influence des actes vitaux, deviennent aptes à leur formation (56). Le sang est donc bien évidemment le liquide nutritif par excellence de tout l’organisme. Liquide nourricier. — Globules, 213. — On donne le nom de liquide nourricier (suc nourricier, lymphe plastique, lymphe coagulable) h la CONSIDÉRATIONS PRÉLIMINAIRES. 219 partie du sang qui seule peut transsuder à travers les parois des tuniques vasculaires, en définitive, la partie dissoute du sang, et qui n’est autre que le plasma (57) ; car les globules qui nagent dans le plasma ne sortent pas des vaisseaux avec ce fluide ; ils passent directe- ment des artères dans les veines ; par conséquent ils ne constituent pas essentiellement les matériaux de la nutrition. Cependant les globules du sang n’ont pas moins un rôle fort important dans l’organisme. On sait, en effet, que la diminution ou l’augmentation de ces corpuscules est une cause de trouble dans l’accomplis- sement des phénomènes de l’acte nutritif; on sait aussi que le sang veineux en est moins chargé que le sang artériel (63). Or, il est évident que les globules nais- sent et se détruisent. Ils naissent, comme nous le ver- rons plus tard , de certains produits de la digestion , et ils se détruisent sans cesse dans le sang, en abandon- nant probablement les matières qui les ont formés. Ils augmentent sous l’influence d’une alimentation riche en substances albuminoïdes ; ils diminuent dans des conditions opposées. Dans l’acte respiratoire (108), les globules du sang changent de couleur et passent au rouge vermeil; ils conservent celte teinte dans les gros vaisseaux, et ce n’est qu’en traversant les capillaires qu’ils la perdent et deviennent d’un rouge noir. A chaque circuit qui dure trois minutes , les globules subissent alternative- 220 NUTRITION. ment ces changements dans les capillaires des poumons et dans les capillaires du corps , c’est-à-dire que, dans l’espace de 2h heures, ils éprouvent /|80 fois environ ces alternatives de coloration. Et si nous considérons ces changements au point de vue des actions chimiques qui se passent dans l’organisme, nous voyons que les globules dans les poumons absorbent de l’oxygène et exhalent de l’acide carbonique en quantité égale au volume de l’oxygène absorbé; qu’en traversant les ca- pillaires du corps, les globules abandonnent ce gaz, qui s’unit avec le carbone des combinaisons produites dans la mutation des tissus, fait de l’acide carbonique, et avec leur hydrogène, forme de l’eau. Enfin les globules exer- cent sur les organes, et particulièrement sur les nerfs, une excitation nécessaire à l’entretien de la vie. Les globules du sang ont donc un rôle très-impor- tant dans l’organisme, et s’ils ne prennent pas une part directe à la composition des tissus, ces porteurs de l’oxygène, comme les appelle M. Liebig, sont au moins les intermédiaires par lesquels s’effectuent les actes chimiques de leur nutrition intime, et en outre, ils ser- vent à la décomposition, en répartissant dans les points profonds de la substance des tissus l’élément qui, seul, par les combustions qu’il opère, peut en éliminer les matériaux inutiles. Ce n’est en effet que dans leur pas- sage à travers les capillaires, c’est-à-dire dans les pro- fondeurs de l’organisme, que les globules perdent leur CONSIDÉRATIOXS PRELIMINAIRLS. 221 oxygène, et par suite leur teinte vermeille, et qu’ils deviennent noirs en se chargeant d’acide carbonique. En résumé, le liquide nourricier est particulièrement formé par le plasma, partie dissoute du sang , dans la- quelle sont contenues l’albumine et la fibrine, qui, de toute évidence, sont les matériaux les plus importants de la nutrition. Or, le plasma s’échappe sans cesse à travers les parois des capillaires, en raison de l’expan- sion permanente à laquelle le sang est soumis sous l’in- fluence du calorique répandu dans l’économie ; il hu- mecte ainsi tous les tissus, d’où les vaisseaux lympha- tiques ramènent, dans le torrent circulatoire, la partie du liquide nourricier qui n’a pas été utilisée à leur nu- trition. CHAPITRE DEUXIÈME. ALIMENTS ALBUMINOÏDES. — ALIMENTS RESPIRATOIRES. Distinction dos aliments en aliments albuminoïdes et en aliments respiratoires. — Cette distinction ne doit pas être considérée d’une manière absolue. — Considérations à l’appui. — Nécessité pour l’accomplissement régulier de la nutrition, de l’emploi si- multané des substances albuminoïdes, des matières sucrées et des corps gras. — Principes immédiats albuminoïdes. — Pro- téine. — Principes nutritifs essentiels. — Albumine. —> Fibrine. — Caséine. — Les matières albuminoïdes ne peuvent être utili- sées à la nutrition qu’autant qu’elles ont subi des modifications spéciales dans l’organisme et qu’elles sont associées à d’autres principes. Distinction des aliments en aliments albuminoïdes et en aliments respiratoires. 211\. —Nous avons jeté un coup d’œil sur les diver- ses transformations que subissentlessubslanc.es alimen- taires par les actions et les réactions qui se manifestent dans l’acte de la digestion (123), tant sous leur propre influence que sous celle qu’exercent sur elles les liqui- des des organes digestifs; nous devons actuellement nous occuper de la forme sous laquelle les principes nu- tritifs pénètrent dans le sang, et de leur emploi dans l’économie. Les substances alimentaires sont divisées en deux ALIMENTS ALBUMINOÏDES. 223 classes : les substances azotées et les substances non azotées (35). A celles de la première classe paraît appar- tenir seule la propriété de se convertir en sang, et, par conséquent, de donner naissance à nos tissus ; celles de la seconde classe serviraient à l'entretien de l’acte res- piratoire. De là cette distinction que l’on doit à MM. Lie- big et Dumas, des substances alimentaires azotées en aliments albuminoïdes ou plastiques, et des substances non azotées en aliments respiratoires. « Les aliments albuminoïdes ou plastiques les plus importants sont : L’albumine végétale, La fibrine id., La caséine id., Le gluten, La chair et le sang des animaux. Les aliments respiratoires comprennent : La graisse, L’amidon, La gomme, Les sucres, La pectine, La bassorine, La bière, Le vin, L’eau-de-vie, etc. » (M. Liebig, Chimie organique.) 224 NUTRITION. 215. —Quoique la distinction des substances alimen- taires en aliments albuminoïdes ou plastiques et en ali- ments respiratoires ait jeté de vives lumières sur la nutrition, néanmoins on doit bien plutôt la considérer sous un point de vue général que l’admettre d’une manière absolue. En effet, non-seulement il est des sub- stances alimentaires qui ne paraissent pas trouver place dans ces deux classes, mais encore il est évident que, parmi les substances azotées, il en est qui, en se méta- morphosant dans l’organisme, prennent le rôle des ma- tières non azotées, et il y a tout lieu de penser que sous l’influence de combinaisons diverses avec les sub- stances azotées, certains aliments non azotés servent aussi à la composition des tissus animaux. Chez les carnivores, par exemple, dont l’alimentation est ex- clusivement composée de matières animales, ce sont des substances azotées qui, par les transformations qu’elles subissent, fournissent les matériaux propres aux combustions qui s’opèrent dans l’organisme sous l’influence de l’oxygène; et chez les herbivores, la quantité énorme de substances non azotées qui entre dans leur régime alimentaire ne trouverait pas son em- ploi dans les conditions normales soit pour ces combus- tions ou pour la formation du tissu adipeux même, si une partie au moins de ces substances en se combinant avec les matières azotées, ne venait concourir à la formation de certains tissus. Aussi, louL en reconnaissant que les ALIMENTS ALBUMINOÏDES. 225 aliments non azotés ne doivent pas prendre rang parmi les substances essentiellement nutritives, nous devons cependant faire observer que les éléments qui les com- posent sont d’une nécessité aussi absolue dans la nutri- tion, que les principes des aliments azotés. 216. — Le lait est généralement pris pour base de la quantité des diverses matières qui doivent constituer l’aliment propre à remplir les conditions si complexes de la nutrition. Les substances azotées y sont conte- nues dans la proportion de 1 sur 4 de substances non azotées qui sont le sucre de lait et le beurre. Cette pro- portion de substances non azotées est considérable et elle ne répondrait pas, ce nous semble, aux divers be- soins de l’organisme, si la totalité de ces substances n’avait d’emploi que pour les combustions que déter- mine la présence de l’oxygène. Aussi nous paraît-il fort probable, comme nous nous efforcerons de le démon- trer plus loin, qu’à ces phénomènes exclusivement ne se borne pas le rôle des substances non azotées, sucre et corps gras, dans l’économie. Le lait, en effet, est la nourriture unique de la première enfance, et si l’on considère la nature de la constitution de l’enfant, l’inac- tivité et le sommeil presque incessants à cet âge, on re- connaît que les combustions, bien loin d’être fort acti- ves, sont au contraire limitées, et cela parce qu’il est un besoin qui prédomine chez l’être qui se dévelop- pe et auquel l’alimentation doit satisfaire en première 226 NUTRITION. ligne , la génération et l’accroissement constant du tissu le plus indispensable, le plus répandu, celui qui constitue la trame (tissu cellulaire) dans laquelle se dé- poseront successivement la matièredessupports del’or- ganisme (les os) et les substances destinées à parfaire les organes. Nécessité, pour l’accomplissement régulier de la nutri- tion, de l’emploi simultané des substances albumi- noïdes, des matières sucrées et des corps gras. 217. — Au reste, aucuns des principes nutritifs immé- diats, l’albumine, la fibrine, la caséine, non plus que les féculents, les sucres et les corps gras, ne sont propres, iso- lément, à remplir toutes les conditions de la nutrition , et ce n’est que de leur emploi simultané dans l’orga- nisme, que naissent leurs propriétés nutritives. Aussi, comme nous devons insister plus loin sur celte question, nous contenterons-nous, pour le moment, de constater qu’il est assez généralement admis que, pour l’accomplissement régulier des phénomènes de la nutri- tion, chez les carnivores comme chez les herbivores, trois ordres de substances, mais variables dans leurs proportions, doivent entrer dans le régime alimentaire. Les substances albuminoïdes proprement dites ; Les sucres ou les substances susceptibles d’être trans- formées en sucre dans l’organisme ; ALIMENTS ALBUMINOÏDES. 227 Les corps gras. Il résulte de ces considérations, qu’en étudiant isolé- ment le rôle d’une de ces substances dans l’économie, nous n’entendrons pas faire abstraction de l’influence que les autres peuvent y exercer simultanément. Principes immédiats albuminoïdes. 218.— Les principes immédiats des aliments albumi- noïdes sont Y.albumine, la fibrine et la caséine. Cês principes, soit qu’ils appartiennent aux végétaux ou aux animaux, sont composés de carbone, d’hydrogène, d’a- zote et d’oxygène ; mais, d’après M. Liebig, ils se dis- tinguent de toutes les autres matières azotées en ce qu’ils contiennent une certaine quantité de soufre. L’al- bumine, la fibrine et la caséine animales renferment en outre du phosphore. Protéine. 219.— L’albumine, la fibrine ou la caséine animales, traitées par une lessive de potasse moyennement con- centrée, donnent, par l’acide acétique, un précipité diaphane et gélatineux qui présente toujours la même composition et les mêmes propriétés, quelle que soit celle d’entre ces trois substances qui ait été employée pour la préparer. C’est ce produit que M. Mulder, qui 228 NUTRITION. eti a fait la découverte, a désigné sous le nom de protéine. Aussi ce chimiste a-t-il considéré l’albumine, la fibrine et la caséine comme ayant une commu- ne, la protéine, qui s’y trouve associée en des propor- tions diverses avec du soufre et du phosphore. Les substances protéiques se ressemblent par leur composition, il en est de même pour leurs propriétés chimiques. Ainsi l’albumine, la fibrine et la caséine se colorent en rouge, lorsqu’on les traite par un mélange d’azotate et d’azotite de mercure, en jaune, par l’acide azotique ; elles se dissolvent dans la potasse ou la soude caustique et dans l’acide chlorhydrique bouillant auquel elles communiquent une teinte bleue. Principes nutritifs essentiels. — Albumine. •— Fibrine. — Caséine. 220. — L’albumine, la fibrine et la caséine sont es- sentiellement propres à la nutrition, aussi M. Liebig a- t-il posé en principe qu’aucun corps azoté, végétal ou animal, dont la composition diffère de celle de l’albu- mine, de la fibrine et de la caséine, n’est propre à en- tretenir la vie des animaux. Mais, parmi ces substances, l’albumine a les relations les plus importantes comme élément nutritif, aussi est-elle considérée comme « la base, le point de départ de toute la série de tissus qui sont le siège des activités organiques. » (M. Liebig.) ALIMENTS ALI3UMINOÏDES. 229 Les matières albuminoïdes ne peuvent être utilisées à la nutrition qu’autant qu elles ont subi des modifica- tions spéciales dans l’organisme et qu’elles sont asso- ciées à d’autres principes. 221. — Les principes nutritifs essentiels tels que l’albumine et la fibrine quelle que soit leur origine, ani- male ou végétale, quelle que soit l’identité de composi- tion qu’ils présentent avec nos tissus, ne peuvent ce- pendant en faire partie qu’autant qu’ils ont subi dans l’organisme les modifications qui sont seules aptes à les assimiler au sang. L’albumine, par exemple, qui, sans aucun doute, est le point de départ de tous les tissus animaux, ne peut toutefois concourir à leur formation qu’autant qu’elle a été soumise aux diverses actions du travail digestif; en outre, si importante que soit l’albu- mine pour la nutrition, elle ne peut seule en remplir toutes les conditions. Les animaux nourris exclusivement avec cette substance finissent par succomber (MM. Tie- demann et Gmelin). C’est qu’en effet, ce n’est que par les modifications que l’albumine subit sous l’influence d’autres substances alimentaires, soit qu’elle se com- bine avec un ou plusieurs de leurs principes, soit qu’elle abandonne un ou plusieurs de ceux qui la constituent, soit enfin que ces substances interviennent dans l’ar- rangement moléculaire ou la proportion de ses élé- ments, qu’elle est réellement le point de départ de tous 230 NUTRITION. les tissus. Et si des animaux ont pu vivre un certain temps soumis au régime exclusif de l’albumine, c’est que cette substance rencontrait dans l’organisme des principes avec lesquels elle pouvait se combiner ou qui lui imprimaient les modifications propres à lui donner les qualités qui lui manquaient, et à la rendre assimi- lable. Il en est ainsi de la fibrine musculaire, c’est-à-dire de la musculine qui n’est pas non plus assimilée en na- ture à nos tissus» Cette substance lient aussi le premier rang parmi les principes alimentaires ; cependant la musculine chimique, c’est-à-dire privée des matières qui l’accompagnent dans la chair des animaux, ne peut subvenir seule à toutes les conditions delà nutrition. En effet, si la chair des animaux est à juste titre consi- dérée comme essentiellement nutritive, c’est qu’elle renferme non-seulement la musculine mais encore, comme nous le verrons plus loin, tous les autres prin- cipes nécessaires à l'accomplissement régulier de l’acte nutritif; et c’est sous l’influence des métamorphoses et des combinaisons que la musculine subit dans le travail de la digestion et de l’absorption, qu’elle arrive à faire partie du sang, non sous la forme propre à constituer la substance des muscles, mais à l’état d’albumine, transformation que l’on a contestée, mais qui a été dé- montrée par M. Melsens. Au reste, quelles qu’aient été les transformations su- ALIMENTS ALBUMINOÏDES. 231 bies dans le travail digestif et dans celui de l’absorption par les substances albuminoïdes, il est admis que celles- ci arrivent toujours dans le sang reconstituées à l’état d’albumine. Cependant, selon M. le docteur Mialhe, ce ne serait pas en l’état d’albumine proprement dite , que ces substances seraient transformées par l’acte di- gestif et parviendraient dans le sang. Toutes les matières albuminoïdes sans exception, dit cet habile chimiste, sont en dernier résultat, transfor- mées par la pepsine en une substance qui présente tou- jours la même réaction chimique, bien que probable- ment elle ait une composition chimique un peu diffé- rente suivant qu’elle provient de tel ou tel composé albumineux. C’est ce produit ultime, comme nous l’a- vons déjà dit, que M. Mialhe a désigné sous le nom d’albuminose, et auquel M. Lehmann avait donné celui de peptone. Quoi qu’il en soit, nous insistons sur ce point, il est indispensable que les divers principes, albuminoïdes, féculents, sucres, corps gras, soient associés entre eux et qu’ils subissent simultanément des métamorphoses spé- ciales dans l’économie pour arriver à faire partie du sang. Nous trouvons la preuve évidente de ce fait dans la composition du lait; cet aliment typique si admira- blement préparé par la nature pour les forces et les be- soins de l’organisation du jeune animal. En effet, quoique le sang de la mère non-seulement renferme tous les 232 NUTRITION. principes propres à la nutrition, mais encore qu’il con- tienne ces principes dans l’état le plus voisin delà com- position de tous les tissus et de tous les liquides de l’é- conomie, il n’est cependant pas employé comme aliment à l’état de sang par la nature; ce n’est qu’après que ce liquide a été transformé en lait chez la mère, c’est-à- dire en principes particuliers, caséine, sucre de lait, beurre, que dans l’organisation du jeune animal, ces principes sont reconstitués à l’état de sang et fournis- sent ainsi un liquide nutritif approprié aux forces orga- niques et aux diverses conditions de la nutrition. Il ne doit pas être un seul corps, dit M. CI. Bernard, si ce n’est l’oxygène et l’eau, qui se combine en nature avec les tissus sans avoir été préalablement soumis à des mé- tamorphoses que lui imprime le travail organique. L’al- bumine du blanc d’œuf n’est assimilée qu’après avoir été coagulée par le suc gastrique, dissoute ensuite et charriée dans le sang. Injectée dans les veines, l’al- bumine est éliminée; il en est ainsi même de l’albu- mine du sérum du sang. Il est donc indispensable que les principes nutritifs subissent, dans l’organisme, des modifications spéciales pour être incorporés au sang, et par suite fixés dans nos tissus. CHAPITRE TROISIÈME. DK LA FIBRINE. Distinction delà fibrine du sang et de la fibrine musculaire. — Dis- tinction delà fibrine dans les trois principaux liquides de l’écono- mie. — La quantité relative de fibrine est variable suivant le sys- tème vasculaire qui la renferme. — De la fibrine dans la lymphe, dans le sang veineux, dans le système de la veine-porte. — De la fibrine dans le système veineux général. —Delà fibrine dans le sang artériel. — Conclusion. PIB U INK DU S ANG. Considérations générales. 222. — L’albumine, comme nous l’avons dit, est le point de départ de la génération de tous les tissus et de tous les fluides de l’économie; cependant l’albumine 11’arrive à constituer ces tissus et ces fluides qu’autant qu’elle subit l’influence de diverses actions qui mettent en mouvement ses molécules élémentaires. Ces actions résultent particulièrement de la présence de l’oxygène dans l’organisme. Mais ce gaz ne pénètre pas en quan- tité égale dans tous les points de l’économie, et, en ou- tre, son action est plus ou moins combattue selon les corps qu’il y rencontre. C’est ainsi que l’action de l’oxy- gène s’exerce très-activement dans les poumons et dans 234 NUTRITION. le système capillaire artériel, et que cette activité est bien moindre dans les capillaires veineux et dans les vaisseaux lymphatiques. La fibrine, comme l’albumine, fait partie du sang, mais avec cette différence que l’albumine arrive dans le sang de toutes pièces, pour ainsi dire, tandis que la fi- brine résulte des métamorphoses ou des combinaisons qu’éprouve l’albumine sous l’influence des corps avec lesquels elle se trouve en contact. La fibrine du sang offre, sous certains points de vue, des particularités qu’il est utile de signaler, car, quoique ces particularités se rapportent au sang veineux, elles sont cependant de nature à jeter du jour sur l’origine de la fibrine. Ainsi, tandis que l’albumine est contenue dans le sang, à l’état normal, dans la proportion de 75 à 85 pour 1000, selon MM. Becquerel et Rodier, la fi- brine n’en fait partie que pour 2,20 à 2,30 pour 1000, et cela assez invariablement. Si l’on soustrait par la sai- gnée du bras, une certaine quantité de la masse du sang, l’albumine et les globules diminuent, tandis que la fibrine, bientôt reconstituée, reprend ses proportions normales, si même elle n’augmente pas ; dans l’état inflammatoire, comme l’ont démontré les travaux de MM. Andral et Gavarret, Becquerel et Rodier, la fibrine du sang augmente et l’albumine ainsi que les globules diminuent, et cela, quant à l’albumine, dans une pro- portion équivalente à l’augmentation de la fibrine. C’est FIBRINE. 235 en effet de 2 à 6 millièmes que l’albumine est diminuée, et de 2 à 6 millièmes que la fibrine est augmentée. (MM. Becquerel et Rodier.) Or, sans chercher pour le moment à expliquer ces diverses particularités, nous en concluons qu’il existe entre l’albumine et la fibrine des relations très-intimes ; et si l’on considère que toutes les substances alimentaires albuminoïdes (albumine, fi- brine, caséine) admises dans les voies digestives n’ar- rivent dans le sang qu’à l’état d’albumine ou au moins sous la forme d’un produit qui offre la plus grande ana- logie avec cette matière, on a tout lieu d’admettre que la fibrine du sang naît des transformations que subit l’albumine sous l’influence de l’oxygène particulière- ment. Au reste, d’après les expériences de M. Scherer, la fibrine du sang n’est que de l’albumine à un premier degré d’oxydation. L’analyse chimique a, en effet, dé- montré, comme le fait observer M. Liebig, que l’albu- mine et la fibrine, sauf une quantité un peu moindre de soufre que contient cette dernière, renferment les mê- mes éléments organiques unis entre eux dans les mêmes proportions de poids, qu’elles sont enfin identiques dans leur composition, et qu’elles ne diffèrent que par l’ar- rangement de leurs éléments, différences qui, certes, peuvent très-bien être dues à la quantité relative d’oxy- gène qu’elles contiennent. La fibrine du sang, dans l’état frais, selon M. Schc- rer, a une grande affinité pour l’oxygène qui produit de 236 NUTRITION. l’acide carbonique à ses dépens. Or, dans les phénomè- nes de la nulrition, la fibrine, dont les éléments sont déjà à l’état de mouvement, doit agir, selon M. J. Mul- ler, comme un ferment sur les structures organisées du corps entier, et les solliciter à entrer dans le même mouvement; elle trouve dans le sang et les globules l’oxygène qui est nécessaire pour ce but. On sait, en effet, que toutes les parties organisées du corps ont, pour l’oxygène, une affinité rendue évidente par un fait bien connu, comme le remarque M. J. Muller, celui que les parties animales humides se putréfient difficilement lorsqu’on les soustrait à l’influence de l’air atmosphéri- que, tandis que placées sous cette inflence, elles ne tar- dent pas à subir la fermentation putride par suite d’une absorption d’oxygène, bientôt suivie d’un dégagement d’acide carbonique. En résumé, l’oxydation de l’albumine, c’est-à-dire sa transformation en fibrine, est subordonnée à la quantité d’oxygène admise dans l’organisme, à la proportion des globules ainsi que des matières carbonées et hydrocar- bonées en présence, ces corpuscules et ces matières pouvant modifier l’oxydation de l’albumine. Aussi, dans l’état physiologique, l’albumine est-elle protégée contre l’action de l’oxygène, et la formation de la fibrine aux dépens de cette substance ne s’opère que dans la me- sure des besoins de l’organisme, conditions essentielles à cause des relations si étendues de l’albumine dans les FIBRINE. 237 phénomènes nutritifs, tandis que la fibrine, qui peut être considérée comme le premier degré de décomposi- tion des matières albuminoïdes,parvenues dans le sang, est déjà arrivée à un état d’altération qui nécessite son emploi immédiat soit dans les tissus, soit comme agent fermentifère. On sait en effet que lorsque la fibrine excède ses proportions normales dans le sang, ce liquide est le plus souvent dans cette condition morbide qui constitue l'inflammation. Distinction de la fibrine du sang et de la fibrine musculaire. 223. — Comme nous venons de le voir, le rôle de la fibrine dans l'économie n’offre pas un moindre intérêt que celui de l’albumine. Par cela même que la fibrine naît des transformations que subit l’albumine, les propriétés dont elle est douée offrent des caractères d’activité variable , comme agent de mouvement dans les phénomènes nutritifs, selon qu’elle renferme en quantité plus ou moins élevée les éléments de l’albumine. Aussi la fibrine, soit qu’elle en- tre dans la composition de la fibre musculaire, soit qu’elle fasse partie du sang, présente des différences qu’il est fort important de reconnaître ; de plus, il y a encore des distinctions à établir, comme nous nous ef- 238 NUTRITION. forcerons de le démontrer, suivant que la fibrine se trouve dans les artères, les veines ou les vaisseaux lym- phatiques. La fibrine musculaire et la fibrine du sang ont, pen- dant longtemps, été confondues comme corps identi- ques; mais actuellement, selon MM. Liebig, Cl. Bernard, Robin et Verdeil, ces substances doivent être distinguées Tune de l’autre. En effet, la fibrine musculaire ou plutôt la musculine, comme M. Liebig l’a nommée et comme plusieurs chimistes la désignent aujourd’hui, se dissout immédiatement dans l’eau contenant un dixième d’acide chlorhydrique, tandis que la fibrine du sang, traitée de la même manière, se gonfle et devient gélatineuse. M. Denis toutefois ne considère pas la musculine comme un principe immédiat et surtout comme un principe propre aux muscles, le tissu du foie, du rein, des pou- mons, du cristallin, etc., lui ayant fourni une matière coagulable identique. Mais de ce que la matière coagu- lable des muscles peut se rencontrer dans d’autres or- ganes, il n’en résulte pas qu’on doive la confondre avec celle du sang. « La fibrine du sang, traitée par l’acide sulfurique concentré, donne une gelée transparente et légèrement jaunâtre, insoluble dans un excès d'acide. La fibrine du sang, soumise à l’action de l’acide sulfurique étendu, semble se dédoubler, en produisant une substance gé- latineuse insoluble, et un composé soluble dans l’eau; la parlie gélatineuse se dissout clans l’eau lorsqu’on a enlevé par des lavages l’excès d’acicle. » (MM. J. Pe- louze et E. Fremy.) Si l’on considère la proportion de fibrine que ren- ferme le sang, 2,20 à 2,30 pour 1000 à l’état normal, on est déjà porté à penser que ce n’est pas cette matière qui est utilisée dans la nutrition des muscles, car cette proportion ne répond pas à l’activité du mouvement nutritif dans ces organes. Enfin, au point de vue de leurs facultés nutritives, ces deux substances diffèrent entre elles d’une manière très- tranchée, car, d’après les expériences de Magendie, la fibrine du sang est loin de la musculine à cet égard, et selon M. Cl. Bernard, elle n’est pas assimilable, tandis que la musculine est généralement reconnue comme un des principes nutritifs les plus essentiels. FIBRINE. 239 Distinction de la fibrine dans les trois principaux liquides de l’économie. 22U. — La fibrine du sang et la fibrine musculaire diffèrent donc l’une de l’autre; mais la fibrine du sang, comme nous l’avons fait observer, doit encore cire dis- tinguée selon les vaisseaux dans lesquels elle circule, et c’est sous ce point de vue que nous allons l’étudier. Nous manquons de documents basés sur l’expérimen- tation pour établir la différence que présente la fibrine 240 NUTRITION. clans los systèmes artériel, veineux et lymphatique; aussi est-ce surtout par l’analogie et par des inductions tirées des phénomènes physiologiques et pathologiques qu’il nous sera possible de faire ressortir ces distinctions. Toutefois, nous ne sommes pas complètement dépourvu, car les recherches expérimentales de M. Scherer et les travaux plus récents de M. Denis tendent à jeter du jour sur cette question (63). Le sang en général (sang artériel, sang veineux, lym- phe), sans entrer dans des détails analytiques étendus, est composé d’albumine, de fibrine, d’une faible quantité de matières grasses, de sels alcalins et terreux, d’eau, et, de plus, de corpuscules particuliers, les globules. Mais le sang, suivant qu’il circule dans les artères, les veines ou les vaisseaux lymphatiques, présente certains carac- tères différentiels. Dans les artères, le sang est rouge et contient, selon MM. Mayer, Berthold, J. Muller etDenis, plus de fibrine et de matières extractives que le sang veineux, les globu- les y sont plus nombreux eten outre, chargés d’oxvgène. Dans les veines, le sang est noir et renferme des pro- duits de la digestion, des résidus de la décomposition générale, de la fibrine et aussi des globules, mais char- gés d’acide carbonique. Dans les vaisseaux lymphatiques, le sang est d’un blanc jaunâtre; il contient aussi de l’albumine, de la fi- brine et des globules, mais ceux-ci sont incolores; en FinaiAE. 241 outre, il existe une bien plus grande quantité d’eau que dans les liquides précédents. Tel est l’état du sang considéré d’une manière géné- rale, selon les vaisseaux dans lesquels il circule et dans chacun desquels il constitue un liquide particulier. Ces trois liquides ne sont donc pas identiques, et quoi- que, jusqu’à présent, il n’ait été établi par les analyses chimiques de différences entre eux que pour la compo- sition de quelques-uns de leurs éléments, néanmoins il est évident que par leurs propriétés et par leur mode d’action dans l’économie, ils se distinguent essentielle- ment l’un de l’autre. La quantité relative de fibrine est variable suivant le système vasculaire qui la renferme. 225. — Nous avons vu que la fibrine du sang et la fibrine des muscles ne doivent pas être confondues ; nous ferons maintenant remarquer que la quantité re- lative de fibrine que contiennent les trois principaux li- quides de l’économie est différente selon le liquide dont cette substance fait partie. Cette distinction est toute naturelle d’ailleurs, puisqu’elle résulte de la pré- dominance que peut présenter, sur les deux autres, un des systèmes vasculaires de l’économie. Ainsi le sys- tème lymphatique prédomine dans la première enfance, et, par conséquent, à cette époque de la vie, la fibrine se trouve en quantité plus considérable dans la lymphe 242 NUTRITION. que dans les deux autres liquides. Dans la jeunesse et dans l’âge adulte, c’est dans le système artériel que la proportion en est plus élevée, et le système veineux de l’homme dans l’âge mûr ou dans la vieillesse la présente en plus grande quantité. Cette augmentation de la pro- portion de la fibrine dans ces circonstances, nous le ré- pétons, n’est relative qu’au développement plus consi- dérable d’un système vasculaire à l’égard de l’autre, car la quantité de fibrine considérée dans un de ces liquides en particulier ne présente pas pour cela un chiffre plus élevé par rapport à la composition normale de ce li- quide. Dans la vieillesse, par exemple, la proportion de fibrine dans le sang est diminuée; ce qui n’empêche pas que le système veineux général n’en contienne une quantité relative plus considérable que les autres vais- seaux. « Chez le vieillard, dit M. [Chimie pa- thologique), la prédominance du système veineux sur le système artériel est des plus apparentes. En effet, tan- dis que le tissu des artères devient plus dense et plus rigide, tandis que le calibre de ces vaisseaux diminue, que leurs plus petites ramifications s’oblitèrent, les veines se dilatent et décrivent des sinuosités; en un mot, leur capacité s’accroît de telle sorte que, malgré la di- minution de la masse totale du sang , les deux tiers de ce liquide à peu près sont contenus dans ces vais- seaux. » Certes, en même temps que la fibrine existe en plus FIBRINE» 243 grande quantité dans le système vasculaire le plus déve- loppé, d’autres principes du liquide qui circule dans ces vaisseaux s’y rencontrent aussi en proportion plus éle- vée; mais la fibrine, à cause de ses propriétés particu- lières et du rôle important qu’elle joue dans l’état phy- siologique et dans l’état morbide, doit surtout nous occuper ici. Nous verrons plus loin d’ailleurs s’il n’y a pas, pour les autres principes comme pour la fibrine, des différences à établir selon le liquide dans la compo- sition duquel ils peuvent entrer. En résumé, ces distinctions sont fort importantes, car elles se rapportent à la fois aux modifications que su- bissent les phénomènes de la nutrition sous l’influence des différents âges de la vie, et à celles qui se manifes- tent selon la nature de la constitution individuelle. De la fibrine dans la lymphe. 226. — Nous avons fait remarquer d’une manière gé- nérale les différences qui existent entre les trois prin- cipaux liquides de l’économie ; nous allons maintenant entrer dans quelques considérations propres à mettre plus en relief les caractères qui distinguent ces liquides, particulièrement sous le rapport de leur influence dans les phénomènes de la nutrition. La lymphe, comparée au sang artériel et au sang veineux, est un fluide à peine pourvu d’activité vitale; 244 NurumoN. les vaisseaux dans lesquels elle circule participent eux- mêmes de cette inactivité. Pompée dans les tissus aux dépens du sang artériel et de la substance de ces tissus, la lymphe est unehumeursiwgeneris, etquine subit qu’àun faible degré les diverses influences qui mettent en mou- vementles éléments des autres liquides. La lymphe (67) renferme cependant de l'albumine, de la fibrine et des principes salins; mais ces matières y existent pour la plupart en minime proportion et dans une quantité d’eau bien plus considérable que n’en présentent le sang artériel et le sang veineux. Remarquons en outre que la composition de la lymphe, dans le système lymphatique général, est en grande partie dépendante de l’état du sang artériel ; dans l’abstinence , par l’appauvrissement du sang artériel, le système lymphatique devient turgide et se gorge de lymphe, mais d’une lymphe bien moins riche en matériaux organiques que dans l’état normal. Sous ces rapports, on comprend déjà que la lymphe soit inférieure au sang artériel et au sang veineux quant à l’activité dont ses éléments peuvent être doués ; ce- pendant, elle présente comme eux et au même degré la propriété de se coaguler, propriété remarquable, car d’après les analyses, la lymphe ne contiendrait qu’une minime proportion de fibrine proprement dite. Mais la fibrine est-elle bien la substance qui, dans la lymphe comme dans le sang d’ailleurs, constitue uniquement la matière coagulable? Nous ne le croyons pas, et c’est un 245 point que nous nous efforcerons d’élucider lorsque nous étudierons les aliments non azotés. Quant à présent, pour nous conformer aux idées reçues, nous continue- rons à donner le nom de fibrine à la matière coagulable de la lymphe, mais en faisant observer qu'il est très- probable que la fibrine n’entre dans la composition de cette matière que dans une proportion assez limitée. Mais, outre l’albumine et la fibrine, la lymphe contient des globules, globules blancs, et par conséquent déjà très- différents sous ce rapport seulement de ceux du sang. Quelle que soit l’origine de ces globules, toujours est-il qu’ils naissent dans la lymphe, y existent avec une or- ganisation spéciale, et qu’ils doivent jouer un rôle dans l’économie. Aussi est-il probable que, comme les glo- bules du sang, les globules de la lymphe peuvent se charger d’une certaine quantité d’oxygène, ainsi que paraissent le démontrer la coloration rose-rouge que prend la lymphe au contact de l’air et celle qui se re- marque à la peau sur le trajet des vaisseaux lymphati- ques, lorsque le travail inflammatoire accumule l’oxy- gène sur un point voisin de ces vaisseaux. Dans les vaisseaux lymphatiques qui viennent d*3 la rate, la lymphe, à certains moments, acquiert la couieur de l’eau rougie ; or, selon les expériences de M. J. Bé- clard et celles de MM. Kœllifer, Maleschotl et Gray, les globules du sang se détruisent dans leur passage par la rate, et si l’oxygène qu’ils abandonnent alors exerce son FIBRINE. 246 NUTRITION. action sur le sang veineux contenu dans cet organe, et y donne lieu à la formation de la fibrine qui se rend dans la veine-porte, il n’est pas irrationnel de croire que la lymphe dont s’emparent les vaisseaux lymphatiques rampant à la surface de la rate, n’est pas soustraite à cette action. Aussi nous croyons que, dans cette circonstance, non-seulement la lymphe acquiert de la fibrine, mais encore que ses globules se chargent d’une certaine quantité d’oxygène. Nous croyons en outre qu’un phé- nomène analogue doit s’opérer dans le système glandu- laire lymphatique général, et que c’est sous ces influen- ces que le chyle des chylifères, en entrant en conflit avec la lymphe dans les capillaires lymphatiques abdo- minaux, devient coaguiable. En effet, « en comparant, comme le dit M. J. Muller, le chyle des vaisseaux lymphatiques et le chyle contenu dans le canal intestinal, il ressort de suite que non-seu- lement les lymphatiques absorbent, mais encore qu’ils métamorphosent ce qu’ils absorbent; car c’est seule- ment lorsque la substance alimentaire se trouve conte- nue dans leur intérieur, qu’elle acquiert la propriété de se coaguler spontanément en partie, et plus elle avance dans le système lymphatique, plus cette propriété de- vient prononcée en elle. Peut-être, ajoute ce savant physiologiste, les lymphatiques des autres parties du corps transforment-ils aussi l’albumine en matière coa- gulable. » FIBRINE. 247 Au reste, il nous semble évident que la matière coa- gulable de la lymphe se forme au sein du système lymphatique, et que la nature de cette matière doit être en rapport avec le mode d’élaboration et l’espèce de matériaux qui lui donnent naissance ; et si cette matière est en partie constituée par de la fibrine proprement dite, elle est aussi formée d’une substance d’un autre ordre. Par cela même d’ailleurs que la fibrine fait par- tie de la lymphe, celte substance ne peut être douée que d’une activité très-relative dans les actes nutritifs, et son emploi dans l’économie doit-il se rapporter à la formation des tissus et des fluides qui participent des propriétés dévolues à la lymphe. Si ce n’est dans le système glandulaire, la fibrine de la lymphe, ainsi que toutes les matières qui font partie de ce liquide, l’albumine, les matières inorganiques, les produits de la digestion admis dans le canal thoracique ne sont pas employés par les vaisseaux lymphatiques, ce sont les artères qui les utilisent dans les organes. Or, charriée dans la lymphe avec le chyle des chylifères, la fibrine chemine dans le canal thoracique et est versée dans la circulation veineuse, où elle se confond avec les principes du sang veineux pour constituer le sang arté- riel dans les poumons. La lymphe, par conséquent, en- tre pour une partie dans la composition du sang arté- riel, et doit en modifier les propriétés selon la proportion dans laquelle elle y est admise. 248 NUTRITION. De la fibrine dans le sang veineux. 227. — Le sang veineux présente des différences très-notables dans sa composition, selon qu’il appartient à la circulation générale ou au système de la veine-porte. Ces différences sont évidentes, car il suffit de remarquer que, dans le système de la veine-porte, le sang est à la fois constitué par le sang veineux de la circulation gé- nérale et par les produits de la digestion absorbés par les veines mésentériques, tandis que la plupart des au- tres vaisseaux veineux du corps ne contiennent que le sang de la circulation générale. 11 en résulte que, rela- tivement à la fibrine dont nous nous occupons surtout ici, il y a des distinctions à établir suivant que cette substance entre dans la composition du sang de la veine- porte ou du sang des autres vaisseaux veineux. De la fibrine dans le système de la veine-porte. 228. — Dans le système de la veine-porte, la fibrine provient en partie de l’excédant de la fibrine artérielle et lymphatique qui n’a pas été employé dans le travail de la nutrition, mais particulièrement des matières albumi- noïdes du chyle intestinal dont s’emparent les capillai- res veineux mésentériques. Le chyle des veines mésentériques ne contient pas de fibrine de nouvelle formation; celle qui s’y trouve vient, finnin E. 249 comme nous venons de le dire, de la circulation géné- rale ; ce n’est que dans les gros troncs vasculaires du système de la veine-porte que se rencontre la fibrine formée aux dépens du chyle intestinal. Cependant, quoi- que le sang puisse subir des modifications particulières dans ces vaisseaux, comme nous le verrons dans la par- tie pathologique de ce travail, la fibrine, toutefois, n’v est pas formée. La fibrine de nouvelle formation paraît naître dans la rate, des transformations que subissent, sous l’influence de l’oxygène des globules du sang ar- tériel, les substances albuminoïdes du chyle amenées dans cet organe. On sait, en effet, qu’à certains mo- ments la rate augmente considérablement de volume et, sans doute, c’est particulièrement lorsque le sang de la veine-porte, chargé des produits de la digestion , est contraint de refluer vers cet organe, dont le tissu se prête singulièrement à l’accomplissement de ce phéno- mène. C’est alors que s’effectue la formation de la fi- brine, comme les recherches expérimentales de M. J. Béclard semblent le démontrer. Ce physiologiste a con- staté, par de nombreuses expériences, que le sang qui revient de la rate contient plus de fibrine que le sang veineux général, qu’il offre aussi plus d'albumine,mais qu’il est moins pourvu de globules. C’e t qu’en effet, comme l’a observé M. J. Béclard, les globules du sang se détruisent dans la rate, eLsans doute ces corpuscules contribuent non-seulement à la formation d’une partie 2'iiO NUTRITION. de la fibrine que contient le sang de la veine-porte, mais encore à celle de la fibrine de la lymphe. Nous de- vons faire observer, en passant, que ces substances, quoique nées dans les mêmes circonstances, ne doivent pas avoir des propriétés idendiques, car les éléments de la lymphe diffèrent évidemment des éléments du sang de la veine-porte, ces derniers étant surtout constitués par les matières albuminoïdes fournies par le chyle des vei- nes mésentériques, voie principale ou peut-être unique par laquelle les produits albuminoïdes de la digestion pénètrent dans le sang. La fibrine, d’ailleurs, quel que soit le point de l’économie d’où l’on puisse l’extraire, est une substance très-complexe et dont la composition est loin d’être parfaitement connue, comme le prouve surabondamment M. Denis, dont toutefois les nouvelles recherches sont de nature à éclairer celte question. Nous nous bornons à signaler ici l’influence que peut avoir la rate sur la formation de la fibrine du sang de la veine-porte, et sur celle de la lymphe, en nous réser- vant d’insister ultérieurement sur ce point par des con- sidérations d’un autre ordre ; néanmoins, nous ferons remarquer que l’usage attribué à la rate en celte cir- constance, pourrait jeter quelque jour sur la physiologie de la veine-porte et, en même temps, éclairer certains phénomènes morbides encore fort obscurs. Nous n’igno- rons pas qu’on a observé qu’aprôs l’ablation de la rate chez les animaux, il ne s’est manifesté rien d’assez no- 251 table pour donner lieu d’attribuer à cet organe des fonc- tionsbien essentielles, et que quelques physiologistes ont même avancé que la rate était un organe inutile ; mais, comme le fait observer avec juste raison M. J. Béclard, « il y a, dans l’organisme, beaucoup de parties qui peu- vent être isolément retranchées sans que la vie soit né- cessairement anéantie, ce qui ne veut pas dire que ces parties soient sans fonction. L’organisation lutte en quel- que sorte contre ces mutilations et assure l’accomplis- sement des fonctions d’une autre manière et sur d’au- tres points de l’organisme. » « Dans le piédestal de la colonne Trajane, dit M. Liebig, on peut enlever au ci- seau chaque pierre, si l’on a soin de remettre à sa place à mesure qu’on enlève l’assise suivante, la première as- sise qu’on avait retirée. Peut-on conclure de là que celte colonne soit suspendue en l’air et qu’aucune partie ne supporte celle qui est au-dessus? Non, et pourtant on a rigoureusement démontré que chacune des pièces ne supporte rien, caron les a toutes enlevées, sans nuire à la stabilité de la colonne. » (Traité de Chimie orga- nique. ) FIBRINE. De la fibrine dans le système veineux général. 229. — Dans le système veineux général, la fibrine résulte de la quantité excédante de la fibrine du sang ar- tériel et de celle de la lymphe qui n’ont pas été utilisées 252 NlIIUIloN. dans l'acte nutritif, l’une et l’autre resîant en dissolu- tion dans le plasma, sont versées par les capillaires ar- tériels dans les capillaires veineux et rentrent ainsi dans la circulation générale. La fibrine veineuse a donc deux origines, l’une, d’où provient la fibrine particulière à la veine-porte, l’autre, la fibrine de la circulation générale ; aussi ont-elles un rôle différent dans l’organisme somme, pour ce qui a trait surtout à la fibrine de la veine-porte, les beaux tra- vaux de M. Cl. Bernard nous en fournissent la preuve. On sait à n’en plus douter actuellement, d’après les expériences de ce savant physiologiste, que le foie fa- brique du sucre aux dépens des principes albuminoï- des de l’alimentation ; on sait que même pendant l’ab- stinence, si ce n’est lorsqu’elle a été trop prolongée, la production de sucre n’est pas suspendue dans le foie. Or, pendant l’abstinence, ce ne peut être que dans le sang que le foie puise les éléments propres à la forma- tion du sucre, et si l’on considère, comme l’ont démon- tré péremptoirement encore les analyses expérimentales de M. Cl. Bernard, corroborées de tout point par celles de M. Lehmann, que la fibrine du sang de la veine- porte disparaît en totalité dans le foie, on ne peut se refuser à reconnaître avec ces savants, que la fibrine du sang est le point de départ de la formation du sucre dans cet organe. Remarquons d’ailleurs que l’absti- nence prolongée qui détermine la délibrinisationdu sang FIBRINE. 253 est suivie de la suspension de la fonction glycogénique du foie. En outre, nous croyons pouvoir avancer que, non- seulement la fibrine est bien la substance qui est parti- culièrement utilisée pour la formation du sucre dans le foie, mais de plus que le sucre ne peut être fabriqué par cet organe si la fibrine a subi des modifications qui al- tèrent les principes qui la constituent. M. Cl. Bernard a en effet constaté que, dans l’état inflammatoire, la fonc- tion glycogénique du foie est suspendue et certes, ce ne peut être parce que, dans cet état morbide, la quantité de fibrine est accrue dans le sang, mais bien plutôt parce que cette substance n’est plus offerte au foie dans les conditions propres à remplir l’usage auquel elle est destinée. Il n’en est pas ainsi sans doute toutes les fois que la proportion de fibrine est accrue dans le sang, comme dans la grossesse, par exemple, où cet excès de fibrine répond aux nouvelles conditions nutritives, im- posées à la mère. Au reste, nous reviendrons en son lieu sur cette question, car, selon nous, à l’état de la fibrine dans le système vasculaire en général et particulièrement à l’al- tération de cette substance dans le système de la veine- porte, soit dans les phénomènes inflammatoires, soit sous des influences morbides particulières se rattachent les points les plus importants de la pathologie. En résumé, quelle que soit la source première de la 254 NUTRITION. fibrine dans les différents systèmes vasculaires de l’or- ganisme, la fibrine veineuse de la circulation générale est constituée par la quantité excédante de la fibrine ar- térielle non utilisée dans l’acte de la nutrition, mais en outre elle s’accroît dans le ventricule droit du cœur des principes sucrés élaborés par le foie, de la fibrine de la lymphe et du sucre que fournit le canal thoracique. C’est alors que la fibrine veineuse et la fibrine de la lymphe réunies ainsi que le sucre qui les accompagne vont, après leur passage dans les poumons, concourir à la formation de la fibrine artérielle, comme, au moins, cela nous paraît probable. 11 résulte de ces considérations que, comme principe nutritif dans le sang artériel, il y a tout lieu de penser que la fibrine doit posséder des propriétés différentes selon qu’une proportion plus ou moins élevée des prin- cipes qui la constituent sont fournis par le sang vei- neux ou par la lymphe. En étudiant la fibrine dans le sang artériel, nous allons voir jusqu’à quel point cette proposition peut être fondée. De la fibrine dans le sang artériel. 230. — Le sang veineux et la lymphe réunis dans le ventricule droit du cœur renferment tous les princi- pes et tous les produits nutritifs de l’alimentation et de l’organisme ; ce sont ces liquides, qui, chacun pour FIBRINE. 255 leur part, vont, après leur passage dans les poumons, constituer le sang artériel. L’un et l’autre, ainsi que nous l’avons dit, contiennent de la fibrine, mais le sang veineux en renferme dans une proportion bien plus éle- vée que la lymphe, ce qui s’explique d’ailleurs puisque le sang veineux n’utilise la fibrine qu’il contient que dans les poumons et, en la restituant ainsi au sang ar- tériel, tandis que la fibrine de la lymphe, si ce n’est dans l’enfance ou dans l’état pathologique, est en gran- de partie employée dans le système glandulaire lympha- tique. Quoi qu’il en soit, la fibrine s’épuiserait bientôt dans le sang artériel si elle n’y était constituée que par la fibrine veineuse et par celle de la lymphe; car, si ce n’est la lymphe qui peut fournir de la fibrine de nouvelle formation, le sang veineux ne contient que celle qu’il puise dans le sang artériel. 11 était donc indispen- sable que la fibrine artérielle qui est continuellement utilisée dans les actes organiques, fût incessamment ré- générée ; c’est en effet ce qui a lieu lors du passage du sang veineux et de la lymphe par les poumons, et dans ce cas, la fibrine artérielle peut être plus particulière- ment constituée par les éléments du sang veineux ou par ceux de la lymphe, suivant que l’un ou l’autre de ces liquides fournit en proportion plus ou moins éle- vée les principes propres à sa formation. Or, dans les poumons, outre l’action particulière que l’oxygène de l’air exerce sur les globules, ce gaz a une 256 NUTRITION. influence non moins réelle sur les autres principes du liquide qui les traverse, suivant, toutefois, l’affinité qu’ils présentent et la facilité avec laquelle leurs élé- ments peuvent être mis en mouvement. On sait, d’après les expériences de M. Cl. Bernard (175), que le sang veineux, avant de pénétrer dans les poumons, contient beaucoup de sucre, tandis qu’à sa sortie de ces organes, si ce n’est à certains moments, on en constate à peine quelques traces. Le sucre a donc été utilisé dans les poumons, et ce ne peut être uni- quement aux combustions de l’acte respiratoire qu’une aussi grande quantité de cette matière a été employée, puisque, comme M. Cl. Bernard l’a encore démontré, la chaleur, bien loin de se développer dans cette cir- constance, s’abaisse au contraire (122). Le sucre, par conséquent, n’arrive pas au sang artériel dans son état propre; mais bien sous une au Ire forme, et pour nous, comme nous nous efforcerons plus loin d’en faire la dé- monstration, il se combine, sous l’influence des ac- tions chimiques que détermine la présence de l’oxy- gène, avec l’albumine et concourt à la formation de la fibrine. Telle nous paraît être l’origine de la fibrine artérielle; et c’est ainsi que le sucre, dans les poumons, peut sur- tout garantir l’albumine des atteintes de l’oxygène et qu’en outre, selon sa provenance et la quantité dans laquelle il est fourni, suivant aussi la proportion d’albu- FIBRINE. 257 mine qu’il rencontre, et d’oxygène en présence, il prend part à la formation d’une fibrine plus ou moins active, ou en d’autres termes, plus ou moins apte à en- trer en mouvement dans les actions organiques. C’est encore ainsi que le sucre, en se combinant avec l’al- bumine, sert de modérateur au mouvement imprimé à cette substance, et que la fibrine qui résulte de cette combinaison, protégée d’ailleurs par la présence de cer- tains principes salins, peut traverser les gros troncs vas- culaires sans manifester ses propriétés; condition bien es- sentielle, car il peut se produire de la fibrine dans les poumons ou dans d’autres points de l’organisme, sans le concours du sucre, et c’est précisément lorsque, sous l’influence de l’oxygène en excès, ou de la diminution des matières non azotées ou salines, l'albumine, direc- ment et vivement attaquée, passe à ce degré d’oxygé- nation qui la rapproche très-probablement de la nature de la fibrine musculaire; mais alors, ce n’est plus la fi- brine normale du sang artériel, et ce liquide a acquis des propriétés qui le font sortir de l’état physiologique. Conclusion. 231. — Dans le sang artériel, sont donc rassemblés les divers principes propres à la formation de tous les tissus et de tous les liquides de l’économie et dans des conditions telles qu’ils sont aptes immédiatement à être 258 NUTRITION. utilisés par le travail de la nutrition, Or, la fibrine du sang artériel est constituée par la fibrine du sang vei- neux et celle de la lymphe, mais en outre par la fibrine de nouvelle formation qui s’est produite aux dépens du sucre et de l’albumine de ces liquides. Parvenues dans le sang artériel, la fibrine du sang veineux, celle de la lymphe et la fibrine de nouvelle formation ne doivent plus être considérées que comme une substance unique, mais qui peut être douée de propriétés plus ou moins actives selon la proportion de principes fibrineux pro- venant du sang veineux ou de la lymphe ; car, nous insistons de nouveau sur ce point, la fibrine est une des substances du sang qui, avec les globules, doit être en- visagée comme le mobile des actions chimiques qui se développent dans l’organisme (222-223). 232. — Ainsi que dans les autres vaisseaux de l’éco- nomie, ce n’est pas pendant le cours du sang dans la capacité des gros troncs artériels que se manifestent les actes de la nutrition, mais bien dans le système capil- laire; et c’est la liqueur du sang, c’est-à-dire le plasma chargé des globules et tenant en dissolution l’albumine, la fibrine et les autres principes du sang, qui fournit tous les éléments nécessaires au développement des phéno- mènes nutritifs. Or, dans le système musculaire, les globules du sang artériel entrent en conflit avec les di- vers principes du plasma, et c’est alors que se produit aux dépens de l’albumine et de l’oxygène des globules, FIBRINE. 259 la fibrine musculaire, c’est-à-dire la substance qui, dans l’organisme, est douée du mouvement moléculaire le pins actif. Mais on sait que la fibrine musculaire se forme avec plus ou moins d’abondance selon les divers besoins de l’organisme, et suivant aussi l’activité que détermine l’exercice des muscles ; nous devons faire remarquer en outre que la fibrine musculaire, la musculine, ne con- stitue pas seule la substance des muscles, et que ces or- ganes contiennent une autre matière qui forme le tissu dans lequel se dépose la musculine ; par conséquent, cette matière doit, en même temps que la substance musculaire proprement dite, recevoir les éléments nu- tritifs qui lui sont propres. Or, ces diverses conditions sont toutes remplies dans la nutrition des muscles, mais à des degrés différents selon les qualités du plasma. Pour rendre notre pensée plus intelligible, nous allons exposer quelques-unes des circonstances auxquelles doit répondre la composition de ce fluide. 233. —Dans la première enfance, comme nous l’a- vons déjà dit, un des principaux besoins de l’organisme réside dans la génération, l’entretien et l’accroissement du tissu propre à constituer la trame dans laquelle doit se déposer successivement la substance des organes. Nous avons précisément fait remarquer qu’à cet âge corres- pond le développement prédominant du système lym- phatique. Ne ressort-il pas alors de ces considérations 260 ivuriUTiûN. ainsi que de l’espèce d’alimentation (le lait), de la na- ture du chyle auquel cette alimentation donne lieu, des transformations que ce chyle subit dans le travail de l’absorption, que le plasma contient des éléments dans lesquels prédominent les principes nutritifs, plus parti- culièrement élaborés parle système lymphatique. C’est- à-dire, en négligeant les autres principes qui, cependant, ont aussi leur rôle important, que le plasma, dans cette circonstance, contient plus de fibrine provenant du sys- tème lymphatique que de fibrine fournie par le système veineux; plus de globules de la lymphe relativement que de globules du sang, enfin des principes nutritifs plus réfractaires à l’action de l’oxygène, et par conséquent très-aptes à la composition du tissu cellulaire, et qui ré- pondent essentiellement au mode de vitalité de ce tissu. Aussi en résulte-t-il que les principes qui constituent la substance musculaire de l’enfant, sont très-pauvres en musculine et très-abondamment pourvus au contraire de ceux qui entrent dans la composition du tissu cellu- laire. On sait en effet que la chair des jeunes animaux fournit de la gélatine en grande quantité. Et si l’on re- monte à la génération de ces tissus chez le fœtus, on rencontre sous sa forme première, la matière qui, en se métamorphosant sur place, constitue la trame celluleuse des muscles, et qui n’est autre que la glycose. Dans une de ses nombreuses expériences, M. Cl. Bernard n’a-t-il pas démontré qu’en traitant des muscles de fœtus très- FIBRINE. 261 jeunes parla macération dans l’eau, à la température de -f- 5 à —f— 6®, ensuite par le réactif cupro-potassique, on découvre une notable quantité de sucre? 23â. — Ajoutons que pour dernier terme des méta- morphoses que subissent les principes nutritifs dans l’organisme de l’enfant, nous trouvons dans la sécrétion urinaire l’acide hippurique comme chez les herbivores, c’est-à-dire ce corps que la chimie contraint à révéler son origine en le dédoublant en acide benzoïque et en sucre de gélatine (glycocolle). Notons en outre que, dans l’urine des enfants en bas-âge, il ne se rencontre que des traces d’urée. Aussi le mouvement de composi- tion l’emporte-t-il sur celui de la décomposition, ce qui vient encore prouver que les combustions déterminées par l’oxygène dans les tissus, sont très-limitées, et que, par conséquent, ce gaz rencontre dans l’organisme de l’enfant des matières fort réfractaires à son action. 235. —Dans l’âge adulte, alors que tous les organes sont arrivés à leur complet développement, le système musculaire est dans toute sa vigueur ; aussi attire-t-il énergiquement à lui les éléments nutritifs, surtout lors- que par les exercices, cet appareil est mis en activité. A cette époque de la vie, le système musculaire domine la nutrition ; mais le sang artériel est prêt à répondre à ces appels, car la nature de l’alimentation a départiaux veines (227) un rôle bien plus actif que celui qu’elles possédaient chez l’enfant, et ce sont elles plus particu- 262 NUTRITION. lièrement qui fournissent au sang artériel les éléments nutritifs dont il est avide; au système lymphatique est réservé le rôle secondaire. C’est alors que le plasma, pourvu d’une fibrine plus riche en principes actifs, con- tient en outre ces globules nombreux et rutilants qui, dans tous les points de l’organisme, vont porter le mou- vement et la vie. En effet, le sang qui, dans son trajet par les gros troncs, les branches et les ramuscules vas- culaires, a perdu progressivement la quantité d’eau et de sels qui maintenait la stabilité dans ses éléments, ar- rive enfin dans les extrémités capillaires, où ces élé- ments rapprochés dans le plasma, entrent en conflit avec une énergie favorisée par les activités vitales. Les glo- bules, que rien ne protège alors, sont vivement atteints par l’oxygène qu’ils contiennent, et leur destruction est le point de départ du mouvement imprimé aux molé- cules déjà ébranlées de la fibrine et des actions chimi- ques si complexes qui se produisent avec les autres prin- cipes du sang et le tissu des muscles. C’est enfin sous ces influences que naît la fibre musculaire, tissu cellu- laire et musculine, du dédoublement de la fibrine, des métamorphoses de l’albumine et des mutations qui s’o- pèrent avec la substance propre des muscles elle- même. De là, ces mouvements de composition et de décomposition si remarquablement actifs dans le tissu musculaire, ces produits si variés, la créatine, la créa- tinine, l’inosite, l’acide inosique, l’acide lactique, et pour FIBRINE, 263 dernier ternie de ces métamorphoses, Y urée pour les principes albuminoïdes proprement dits, et Y acide uri- que pour les principes azotés d’un autre ordre. Nous re- marquerons en effet, que la proportion de l’urée conte- nue dans l’urine (18k), est en rapport avec la quantité de substances albuminoïdes renfermées dans le sang et avec l’activité du mouvement nutritif qui en détermine l’emploi, de même que la quantité de l’acide urique dans l’urine (190), répond à la proportion de fibrine que le sang contient et aux usages auxquels celte substance est destinée dans l’économie ; phénomène que nous voyons se produire en sens inverse dans l’état pathologique, alors que la fibrine modifiée et mise en mouvement avec une suractivité insolite par l’action de l’oxygène, ne peut plus être utilisée dans l’acte de la nutrition. Elle se consume en grande partie au sein du système vasculaire et s’y régénère aux dépens de l’albumine et des autres éléments du sang. C’est ainsi que dans l’état inflammatoire, la quantité cl’acide urique est accrue dans l’urine, celle de l’urée diminuée et qu’en même temps, la proportion de la fibrine se maintient en excès, avec plus ou moins de persistance, dans le sang. CHAPITRE QUATRIÈME. ALIMENTS PROVENANT DES TISSUS GÉLATINEUX. Tissus gélatineux. — Sont très-répandus dans l’organisme. — Leur mode de vitalité. — Différence qu’ils présentent à cet égard avec les autres tissus de l’économie. — La fibrine, proprement dite, ne doit pas constituer toute la matière coagulable du système vas- culaire. — Propriétés nutritives de la gélatine.— La gélatine est transformée en sucre dans l’organisme. — Expériences de M. Cl. Bernard. — Conclusion. Tissus gélatineux. — Leur mode de vitalité. — Diffé- rence qu’ils présentent à cet égard avec les autres tissus de l’économie. 236. — Parmi les tissus animaux, et par conséquent azotés, qui font partie des aliments, il en est sur lesquels les physiologistes sont encore en divergence d’opinion quant aux propriétés nutritives dont ils peuvent être doués ; tels sont les tissus qui, par l’ébullition dans l’eau, donnent de la gélatine. Les tissus susceptibles de fournir de la gélatine sont si abondamment répandus dans l’économie animale, qu’il n’en est peut-être pas un seul dont on ne puisse en extraire une certaine quantité. En effet, la gélatine entre dans la composition du tissu cellulaire, du tissu séreux, des membranes, des tendons, des ligaments, des tuni- TISSUS GÉLATINEUX. 265 ques des vaisseaux , du tissu organique des os, de la peau, etc.; par conséquent, cette substance est toujours mêlée en assez notable proportion avec les autres ma- tières alimentaires d’origine animale. Cependant, la gé- latine n’est pas considérée comme une substance nutri- tive, et n’est pas rangée dans la classe des aliments albuminoïdes. C’est qu’efïectivement, la gélatine man- que d’un des corps qui caractérisent les aliments al- buminoïdes, le soufre, et qu’en outre, dans l’organis- me vivant, les tissus qui la fournissent diffèrent des autres tissus de l’économie par une activité bien infé- rieure dans le mouvement moléculaire de la matière dont ils sont formés. « Les tissus gélatineux, dit M. Lie- big, la gélatine des os, les membranes, les cellules éprouvent dans l’économie une altération continue par suite de l’action de l’oxygène et de l’humidité; les par- ties qui se décomposent ainsi doivent donc être renou- velées par le sang ; mais cette transformation et cette restitution sont évidemment circonscrites par des limites fort étroites. Tandis que la graisse disparaît chez le ma- lade ou chez celui qui succombe à l’inanition, et que la substance des muscles reprend alors la forme du sang, les tendons et les membranes persistent dans leur état et tous les membres du cadavre conservent la cohérence qu’ils doivent à ces tissus. » (Chimie organique appli- quée à la physiologie.) Nous ferons observer en outre que le tissu nerveux, dans la composition duquel il en- 266 NUTRITION. tre de la matière gélatineuse et de la graisse phosphorée et azotée, présente aussi le même phénomène. Cette inactivité dans le mouvement de composition des tissus gélatineux et cette résistance qu’ils opposent au mouvement de décomposition sont en effet fort re- marquables, surtout si l’on compare sous ce rapport ces tissus avec les autres tissus de l’économie; car elles don- nent lieu de penser que la substance des tissus gélati- neux n’est si réfractaire aux mouvements et aux muta- tions que subissent les autres tissus sous l’influence des actions vitales, que parce que les éléments qui la consti- tuent sont dans un arrangement moléculaire qui semble- rait la rapprocher de la composition des principes de l’ordre organique proprement dit. En outre, elles font comprendre les phénomènes tout spéciaux que présen- tent les tissus gélatineux dans l’état morbide. Les tissus gélatineux doivent donc être distingués des autres tissus animaux, non-seulement sous le rapport du rôle qu’ils jouent comme substance alimentaire, mais encore sous celui de leur mode de vitalité dans l’écono- mie. Or, dans les fluides de l’organisme, nous avons reconnu (22è) que, parmi les principes qui entrent dans leur composition, il y avait aussi des distinctions à éta- blir, et ces distinctions ont surtout consisté dans la dif- férence que présente la fibrine selon son origine, selon les vaisseaux dans lesquels elle circule et suivant son emploi dans la nutrition des tissus. Nous arrivons donc à GÉLATINE. 267 rechercher si, parmi les substances alimentaires azotées ou non azotées, il n’est pas d’autres principes que les ma- tières dites albuminoïdes qui puissent aussi donner lieu à la génération et à l’entretien des Lissus, soit en se mo- difiant sous l'influence du travail organique, soit en en- trant en combinaison avec un ou plusieurs des éléments des substances albuminoïdes. La fibrine, proprement dite, ne doit pas constituer toute la matière coagulable du système vasculaire. 237. — Nous avons fait remarquer que tous les principes des tissus de l’économie étaient représentés dans le sang, sauf la matière gélatineuse, et en effet, les tissus d’où provient cette matière sont précisément ceux dont le mode de nutrition offre le plus d’obscurité. Néan- moins il y a quelques raisons de croire que si l’on n’a pas encore découvert dans le sang les principes de ces tissus, c’est qu’il n’a pas encore été possible, jusqu’à présent, de distinguer, dans les divers vaisseaux de l’é- conomie, la vérilable nature de la matière coagulable, et que, par ce motif, cette matière a été confondue avec la fibrine proprement dite. Cependant, comme nous l’avons déjà fait observer, nous ne croyons pas que la fibrine constitue toute la matière coagulable contenue dans les vaisseaux de l’organisme. Notre opinion trouve- rait un appui dans cette remarque de M. Cl. Bernard : 268 NUTRITION. '< Si l’on bat, dit ce savant physiologiste, le sang sorti du foie avec des verges, il ne s’y attache aucun filament; cependant il se coagule. La coagulation, qu’on avait jusqu’alors attribuée à la fibrine qu’on extrait par le battage, ne saurait donc lui être exclusivement rappor- tée. » On sait que M. Ci. Bernard, et particulièrement M. Lehmann, ont constaté, par de nombreuses expé- riences, que la fibrine disparaît complètement dans le foie, qu’on n’en retrouve plus de traces dans le sang des veines hépatiques ; cependant le sang de ces veines se coagule. Or, si d’après l’expérience que nous venons de citer, il y a lieu d’admettre dans le sang une matière coagula- ble autre que la fibrine, jusqu’alors l’analyse chimique n’en a pas fait connaître la nature, mais nous n’en croyons pas moins à son existence, quoiqu’elle se révèle bien plutôt d’après l’analogie et l’induction que par des preuves expérimentales. 11 n’en serait pas ainsi toute- fois dans dans l’état pathologique. M. Bouchardat, en analysant la couenne inflammatoire dans le rhumatisme articulaire aigu, y a démontré la présence de la gélatine. (Ann. de Thérap., année 1851.) Cette matière, par con- séquent, existerait au moins accidentellement dans le sng. GÉLATINE. 269 Propriétés nutritives de la gélatine. 238.— Toutes les substances albuminoïdes, pour ar- river à faire partie du sang, doivent subir, dans l’acte digestif et dans le travail de l’absorption, des métamor- phoses qui les ramènent à l’état d’albumine (153-221). Aussi toutes les matières alimentaires qui ne peuvent être transformées en albumine, appartiennent ou à la classe des substances féculentes, lesquelles sont soumi- ses à des modifications spéciales dans l’organisme , ou à celle des corps gras. Il en résulte qu’une des matières que peuvent fournir presque tous les tissus animaux, la gélatine, ne peut trouver sa place dans aucune de ces classes et que, par conséquent, elle ne devrait pas être considérée comme substance nutritive. Cependant, si la chair des animaux est à juste titre considérée comme douée des propriétés les plus nutritives, n’est-ce pas parce qu’elle renferme, réunis dans les conditions les plus parfaites, les divers principes indispensables à l’accomplissement de tous les phénomènes de la nutri- tion, plus encore même que par cette matière éminem- ment nutritive, la fibrine qu’elle contient? Il a été prouvé, en effet, que cette substance, isolément, c’est- à-dire privée des matières qui l’accompagnent dans la chair des animaux, ne saurait remplir toutes les condi- tions de l’acte nutritif. Eh bien ! il n’en est pas autre- 270 NUTRITION. ment de la gélatine, car si nous comparons entre elles les matières alimentaires péremptoirement reconnues par l’expérience comme réunissant toutes les qualités nutritives, le lait, le froment, la chair des animaux, nous serons contraints de reconnaître la vérité de cette assertion. Ces matières, en effet, renferment, quoique dans des proportions et sous des formes différentes, les trois principes qui, par leur réunion, peuvent répondre aux divers besoins de l’organisme. Ainsi, abstraction faite des matières inorganiques, le lait contient de la caséine, du sucre et du beurre ; le froment, du gluten, de la fécule (qui peut fournir du sucre et de la graisse), et d’ailleurs des principes gras, quoiqu’en minime quan- tité; enfin la chair des animaux qui renferme de la fi- brine, de la gélatine et de la graisse. On sait que les libres musculaires soumises à une ébullition prolongée donnent de la gélatine, laquelle, selon Berzélius, ré- sulte de la transformation du tissu cellulaire par l’action de l’eau bouillante. Or, avec un principe reconnu émi- nemment nutritif se rencontre dans la chair des ani- maux, et en proportion assez élevée, une substance à laquelle un certain nombre de physiologistes ont refusé toute participation à l’acte nutritif. Il n’en est pas ainsi cependant, car la gélatine, si fréquemment introduite dans l’organisme, puisqu’elle fait partie de presque tous les tissus animaux, ne se retrouve ni dans les fèces, ni dans les urines, lors même qu’elle est contenue en excès GÉLATINE. 271 dans une ration alimentaire. Ainsi « un chien qui a avalé des os,dit M. Liebig, n’en rejette que la partie calcaire, tandis que la gélatine a disparu complètement dans son corps : la même chose s’observe chez les individus qui prennent pour leur nourriture comparativement plus de gélatine (dans le bouillon de viande) que d’autres substances. » « Un canard, nourri exclusivement avec de la gélatine, en a assimilé b gr. 78 en douze heures, et a pu vivre assez longtemps à ce régime. Il a seule- ment produit de l’acide urique en grande quantité. » (M. Boussingault.) Au reste, si l’on n’accorde pas à la gélatine des pro- priétés essentiellement nutritives, néanmoins, aujour- d’hui, on arrive à reconnaître qu’elle joue un certain rôle dans les phénomènes de la nutrition. Ainsi, M. Bous- singault a dernièrement exprimé l’opinion que la géla- tine n’est pas un aliment plastique mais un aliment res- piratoire, et M. le docteur Mialhe, dans son bel ouvrage sur la Chimie appliquée à la physiologie et à la théra- peutique, émet les propositions suivantes : « La gélatine est-elle destinée à être brûlée et à concourir à l’entre- tien de la chaleur animale , ou bien est-elle un aliment plastique propre à réparer la trame organique ? La ques- tion n’est pas encore expérimentalement résolue. Tou- tefois l’analogie conduit à admettre qu’elle a cette dou- ble fonction. » M. J. Béclard est beaucoup plus explicite, car voici comment il apprécie les propriétés de la gé- 272 NUTRITION. latine. « Le pouvoir nutritif de la gélatine a été con- testé et même formellement nié par un certain nombre de physiologistes. La gélatine ne peut pas entretenir la vie des animaux lorsqu’on leur administre cette substance isolément. En cela, elle ne se distingue point des autres matières azotées qui, données seules, ne peuvent pas nourrir non plus. La gélatine, associée à d’autres aliments, jouit-elle, comme les autres sub- stances azotées, du pouvoir nutritif? Des animaux ont été soumis à des expériences nombreuses et continuées pendant longtemps; l’homme s’estpris lui-même (M. Don- né en particulier), comme sujet d’expérience): or, il ré- sulte de tous ces faits que la gélatine du commerce, as- sociée à d’autres aliments, non-seulement ne concourt point à la nutrition, mais encore qu’elle agit à la ma- nière d’une substance purgative, et qu’elle est plutôt nuisible qu’utile. « Mais tel n’est point l’effet réel de la gélatine que nous prenons quotidiennement en assez grande quantité avec le bouillon, avec la viande, avec les os, avec la partie soluble des tendons, des ligaments, de la peau, du tissu cellulaire. Ces substances nourrissent à la ma- nière des autres substances azotées. Si la gélatine du commerce (ou colle-forte), obtenueà l’aide de la vapeur surchauffée, ou par les acides, à l'aide d’os puants et fétides (comme il est aisé de le voir dans les fabriques); si cette gélatine, dis-je, ne nourrit point, et si elle agit lutôt comme médicament que comme aliment, en pas- sant presque entièrement par les urines et dans les fèces, c’est qu’elle est profondément altérée dans sa nature. La gélatine obtenue par la coction des pieds de veau (tendons) ou par celle des os frais, est une substance réellement nutritive ; les expériences de M. Cl. Bernard sont positives h cet égard. » (M. J. Béclard, Traité élé- mentaire de physiologie humaine.) GÉLATINE. 273 La gélatine est transformée en sucre dans l’organisme. Expériences de M. Cl. Bernard. 239. — Ainsi la gélatine, après avoir été alternative- ment admise et rejetée comme substance nutritive, est enfin considérée aujourd’hui, et à bien juste titre, comme propre à être utilisée dans l’économie. Or, on connaît la réaction curieuse que l’acide sulfurique détermine sur la gélatine et qui donne lieu à la substance sucrée que Ton désigne sous le nom de glycocolle ; un phénomène ana - logue ne pourrait-il pas se manifester dans l’organisme? Les expériences suivantes, que nous empruntons aux Leçons de physiologie expérimentale de M. Cl. Bernard, jettent une vive lumière sur cette question : « l°Un chien adulte et de petite taille, pesant 4 kil.91, fut d’abord soumis à une abstinence absolue pendant quatre jours, afin de laisser les intestins se débarrasser des anciens aliments. (Depuis huit jours, du reste, le 274 NUTRITION. chienne mangeait que de la viande.) Pendant les six jours qui suivirent, on lui ingéra chaque jour, dans l’es- tomac, 370 grammes d’eau ordinaire tiède, contenant en dissolution 20 grammes de gélatine dite alimentaire. Une heure après son dernier repas, on sacrifia l’animal par strangulation. « A l’autopsie, faite avec beaucoup de précautions, j’ai constaté que la décoction du foie, jaunâtre et légè- rement louche, renfermait beaucoup de sucre; le dosage en donna 1,33 pour 100 du tissu hépatique. « 2° Un autre animal, une chienne, de taille moyenne, fut nourrie, pendant trois jours exclusivement, avec des matières gélatineuses, consistant en pieds de mouton, dont on avait enlevé les os, et qu’on avait fait bouillir avec de l’eau pour en séparer la plus grande partie de la graisse, qui venait surnager à la surface du liquide refroidi. Chaque jour, l’animal mangeait quatre pieds de mouton avec la gelée qui les entourait. Après trois jours de ce régime, et trois heures après son dernier repas, l’animal fut sacrifié par la section du bulbe rachidien. Je constatai que le tissu de son foie renfermait 1,65 pour 100 de sucre. Ua décoction hépatique était jaunâtre et légèrement opaline. » Conclusion. D’après ces expériences remarquables, il résulte que GÉLATINE. 275 la gélatine admise dans l’économie , subit dans le foie des modifications par l’intermédiaire desquelles cette substance est transformée en sucre, transformation bien plus complète que par l’acide sulfurique, puisque l’a- zote est éliminé. La gélatine et, par conséquent les tis- sus animaux qui la fournissent, ont donc un rôle déter- miné dans les phénomènes de la nutrition ; rôle impor- tant , indispensable même , car c’est ainsi que les carnivores, dont l’alimentation est privée de matières féculentes, trouvent, dans la chair des herbivores dont ils se nourrissent, ce principe non azoté, le sucre, qu’exi- gent si impérieusement les lois qui régissent la nutri- tion. C’est ainsi que leur régime alimentaire est com- plété, et que les trois principes essentiels à l’accomplis- sement régulier des phénomènes nutritifs, les matières albuminoïdes, le sucre et les corps gras arrivent réunis dans l’intimité organique. CHAPITRE CINQUIÈME. ALIMENTS DITS RESPIRATOIRES. — SUCRE. — CORPS GRAS. T. SUCRE. Propriétés chimiques de la glycose.— Usages attribués à la glycose dans l’organisme animal. — Usages et métamorphoses des ma- tières amylacées et du sucre chez les végétaux. — Le sucre, en acquérant de l’azote, est utilisé à la nutrition des tissus.— Con- sidérations à l’appui. — D’autres substances non azotées peuvent aussi acquérir de l’azote dans l’organisme. — Derniers termes des métamorphoses du sucre combiné avec l’azote.— Conclusion. - Actions chimiques sous l’influence desquelles peuvent s’opérer ces métamorphoses. — Expériences et considérations de M. Cl. Bernard. — Le sucre, transformé en matière coagulable, n’est pas seulement utilisé à la nutrition des tissus. — Des autres usages du sucre. — Le sucre des féculents et le sucre de l’orga- nisme ne doivent pas se comporter d’une manière identique dans les actes nutritifs. — Des usages du sucre comme aliment respi- ratoire. — De son rôle dans l’état morbide. — L’albumine et le sucre sont les principaux agents de la nutrition. — Emploi du sucre à la formation et à l’entretien du tissu osseux. — Des usages et des effets du sucre introduit en nature dans l’orga- nisme. —La transformation si remarquable que subis- sent les matières gélatineuses dans le foie, et les usages auxquels ces matières sont destinées dans l’acte de la nutrition nous amènent, par un rapprochement tout na- turel à étudier l’emploi du sucre qui provient des sub- stances féculentes. Nous avons vu (126, 13/i) que les substances féculen- tes sont transformées sous l’influence des sucs salivaires et pancréatiques en dexlrine et en glycose. Comme c’est sous cette dernière forme que ces substances pénètrent dans le sang, ce sera aussi sous cette forme que nous jetterons un coup-d’œil sur les propriétés et sur le rôle des féculents dans l’économie. Sans entrer dans de grands développements à l’égard des propriétés chimiques de la glycose, il nous semble opportun toutefois de rappeler quelques-unes de celles qui se rattachent plus particulièrement à notre sujet. SUCRE. 277 Propriétés chimiques de la glycose. 2/|l. — La glycose ou sucre de raisin, sucre de dia- bète, sucre de la deuxième espèce, est extraite des rai- sins, des châtaignes, des figues et autres fruits sucrés. Le ligneux, l’amidon, la fournissent aussi ; elle existe chez les végétaux au moment de la germination. Dans l’organisme animal, la glycose se rencontre dans le tube intestinal, résultat des métamorphoses des sub- stances féculentes, et surtout dans le foie, dans le foie des carnivores même , comme l’ont démontré si pé- 278 NUTRITION. remptoirement les expériences de M. Cl. Bernard. Se- lon M. Colin, il en existe aussi dans les chylifères et le canal thoracique, chez les herbivores et les carnivores. Dans la vie fœtale, comme nous l’avons déjà signalé, M. Cl. Bernard a encore démontré la présence de la glycose, mais alors, selon l’âge du fœtus, elle existe dans le tissu des muscles et des poumons ou dans le foie. 11 a aussi été trouvé du sucre dans la substance mus- culaire (M. L. Figuier, M. Bouchardat) ; le sucre entre dans la composition du liquide céphalo-rachidien; il fait partie du lait, mais sous une autre forme ; enfin on le rencontre dans l’urine (diabète). Bien que par la présence du sucre dans ces diverses parties de l’organisme, on est déjà porté à penser que ses usages ne peuvent se borner à l’entretien de l’acte respiratoire et des combustions qui s’opèrent dans l’é- conomie, aussi n’est-ce pas son unique emploi, comme nous nous efforcerons de le démontrer. Le sucre de l’organisme ou glycose est analogue au sucre de raisin, d’amidon, de fruits, etc. ; et par consé- quent, il en possède les propriétés chimiques. La glycose est moins soluble que le sucre de canne, cependant elle se dissout dans une partie et demie d’eau froide, et en toutes proportions dans l’eau bouillante. Elle est très-soluble dans l’alcool froid. Elle polarise à droite. L’acide sulfurique qui altère le sucre de canne, dissout au contraire la glycose et se combine avec elle, mais elle est attaquée par les alcalis qui la colorent en brun, tan- dis qu’ils ne modifient pas la couleur du sucre de canne. La glycose se combine aisément avec le sel marin. Une solution de glycose dissout l’oxyde de plomb en grande quantité à Laide de la chaleur. Le sirop de glycose dissout en quantité considérable la chaux et la baryte. Ces deux oxydes se combinent dans certaines circonstances avec cette matière. La glycose réduit facilement certains oxydes métal- liques, notamment l’oxyde de cuivre. La réduction de cet oxyde par la glycose a été régularisée par M. Bar- reswill au point que l’on peut non-seulement décou- vrir la glycose dans un liquide, mais encore en déter- miner la quantité. Soumise à l’action de la levure de bière, la glycose se décompose en acide carbonique et en alcool, et elle se métamorphose en acide lactique sous l’action du caséum. Comme la gomme, l’amidon, la dextrine, le sucre de lait, le sucre de canne, la glycose en solution attaque, à la température ordinaire et par simple contact, le carbonate de chaux et se combine avec sa base, elle agit ainsi à l’égard de certains métaux bien décapés, le cuivre, le zinc, l’étain, le plomb, etc. C’est en effet ce qui résulte de son emploi dans les procédés lithogra- phiques. Il se forme, avec la pierre lithographique ou la planche métallique dont on fait usage, un composé SUCRE. 279 280 NUTRITION. insoluble dans l’eau, mais qui se laisse pénétrer par ce liquide et qui, en conservant humide la surface de la pierre ou des métaux, repousse les corps gras qui, au- trement, s’y fixeraient. La glycose, dans cette circon- stance, paraît se comporter comme le sucre de canne et former des sels particuliers. Ces composés, encore peu connus d’ailleurs, répondent à celui qui se produit quand on sature de chaux avec excès du sirop de sucre de raisin. Cet excès de chaux, selon M. Liebig, donne nais- sance à une combinaison basique que l’alcool précipite en grumeaux; ce précipité, lavé avec l’alcool, présente une masse blanche qui devient demi-transparente en attirant l’humidité de l’air. Usages de la glycose dans l’organisme. 242. — Il est assez généralement admis que le sucre formé dans le tube digestif aux dépens des substances féculentes, est surtout employé aux com- bustions de l’acte respiratoire, et que le dernier terme des métamorphoses de ces matières se résume à la trans- formation de leurs éléments en eau et en acide carbo- nique. Cependant, tout lesucre formé dans l’organisme, soit dans le foie aux dépens des substances azotées, soit dans le tube digestif avec les féculents, ne peut être brûlé pour les besoins de la respiration ; car, s’il dispa- raît souvent après son passage dans les poumons, sou- 281 vent aussi on le rencontre dans la circulation générale ou dans les tissus, sous sa forme spéciale ou transfor- mé en acide lactique. Pour le sucre du foie, M. Cl. Ber- nard a constaté que, pendant l'abstinence, ce sucre existe dans le sang qui du foie va au poumon, et qu’il disparaît du sang, qui du poumon se dirige vers le cœur ; mais que pendant la période digestive, le sucre du foie se retrouve dans la circulation générale. Selon M. L. Figuier, le sucre se rencontre dans les vaisseaux de la circulation générale , dans le système musculaire et même dans la veine-porte. M. Chauveau, dans un mémoire présenté à l’Académie des sciences, au mois de juin 1856, prétend en outre que, d’après des expérien- ces faites sur quatre chevaux et sur quatre chiens, il a reconnu que pendant l’abstinence même très-prolon- gée, le sucre ne disparaît pas dans le sang des vaisseaux de la grande circulation. D’un autre côté, pour le sucre des féculents, il résulterait des expériences auxquelles M. G. Colin s’est livré, que le chyle, la lymphe et le sang des herbivores contiennent du sucre, et selon M. Chauveau,que la lymphe pure est toujours sucrée et que le sucre se rencontre plus abondamment chez les herbivo- res que chez les carnivores. Or, de ces divers résul- tats, tous fournis par l’expérimentation, et que, pour le moment, nous ne chercherons pas à concilier, il res- sort évidemment que si le sucre disparaît en certaines circonstances dans les vaisseaux qui reviennent des pou- SUCRE. 282 nions, il est certain aussi qu’en d’autres cas, on le ren- contre non-seulement dans ces vaisseaux, mais encore dans tout le système vasculaire de l’économie. Au reste, la présence du sucre dans le liquide céphalo-rachidien, la formation de la lactine dans les mamelles, de l’acide lactique dans certaines parties de l’organisme, viennent encore démontrer que le sucre n’est pas complètement détruit dans les poumons. En outre, chez les herbivores particulièrement, dont l’alimentation est en si grande partie composée de matières non azotées, il y a, certes, une grande quantité de sucre qui n’est pas brûlé dans l’acte respiratoire ; aussi est-il généralement admis que le sucre non employé dans l’organisme subit certaines modifications par l’intermédiaire desquelles il arrive à constituer la graisse (47). Les expériences de M. Lie- big lèvent d’ailleurs tout doute à cet égard. L’usage du sucre n’est donc pas borné aux com- bustions de l’acte respiratoire. Or, dans son passage par les poumons, sous l’influence des matières albuminoï- des, des sels qu’il rencontre, de même que dans les di- verses actions qu’il subit dans l’intimité de l’organisme, le sucre ne peut-il pas encore éprouver d’autres méta- morphoses? C’est ce que nous allons rechercher. NUTRITION. Usages et métamorphoses des matières amylacées et du sucre chez les végétaux. 243. — Chez les végétaux, les substances féculentes SUCRE 283 sont les agents les plus importants de la nutrition. Les métamorphoses de l’amidon par la diastase en dextrine et en sucre, sont le point de départ des divers tissus et des combinaisons par l’intermédiaire desquelles les sels terreux et métalliques sont puisés dans le sol et ame- nés à faire partie de l’organisation de la plante. C’est dans les radicelles des végétaux que se produisent ces phénomènes; aussi est-il peu de radicelles qui, en cer- tains temps, n’aient la saveur sucrée. Mais, dans sa mar- che ascendante vers la tige, le sucre disparaît et, en même temps que cette disparition s’effectue, le ligneux se développe. « Si l’on suit, dit M. Cl. Bernard, la série de phéno- mènes vitaux dans une betterave, on voit que, pendant la première année, la plante accumule dans sa racine les matières qui s’y trouvent alors en grande abon- dance; mais si on la laisse se développer, l’année suivante, à mesure que la lige va s’élever et que les bourgeons se formeront pour produire des Heurs et des fruits, on verra le sucre monter de la racine dans la tige, s’y changer en sucre de la seconde espèce, enfin dispa- raître peu à peu ; et à l’époque de la maturité des grai- nes, la matière sucrée aura disparu dans toute la plante. Le sucre' accumulé, la première année, aura été détruit dans la seconde pour servir au développement complet du végétal. » (Leçons de physiologie experimentale.) Selon M. Liebig (Chimie organique), « une branche 284 NUTRITION. d’osier, dont le ligneux est riche en granules féculents, pousse des racines et des feuilles dans l’eau distillée et dans l’eau de pluie; mais parleur accroissement, la pro- portion d’amidon devient de plus en plus faible. Cette substance a évidemment servi à la nutrition de ces or- ganes. «Certes, comme le fait encore observer M. Liebig, l’acide carbonique, l’ammoniaque et l’eau sont bien cer- tainement les substances nutritives des plantes une fois développées, mais c’est l’amidon, le sucre et la gomme qui, s’ils sont accompagnés d’une matière azotée, four- nissent à l’embryon les principes nécessaires au déve- loppement de ses organes nutritifs. Voilà donc encore de nouvelles métamorphoses qu’il faut ajouter à celles que la matière amylacée a déjà su- bies. Ainsi, l’amidon est d’abord transformé en dexlrine, ensuite en sucre ou glycose, enfin en cellulose. Mais si le sucre fait la cellulose, la cellulose fait du sucre, car on sait que l’on peut transformer le ligneux en sucre de raisin par l’action de l’acide sulfurique. Une méta- morphose analogue se produit d’ailleurs dans la matu- ration des fruits. Avant la maturité, les fruits se com- posent d’un tissu cellulaire compact qui renferme les éléments du ligneux, et qui est rempli d’un liquide con- tenant très-peu de sucre, une matière gommeuse et une grande quantité d’acide libre; quand les fruits mûrissent, une partie de l’acide disparaît par l’influence de l’oxy- gène, le tissu cellulaire diminue et la quantité de sucre sucre. 285 augmente, de manière qu’au lieude fruits ligneux et aci- des, on a, après la maturation complète, des fruits qui fournissent un suc sucré renfermé dans leur enve- loppe coriace. Le sucre, en acquérant de l’azote , est utilisé à la nutrition des tissus. — Considérations à l’appui. 2hh. — Or, si l’on considère que le sucre est égale- ment formé en abondance dans l’organisme animal, qu’il y paraît aussi indispensable qu’à la nutrition des végétaux ; si l’on remarque, en outre, qu’il est sans cesse dans un milieu constitué particulièrement par des matières azotées sous l’influence desquelles s’opèrent en grande partie ses métamorphoses, n’est-on pas porte à penser qu’il peut, dans certaines circonstances, ac- quérir de l’azote et devenir alors le point de départ des tissus animaux qui, par leur composition et leur natu- re, se rapprochent, en quelque sorte, de la cellulose végétale? Que pour un moment on admette cette hypo- thèse déjà étayée d’ailleurs par les considérations qui précèdent sur la gélatine et sur les tissus gélatineux, et l’on a la cellule animale ; on a ce tissu cellulaire qui, comme le ligneux, résiste tant à l’action destructive de l’oxygène et du temps. On sait, en effet, que le tissu cel- lulaire des os, par exemple, est tellement indestructi- ble, que de Gimbernal a pu extraire de la gélatine de 286 la substance animale des os fossiles du mastodonte de l’Ohio, et de l’éléphant de Sibérie, animaux qui, selon Cuvier, sont morts depuis plus de 4000 ans. (M. Girar- din, Cours de chimie.) On a enfin tous les tissus ani- maux qui, par l’ébuilition dans l’eau, fournissent les ma- tières gélatineuses, lesquelles, comme la cellulose vé- gétale, donnent, par l’action de l’acide sulfurique, une substance sucrée, le sucre de gélatine (glycocolle), avec cette différence toutefois, que cette substance est azotée et qu’elle n’est pas fermentescible, différence qui n’existe plus lorsque la gélatine est transformée en sucre dans le foie, car, comme nous l’avons vu (239), ce sucre présente alors les mêmes propriétés que celui des féculents. Les matières gélatineuses perdent leur azote par les métamorphoses qu’elles subissent dans l’organisme et sont transformées en sucre ; ce fait est prouvé par les expériences de M. Cl. Bernard. Le sucre né des transfor- mations des substances féculentes ne pourrait-il pas en- trer en combinaison avec l’azote ? Ce que nous avons d’abord admis comme une hypothèse va, ce nous semble, acquérir, par les considérations et les faits suivants, la valeur d’une vérité démonstrative. « 11 me paraît hors de doute, dit M. J. Muller (Manuel de physiologie), d’après les expériences de Tiédemann et Gmelin, sur des oies nourries seulement de sucre ou d’amidon, que les aliments non azotés sont éliminés du corps sous la forme de principes constituants de la bile. NUTRITION. SUCRE. 287 Une oie à laquelle on ne donna que du sucre vécut vingt-deux jours; une autre vingt-sept avec de l’amidon sec, et une troisième quarante-quatre avec de l’amidon cuit. Après la mort de ces animaux, on trouva constam- ment de la bile dans le canal intestinal; il s’en était même épanché dans l’estomac du troisième ; le rectum contenait des excréments d’un brun-verdâtre, les cæ- cums étaient pleins d’une bouillie d’un vert foncé, et la vésicule du foie regorgeait de bile; comme les principes constituants de la bile sont, en partie, azotés, il faut admettre avec Liebig que les aliments non azotés, en s’échappant par la voie de la sécrétion biliaire, se com- binent avec une substance azotée. » Remarquons en passant que labile, abstraction faite des autres matières qui lui sont propres, renferme deux acides azotés, combinés avec la soude, l’acide choléique qui contient beaucoup de soufre, et l’autre, l’acide choli- que qui, en se dédoublant, donne de l’acide cholalique, du glycocolle et de l’eau, et que le premier représente très-probablement le résidu des métamorphoses des sub- stances albuminoïdes dans le foie , et l’autre celui des matières qui donnent lieu à la production du sucre dans cet organe. NUIRITION. L’autres substances non azotées peuvent aussi acquérir de l’azote dans l'organisme. — Derniers termes des métamorphoses du sucre combiné avec l’azote. 2/i5. — Au reste, le sucre est loin d’être la seule des substances non azotées qui, dans l’organisme, se com- binent avec l’azote, car on sait que le docteur Ure a de- puis longtemps appelé l’allenlion sur ce fait, que l’acide benzoïque donne lieu à la production de l’acide hippu- rique dans l’économie. « Les preuves fournies par le docteur Ure en faveur de la transformation de l’acide benzoïque en acide hippurique dans le corps humain, dit M. Liebig [Chimie organique appliquée à la physiologie), viennent d’être augmentées par M. Keller de plusieurs autres entièrement décisives, qui m’ont paru assez impor- tantes pour être annexées à cet ouvrage. Les recherches de\l. Keller furent exécutées au laboratoire deM.Wœhler, à Gœttingue. (Les expériences de M. Keller furent faites sur lui-même.) Elles mettent hors de doute ce fait qu'un corps non azolé pris dans les aliments peut, par ses éléments, prendre part aux métamorphoses des tissus et à la formation des sécrétions. » 1! est donc bien acquis à la science que des substances non azotées peuvent entrer en combinaison avec l’azote dans l’économie. Et si l’on considère que l’urine des en- fants en bas-âge et celle des herbivores contiennent nor- male ment de l’acide hippurique, il semble fort ration- SUCRE 289 nel de reconnaître que la présence de cet acide dans ce cas,est en rapport avec la prédominance des matières non azotées qui entrent dans le régime alimentaire des en- fants et des herbivores. L’acide hippurique serait alors dans la sécrétion urinaire, le dernier terme des méta- morphoses des substances non azotées qui auraient été combinées avec l’azote dans l’acte de la nutrition, comme l’urée et l’acide urique représentent le produit ultime des métamorphoses des matières azotées. Enfin, comme la chimie nous apprend que l’acide hippurique, traité par des acides énergiques, se dédouble en acide benzoï- que et en glycocolle (sucre de gélatine), cette réaction remarquable nous donne encore lieu d’apercevoir une nouvelle analogie entre les transformations du sucre des féculents et celles du sucre produit aux dépens des ma- tières gélatineuses ; de même que nous nous trouvons conduit à admettre que ces deux sucres, quoique de source différente, doivent concourir à la formation des tissus auxquels répondent les éléments qui les consti- tuent. Conclusion. 2Zi6. — En résumé, si par l’analogie , il est possible d’arriver à la découverte de la vérité (et encore ne pour- suivons-nous pas jusqu’au bout tous les rapprochements que nous pourrions faire), nulles analogies, ce nous sem- 290 NUTRITION ble, ne peuvent être plus frappantes. Aussi de ces considé- rations, et surtout des beaux travaux de M. Cl. Bernard, qui nous les ont suggérées, croyons-nous pouvoir con- clure que, comme les matières gélatineuses sont trans- formées en sucre dans l’économie, de même le sucre, à son tour, se métamorphose en substance gélatineuse. C’est ainsi que le sucre, soit qu’il résulte du travail gly- cogénique du foie, soit qu’il provienne des féculents, peut constituer, par sa combinaison avec l’azote dans le sang et dans la lymphe, une matière coagulable autre que la fibrine proprement dite, et que, outre les usages qui lui sont généralement attribués, il est le point de départ de la génération et de l’entretien des tissus géla- tineux, du tissu cellulaire en général. Actions chimiques sous l’influence desquelles peuvent s’opérer ces métamorphoses. — Expériences et consi- dérations de M. Cl. Bernard. 247. — Et maintenant quelles sont les actions chimi- ques sous l’influence desquelles peuvent s’opérer ces métamorphoses ? Grâce encore aux recherches si fécon- des de M. Cl. Bernard, on est sur la voie qui doit éclai- rer cette question. Ainsi, il y a tout lieu de croire que ces transformations s’effectuent lorsque le sucre se trouve en contact avec une substance albuminoïde mise en mouvement par l’action de l’oxygène et du calorique, c’est-à-dire sous l’influence de la fermentation. Il se passe alors dans l’organisme animal, un phénomène ana- logue à celui que nous avons signalé à l’égard de la pro- duction de la cellulose végétale, le sucre disparaît au fur et à mesure de la formation de cette matière plastique, de cette matière coagulable qui constitue la cellule ani- male. Au reste, nous ne saurions mieux faire qu’en ci- tant textuellement le passage de l’ouvrage de M. Cl. Ber- nard où cette importante question est traitée. « A l’occasion de l’enseignement qui m’a été confié à la Faculté des sciences, j’ai été conduit à faire quelques recherches de physiologie générale, qui m’ont amené à la découverte que je vais vous exposer aujourd’hui. Je portais mes études sur les conditions d’existence et de développement des cellules organiques. Vous savez, en effet, et c’est maintenant un fait bien connu, que les êtres vivants commencent par être formés de cellules qui, dans leurs évolutions ultérieures, produisent les diverses espèces d’organes et de tissus. Or, partout où se mani- festent des phénomènes vitaux, il y a deux choses à con- sidérer, l’être ou le tissu qui se développent, et le milieu dans lequel ils opèrent leur développement. Nous n’a- vons pas à rechercher pourquoi cette cellule primitive produit un être plutôt qu’un autre, un tissu plutôt qu’un autre. Ces questions de cause première ou finale ne sont pas, à notre avis, du domaine de la science, qui doit sagement se borner à constater les faits, en recherchant SUCRE. 291 292 NUTRITION. non pas pourquoi tel phénomène s’opère, mais de quelle manière, suivant quelle loi, et sous quelles conditions il se passe ? Il nous importe peu de savoir pourquoi tel embryon produit tel être ; mais nous sommes très-in- téressés à connaître le milieu, le terrain dans lequel il se développe, le mode d’après lequel s’effectue cette évolution, afin que, mis à même de prévoir ce qui doit se passer pour un être semblable, nous puissions réali- ser les circonstances qui lui sont favorables, ou les mo- difier à notre gré et à notre profit. C’est ainsi que les applications pratiques dérivent de la science pure. « Je commençai donc par faire des observations sur les conditions d’existence des êtres les plus simples. Je pris pour cela ces végétaux cellulaires microscopiques, appartenant à la classe des champignons, et je choisis la levure de bière. On savait déjà que ces végétaux se dé- veloppent spontanément quand on abandonne à la pu- tréfaction des liquides contenant des matières albumi- noïdes et du sucre en dissolution. Au bout d’un certain temps, on voit la liqueur se troubler, et il se dépose de petits corps oviformes, qui croissent jusqu’à la grosseur de 1/100e de millimètre et donnent naissance par bour- geonnement à d’autres corps semblables à eux qui, en produisant de nouveaux à leur tour, finissent par former des espèces de chapelets, tantôt simples, tantôt plus ou moins ramifiés, et composés d’un nombre variable de grains. Mais bien qu’on ail indiqué vaguement les con- SUCRE 293 ditions générales de cette production de la levure de bière, soit dans les liquides végétaux, soit dans les uri- nes de diabétiques, on n’avait pas eu une idée nette de la manière dont les choses se passent : on pensait que c’était la matière albuminoïde qui se transformait en ferment, sans se rendre bien compte du rôle que jouait ici la matière sucrée. Mes expériences me conduisirent d’abord à reconnaître que la présence de cette matière sucrée était indispensable à la production du ferment, qu’elle formait le milieu nécessaire à son développe- ment. « Je prenais de la levure de bière ordinaire que je délayais dans un peu d’eau, je filtrais sur un filtre com- posé de plusieurs feuilles de papier superposées, afin qu’il ne passât aucun globule, puis je séparais le liquide que j’avais filtré, et qui contenait quelques traces de matières albuminoïdes, en deux parts : l’une que j’a- bandonnais à elle-même, l’autre à laquelle j’ajoutais un peu d’une dissolution sucrée. « Or, dans la première, il ne se développait aucun grain de ferment, tandis que des globules de levure de bière se produisaient dans la seconde, en plus ou moins grande abondance, en même temps que la fermentation alcoolique s’opérait. Je pouvais étudier ces phénomènes en mettant un peu de ces liquides dans un petit godet de verre, recouvert d’une lamelle sur le porte-objet du microscope. 294 NUTRITION. « J’ai ensuite fait des expériences sur des liquides animaux. J’ai pris du sérum du sang qui, dans l’état normal, ne contenait pas de sucre; je l’ai laissé à une température de 15 à 20 degrés; il ne s’y produisait rien, et il se putréfiait au bout de quelques jours ; mais si je prenais du même sérum et que j’v ajoutasse un peu de matière sucrée, voici ce que j’observais, et vous pour- rez facilement répéter ces expériences et constater les mêmes faits. Au bout de quatre ou cinq jours, il se dé- veloppe des cellules, mais ce ne sont plus des cellules de levure de bière, ce sont des cellules blanchâtres qui semblent avoir do l’analogie avec les globules blancs du sang; ces cellules adhèrent les unes avec les autres, prennent naissance en très-grande quantité dans cer- taines circonstances, et particulièrement dans le sérum du sang de la veine-porte; ce n’est qu’après cette forma- tion de ces cellules particulières que des cellules de levure de bière se produisent à leur tour. Si l’on ajoute alors, sous le microscope, un peu de teinture d'iode, on voit que celles-ci se colorent fortement en jaune-brun, tandis que la couleur des premières n’est que peu modifiée. De plus les cellules de levure ne se dissolvent pas dans l’a- cide acétique, tandis que les autres sont complètement dissoutes, et disparaissent par l’action de ce réactif. « Or, ces caractères chimiques sont justement de ceux qui servent, dans beaucoup de cas, à distinguer sous le microscope, les éléments animaux des éléments végé- SUCRE, 295 taux. Ii semblait devoir en résulter que, dans ce milieu composé de sérum et de sucre, il s’était développé deux espèces de cellules; les unes paraissent d’organisation animale, plus ou moins analogue aux globules blancs du sang, les autres végétales, qui forment la levure de bière. Mais ces cellules qui ont ainsi pris naissance ne vont pas plus loin dans leur évolution ; au bout d’un temps variable, tout disparaît et le liquide se pu- tréfie. « Ces expériences me prouvaient que la présence d’une matière sucrée était nécessaire pour la production de cellules organiques isolées, dont certaines d’entre elles présentaient quelques-uns des caractères des éléments animaux. « J’en vins à me demander alors si le sucre, qui se rencontre dans le végétal partout où il y a un dévelop- pement à accomplir, dans la germination, au moment où l’embryon s’accroît, dans la sève, quand les bourgeons grandissent, ne serait pas aussi une condition du déve- loppement des tissus animaux, au moment où ce déve- loppement s’opère avec la plus grande intensité, c’est- à-dire pendant la vie fœtale ; si le milieu sucré, dans lequel j’avais vu prendre naissance une cellule très-ana- logue à un élément animal, mais qui n’avait pas en elle ou en dehors d’elle ce qui lui était nécessaire pour pour- suivre cette évolution et former un tissu ; si ce milieu, dis-je, albuminoïde et sucré, ne se retrouverait pas lors- 296 que cette évolution continue dans l’animal, où tout com- mence encore par une cellule ? « Je pris donc des fœtus de veau dans les abattoirs de Paris, où ils se trouvent en grande quantité, et je cher- chai d’abord dans leurs différents tissus en voie de déve- loppement, s’il n’y avait pas de matière sucrée. De quel- que manière que je m’y prisse, je n’obtins rien immédia- tement, mais j’observai, par exemple, que quand je laissais des muscles ou des poumons dans de l’eau ordinaire, exposée à une température de 15 à 20 de- grés, au bout de très-peu de temps, le liquide devenait très-acide, ce qui était dû à un développement considé> rable d’acide lactique, dont je constatais les caractères, comme nous le dirons plus loin. « Or, vous savez, Messieurs, que l’acide lactique dé- rive ordinairement de la matière sucrée par suite d’une transformation moléculaire, et qu’il a la même compo- sition élémentaire que le glucose (G12, H10, O10, 2 HO). « Il était donc naturel de penser que le sucre avait préexisté là où nous trouvions de l’acide lactique, de même que lorsque nous trouvons de la dextrine, nous concluons à l’amidon qui lui a donné naissance. Mais il fallait surprendre le sucre à sa formation, puisque pri- mitivement, on ne le trouve pas dans le muscle, ni dans le poumon. Il fallait arrêter la fermentation, ou du moins la rendre assez lente pour que nous pussions en saisir les diverses périodes, et c’est ce que nous avons NUTRITION» SUCRE, 297 obtenu, soit en exposant les macérations de tissus de fœtus à des températures basses, soit en les traitant par différentes substances, par l’alcool, par exemple, qui arrête la fermentation lactique sans empêcher la fer- mentation glycosique. Nous avons pu ainsi retirer du sucre du tissu des poumons et des muscles ; voici celte matière qui en contient énormément, ainsi que vous pouvez le voir à sa réaction sur letartrate cupro-potas- sique, et parce que, d’ailleurs, mise dans un tube avec de la levure de bière, elle donne de l’acide carbonique et de l’alcool, dont voici également un échantillon. « Nous avons donc trouvé ce fait, qui n’avait jamais été soupçonné, c’est que le poumon, c’est qu’un mus- i le qui se développe, comme la graine qui germe, con- tient une matière susceptible de se transformer en su- cre. Tant que l’être vit, ce sucre, pour ainsi dire à l’état naissant, est sans doute éliminé, transformé aussitôt que produit, et ne peut pas alors être décelé, mais au mo- ment où les fonctions vitales viennent à cesser, l’évo- lution spontanée de cette sorte de fécule animale, que nous n’avons pu isoler jusqu’à présent (*), continue néan- moins , mais alors comme un simple phénomène chimi- que. » (Leçons de physiologie expérimentale , 1854— 1855, p. 24à-) (*) Depuis la mise à l’impression de notre ouvrage, M. Cl. Ber- nard, dans une communication faite à l’Académie des sciences, a signalé l’existence positive et l’isolement de cette matière. 298 NUTRITION. Le sucre transformé en matière coagulable n’est pas seulement utilisé à la nutrition des tissus. 248. — Mais tout le sucre transformé en matière coa- gulable n’est pas entièrement employé à la nutrition du tissu cellulaire ; son rôle, sous cette forme, n’est donc pas terminé. En effet, comme la fécule dans les végétaux, une partie du sucre métamorphosé est mise en réserve dans le sang et dans la lymphe pour être prêt, sous cette forme, à satisfaire aux besoins immé- diats et incessants de l’organisme, soit en maintenant la densité si indispensable de ces liquides, soit en sub- issant, dans le foie, une nouvelle métamorphose qui le ramène à sa forme première. Des autres usages du sucre. — Le sucre des féculents et le sucre de l’organisme ne doivent pas se com- porter d’une manière identique dans les actes nu- tritifs. 249.—Jusqu’alors, nous avons attribuéau sucre, quelle qu’en soit la source, les mêmes usages dans l’organisme. Cependant, si nous considérons le mode d’alimentation et les résultats de la nutrition dans les deux classes d’animaux où se présentent, sous ces rapports, les dif- férences les plus tranchées, nous serons portés à pen- ser que le sucre qui provient des substances non azo- SUCRE. 299 tées et celui qui résulte exclusivement des métamorpho- ses des matières azotées, ne doivent pas se comporter d’une manière tout à fait identique dans l’économie ani- male. Chez les herbivores, par exemple, dont le régime alimentaire est en si grande partie composé de matiè- res non azotées, la chair est tendre et abondamment fournie de tissu adipeux, tandis que chez les carnivores qui ne se nourrissent que de la chair des autres ani- maux, c’est-à-dire presque exclusivement de substances azotées, la chair est coriace, comme tendineuse et à peu près dépourvue de graisse; aussi manque-t-elle des qua- lités qui distinguent celle des herbivores, en ce que, comme aliment, elle est bien plus difficilement atteinte par les sucs digestifs. Remarquons encore que les car- nivores sont doués d’une force musculaire beaucoup plus développée que les herbivores. Les animaux carnivores, dit M. Liebig, sont, en général, plus forts, plus hardis, plus belliqueux, que les herbivores qui deviennent leur proie. Il y a donc, entre ces deux classes d’animaux, non-seu- lement une différence très-marquée dans l’espèce d’ali- mentation qui leur est propre, mais encore dans les phénomènes nutritifs qui se produisent sous l’influence de leur régime alimentaire. C’est qu’en effet, chez les uns, la source première de la matière coagulable pro- vient des métamorphoses que subissent les aliments non a zotés dans le tube intestinal et des combinaisons qui 300 NUTRITION. s’effectuent avec les substances albuminoïdes apparte- nant au règne végétal ; tandis que chez les autres, celte matière naît presque exclusivement des transformations que le foie fait subir aux principes alimentaires azotés amenés directement dans le sang et des combinaisons qui s’opèrent avec des substances albuminoïdes prove- nant du règne animal. Ces différences ne sont pas moins caractéristiques au premier âge de la vie chez ces animaux, quoique l’her- bivore et le carnivore paraissent recevoir la même ali- mentation. Mais la nature a su réunir, dans le même aliment, des propriétés différentes. C’est ainsi que le lait des herbivores et celui des carnivores, tout en pré- sentant une quantité semblable de principes azotés et de principes non azotés, sont néanmoins doués de qua- lités particulières el en rapport avec le mode de nutri- tion propre à l’animal. Le lait des herbivores, en effet, renferme à peu près sur quatre parties de substances non azotées deux de sucre et deux de corps gras, tan- dis que le lait des carnivores ne contient pas de sucre, et ses substances non azotées sont uniquement consti- tuées par des matières grasses. Toutefois, comme il est indispensable qu’un aliment, pour remplir les diverses conditions de la nutrition, renferme du sucre ou soilsus- ceplible d’en produire dans l’organisme, le lait des car- nivores, ainsi que nous le verrons plus lard, doit contenir, sinon une substance analogue à la matière gélatineuse, SUCRE, 301 au moins des principes propres à être transformés en sucre. Quoi qu’il en soit, à l’époque de la vie où le lait est le seul aliment que reçoit l’animal, les tissus abondent particulièrement en matières gélatineuses; mais plus l’animal avance en âge et plus celte matière tend à ac- quérir de densité et de consistance, sans toutefois que la nature en paraisse essentiellement modifiée; c’est qu’a- lors, en même temps que l’alimentation diffère, des mu- tations s’effectuent dans les divers systèmes vasculaires. Au premier âge, les phénomènes nutritifs sont davan- tage sous la dépendance du système lymphatique; à l’âge qui succède, c’est le système artériel qui l’empor- te, et dans les âges suivants, le système veineux prend plus d’empire. C’est qu’enfin, en même temps que ces mutations se sont opérées, l’importance des fonctions du foie s’est progressivement accrue, une plus grande quantité de sucre est fournie par cet organe, et en conséquence, plus de matière coagulable arrive par cette voie dans l’organisme. Car nous devons le répéter ici, le foie, comme le démontrent les expériences de M. Cl. Bernard, fabrique du sucre non-seulement aux dépens des matières azotées de l’alimentation, mais encore aux dépens de celles du sang; et comme, par la circulation, une partie de la matière coagulable du sang, quelle qu’en ait été l’origine, arrive toujours dans le système de la veine-porte, il en résulte que la production du sucre 302 NUTRITION. dans le foie est augmentée par la quantité de cette ma- tière qui n’a pas été employée à la nutrition des tissus. C’est d'ailleurs ce qui a lieu selon l’époque de la vie de l’a- nimal, selon la prédominance du système vasculaire sous l’influence duquel s’effectuent les phénomènes nutritifs. Des usages du sucre comme aliment respiratoire. — De son rôle dans l’état morbide. 250. — On sait que le mouvement de nutrition, dans les tissus gélatineux, lorsque l’animal est parvenu à son complet développement, ne s’opère que dans des limites assez bornées. On doit comprendre, dès lors que, d’une part, il est tout naturel que la matière propre à entrete- nir ces tissus ne soit formée dans l’économie qu’en quantité proportionnée avec leurs besoins nutritifs, et, d’autre part, que les substances non azotées qui, à la pre- mière époque de la vie de l’animal, étaient en grande partie utilisées à la génération et au développement de ces tissus, doivent avoir une destination en rapport avec les nouveaux besoins de l’organisme. C’est alors que leur rôle, comme aliments respiratoires, deviendrait plus distinct. En effet, chez l’animal arrivé à l’àge adul- te, le sang est riche en globules et, par conséquent, l’o- xygène est abondamment admis dans l’organisme; aussi est-ce à cette époque de la vie que les substances non azotées contrebalancent plus particulièrement l’action de ce gaz en se combinant avec lui, soit pour former de SUCRE. 303 l’eau ou de l’acide carbonique. C’est ainsi qu’elles sont utilisées dans les combustions qui s’effectuent dans l’acte respiratoire ou plutôt dans l’intimité des tissus, enfin que l’excédant de ces substances est mis en réserve dans di verses parties de l’organisme, sous la forme de graisse. Si le rôle que joue le sucre dans l’état physiologique est d’une haute importance, il ne l’est pas moins, on doit le comprendre, dans l’état morbide. La présence en excès ou la diminution du sucre dans l’organisme, l’exagération ou la suspension de la fonction glycogé- nique du foie, l’augmentation ou l’abaissement du chiffre de la fibrine dans le sang, l’accumulation ou la disparition de la graisse dans les tissus, etc., etc., sont autant de cir- constances qui se rattachent à la même question et dont l’étude est d’un haut intérêt pour l’élucidation de cer- tains phénomènes pathologiques, pour l’interprétation des modifications survenues dans les actes nutritifs sous l’influence de la gestation, de l’allaitement, etc. ÎL’albumme et le sucre sont les principaux agents de la nutrition. — Emploi du sucre à la formation et à l’entretien du tissu osseux. 251.—En terminant cette étude plutôt sommaire qu’ap- profondie, nous ferons remarquer que si l’albumine est à juste titre placée au premier rang parmi les agents de la nutrition , on doit reconnaître que le sucre y occupe une place non moins importante. C’est qu’en effet, si éle- 304 NUTRITION. vées et si essentielles que soient les propriétés de l’al- bumine, ces propriétés, cependant, ne sont mises en jeu dans l’économie qu’autant que le sucre s’v rencon- tre, de même que c’est à la présence de l’albumine qu’il faut rapporter les diverses transformations du sucre. L’albumine et le sucre sont inséparables dans les actions chimiques delà nutrition, et c’est de leurs combinaisons, de leurs métamorphoses, de leurs dédoublements que naissent tous les tissus de l’économie; c’est enfin sous l’influence que ces deux substances exercent l’une sur l’autre que se produisent tous les phénomènes nutritifs. Si nous avons étendu les relations du sucre au delà du rôle qui lui est généralement attribué, nous sommes loin de croire que nous avons signalé tous les usages aux- quels il peut être destiné dans l’économie. En effet, si l’on considère avec quelle facilité le sucre et ses dérivés en- trent en combinaison avec certaines matières minérales telles que plusieurs oxydes ou sels métalliques, la chaux, la silice, les sels de soude, de cuivre, etc. , on doit com- prendre que sous de semblables influences, des modifi- cations importantes puissent être apportées dans l’action du sucre comme dans les métamorphoses qu’il subit. Aussi est-il probable que le sucre n’est pas étranger à la formation des os, comme le pense M. Verdeil, et comme nous le croyons aussi, car l’affinité du sucre pour la chaux et la silice, et sa transformation en sub- stance gélatineuse, démontrent, ce nous semble, qu’il SUCRE. 305 est appelé à concourir d’une manière toute particulière à la génération et à l’entretien du tissu osseux, de même qu’il pourrait bien servir de véhicule à certains corps dont il faciliterait ainsi l’accumulation dans quelques organes, le foie, par exemple. L’influence des substances minérales sur le sucre , dans l’organisme, n’est pas une hypothèse gratuite, car, par de nombreuses expériences faites sur les animaux, on a reconnu que le sel marin, par exemple, admis en excès dans l’économie, entrave la transformation du sucre en graisse. On sait encore que ce sel a une ac- tion manifeste sur le sang, il le défibrinise et peut- être bien plus en mettant obstacle aux métamorphoses du sucre en matière coagulable, qu’en agissant sur la fibrine, dont au contraire il nous paraît, jusqu’à un cer- tain point, favoriser la stabilité. On sait d’ailleurs que la production et l’accumulation de la graisse dans l’é- conomie sont en rapport avec l’inactivité du mouvement de nutrition dans les tissus ; aussi tout ce qui tend à exciter ce mouvement, tel que les exercices en général, le sel marin, etc., met obstacle à la génération du tissu adipeux. Des usages et des effets du sucre introduit en nature dans l’organisme. 252. — Introduit en nature dans l’organisme, le sucre ne se comporte pas complètement comme celui qui s’y 306 produit par les métamorphoses des féculents ou des ma- tières azotées de l’alimentation, si ce n’est, toutefois, chez les enfants et chez les jeunes animaux dont le lait est la nourriture exclusive; car, dans cette circonstan- ce, la lactose est appelée en partie, par sa conversion en acide lactique, à faciliter dans l’estomac la dissolu- tion des autres principes du lait, et de plus à être uti- lisée en nature par les voies de l’absorption. Chez l'a- dulte, le sucre est aussi le plus souvent transformé en acide lactique et de plus en acide acétique et il concourt aux mêmes usages. D’après les curieuses recherches que M. Becker a faites sur l’action du sucre, il résulterait que, sous l’influence de l’usage de cette substance, l’exhalation de l’acide carbonique et de l’eau par les poumons, est considérablement diminuée et que la transpiration n’est pas augmentée ; en outre, que les urines, à l’analyse, donnent une quantité bien moins considérable de phos- phates et de matières extractives. Mais, admis en excès dans l’économie, et surtout à l’exclusion d’autres prin- cipes nutritifs, il est la cause de désordres d’autant plus profonds, que l’usage en a été plus prolongé. Les expériences de Magendie, de MM. Tiedemann et Gme- lin, etChossat, ne laissent aucun doute à cet égard. Tous les animaux soumis au régime exclusif du sucre périssent en l’espace de quelques semaines dans un état de consomption et de maigreur excessives. On nutrition. sait que Stark s’est donné la mort en expérimentant le sucre sur lui-même, il devint d’abord extrêmement fai- ble et bouffi, et sa figure se couvrit de taches rouges qui menaçaient de dégénérer en ulcères. (M. J. Muller.) CORPS GRAS. 307 II. CORPS GRAS. Les corps gras ne sont pas seulement utilisés dans les combustions de l’organisme. — Les corps gras se rencontrent dans le règne végétal et dans le règne animal. — Propriétés chimiques des corps gras. — Glycérine. Ses propriétés chimiques.— Nécessité des corps gras dans l’alimentation. — Comme les autres substances alimentaires, les corps gras subissent des transformations spé- ciales pour être utilisés dans les actes nutritifs. — Origine des globules. — Opinions et considérations à l’appui. — Les corps gras contrebalancent l’action des sels calcaires et des sels alca- lins, et régularisent les métamorphoses du sucre. — Action des corps gras dans le mouvement de décomposition ; ils agissent comme agents désassimilateurs de la matière osseuse. — Cir- constances dans lesquelles la graisse est utilisée ou accumulée dans les tissus. — La graisse, reprise par les voies de l’absorp- tion, n’est utilisée dans l’économie qa’après avoir subi des trans- formations spéciales. — Usages de la graisse dans le tissu cu- tané. — Son rôle dans l’organisme, comme mauvais conducteur du calorique et du fluide nerveux. Les corps gras ne sont pas seulement utilisés dans les combustions de l’organisme. 253. — Les corps gras, comme les féculents, sont classés parmi les aliments respiratoires, et, par consé- 308 NUTRITION. quent, ainsi que ces derniers, ils sont utilisés aux com- bustions que détermine la présence de l’oxygène dans l’organisme. Mais s’ils sont assimilés aux mômes usages que les féculents, ils en diffèrent toulefois par le mode suivant lequel ils pénètrent dans le sang; car, tandis que les féculents sont transformés en sucre dans le tube digestif, les corps gras ne subissent aucune modifica- tion dans leurs éléments, puisqu’ils ne sont qu’émul- sionnés, et c’est en nature qu’ils arrivent dans la circu- lation. En outre si, dans certaines circonstances, on trouve constamment du sucre dans le sang ou dans les tissus, le plus souvent le sucre disparaît pour donner naissance à d’autres composés, tandis que les corps gras se rencontrent en nature dans presque toutes les parties de l’organisme. Certes, en signalant ces différences, nous n’avons pas pour but de révoquer en doute le rôle similaire du sucre et des corps gras dans les phénomènes de combustion de l’économie, ce serait nier l’évidence. Mais par cela même que les corps gras paraissent d’une utilité incon- testable dans l’alimentation , qu’ils se rencontrent dans presque tous les tissus animaux, qu’enfin ils sont doués des propriétés chimiques les plus remarquables et, jus- qu’à un certain point, en antagonisme avec celles du sucre, il nous semble que ces corps doivent avoir, dans l’acte de la nutrition, des usages moins restreints que ceux qui leur sont généralement attribués. Quelques CORPS GRAS. 309 considérations succinctes vont d’ailleurs étayer celle pro- position. Les corps gras se rencontrent dans le règne végétal et dans le règne animal. 254. — Les corps gras neutres sont abondamment répandus dans le règne animal et le règne végétal : « il n’y a pas d’animal qui n’en soit pourvu, il n’y a pas de feuille qui n’en contienne. » (M. Malaguti.) Dans les plantes, ce sont particulièrement les semences, le pol- len ainsi que la partie charnue qui enveloppe le fruit, qui renferment ces corps. Dans l’économie animale, le tissu cellulaire en est ordinairement le siège. Chez les mammifères, la graisse est abondante sous la peau, à la surface des muscles, autour des reins, à la base du cœur, dans les replis des épiploons, au niveau des articulations, dans le sens de la flexion, dans le sys- tème nerveux dont elle est un des éléments constitu- tifs, dans les cavités médullaires, dans les tissus spon- gieux des os, dans le tissu cellulaire de presque toutes les régions du corps. Les corps gras se trouvent aussi dans divers fluides de l’économie. Dans le sang, ils se rencontrent à l’état li- bre ou combinés avec l’albumine, la fibrine et l’héma- tine des globules, enfin à l’état de margarate, stéarate et oléate de soude, c’est-à-dire de savons. Dans le lait, 310 NUTRITION. ils constituent le beurre ; mais, en outre, le sérum du lait contient des principes gras en gouttelettes ; c’est ainsi qu’ils se présentent encore dans le chyle. La sy- novie, le mucus, la bile offrent aussi des principes gras. Le cerveau en contient en abondance à l’état de combi- naison avec le phosphore. Enfin, si ce n’est la substance propre des tissus osseux et dentaire, et la fibre du tissu cellulaire et élastique, des corps gras se rencontrent dans l’épaisseur de toutes les espèces d’éléments ana- tomiques. Il peut toutefois s’en déposer morbidement dans tous les tissus et dans tous les fluides. On sait qu’ils existent dans le pus et dans certaines dégénérescences des tissus. La graisse ne se présente pas dans un état identi- que chez tous les animaux, elle varie même selon les époques de la vie. Ainsi, chez les herbivores, elle est plus solide, plus ferme et moins odorante que chez les carnivores. Chez les oiseaux, elle est fine, douce, onc- tueuse, très-fusible ; chez les poissons, elle est presque fluide et très-odorante ; chez les jeunes animaux, elle est blanche et abondante ; avec l’âge elle se colore en jaune et diminue en quantité. Outre ces différences physiques, la graisse, selon les espèces d’animaux, en présente aussi sous le rapport de sa composition chimique, et les plus tranchées résultent de la proportion d’acide stéarique et margarique qu’elle contient comparativement à l’acide oléique. CORPS GRAS. 311 Propriétés chimiques des corps gras. 255. — On sait, d’après les beaux travaux de M. Che- vreul, que les corps gras sont constitués pour la plus grande partie par trois principes particuliers, Voléine, la margarine, et la stéarine, combinés entre eux dans une foule de proportions. Ces principes sont unis à une substance particulière, la glycérine. Les corps gras peu- vent donc être considérés comme des de glycérine avec divers acides gras. Les corps gras neutres sont très-facilement attaqués par les alcalis et les oxydes métalliques qui les trans- forment en acides gras avec lesquels ils se combinent, et en glycérine qu’ils mettent en liberté. C’est à la combi- naison des alcalis et des oxydes métalliques que l’on a donné le nom de savons, ou d’emplâtres, lorsque la com- binaison s’effectue avec l’oxyde de plomb. Par simple contact, les corps gras neutres se combi- nent avec certains métaux bien décapés, tels que le zinc, le cuivre, le plomb, l’étain, etc. Isolés, les acides gras attaquent ces mêmes métaux et forment aussi des com- binaisons savonneuses. Il en est ainsi des corps gras neu- tres et de leurs acides avec la pierre lithographique, carbonate de chaux silicé. Les combinaisons des acides gras à base d’alcali sont solubles, tels sont les savons de soude, de potasse, 312 NUTRITION. d’ammoniaque. Les corps gras ainsi combinés échan- gent facilement leur base; en effet, la solution de ces savons est précipitée par les sels terreux ou métal- liques en dissolution. C’est ainsi qu’avec les sels de chaux, de magnésie, de fer, de cuivre, etc., il se pro- duit des savons de chaux, de magnésie , de fer, de cui- vre, insolubles dans l’eau, mais qui, à l’exception du savon de chaux, se dissolvent dans les huiles grasses essentielles, l’alcool ou l’éther. Les corps gras n’attaquent pas les combinaisons ter- reuses ou métalliques formées par le sucre, telles que le saccharate de chaux, de cuivre, d’étain, de plomb, etc. Les corps gras dissolvent le soufre et le phosphore. Glycérine. — Ses propriétés chimiques. 256. — La glycérine a des propriétés qu’il est utile de signaler, elle est liquide, presque incolore ; elle a la consistance d’un sirop épais. Sa saveur est douce et franchement sucrée. C’est ce produit que Scheele ob- serva pour la première fois et qu’il désigna sous le nom de principe doux des huiles. La glycérine est incristallisable, elle est déliquescente et se mêle avec l’eau et l’alcool en toutes proportions; elle est insoluble dans l’éther. Chauffée à l’air, elle brûle avec une flamme lumineuse. Bouillie avec du sulfate de cuivre, elle en précipite le cuivre à l’état métallique. Elle est transformée en acide oxalique par l’acide ni- trique, en acide carbonique et en acide formique, par l’acide sulfurique et le peroxyde de manganèse. Elle se combine avec la potasse et la baryte. Elle dissout à chaud le sulfate de potasse, de soude, de cuivre, l’azotate de potasse et l’azotate d’argent. Le chlore et le brome l’altèrent. La glycérine, jusqu’à ces derniers temps, n’avait pu être combinée avec les acides gras, mais, en 185Zi, M. Berthelot a démontré que cette substance peut, sous l’influence d’une haute température et d’un temps très- prolongé, abandonner les deux équivalents d’eau qu’elle avait pris en se séparant des corps gras; elle se combine en même temps avec les acides gras qui sont en pré- sence et reconstitue ainsi la butyrine, l’oléine, etc. Quoique douée d’une saveur sucrée, qui la rapproche de quelques espèces de sucre, elle a été considérée jusqu’alors comme ne pouvant éprouver la fermentation alcoolique; mais, d’après M. Malaguti, la glycérine est une substance sucrée qui joue le rôle de l’alcool sans en avoir les propriétés fondamentales, et, dans un travail récemment présenté à l’Académie des sciences, M. Ber- thelot signale qu’il a obtenu de l’alcool avec cette matière. Nous n’avons fait qu’énumérer les principales pro- priétés des corps gras, mais il nous semble que cette énumération seule suffit et au delà pour faire compren- dre que dans l’économie animale, le rôle de ces sub- CORPS GRAS. 313 314 NUTRITION. stances ne peut être borné aux combustions de l’acte respiratoire ou de l’intimité organique, et qu’il y atout lieu de croire qu’à des propriétés si variées doivent se rattacher des phénomènes fort importants dans l’acte de la nutrition. Nous n’avons pas la prétention d’élucider complète- ment cette question, mais au moins allons-nous nous efforcer de mettre en évidence quelques-uns des points qui nous paraissent le plus dignes d’attention. Nécessité des corps gras dans l’alimentation. — Comme les autres substances alimentaires, les corps gras sub- issent des transformations spéciales pour être utili- sées dans les actes nutritifs. 257. — Les substances alimentaires, pour être com- plètement douées de toutes les qualités nutritives, doi- vent contenir des corps gras ou être susceptibles d’en fournir par leurs transformations dans l’organisme. Cette vérité est telle qu’instinclivement l’homme, dans les régions tempérées au moins, a toujours senti le be- soin d’ajouter des matières grasses à la plus grande par- tie de ses aliments. Aussi, il n’est pas une préparation culinaire dans laquelle il n’entre du beurre, de l’huile ou de la graisse. Le lait et les œufs, ces aliments typi- ques, préparés par la nature, et propres, par consé- quent, à satisfaire à toutes les conditions de la nutri- CORPS GRAS. 315 lion, nous offrent encore un exemple, par les matières grasses qu’ils contiennent, de la nécessité des corps gras dans l’alimentation. De cette circonstance que les corps gras pénètrent en nature dans la circulation, on a pensé que la quantité excédante de ces corps qui n’est pas utilisée aux com- bustions de nutrition, pouvait être mise en réserve dans certains tissus. 11 n’en doit pas être ainsi cependant, car les corps gras, pour être assimilés, subissent, dans l’in- timité organique, comme les autres aliments, des mé- tamorphoses particulières. La graisse des jeunes ani- maux qui se nourrissent de lait, n’est analogue au beurre que par les propriétés chimiques générales qui caracté- risent les corps gras ; mais elle en diffère par des qua- lités physiques et chimiques particulières. Il en est ainsi de la graisse des carnivores dans l’alimentation desquels il entre des matières grasses de si différentes espèces, des animaux qui ne vivent que de poissons, etc.,etc. La chair et la graisse de ces animaux peuvent toutefois se ressentir de la nature des corps gras dont ils se nour- rissent, mais c’est seulement ou très-particulièrement au moins, par les principes aromatiques dont ces corps sont pourvus, car elles n’en conservent pas moins les ca- ractères et les propriétés qui leur appartiennent. Cependant il est possible que les corps gras, admis en excès dans l’économie, séjournent momentanément dans les tissus, mais ils y sont bientôt modifiés et repris 316 NUTRITION. par les voies de l’absorption, ils servent, comme nous le verrons plus loin, à des usages particuliers. Au reste, il est digne de remarque que les carnivores dans l’alimentation desquels les corps gras existent en nature dans des proportions assez élevées, soient pré- cisément les animaux dont les tissus en sont presque dépourvus, tandis que les herbivores qui n’en trouvent que fort peu dans leurs aliments, en accumulent au contraire des quantités souvent considérables; c’est que l’accumulation de cette graisse provient non des corps gras admis dans leur organisme, mais bien des trans- formations que subissent les matières féculentes de leur alimentation sous l’influence du mode de nutrition pro- pre à ces animaux. Origine des globules. — Opinions et considérations à l’appui. 258. — Mais si les corps gras ne sont pas assimilés en nature dans les tissus, il n’est pas moins constant qu’ils peuvent être utilisés en partie sous la forme dans laquelle ils pénètrent dans le sang. Ainsi nous croyons que la division extrême qu’ils subissent dans le canal digestif, par l’intermédiaire du suc pancréatique, les dispose à remplir, outre les usages auxquels ils sont destinés comme aliments respiratoires, un rôle fort im- portant. Ce sont les corps gras qui constituent le noyau central autour duquel viennent se grouper successive- CORPS GRAS. 317 ment et se combiner les éléments qui concourent à la formation des globules du sang. Non-seulement les pro- priétés chimiques des corps gras donnent à cette hypo- thèse une certaine valeur, mais encore la composition des globules et les usages auxquels ces corpuscules sont destinés dans l’économie (213), lui fournissent un nouvel appui. En effet, les globules du sang contiennent du fer, du soufre et du phosphore, matières desquelles les corps gras s’emparent facilement, surtout lorqu’ils ont été atteints par l’oxygène, et dont la première, le fer, d’a- près M. Liebig, et la dernière, le phosphore, selon M. Rees, jouent un grand rôle dans l’oxygénation du sang. Remarquons en outre que chez tous les animaux dans le régime desquels les corps gras entrent en pro- portion assez élevée, ou qui, parles exercices auxquels ils se livrent, 11e permettent pas à la graisse formée dans l’organisme de s'accumuler dans les tissus, le sang contient des globules en grande quantité. Aussi a- t-on observé que le sang des carnivores et celui des oiseaux sont plus riches en globules que celui des her- bivores en général. Par cela même que le sang des carnivores et des oi- seaux est riche en globules, l’oxygène pénètre en quan- tité considérable dans leur organisme, conséquemment ils devraient avoir besoin d’une proportion assez élevée d’aliments respiratoires ; cependant ils en consomment beaucoup moins que les herbivores. Celte remarque, 318 NUTRITION. toutefois, ne détruit pas notre hypothèse, car l’action de l’oxygène dans l’organisme animal ne se porte pas seulement sur les matières non azotées, puisque les mé- tamorphoses des substances albuminoïdes, et l’échange qui s’opère entre ces substances et les tissus ne s’effec- tuent que sous l’influence de ce gaz. On sait que chez les carnivores et les oiseaux, le mouvement de ces sub- stances et de ces mutations est fort actif ; l’urine des premiers et les excréments des derniers le prouvent surabondamment. Au reste, bien avant nous, MM. Tiedemann et Gme- lin, H. Nasse, J. Muller et Donné ont attribué aux corps gras le rôle que nous leur reconnaissons dans la forma- tion des globules du sang, car ils ont admis que ces cor- puscules passent par une série de transformations dont les granulations de la lymphe ou du chyle sont le point de départ. M. Milne-Edwards a tout récemment émis une opi- nion analogue, comme l’atteste le passage suivant que nous empruntons à la Revue des Cours publics et des So- ciétés savantes de la France et de l’étranger, année 1856. « M. Milne-Edwards paraît attacher une grande im- portance à ces globulins (globulins de la lymphe). Il admet avec quelques autres physiologistes que ces glo- bules sont une espèce de graisse formée par le chyle flottant dans de l’albumine, et que les noyaux forment le centre d’une agglomération élémentaire de celte matiè- CORPS GRAS. 319 re, d’ailleurs éminemment organique et constitutive du sang. » (M. Octave Martin, article analytique du Cours de zoologie et d’anatomie comparée, de M. Milne-Ed- wards.) En résumé, comme il est fort difficile de démontrer expérimentalement que le noyau central dont sont pour- vus les granulations de la lymphe et du chyle ainsi que les globules, a été primitivement constitué par une par- ticule graisseuse provenant des corps gras émulsionnés, c’est donc seulement par induction et par analogie que nouspouvons arriver à nous éclairer sur cette question. Ainsi, un des phénomènes physiologiques le plus tran- ché que présente l’action des corps gras consiste dans le développement de la chaleur. Tous les thérapeutistes ont observé ce fait après l’administration de l’huile de foie de morue à certaines périodes des maladies de con- somption. Nous ferons remarquer que ce n’est pas im- médiatement, comme avec les alcooliques, que se ma- nifeste ce phénomène, mais bien après un certain temps de l’usage des corps gras. Or, il est évident que les corps gras occupent une place importante comme ali- ments respiratoires, car tout concourt à démontrer qu’ils sont utilisés dans les combustions qui s’accomplis- sent dans l’économie animale, et que, de plus, ils four- nissent une quantité de principes combustibles beau- coup plus considérable que les autres substances non azotées, Cependant, pour que ces principes produi- 320 NUTRITION. sent de la chaleur, il faut qu’ils brûlent, et ce n’est que sous l’influence de l’oxygène admis dans l’organisme que leur combustion peut s’effectuer. Comme l’on sait que ce sont les globules du sang particulièrement qui s’emparent de l’oxygène de l’air et le charrient dans toutes les parties du corps, il en résulte que si les globules n’existent qu’en minime proportion dans le sang, aux dernières phases de la phthisie pulmonai- re, par exemple, ce ne sont pas tant les principes com- bustibles qui font défaut, mais surlout l’élément combu- rant, l’oxygène. Dans la phthisie arrivée à ce degré, le sucre se rencontre souvent en quantité excédante, et pro- bablement, c’est parce que l’oxygène ne pénètre dans l’économie qu’en proportion trop minime pour atteindre tout le sucre formé, et que d’ailleurs, suivant nos vues, le sang appauvri ne fournit plus assez d’albumine pour favoriser la combinaison du sucre avec cette substance. N’est-on pas alors conduit à admettre que la chaleur qui se développe dans l’organisme, sous l’influence de l’usage des corps gras dans ces circonstances, est due autant et plus même à leurs propriétés comme principes reconstituants des globules qu’à celles qu’ils possèdent comme éléments combustibles? Les règles générales établies par M. Tauflieb de Barr, ainsi que les considérations de M. le docteur Homolle à l’égard du mode d’administration de l’huile de foie de morue dans les deux principales formes de la phthisie 321 pulmonaire, de même que les réflexions que ces tra- vaux suggèrent à MM. Trousseau et Pidoux auxquels nous les empruntons, vont encore appuyer notre ma- nière de voir : « Dans la première (forme), phthisie aiguë, floride, à forme inflammatoire, survenant chez des sujets robus- tes et pléthoriques, et s’accompagnant de congestions vives vers les poumons avec tendance prononcée aux hémoptysies, ou de réaction plus ou moins intense du côté du système circulatoire, l’huile de foie de morue, loin d’avoir de bons résultats, exposera à des acci- dents et pourra rendre plus active la marche de la ma- ladie. » « Ajoutons, disent MM. Trousseau et Pidoux, qu’en dehors même de cette forme toute spéciale de phthisie pulmonaire, il est encore beaucoup d’individus ner- veux et irritables chez qui, dans la première pério- de de la maladie, se manifestent des accidents d’irrita- tion ou de congestion très-marquée, et qui réclament temporairement, comme ceux de la forme précédente, l’emploi modéré des tempérants, des antiphlogistiques et des révulsifs. Dans ces conditions, l’huile de foie de morue n’est pas moins contre-indiquée. « Dans la seconde forme, au contraire, phthisie scro- fuleuse, ou froide et torpide, à marche chronique, dé- veloppée chez des sujets lymphatiques, à chairs molles, à circulation et nutrition languissantes, avec hématose CORPS GRAS. 322 NUTRITION. incomplète, on aura les raisons les plus légitimes d’es- pérer d’heureux effets de son administration. « Faisons remarquer ici, continuent MM. Trousseau et Pidoux, que ce qui peut servir à expliquer le succès et la vogue soutenus de l’huile de foie de morue, appli- quée à la phthisie pulmonaire, c’est que la seconde forme est beaucoup plus commune que la première, surtout dans nos grandes villes et au sein des classes pauvres qui regorgent de phthisiques entachés de lymphatisme. « 11 importe encore de faire ici une observation pra- tique, c’est que, chez les individus de la première ca- tégorie, une fois qu’ils seront arrivés à la période d’hec- lisie proprement dite, c’est-à-dire, qu’ils seront tombés dans l’état cachectique, à la suite de la fonte tuberculeu- se et de la diarrhée, l’huile de foie de morue, qui était contre-indiquée au début, pourra, dans ces conditions opposées, être employée utilement au même titre que le régime fortifiant et analeptique. « Que si, maintenant, nous cherchons à apprécier le véritable mode d’action de l’huile de foie de morue dans les différentes affections que nous venons de passer en revue, nous n’hésiterons pas à reconnaître, avec les mé- decins cités plus haut, que c’est surtout en agissant sur les fonctions de nutrition et d’assimilation, c’est- à-dire en modifiant l’état dyscrasique ou cachectique, que ce médicament arrive à guérir ou à amender la maladie spéciale à laquelle cet état général se trouve CORPS GRAS. 323 lié, soit comme cause, soit comme effet ou comme com- plication. » (Traité de thérapeutique et de matière mé- dicale, par A. Trousseau et H. Pidoux, édit, de 1855.) Ces distinctions sur l’emploi de l’huile de foie de mo- rue, selon la forme qu’affecte la phthisie pulmonaire, ne viennent-elles pas démontrer le véritable rôle des corps gras au point de vue de leur pouvoir reconsti- tuant des globules ? M. Milne-Edwards adopte complè- tement cette opinion, car, dans une de ses récentes le- çons, ce savant professeur disait : « En nourrissant avec des graisses faciles à la diges- tion et à l’assimilation (l’huile de foie de morue ou de poisson en général), on obtient beaucoup de globulins d’abord, qui se transforment ensuite en véritables glo- bules sanguins et augmentent ainsi la richesse réelle du sang. Dans la phthisie pulmonaire, par exemple, où les globules du sang sont fort diminués , on peut réta- blir leur nombre normal en nourrissant avec ces ma- tières grasses. On a porté, par ce moyen, la masse pro- portionnelle des globules de, 0,116 à 0,1/|5. » (Loc. cit.) Ces faits, il est vrai, ont trait particulièrement à l’huile de foie de morue ou de poisson qui, outre leurs propriétés comme corps gras, peuvent encore, par les autres princi- pes qu’elles renferment, posséder des propriétés spécia- les; mais on sait que les thérapeutistes ne s’en sont pas tenus à ces huiles seules et que, dans un grand nombre 324 NUTRITION. de cas, des corps gras de diverses espèces ont fait ob- tenir des résultats analogues. En résumé, nous dirons avec M. Payen que les corps gras sont bien évidemment des aliments respiratoires, mais avec cette particularité qu’à poids égal, ils peuvent fournir beaucoup plus de chaleur que les autres matières alimentaires, lorsque leur combustion s’opère dans l’in- timité organique, mais que le rôle de ces corps ne se borne pas là, car on les retrouve dans l’économie par- tout où s’accomplissent des fonctions importantes, par- tout où les organes se développent, où les tissus les ac- cumulent en quantité plus ou moins considérable, et qu’à des moments donnés comme dans les exercices vio- lents, les marches forcées, les travaux pénibles, celle sorte d’approvisionnement se dépense au profit de l’in- dividu et concourt à soutenir ses forces. (M. Payen, Des substances alimentaires et des moyens de les améliorer, de les conserver et d’en reconnaître les altérations.) L’élude des corps gras mérite donc une attention toute particulière, aussi allons-nous rechercher s’ils ne pour- raient pas avoir d’autres usages. Les corps gras contrebalancent l’action des sels calcai- res et des sels alcalins, et régularisent les métamor- phoses du sucre. 259. — La part si importante que les corps gras nous paraissent prendre dans la génération des globules, et CORPS GRAS. 325 d’ailleurs, les usages spéciaux auxquels ces substances sont destinées, rendaient indispensable leur présence incessante dans l’organisme ; aussi, chez l’homme, deux sources versent les corps gras dans le sang, les chyli- fères et le foie. Par la première de ces sources, les corps gras arrivent dans la circulation tels que l’alimen- tation les fournit; par la seconde, suivant les belles ex- périences de M. Cl. Bernard, ils sont le produit des mé- tamorphoses que subit le sucre des féculents dans le foie. Ainsi, comme le sucre, les corps gras ont deux ori- gines. En outre, les corps gras et le sucre, sans possé- der des propriétés chimiques semblables, ont toutefois une affinité analogue pour certaines matières, la chaux et la soude, par exemple. Notons enfin que les corps gras et le sucre sont toujours en présence dans le sang, avant le passage de ce liquide par les poumons, et qu’il en est encore ainsi, à certains moments, dans d’autres points de l’organisme. Or, de ces diverses circonstances, n’y aurait-il pas lieu de penser que les corps gras, admis en nature ou formés dans l’économie, pourraient avoir pour usage, outre les attributions qui leur sont propres, de contre- balancer l’action des sels calcaires et des sels alcalins sur le sucre et par suite, de régulariser les métamor- phoses que ce dernier subit sous l’influence de ces sels? En effet, si le sucre se transforme en substance coagu- 326 NUTRITION. labié, cette transformation ne doit-elle pas être d’autant plus favorisée qu’il existe de matières calcaires dans la circulation, de même que, par opposition, plus le sang renferme de sels alcalins et plus le sucre peut être mé- tamorphosé en eau et en acide carbonique. Chez les herbivores, par exemple, l’alimentation fournit en abon- dance du sucre et des sels alcalins, les sels calcaires y existent en moindre quantité et les corps gras s’y rencon- trent à peine; mais on sait que, dans le foie, lesucredes féculents est transformé en graisse, et ce serait ainsi que l’excès des sels alcalins pourrait être combattu. La nour- riture des carnivores présente des conditions opposées, les corps gras et les sels calcaires s’y trouvent en abon- dance, les sels alcalins,en faible proportion, et le sucre y manque entièrement ; mais les métamorphoses des ali- ments gélatineux dans le foie suppléent amplement h l’absence du sucre, et l’excès de matière coagulable qui pourrait se produire sous l’action des sels calcaires se- rait entravé par la présence des corps gras. Tel serait le rôle antagoniste que les corps gras pourraient jouer dans ces circonstances, antagonisme qui aurait pour but d’équilibrer en partie les phénomènes nutritifs qui s’o- pèrent sous ces influences. CORPS GRAS. 327 Action des corps gras dans le mouvement de décompo- sition ; ils agissent comme agents désassimilateurs de la matière osseuse. 260.—Si les corps gras fournis par l’alimentation ont un rôle fort important dans l’économie, ceux qui sont mis en réserve dans les tissus ont des usages non moins essentiels. Repris par les voies de l’absorption, et, par conséquent, sous l’influence du mouvement de décom- position qui s’opère sans cesse dans l’organisme, les corps gras, ce nous semble, ne peuvent être étrangers aux phénomènes qui ont pour but la désassimilation de certaines matières incorporées à la substance des tissus. Aussi croyons-nous que c’est sous leur influence que s’effectue l’élimination de la matière terreuse des os. Voici d’ailleurs les motifs sur lesquels nous basons notre opinion. Sans parler ici de la nature complexe des corps gras qui certes se prêtent particulièrement au rôle que nous leur attribuons, nous remarquerons avec M. Chossatque de tous les tissus, le tissu adipeux est le premier et le plus facilement entraîné par le mouvement de décomposition et que, dans les maladies où la graisse subit ce mouve- ment d’une manière très évidente, telles que la phthisie tuberculeuse, la fièvre typhoïde, l’anémie, la chlorose, les phlegmasies, etc., l’analyse chimique démontre dans le sang la présence des sels calcaires en excès. D’autres 328 NUTRITION. causes, sans doute, contribuent à ce phénomène, mais assurément les corps gras y prennent une part très- active. En outre, d’après les analyses de Von Ribra sur la composition des os humains, la quantité de graisse con- tenue dans la substance osseuse paraît être en rapport inverse avec la proportion de matières terreuses néces- saires soit à l’accroissement des os, soit à leur maintien dans les conditions normales. C’est ainsi que, chez le fœtus, ces analyses constatent qu’il n’existe dans les os qu’une très-faible quantité de graisse, et même des tra- ces seulement, tandis qu’après la naissance, et à mesure que l’âge avance, cette proportion augmente et se main- tient dans une moyenne de 1,35 pour 100, 00, mais pour diminuer dans la vieillesse; on sait que chez les vieil- lards la matière terreuse prédomine dans les os. La pré- sence de la graisse dans les os ne paraît donc pas étran- gère au mouvement de la matière terreuse. En outre, dans les maladies des os, où la matière ter- reuse est diminuée d’une manière considérable, la pro- portion de graisse est augmentée, tels sont le rachi- tisme, l’ostéomalacie. Remarquons aussi que dans ces maladies, l’urine entraîne plus de phosphate acide de chaux que dans l’état normal. Dans la carie où certes la décomposition des os est fort active, la graisse existe souvent en proportion très-élevée, tandis qu’il y a dimi- nution de la matière terreuse. CORPS GRAS. 329 Enfin, comme dernière remarque sur l’action élimi- natrice des corps gras, dans les phénomènes qui déter- minent la destruction des tissus, soit que la graisse se développe sous l’influence des ferments ou sous celle de l’état pathologique, toujours est-il que le pus, ce dernier terme des décompositions morbides, est constitué par une quantité très-notable de corps gras. Au reste, dans le mouvement de composition et de décomposition des os, deux substances organiques sont en présence : l’une, la substance gélatineuse, qui résiste avec force aux causes altérantes que subissent les autres matières de l’économie, l’autre, la graisse, qui, au con- traire, est particulièrement soumise à leur atteinte et dans la profondeur du tissu osseux même; car on sait avec quelle rapidité, comme le faisait déjà remarquer Grimaud, de Montpellier, la graisse disparaît de la ca- vité médullaire des os des animaux fatigués par une marche forcée. En outre, la substance gélatineuse qui présente d’ailleurs toutes les conditions propres à fixer la matière terreuse, en est bien manifestement le récep- tacle, tandis que la graisse, au contraire, par ses pro- priétés toutes particulières, est loin de pouvoir être utilisée à un pareil but. Or, si la substance gélatineuse atteinte par le mouvement de décomposition peut entraî- ner de la matière terreuse, ce ne doit être qu’en pro- portion de l’altération qu’elle subit, c’est-à-dire en quan- tité fort minime ; à la graisse est donc bien évidemment 330 NUTRITION. réservé, ce nous semble, le rôle le plus actif dans la désassimilation de la matière calcaire des os. En dernière analyse, de ces considérations que nous aurions pu multiplier d’ailleurs, il nous semble résulter d’une manière plausible que si la graisse, dans le tissu osseux, contribue pour une grande part au mouvement de la matière terreuse, elle peut aussi, dans les points de l’organisme où elle s’accumule, exercer, par la dé- composition de ses éléments ou par ses propriétés in- trinsèques, une influence analogue sur la substance de certains tissus. C’est ainsi qu’une absorption intersti- tielle très-active, en mettant en mouvement les élé- ments de la graisse, a pu déterminer la résolution de tu- meurs qui avaient résisté aux fondants reconnus les plus puissants; c’est encore ainsi probablement que les agents médicamenteux qui ont un corps gras pour véhicule, ac- quièrent une eüicacilé qu’ils ne posséderaient pas sous un autre mode de préparation. Circonstances dans lesquelles la graisse est utilisée ou accumulée dans les tissus. 261.—-Mais à ces usages importants n’est pas borné le rôle des corps gras accumulés dans les tissus ; aussi de- vons-nous en continuer l’étude, ne serait-ce d’ailleurs que pour nous mettre à portée de concevoir sous quelles formes ces matières sont utilisées dans ces circon- stances. Le mouvement de la graisse dans l’économie est en rapport avec l’activité et l’inactivité des phénomènes nutritifs ; de là l’emploi incessant de la graisse ou son accumulation plus ou moins considérable dans les tissus. Les influences qui déterminent l’emploi de la graisse ou mettent obstacle à son accumulation sont : le sexe mâle, l’âge de croissance, les climats chauds, le tempé- rament bilieux, l’abstinence, la faim, la soif, les exer- cices violents, les veilles, les passions tristes, les hé- morrhagies continues ou considérables, la fièvre, enfin toutes les causes qui favorisent l’admission ou l’action de l’oxygène, de même que celles qui altèrent profon- dément l’organisme ou qui apportent des modifications dans la génération ou l’accumulation de la graisse, tel- les que les corps qui, à d’autres titres que l’oxygène, ont une affinité particulière pour l’hydrogène :1e chlore, l’iode, le brome, l’arsenic, etc. L’accumulation de la graisse coïncide avec la prédo- minance du système lymphatique, le sexe féminin, la première enfance, l’époque du développement complet de l’individu, la ménopause, l’alimentation dans laquelle les matières non azotées l’emportent sur les matières azotées, le défaut d’exercice, le sommeil trop prolongé ou après les repas, le séjour dans un air humide, les CORPS GRAS. 331 332 hémorrhagies limitées; en résumé, avec les diverses circonstances qui tendent à entraver ou à neutraliser jusqu’à un certain point l’admission ou l’action de l’oxy- gène dans l’organisme. 11 résulte de ces diverses conditions que si la graisse, comme principe distinct, est le point de départ de phé- nomènes spéciaux, toutefois, comme les autres substan- ces nutritives, l’albumine, la fibrine, le sucre, elle n’est manifestement utilisée que sous l’influence de l’agent qui met tout en mouvement dans l’organisme, l’oxygène. Aussi la graisse accumulée dans les tissus n’a que des usages fort restreints, et ce n’est que lorsqu’elle est re- prise par les voies de l’absorption qu’elle est appelée à prendre part aux actes nutritifs. NUTRITION. La graisse reprise par les voies de l’absorption, n’est utilisée dans l’économie qu’après avoir subi des trans- formations spéciales. 262. — De même que les corps gras de l'alimentation sont puisés dans le tube intestinal par les chylifères, de même, très-vraisemblablement, la graisse mise en ré- serve dans les tissus est reprise par les vaisseaux lym- phatiques, et est-ce dans le système lymphatique qu’elle subit les modifications qui la rendent propre à être utili- sée dans l’organisme. En effet, tout nous porte à croire que, dans ce système, la graisse, en raison du dédou- CORPS GRAS. 333 blement de ses principes, sous l’influence de l’oxygène et des substances albuminoïdes est, en partie au moins, transformée en sucre. Ne résulte-t-il pas des expérien- ces de M. Chauveau que, pendant l’abstinence, meme très-prolongée, le sucre ne disparaît pas du sang des vaisseaux de la grande circulation et que la lymphe pure est toujours sucrée ? D’un autre côté, M. Cl. Bernard n’a-t-il pas démontré que, pendant l’abstinence, le sucre formé dans le foie disparaît du sang, qui, du poumon, se dirige vers le cœur ? Or, dans cette circon- stance , le sucre que fournit le foie étant complètement détruit dans les poumons, il est évident que celui qui se trouve dans le sang des vaisseaux de la grande circula- tion et dans la lymphe provient d’une autre source. Et si nous nous reportons à la composition de la graisse et que nous considérions avec quelle facilité cette substance rentre dans la circulation, n’aurons-nous pas lieu de penser que le tissu adipeux plus que tous les autres tis- sus de l’organisme, réunit les conditions qui le rendent apte à subir les métamorphoses par lesquelles il peut être amené à remplacer le sucre, surtout lorsque l’abstinence en tarit la source première. Sous le rapport des théories chimiques, d’ailleurs, la transformation des corps gras en sucre est loin d’offrir les difficultés qu’aurait soule- vées avant l’admirable découverte de M. Cl. Bernard, l’hypothèse par laquelle on aurait prétendu que des ma- tières azotées pouvaient être métamorphosées en sucre 334 NUTRITION. dans l’économie. Ne savons-nous pas déjà que plusieurs chimistes, M. Poggiale particulièrement, ne sont pas éloignés de croire à la possibilité de celte transforma- tion ? En effet, dans un mémoire présenté au mois de juin 1855 à l’Académie de médecine, M. Poggiale con- clut des expériences qu’il a consignées : « 1° que le su- cre peut se former dans l’économie aux dépens des ali- ments azotés et peut-être des corps gras; 2° que l’ali- mentation absolue de la graisse ne semble pas diminuer la proportion du sucre dans l’organisme. » Au reste, la production incessante du sucre dans l’or- ganisme est d’une nécessité absolue pour l’accomplisse- ment des actes vitaux, et la transformation de la graisse en sucre, en comblant les lacunes que la suspension de la fonction glycogénique du foie et l’abstinence laissent exister, facilite l’interprétation de certains phénomènes inexplicables sans cette hypothèse. C’est ainsi, par exem- ple, que l’état inflammatoire qui suspend la fonction gly- cogénique du foie, active, au contraire, la résorption de la graisse et la désagrégation de ses principes, et que le sucre, renouvelé sans cesse, fournit à l’économie l’élé- ment indispensable aux actions organiques, l’eau, et l’un des agents importants de la désassimilation, l’acide carbonique. Des effets analogues sont produits, d’ail- leurs, par l’abstinence. Quoique provenant des métamorphoses de la graisse, le sucre n’en aurait pas moins les propriétés et les usa- CORPS GRAS. 335 ges que nous lui avons attribués, aussi doit-il concou- rir à la formation de la matière coagulable, mais dans des limites subordonnées à la proportion d’oxygène et d’albumine en présence dans la lymphe et dans le sang, ainsi qu’à la quantité de matières grasses accumulées dans les tissus. Chez les hibernants, selon M. Cl. Ber- nard, le sucre continue à se produire, et la défibrinisa- tion du sang est entravée par les métamorphoses de la graisse résorbée peu à peu pendant le long sommeil de ces animaux. En résumé, considérées à ce point de vue, les fonc- tions du foie et celles du système lymphatique présen- tent une analogie frappante. L’un et l'autre fournissent du sucre, et ils ne se distinguent que par les matières qu’ils emploient pour ce but. C’est ainsi que, quel que soit le régime alimentaire, le sucre, cet agent indispen- sable aux actions nutritives, ne fait jamais défaut dans l’économie, et que, même dans l’état morbide et pendant l’abstinence prolongée, il peut encore se produire avec plus ou moins de persistance, selon la quantité de ma- tière coagulable contenue dans le sang ou de graisse ac- cumulée dans* les tissus. Mais il en résulte que les phé- nomènes nutritifs, suivant qu’ils s’effectuent sous l’in- fluence prédominante du foie ou sous celle du système lymphatique, présentent des caractères différents. Au premier cas répond le mode de nutrition des carnivores, au second, celui des herbivores, et chez l’homme, l’un 336 et l’autre se rapportent aux différences qui se manifes- tent dans la nutrition relativement à l’âge, au sexe, aux constitutions, etc. En revenant à notre sujet principal, nous dirons qu’il nous semble ressortir de ces considérations que des mo- difications plus ou moins profondes seront imprimées à la nutrition générale, suivant la forme sous laquelle la graisse rentrera dans la circulation, c’est-à-dire suivant qu’elle aura été transformée dans le système lymphati- que, en proportion plus ou moins élevée, en sucre, en eau et en acide carbonique, ou qu’elle subsistera plus ou moins abondamment en nature ; suivant entin qu’elle aura contribué à la formation de la matière coagulable de la lymphe ou à l’élimination des principes qui pren- nent parL à la génération de cette matière. A ces phénomènes, on le comprend, se rattachent des questions de pathologie et de thérapeutique importan- tes, aux engorgements glandulaires entre autres, ainsi qu’aux agents qui ont la propriété d’activer les méta- morphoses de la graisse, l’iode, par exemple, etc. NUTRITION. Usages de la graisse dans le tissu cutané. — Son rôle dans l’organisme, comme mauvais conducteur du ca- lorique et du fluide nerveux. 263.—Accumulée sous la peau, la graisse est appelée à remplir dans les fonctions de cette enveloppe des usages également dignes d’attention. En s’échappant des follicules sébacées, elle lubréfie la surface cutanée et neutralise l’action irritante des fluides rejetés au dehors par cette voie ; elle lutte aussi contre l’influence des agents extérieurs. En outre, si elle ne prend pas une part directe à la génération et à l’entretien de l’épiderme, des ongles et des poils, au moins y concourt-elle sous plusieurs rapports. Certaines maladies de la peau qui paraissent coïncider avec la suppression ou l’exagéra- tion de la sécrétion graisseuse, avec une alimentation trop exclusivement composée de poisson huileux, l’état des ongles, dans des cas semblables, leur conformation dans la phthisie tuberculeuse, la chute des cheveux à la suite d’un amaigrissement rapide ou de transpirations habituellement abondantes, leur décoloration lorsque, sous l’influence de l’âge, la production et la nature de la graisse sont modifiées, la différence que présente le poil des animaux, la composition chimique des écailles des poissons, et beaucoup d’autres faits qu’il serait très-fa- cile d’accumuler, sont autant de motifs qui corroborent notre opinion et viennent démontrer que la graisse est loin d’être étrangère aux phénomènes nutritifs dont la peau est le siège. Pour terminer, enfin, la graisse, dans l’intimité orga- nique comme à la surface des organes, exerce une in- fluence qui se rapporte à ses propriétés comme hïsiologi- ques, 93. Action réflexe, 89. Adulte. La fibrine prédomine dans le sang artériel chez l’a- dulte, 242. — Nutrition chez l’adulte, 261. — Elimination du fer, du soufre et du phos- phore, 402. Agents sous l’influence desquels s’opère la nutrition, 16. Agents extérieurs. Leur action physiologique, 91. — Voies par lesquelles ils pénètrent dans l’organisme, 97. — Leur action sur la peau, 143. Agents nutritifs, 20. — Leur forme et leurs propriétés, 20. — Forme gazeuse, 21. — Forme liquide, 24. — Forme solide, 28. (V. Aliments.) Air atmosphérique, 21. — Pres- sion atmosphérique, 21. — Composition de l’air atmo- sphérique, 21.— Influence du calorique, 22. — Corps étran- gers dans l’air, 22.— Ses pro- priétés dansl’organisme, 23. — Son influence comme agent de nutrition, 98. — Son action dans l’acte respiratoire, 98.— Des trois gaz qu’il contient, l’oxygène seul est propre à la respiration, 99. — L’air est toujours en contact avec la muqueuse pulmonaire, 100.— Nécessité de la pureté de l’air, 103. — Air confiné, 103. — influence de la viciation de l’air, 105. — suivant son état hygrométrique, 107. Albumine, 228. — est le point de départ de toute la série des tissus qui sont le siège des ac- tivités organiques, 2 2 8.—L’al- bumine et le sucre sont les principaux agents de la nutri- tion, 303. — Proportion dans laquelle l’albumine est conte- nue dans le sang, 58-234. — Forme sous laquelle elle pénè- tre dans le sang, 153-154. — Ne peut être utilisée à la nu- trition qu’après avoir subi des modifications spéciales dans le tube digestif, 229.— Isolé- ment, est impropre à la nutri- tion, 229. — Doit se combiner avec le sucre dans l’organisme, ou lui abandonner quelques- uns de ses éléments, 256. — Sa présence dans l’urine, 209. Albuminoïdes (substances), 223- 227. — Sont essentiellement propres à la nutrition, 228. — Sont le point de départ des phénomènes chimiques de la nutrition, 422. — Ne peuvent être utilisées à la nutrition qu’autant qu’elles ont subi des modifications spéciales dans l’organisme et qu’elles sont associées à d’autres principes, 229. — Forme sous laquelle elles pénètrent dans le sang, 154. — Leurs propriétés fer- mentescibles, 392.—Ont pour dernier terme de leurs méta- morphoses, l’urée, 263-339. — et l’acide urique» selon les tliéo ries act uell es, 339.—1U: ac- tifs qui les décèlent, 228. Albuminose, 130, 154,231. ET ANALYTIQUE DES MATIERES. 447 Albuminurie, 210. Alcalins. (V. Sels.) Alcalis. Toujours contenus dans les aliments propres à entre- tenir la vie, 350. Alimentaire (régime). Nécessité de le varier, 428. — Son in- fluence sur la production des maladies, 430. — Ressources puissantes qu’il offre à la thé- rapeutique, 431. — Principes alimentaires, 222. Alimentation. Son influence sur l’acidité ou l’alcalinité de l’u- rine, 198. — Nécessité des corps grasdansl’alimentation, 314. — Il est souvent indis- pensable que la proportion des principes nutritifs varie dans l’alimentation, 422. Aliments, 28. — Leur action dans les voies digestives, 122. — dans la bouche, 123. — dans l’estomac, 125. — dans les intestins grêles, 131. — Forme sous laquelle ils sont absorbés dans les voies diges- tives, 153. — Distinction des aliments en aliments albumi- noïdes et en aliments respira- toires, 222.—Cette distinction ne doit pas être considérée d’une manière absolue, 224.— Principes immédiats des ali- ments albuminoïdes, 227. — Aliments provenant des tissus gélatineux, 264. — Aliments dits respiratoires, 276.—Tous les aliments propres à entre- tenir la vie contiennent tou- jours de l’acide carbonique ou de l’acide phosphorique et des alcalis, 350.—De la présence de l’eau dans les aliments, 410. — Principes qu’ils doi- vent renfermer pour remplir toutes les conditions de la nu- trition, 419. — Aliments qui renferment tous les principes propres à la nutrition, 421. Amylacées (matières). Forme sous laquelle elles pénètrent dans le sang, 153. — Leurs usages et leurs métamorpho- ses chez les végétaux, 282.— (V. Féculents.) Anastomoses, 67-69. Animale (chaleur). (V. Chaleur.) Animaux. Leurs principes élé- mentaires, 29. — Leurs prin- cipes immédiats azotés, 31. — non azotés, 32. —Tous les animaux ont une température qui leur est propre, 112. — Animaux à sang chaud et ani- maux à sang froid, 115.— La chair des animaux renferme tous les principes propres à la nutrition, 270, 421. Aorte (artère), 65, 66. Appareils organiques de la nu- trition , 34. — Appareil res- piratoire, 34-97. — digestif, 36, 121. — urinaire , 49. — Appareils organiques nerveux, 84. Artères, 66-67. — Leur compo- sition anatomique, 67. —Leur contractilité, 70. Artères mésentériques, 39. Artère pulmonaire, 35. Articulations (sécrétions dans les), 172. B. Benzoïque (acide). (V. Acide.) Bile, 136. Son action, 137, 384. — Le sel marin entre comme élément indispensable dans la bile, 384. Boissons, 24. — Leurs propriétés dans l’organisme, 28.—Forme sous laquelle elles sont absor- bées dans le travail digestif, 154. 448 TABLE ALPHABÉTIQUE Boissons fermentées, 25. — Leur action dans l’économie, 413. — Leur action sur le système nerveux et sur le sang, 415. — Elles paraissent agir comme les anestésiques, 416. — Elles chargent le sang d’acide car- bonique, 416. — Leur usage immodéré cause les désordres nutritifs les plus graves, 417. Bouche, 37. — Action des ali- ments dans la bouche, 123.— leur transformation, 123. Bronches, 35. Bronchiques (cellules), 35. C. Caillot du sang, 51. — de la lymphe, 61. Calculs urinaires, 210. Calorique. L’oxygène en est la source dans l’économie ani- male, 18,111. — Son influence sur l’air atmosphérique, 22. — Sa répartition inégale selon les différents points de l’orga- nisme, 116. — Degré auquel la perte de calorique entraîne la mort, 120. — Les corps gras sont mauvais conducteurs du calorique, 336. Canal iiépathique. 41. Canal thoracique, 39, 80. Capillaire (système), 73. Capillaires. (V. Vaisseaux.) Capsules surrénales, 49. Carbonates alcalins. Leur in- fluence sur l’urine, 208. — Leur identité d’action avec les phosphates alcalins dans l’éco- nomie, 353. (V. Sels.) Carbonique. (V. Acide.) Caséine, 228. — Différences qu’ello présente avec les au- tres substances alimentaires, 395.—La quantité de caséine que contient le lait de vache rend cet aliment souvent im- propre à l’alimentation des enfants en bas-âge, 31)6. — Elle est sans doute la cause des propriétés laxatives du lait de vache chez certains in- dividus, 396. Cerveau, 84. Cervelet, 84. Chaleur animale, 111. — L’oxy- gène en est la source première, 111. — Tous les animaux ont une température qai leur est propre, 112. — 11 ne se pro- duit de chaleur dans l’orga- nisme que là où pénètre le sang artériel, 113. — Influen- ces sous lesquelles elle est pla- cée, 114. — Siège de la cha- leur animale. Hypothèse de Lavoisier, 116. — Répartition inégale de la chaleur selon les différents points de l’orga- nisme, 116. — Siège réel de la calorification animale, 117. — Causes qui déterminent des oscillations dans le développe- ment, la répartition et le maintien de la chaleur dans l’organisme, 119.— Degré au- quel la perte de calorique en- traîne la mort, 120. — Effets de l’abstinence sur la calori- fication animale, 120. — La chaleur diminue dans l’acte respiratoire, 116, 256. Cheveux. Leur coloration, 400, 403. Chlore. Il se rencontre dans le système musculaire combiné avec le potassium, 383. Chlorure de sodium. (V. Sel ma- rin.) Choléique. (V. Acide.) Cholique. (V. Acide.) Chyle, 38, 140. —Sa composi- tion, 141. ET ANALYTIQUE DES MATIÈRES 449 Ciiylifères. (V. Vaisseaux.) Chyme, 38, 131. Chymosine, 126. Circulation, 64. — Organes de la circulation, 64. — Proprié- tés des organes de la circula- tion, 69. — Mécanisme de la circulation, 71. — Grande et petite circulation, 72. — Cir- culation capillaire, 72. — Cir- culation dans les capillaires, 76. — dans les vaisseaux lym- phatiques, 81. Coagulation du sang, 52. — de la lymphe, 61. Cœcum, 39. Coeur, 64. —Oreillettes et ven- tricules, 65. —Les battements du cœur varient suivant l’àge, le sexe, les constitutions, etc., 69. Colon, 39. Combustions dans l’organisme, 112. Composition et décomposition (mouvement de), 12.—Action des corps gras comme agents désassimilateurs de la matière osseuse dans le mouvement de décomposition, 327. Constitutions médicales, 109. Contractilité, 83, 89, 93, 94. Corps gras. (V. Gras.) Corps de l’homme. — Éléments qui le constituent, 4. — Sa température, 118. —Les mé- dicaments les plus efficaces doivent être recherchés parmi les éléments du corps de l’homme, 433. Cruor, 51. D. Décomposition (mouvement de), 12. — Action des corps gras comme agents désassimila- teurs de la matière osseuse dans le mouvement de décom- position, 327. Défécation, 40. Derme, 47. Diastase animale, 125. — Son rôle, 125. Diathèse crique, 208. Digestif (appareil), 36, 121. Digestives (voies), 36, 121, — Action des aliments dans les voies, 122.— Résultat ultime des fonctions digestives, 139. — Forme sous laquelle les aliments sont absorbés dans les voies digestives, 153. — Forme sous laquelle les bois- sons sont absorbées, 154. — Les corps gras y sont absorbés en nature, 154. Digestion, 121. •— Mastication, 123. — Insalivation, 123. — Salive, 124. — Suc gas- Irique, 126. — son action, 129. — Substances attaquées par le suc gastrique, 129. — Substances inattaquées par le suc gastrique, 130.— Chyme, 131. — Suc pancréatique, 132. — son action, 133. — Bile, 136. — son action, 137. — Suc intestinal, 1;8. — son action, 138. — Résultat ul- time de la digestion, 139. — Chyle, 140. — Produits di- gestifs dans le gros intestin, 142. Diurétiques (substances dites), 207. Duodénum , 38. — Action des aliments dans le duodénum, 131. E. Eau, 24. — Classification des eaux, 25. — Eau potable, 26. — Caractères des meilleures eaux potables, 27.— Proprié- 450 TABLE ALPHABÉTIQUE tés de l’eau dans l’organisme, 28, 405. — Quantité conte- nue dans le corps humain, 407. — Conditions qui en font varier la quantité dans l’orga- nisme, 407. — Diminution de l’eau dans l’organisme, 408. — De l’eau dans les substan- ces alimentaires, 410. — Eli- mination de l’eau hors de l’organisme, 410. — L’excès d’eau dans le sang est nuisible à l’accomplissement des actes nutritifs, 410.—Son influence dans les phénomènes nutri- tifs suivant sa composition, 411. — Quantité que renfer- ment. la viande, le pain et le meilleur vin, 411. Éclampsie (1’) pourrait avoir pour cause la présence en excès des sels alcalins dans le sang, 379. Électricité, 18. Éléments qui constituent le corps de l’homme, 4. Endémiques (maladies), 109. Endosmose, 148. Enfant. Le lait est l’aliment propre à sa nourriture, 225, 231. — La fibrine prédomine dans la lymphe chez l’enfant, 241. — ses propriétés, 259. — Élimination du fer, du sou- fre, du phosphore, chez l’en- fant, 399. Épiderme, 46. Estomac, 37. — Action des ali- ments dans l’estomac, 125. Excitation ou incitation, 91.— Phénomènes qu’elle détermine sur les capillaires, 94. Excréments. Leur composition chimique, 176. F. Féculents, 31,—Leur trausfor- mation en dextrine et en gly- cose par la salive, 125. — Ac- tion du suc pancréatique sur les féculents, 134. — Forme sous laquelle ils pénètrent dans le sang, 153. — Consi- dérés comme aliment respira- toire, 223. — Leurs usages dans l’économie après leur transformation en sucre, 280. — Ils renferment plus de car- bone que les substances azo- tées, 423. — Isolés, ils ne peuvent remplir tontes les conditions de la nutrition, 420. — Toutefois, ils peuvent entrer en quantité considéra- ble dans le régime alimentaire des habitants des campagnes et des régions équatoriales, 424-426. Fer, 387. — Sa proportion dans le sang, 59. — Il ne se ren- contre que dans les globules. Son importance dans ces cor- puscules, 389. — Mouvement de l’élimination du fer hors de l’organisme. Son emploi dans cette circonstance, 397. Fibrine, 233. Fibrine du sang, 52. — Propor- tion dans laquelle la fibrine est contenue dans le sang, 54, 234. — Résulte de l’oxydation de l’albumine,suivantM.Sche- rer, 235. — Conditions sous lesquelles cette oxydation est placée, 236. — La fibrine du sang doit agir, selon M. J. Mul- ler, comme un ferment, 236. — Distinction de la fibrine du sang et de la fibrine mus- culaire, 237. — La fibrine (musculine) isolément est im- propre à la nutrition, 230. — Distinction de la fibrine dans les trois principaux li- quides de l’économie, 239. — ET ANALYTIQUE DES MAT1ÈIIES. 451 Sa quantité relative est varia- ble, suivant le système vascu- laire qui la renferme, 241. — Elle prédomine dans la lym- phe chez l’enfant, 241.—dans le sang artériel chez l’adulte, 242. — dans le sang veineux chez les vieillards, 242. —De la fibrine dans la lymphe, 243. — Sa formation, 246. — De la fibrine dans le sang vei- neux , 248.— dans le système de la veine-porte, 248. — Sa formation, 249. — Fibrine dans le système veineux géné- ral, 251. — Son origine, 252. — La fibrine du sang de la veine-porte est transformée en sucre dans le foie, 252. — La fibrine, modifiée par l’état in- flammatoire, n’est pas méta- morphosée en sucre, 253. — Fibrine dans le sang artériel, 254. — Son origine, 256. — Rôle de la fibrine, 257. — La fibrine est, avec les globules, le mobile des actions chimi- ques de l’organisme, 258. — De la fibrine chez l’enfant, 259. — chez l’adulte, 261.— La fi- brine proprement dite ne doit pas constituer toute la matière coagulable du système vascu- laire, 267. — La fibrine vas- culaire est surtout le véhi- cule du phosphate de chaux, 366. Fluide nerveux, 6. — Son ana- logie avec le fluide électrique, 87. — Les corps gras sont mauvais conducteurs du fluide nerveux, 336. Fluor. Il existe dans le sang, 60. Foie, 40. — Ses fonctions, 41. —Sécrétions dans le foie. Gly- cogénie, 176. Follicules muqueux, 38. Fonctions do nutrition et fonc- tions de relation, 6. Froment. Renferme tous les élé- ments propres à la nutrition, 270, 421. G. Ganglions nerveux, 85, 89* Gastérase, 126. Gaz dans le sang, 54. Gaz intestinaux, 176* Gélatine, 264.— N’a pas encore été trouvée dans le sang à l’é- tat physiologique, 217. — S’y rencontre à l’état morbide, selon M. Bouchardat, 268. — Ses propriétés nutritives, 269. — Est transformée en sucre dans l’organisme ; expériences de M. Cl. Bernard, 273. — Elle a un rôle spécial dans la nutrition, 274. Gélatineux (tissus), 264. (V. Tis- sus.) Glandes dronchiques, 34. GLANDEset cavités closes (absorp- tion dans les), 162. Glandes lymphatiques, 79. Glandes sébacées, 47. Globules du sang, 53. — Leur proportion dans le sang, 53, 58, 59. — Leur rôle, 218. — Leur origine et considé- rations à l’appui, 316. — Le fer ne se rencontre que dans les globules, 389. — Impor- tance du fer dans ces cor- puscules, 389. — Leur impor- tance dans les actes nutritifs, 390. Globulins de la lymphe, 61. — Ils doivent se charger d’une certaine quantité d’oxvgène, 245. Glycérine, 312. — Ses propriétés chimiques, 312. Glycogénie du foie, 176, — Cir- 452 TABLE ALPHABÉTIQUE constances qui la modifient, 178. Glycocollë, 286. Glycose. Matière résultant, dans l’organisme, de la transforma- tion des féculents par l’action de la salive et du suc pancréa- tique, 125, 134.— et des mé- tamorphoses des substances albuminoïdes, par une action spéciale du foie, 176. — Pro- priétés chimiques de la gly- cose, 277. — En solution, se combine à la température or- dinaire et par simple contact avec le carbonate de chaux, le cuivre, le zinc, 279. — Usages attribués à la glycose dans l’organisme animal, 280. (V. Sucre.) Graisse. Circonstances dans les- quelles elle est utilisée ou ac- cumulée dans les tissus, 330. — Reprise par les voies de l’absorption, est métamorpho- sée en sucre et concourt à la formation de la fibrine, 332, 335. — Ses usages dans le tissu cutané. Son rôle dans l’organisme comme mauvais conducteur du calorique et du fluide nerveux, 336. — L’iode active ses métamor- phoses, 336. Gras (corps), 307. — Forme sous laquelle ils sont absorbés dans le tube digestif, 154. — Se combinent à la température ordinaire et par simple con- tact avec le carbonate de chaux, le cuivre, le zinc, etc., 311. —Ne sont pas seulement utilisés dans les combustions de l’organisme, 307. — Se rencontrent dans le règne vé- gétal et dans le règne animal, 309. — Leurs propriétés chi- miques, 311. — Leur néces- sité dans l’alimentation, 314. — Us subissent, comme les autres substances alimentai- res, des transformations spé- ciales pour être utilisés dans les actes nutritifs, 314. — Ils concourent à la formation des globules, 316.— Us contreba- lancent l’action des sels cal- caires et des sels alcalins, et régularisent les métamorpho- ses du sucre, 324. — Leur action dans le mouvement de décomposition comme a- gents désassimilateurs de la matière osseuse, 327. — Cir- constances dans lesquelles ils sont utilisés ou accumulés dans les tissus, 330. — Repris par les voies de l’absorption, ne sont utilisés dans l’écono- mie qu’après avoir subi des transformationsspéciales,332. — Leur usage dans le tissu cutané. Leur rôle dans l’orga- nisme, comme mauvais con- ducteurs du calorique et du fluide nerveux, 336. — Dis- tinction des circonstances dans lesquelles ils doivent être employés contre la phthi- sie pulmonaire, 320. Grand sympathique (nerf), 85. Gros intestin, 39. Grossesse (du phosphate de chaux dans la), 371. H. Hématose, 36. Hépathique (canal), 41. Hippurique (acide). Se dédouble en acide benzoïque et en gly- cocolle, 196. (V. Acide hippu- rique.) Huile de foie de morue. — Régu- larisation de son emploi dans la phthisie tuberculeuse, 320. ET ANALYTIQUE DES MATIÈRES. 453 I. Imbibition, 148. Incitation, 91. — Phénomènes qu’elle détermine sur les ca- pillaires, 94. Incombustibles (matières) du sang, 348. Innervation, 88. — Influence des sels alcalins, 379. iNORGANiQUEs(substances). Forme sous laquelle elles sont absor- bées dans le tube digestif, 154. Insalivation, 123. Intestins grêles, 39. Intestin (gros), 39.— (Produits digestifs dans le), 142. Intestins. Absorption dans les intestins, 152. — Forme sous laquelle sont absorbées les ma- tières alimentaires dans les.— Vaisseaux par lesquels s’opère cette absorption, 153, 155. Iode. Active les métamorphoses de la graisse, 336. L. Lait. Aliment propre à la nour- riture de l’enfant, 225, 231. — Différences entre le lait des herbivores et celui des carni- vores, 300. Lait de vache. Il ne convient pas toujours pour l’alimenta- tion des enfants en bas âge, 396. — Cause de ses proprié- tés laxatives chez certains in- dividus, 396. Larynx, 35. Liquide nourricier. Plasma, 51, 218. Liste des auteurs consultés, 437. Lumière, 18. Lymphatique (système), 79, 81. — Analogie de scs fonctions avec celles du foie, relative- ment à la génération du sucre dans l’économie, 335. Lymphatiques glandes , 79. — Vaisseaux, 79. — Ganglions, 80. — Grand vaisseau lym- phatique droit, 80. — Grande veine lymphatique droite, 80. — Circulation dans les vais- seaux lymphatiques, 81. — Tempérament lymphatique, 82. Lymphe , 60. — Ses propriétés physiques, 60. — Caillot et sérum. Coagulation de la lymphe, 61. — Rapports de la lymphe avec le sang, 62. — Sa composition chimique, 62. — Fibrine dans la lymphe, 243. — Ses globulins doivent se charger d’une certaine quantité d’oxygène, 245. M. Maladies endémiques ou spora- diques, 109. Mastication, 37-123. Matière coagulable (la) des sys- tèmes vasculaires ne doit pas être seulement constituée par la fibrine proprement dite, 267. — Est surtout le véhicule du phosphate de chaux, 366. Médicales (constitutions), 109. Médicaments (les) les plus effi- caces doivent être recherchés dans la série des matières qui constituent le corps humain, 433. Membranes muqueuses, 44. — Distinction des, 44. — Leur composition anatomique, 45. — Leurs propriétés, *45. — Leurs usages, 45. Membranes séreuses et les articu- lations (sécrétions dans les), 172. Mésentère, 39. 454 TABLE ALPHABÉTIQUE Mésentériques (veines), 39. (V. Veines. Moelle allongée, 84. Moelle épinière, 84. Mouvement de composition et mouvement de décomposition, 12. Mouvement de décomposition (action des corps gras comme agents désassimilateurs de la matière osseuse dans le), 327. Musculaire (système). — Nutri- trition dans le, 261. — La li- queur dont ilest imprégné con- tient beaucoup de chlore com- biné avec le potassium, 383. Musculine. Distinction de la fi- brine musculaire de la fibrine du sang, 237. N. Neri-s cérébraux, 85.— spinaux, ■85. Nerf grand svmpathiqub, 85. Nerf pneumogastrique, 85. Nerveux (système), 83. Nerveux (appareils organiques), 84. Nutritifs (agents). (V. Agents.) Nutritifs (principes). (V. Prin- cipes.) Nutrition (mode de) dans les corps organisés, 1. —Diffé- rences qui la caractérisent chez les végétaux et chez les animaux, 2. — Fonctions de nutrition, 6. — Aperçu suc- cinct de son importance, 9. — Définition, 11. — Agents sous l’influence desquels elle s’o- père, 16. — Appareils organi- ques de la nutrition, 34. — Nutrition (organes de) annexés au tube digestif, 40. — Nu- trition (instruments de la), 213.— Elle est incessante, et tous les organes sont soumis à son influence, 214. —Le lait pris pour base de la quantité des matières qui doivent con- stituer l’aliment propre à rem- plir les conditions de la nutri- tion, 225. — L’albumine, la fibrine, la caséine, les sucres et les corps gras, isolément sont impropres à la nutrition, 226, 229, 230, 231. — Néces- sité pour son accomplisse- ment régulier de l’emploi si- multané des substances albu- minoïdes,des matières sucrées et des corps gras, 229, 230, 231. — Nutrition dans la pre- mière enfance, 259. — chez l’adulte, 261. — dans le sys- tème musculaire, 261. — La gélatine, a un rôle spécial dans la nutrition, 274. — L’albu- mine et le sucre en sont les principaux agents,303.— Im- portance du fer dans la nutri- tion, 389. — Importance des globules, 390. — Influence de l’eau, suivant sa composition, 411. — Aliments qui renfer- ment tous les principes pro- pres à la nutrition, 270, 421. — Les substances albuminoï- des sont le point de départ des phénomènes chimiques de la nutrition, 422. O. Œsophage, 37. Oreillettes du coeur, 65. Os. Le phosphate de chaux, à l’état basique, constitue en grande partie la matière terreuse des os, 365. —Le sucre concourt à leur for- mation et à leur entretien, 303. — Action des corps gras comme agents désassimila- teursde la matière des os, 327. ET ANALYTIQUE DES MATIÈRES. 455 Osmazômë, 82. Oxygène. Son influence sur la nature inerte et sur la nature vivante. 16. — Source du ca- lorique et de l’électricité, 18. — Haute influence de l’oxy- gène dans l’organisme, 18. — Son action est incessante et elle tend à réduire l’agrégat organique à des combinaisons plus simples, 19. — Des trois gaz que l’air atmosphérique renferme, lui seul est pro- pre à la respiration , 99. — Mode par lequel il pénètre dans le sang, 100. — Source première de la chaleur ani- male, 111. Ozone, 22. P. Pain. Ne pourrait pendant long- temps constituer uniquement l’alimentation, 421. Pancréas, 38. Pancréatine, 133. Papilles, 47. PEAu,46.Épiderme,46.—Derme, 47. — Composition anatomi- que de la peau, 46. — Ses fonctions, 48, 143. — Action des agents extérieurs sur la peau, 143. — Absorbe de l’oxygène et exhale de l’a- cide carbonique, 144. — Per- spiration cutanée, 144.— La suppression de la perspira- tion cutanée détermine l’as- phyxie, 144. — Transpiration ou sueur, 145, 181. — Con- ditions qui influencent les fonctions cutanées, 146. — Sa propriété d’absorption,161. •— Influences qui modifient l’absorption de la peau, 162. — Sécrétions de la peau, 180. — Sympathies de la peau avec divers organes, 184. — Rapports de la sécrétion cu- tanée avec la sécrétion uri- naire, 211.— Coloration de la peau, 400., 403. — Usages de la graisse dans le tissu de la peau, 336. Pepsine, 126.— Son action, 127. Perspiration cutanée, 144. Perspiration pulmonaire, 174. Pharynx, 37. Phosphates terreux. Leurs corn- binaisons avec l’albumine et la matière gélatineuse. Par- ticularités qui en résultent, 351. Phosphate de chaux,364.—Expé- riences qui tendent à détermi- ner son rôle dans la gélatine, 352. — II concourt à la for- mation et à l’entretien de la matière osseuse. Il augmente la cohésion des matières avec lesquelles il est combiné, 364. — La matière coagulable en est surtout le véhicule, 366. — La quantité du phosphate de chaux utilisée dans l’éco- nomie est soumise à diverses influences, 367. — Opinion de M. Mouriès sur son rôle, 369.— Il entretient l’irritabi- lité vitale, 369.—Importance de son emploi régulier dans l’économie, 370. — Du phos- phate de chaux dans la gros- sesse, 371. — Son influence sur la sécrétion urinaire, 372. — Ses relations dans l’état morbide, 373. — Son accu- mulation dans le sang coïncide avec celle de la matière coagu- lable, 373. Phosphate de soude. Ses proprié- tés, 353. — Son identité d’ac- tion avec les carbonates alca- lins, 353. Phosphore et soueke. Leurs usa- 456 TABLE ALPHABÉTIQUE ges dans l'organisme, 391. — Distinction de leurs usages, 393. Phthisie tuberculeuse. Régula- risation de l’emploi de l’huile de foie de morue dans la phthisie tuberculeuse, 320. — Plan général de l’ouvrage, XXV. Plasma, 51, 218. Plèvres, 35. Pouls, 70. Poumons, 34. — Leur fonction, 36. — Absorption dans les poumons, 151. Principes élémentaires des végé- taux et des animaux, 29. — Principes immédiats azotés des végétaux, 30. — non azo- tés des végétaux, 31. — azo- tés des animaux, 31. — non azotés des animaux, 32. — Principes immédiats organi- ques contenus dans le sang, 217. — Principes immédiats albuminoïdes, 227. — Sont essentiellement propres à la nutrition, 228. — Principes minéraux du sang. Leur pas- sage dans les urines et dans les fèces, 356. Principes qui doivent être par- ticulièrement employés dans le traitement des maladies, 432, 433. Principes nutritifs (division des), en principes immédiats azotés et non azotés, 3 0.—Prin- cipes nutritifs de l’alimenta- tion. Ils sont tous contenus dans le sang artériel, 216. — Principes nutritifs essentiels. — Albumine, fibrine, caséine, 228. — Il est souvent indis- pensable que la proportion des principes nutritifs varie dans l’alimentation, 422.— Princi- pales circonstances dans les- quelles elle varie, 426. Produits ultimes des métamor- phoses des matières alimen- taires, 339. Protéine, 227. Protubérance annulaire, 84. Ptyaline, 125. Pulmonaire (artère), 35. R. Rate. Ses usages, 42. Rectum, 39. Régime alimentaire. (V. Alimen- taire.) Reins, 49., — Leurs usages, 49. Réservoir de Pecquet, 80. Résorption, 163. Respiration, 98. — L’oxygcne seul est propre à la respira- tion, 99. — L’air atmosphéri- que est toujours en contact avec la muqueuse pulmonaire dans la respiration, 100. — Théorie de Lavoisier, 101. — Phénomène chimique de la respiration. Hématose, 101.— Conditions qui modifient la respiration, 102. — Modifica- tions imprimées à la respira- tion sous les influences indivi- duelles, 110. Respiration insensible ou per- spiration cutanée, 144. ' Respiratoire (appareil), 34, 97. Respiratoires (aliments dits), 276. (V. Aliments,) S. Salive, 124. — Espèces de sa- live, 124. — Ses usages, 125. Sang, 50. — Ses propriétés phy- siques, 51.— Liqueur du sang, plasma, 51, 218. — Sérum. Cruor, 51. — Coagulation du sang, 52. — Fibrine du sang, 52.—Proportion dans laquelle la fibrine est contenue dans le ET ANALYTIQUE DES MATIÈRES. 457 sang, 54, 58, 59, 234.— Pro- portion de l’albumine, 54, 58, 59, 234. — de l’eau, 54. — Gaz dans le sang, 54. — Cir- constances dans lesquelles la composition du sang varie,56. — Conditions qui déterminent sa pureté ou son altération, 57. — Sa composition chimi- que, 58. — Ses rapports avec la lymphe, 62. — Sang arté- riel cl sang veineux. Différen- ces qui les caractérisent, 55, 240. — Le sang artériel con- tient tous les principes nutri- tifs de l’alimentation, 216. — Sang veineux. Sa transforma- tion, par l’oxygène de l’air, en sang artériel, 99. — Principes immédiats organiques conte- nus dans le sang, 217. — Le fluor existe dans le sang, 217. — Distinction de la fibrine du sang de la fibrine muscu- laire,237.— De la fibrine dans le sang veineux, 248. — dans le sang de la veine-porte, 248. — dans le sang artériel, 254. — La gélatine ne se rencon- trerait dans le sang que dans l’état morbide, 268. — Ma- tières incombustibles du sang, 348. — Les médiateurs des fonctions organiques sont les parties incombustibles ou les sels du sang, 349. — Passage des principes minéraux du sang dans les urines et dans les fèces, 356. — L’excès d’eau dans le sang est nuisi- ble à l’accomplissement des actes nutritifs, 410. Sécrétions, 165. — Des sécré- tions en général, 165. — Dé- finition et division, 166. — Appareils organiques, 167. — Différentes dénominations, 167. — Sécrétions alcalines ou acides, 168. — Excrémen- titielles et récrémentitielles, 167. — Corps sur lesquels s’effectuent les sécrétions, 168, — Modification qu’elles sub- issent ,169. — Antagonisme des sécrétions, 170. — In- fluence du système nerveux sur les sécrétions, 170.— Des sécrétions en particulier, 172. — dans les membranes sé- reuses et dans les articula- tions, 172. — dans les voies respiratoires, 174. — dans les voies intestinales, 175. — dans le foie, glycogénie, 176. — excrémentitielles intestinales, 179. — Sécrétion cutanée, 180. — urinaire, 185. — De la rapidité avec laquelle les substances passent du tube digestif dans la sécrétion uri- naire, 211. — Rapports de la sécrétion urinaire avec celle de la peau, 211, — Influence du phosphate de chaux sur la sécrétion urinaire, 372. Sels alcalins, 374.— Leur rôle, selon M. Liebig, 374.— Leur action sur les tissus, 376. — Ils favorisent la combinaison de l’oxygène avec les matières organiques, 377. — Leur in- fluence sur les actes nutritifs, suivant la proportion dans la- quelle ils sont contenus dans le sang, 378.—Leur influence sur l’innervation, 379. — Parmi eux, le sel marin est le plus important dans la nutri- tion, 380. — Opinions de di- vers auteurs sur leurs usages, 382. Sels calcaires et sels alcalins. Leur action est contrebalan- cée par les corps gras, 324. Sel marin. Existe dans la sueur, 182. — Il contribue à la sta- 458 TABLE ALPHABÉTIQUE bilité dos ('déments organiques du sang, 2(52, 377. —Quantité normale contenue dansle sang, 59, 60, 382. — Son influence sur l’absorption, 376.— Il est de tous les sels alcalins le plus important dans la nutrition, 380. — Il existe dans la bile, 384. — Scs usages dans l’or- ganisme, 384. Sels terreux, 364. (V, Phosphate de chaux.) Sensibilité et contractilité,83, 89, 93, 94. Sérum du sang, 51.— sa compo- sition, 59.—de la lymphe, 61. Soufre et phosphore. Entrent dans la composition des prin- cipes albuminoïdes, 227, 391. — et des globules,39 î,—Leurs usages dans l’organisme, 391. — Distinction de leurs usages, 393.— Leur élimination chez l’enfant, 399.— chez l’adulte, 402. Sporadiques (maladies), 109. Substances albuminoïdes, 227. (V. Albuminoïdes.) Substances alimentaires.(V. Ali- mentaire, Aliments et Alimen- tation.) Suc gastrique,! 26.—Ses proprié- tés, 127.— Son action, 129.— Substances attaquées par le suc gastrique, 129. — inatta- quées par le suc gastrique,! 30. Suc intestinal, 138. — Son ac- tion, 138. Suc pancréatique, 132.— Ses propriétés. Ses usages. 133. Sucre, 276. — Ses usages et ses métamorphoses chez les végétaux, 282. —Il n’est pas seulement utilisé dans l’orga- nisme aux combustions de l’acte respiratoire, 280. — Il doit se combiner avec l’albu- mine dans l’organisme, 256. — En acquérant de l’azote, il est utilisé à la nutrition des tissus. Considérations à l’ap- pui, 285.— D’autre3 substan- ces que le sucre peuvent ac- quérir de l’azote dans l’orga- nisme, 288. — Par sa combi- naison avec l’azote, il est le point de départ de la généra- tion des tissus gélatineux, 290. — Actions chimiques sous l’influence desquelles peuvent s’opérer ses métamorphoses. Expériences de M. Cl. Ber- nard, 290. — Transformé en matière coagulable, il n’est pas seulement utilisé à la nu- trition des tissus, 298. — Ses autres usages, 298. — Le su- cre des féculents et le sucre de l’organisme ne doivent pas se comporter d’une manière identique dans les actes nutri- tifs, 298. — Il est transformé en graisse dans l’organisme, 282. — Ses usages comme ali- ment respiratoire, 302.— Son rôle dans l’état morbide, 302. — L’albumine et le sucre sont les principaux agents de la nutrition, 303. — Son emploi à la formation et à l’entretien du tissu osseux, 303. — Ses usages et ses effets, introduit en nature dans l’organisme, 305. — Les corps gras régu- larisent ses métamorphoses, 324. — Il ne fait jamais dé- faut dans l’organisme, 334, 335. — Derniers termes des métamorphoses du sucre com- biné avec l’azote, 288. — Sa présence dans l’urine, 209. Sueur, 145. — Acides de la sueur, 181. — Sa composition chimique, 182. — L’urée s’y rencontre, 183. — L’acide urique n’y existe pas, 183. ET ANALYTIQUE DES MATIÈRES. 459 Sympathies, 90. Synovie, 172. Système artériel, 69. (V. Sang.) Système capillaire, 73. Système lymphatique, 81. (V. Lymphatiques.) Système nerveux, 83. Système vasculaire à sang rouge, 69. — à sang noir, 69. Système veineux, 69. (V. Veines.) Système de la veine-porte , 40. (V. Fibrine.) T. Température. Son influence sur l’air atmosphérique, 22, 107. — Tous les animaux ont une température qui leur est pro- pre, 112. — Animaux à tem- pérature constante et animaux à température variable, 115. — Température du corps de l’homme, 118. Thoracique (canal), 39, 80. Tissus gélatineux, 264. — Ali- ments provenant des, 264. — Mode de vitalité des tissus gé- latineux, 264. — Différences qu’ils présentent à cet égard avec les autres tissus de l’éco- nomie, 265. — Leur origine, 290. — Le sucre, par sa com- binaison avec l’azote, est le point de départ de la généra- tion des tissus gélatineux, 290. — Us présentent des différen- ces dans leur état suivant les époques de la vie, 301. 'Iissu nerveux (sa composition), 86. Trachée artère, 35. Transpiration ou sueur, 145. Tlbe digestik, 36. U. Urée, 188. — Sa composition, 188. — Sa quantité dans l’u- rine , 189. — Sa formation, 191. — Influences qui modi- fient sa proportion dans l’u- rine, 190. — Son absence ou sa diminution dans l’urine, 192. — Dernier terme des mé- tamorphoses des substances albuminoïdes, 263, 339. — Elle se rencontre dans lasueur, 183. Uretères, 49. Urinaire (appareil), 49. Urinaires (calculs), 210. Urinaire (sécrétion), 185. — Ses rapports avec celle de la peau, 211.—Influence du phosphate de chaux sur la sécrétion uri- naire, 372. Urine, 185.—normale,186. — Sa composition,189. —Influences qui font varier la proportion de l’acide urique dans l’urine, 195. —Acidité et alcalinité de l’urine,197.—Matières qui s’y rencontrent normalement ou accidentellement, 197. — In- fluence de l’alimentation sur son acidité ou sur son alcali- nité, 168. — Quantité émise dans un temps donné, 199. — Quantité d’eau dans l’urine, 200. — Distinction des urines selon le moment de leur émis- sion, 201. — Quantité des principes solides contenus dans l’urine, 202. — Causes d’augmentation des principes solides, 203. — Diminution des principes solides, 204. — Etat dans lequel les substan- ces introduites dans le tube digestif sont trouvées dans l’urine, 205.—Matières qu’on y peut trouver, 205.— Ma- tières qu’on y retrouve, mais altérées, 205. — qu’on y re- trouve sans qu’elles aient subi 460 TABLE ALPHABÉTIQUE ET ANALYTIQUE. aucun changement, 20G. — Influence des carbonates alca- lins sur l’urine, 208. — Pré- sence du sucre et de l’albu- mine dans l’urine, 209. — Urine laiteuse, chyleuse, 209. — Rapidité avec laquelle les substances passent du tube digestif dans l’urine, 211. — Urine acide et urine alcaline, 356. — Urine des herbivores, 196. Urique. (V. Acide urique.) Urique (diathèse), 208. V. Vaisseaux capillaires, 72. — Distinction des vaisseaux ca- pillaires, 73.— Leur quantité varie selon la nature des tis- sus, 74. — Leurs propriétés, 75. — Circulation dans les capillaires, 76. — Leurs usa- ges , 78. — Ce n’est que par les vaisseaux capillaires que s’effectuent les actes nutritifs, 78, 258. Vaisseaux chylifères,39, 79.— Différences qu'ils présentent avec les veines mésentériques dans leurs propriétés d’absorp- tion, 155, 159. Vaisseaux lymphatiques, 79. (V. Lymphatiques.) Végétaux. Leurs principes élé- mentaires, 29. — Leurs prin- cipes immédiats azotés, 30. — non azotés,31. — Végétaux et animaux. Différences qui caractérisent la nutrition chez les uns et chez les autres, 2. Veines, 66. — Leur composition anatomique, 68. — De la fi- brine dans les veines, 248. Veine cave supérieure et veine cave inférieure, 67. Veines mésentériques, 39. — Dif- férence qu’elles présentent avec les vaisseaux chylifères dans leur propriété d’absorp- tion, 155, 159. Veine-porte, 43.— De la fibrine dans le système de la veine- porte, 248. Veines pulmonaires, 35. — mé- sentériques, 39. Veine sous-clavière droite, 80. Ventricules du coeur, 65. Vésicule biliaire, 41. Vessie, 49. Vieillards. Le système veineux prédomine chez eux, 242. Voies par lesquelles pénètrent les agents extérieurs dans l’or- ganisme, 97. Voies intestinales, 36, 121 (sé- crétions dans les), 175. Voies respiratoires, 34, 97 (sé- crétions dans les), 174. FIN DE I.* TABLE ANALYTIQUE pus MATIERES. Coulommiers. — Imprimerie de A. MOl'SSIN.