ou SaSstoire des affections Biaorljiiïes «le l'œil et 'M «le ses annexes, provoquées et entrete- sL nues par les atteintes ou le séjour W; d'animaux, vivants iik par S. Excc. le docteur W CH. J.-F. CARRON DU VILLARDS & lusp-'cteur-Géiiéral honoraire du corps de chirurgie militaire Mexi- 'jfe en in, membre titulaire de l'Académie impériale de médecine de ML Rio de Janeiro, et de diverses autres sociétés savantes. yX> Commandeur, officier et chevalier de divers ordres. JÊ^ Décoré de la croix de Simon Bolivar, etc., etc. /IL I Que faire dans un gîte amoins que l'on y songe. JN) (Fables de Lafontawe.) jS _______r m RIO DE JANEIRO CHEZ MORIZOT & Ce., LIRRATRE DE LA MAISON IMPÉRIALE 112, rue do Ouvidor ^U 9 ^û PASSE-TEMPS (DIPlVMIlQlDIlMIIQWnS MARITIMES. il Monsieur le professeur Velpeau, OHicicr de la légion-d'honneur, memhie de l'Institut et de rAciidcinh de médecine de Paris, etc., etc., 'te. iA%b&MJtefSS- fc w 'cvmwe ma Ameyyaàâcc/e eA ane wt<: yaAc7?, Me d/cm^4 et f'c'dy>ie*™*z< * entjAiczd a//cyccd .- de7iAtmeaAà eu veyAa c/ed^acAdye me /zyoAsd/e, ■ay Ae. Az/yct /AiOetidteay Ae. ^yofc/jccy, '^Jcfye A>'(nt le mémoire rcnl'ermv l'histoire, était M. John iUauuoir, frère de mou iliustre maître et ami, .i V. Mauuoir célèbre chirurgien de Genève. ** Guide piuliqir cité. ïom. ï, p. 279. — 10 — nommée par le célèbre naturaliste. parce que, quand elle est avalée par les hommes et surtout par les chiens, elle s'attache à la luette, aux amygdales, au voile du palais, et produit des efforts de vomissements au moyen desquels elle est rejetée à l'instant. Celle mouche bien connue,dépose non-seulement ses œufs dans les viandes mortes, mais encore sur les chairs vivantes, les ulcères de mauvaise nature, entre les paupières des hommes endormis. L'histoire de ce pauvre chanteur des rues dévoré par les larves de mouches de la viande, qui in- fectaient surtout les paupières, n'est pas unique, car Lejeune, chirurgien du duc de Guise \ écrivait à Jac- ques Guilleaumeau, qu'il avait vu à Joinville extraire des vers de l'œil, par une femme qui lui raconta que cela se voyait souvent dans ce pays, et n eusse été, dit Le- jeune, que je les ay veu marcher, je n'eusse peu me persuader, se pouvoir engendrer telle vermine au blanc de Vœil. Le même Lejeune vérifia plus tard la fréquence de ces vers dans cette partie de la Bour- gogne. Jean Verbrugge, chirurgien de Middelbourg, Hollande, ** rapporte des faits de celte nature qu'il avait observés. Galtzan *** raconte avoir vu un jeune homme dont toute la graisse de l'œil était dévorée par des lar- ves de mouches. Enfin, on lil, dans les Ephémérides des curieux de la nature, année lSrae, observation 2/ime, que l'on vil sortir d'entre les paupières d'un homme, Jacques Guilleaumeau. Traité des maladies des yeux. 7. J,?a" Vci'bl'uPg«'» traduction hollandaise de Jacques Guilleaumeau. MuldelbstuiL', in-8-, 1673. Galtzan. JiissrrtaUo de rcnninUmx. ttvasbouri;, 1721, — 11 — une grande quantité de larves sans que l'on y observât ni plaie ni ulcération. Les savants traducteurs et commentateurs de Mae- kensie peuvent donc accepter sans contrôle le cas rap- porté par 31. Cloquet. Pour mon compte j'ai vu souvent des cas analogues, chez des mendiants aveugles, chez des nègres privés de la vue et atteints d'ophthalmies purulentes chro- niques. Quelque fois la larve après avoir détruit une partie des tissus, se creuse une niche, où elle continue son travail de destruction : il faut alors aller à sa recherche et l'extraire, comme dans le cas suivant, qui a été em- prunté aux Annales d'oculistique, par un grand nombre de journaux scientifiques et politiques. Le meilleur moyen de débarrasser les yeux et les paupières de celle sale engeance, consiste à injecter entre les paupières et dans les trajets fistuleux , si les larves en ont formé, une légère infusion de nicotiane, aiguisée avec quelques gouttes de solution alcoolique de deuto-chlorure de mercure. Extraction d'une larve profondément située dans le grand angle de l'œil, entre la caroncule lacrymale et la réunion des canaux lacrymaux su- périeur et inférieur, recueillie par le docteur Pierre Tettamanzi. Francisca Zembrana, de Juana Diaz (île de Puerto Rico), âgée de 20 ans, était, depuis quelques semaines, atteinte d'une ophthalmie paîpébrale, ayant son siège principal au grand angle de l'œil droit, accompagnée d'é- coulement purulent fétide et de démangeaisons insup- portables. F:iti'-uée de montrer son œil à différents médecins du pays, elle se rendit à Ponce pour consulter M. Car- ron du Villards, qui, à la première inspection, déclara qu'il s'agissait d'une larve de la mouche de la viande et qu'il en distinguait les crochets mondibulaires,au rebord d'un trajet comme fistulcuv. J'avoue que pour mon compte je ne voyais rien; mais M. Carron du Villards m'ayant indiqué deux points noirs, je les reconnus en en effet. Il introduisit une pince à pupille artificielle dans l'ouverture et chargea immédiatement par la tête la larve, qui fut extraite avec quelques efforts, car elle était de beaucoup plusgrosseque l'ouverturede la fosse où elle était nichée. L'animal fut extrait vivant : c'était une larve apode ayant neuf ligues anglaises de longueur, pourvue de treize anneaux recouverts de poils et d'une appendice respiratoire caudal à trois branches ; sa tête était armée de deux crochets mandibulaires très forts et noirs. Avec l'extraction du parasite rongeur, disparurent tous les symptômes d'ophthalmie, ainsi que l'écoule- ment et le prurit. îl est probable que, pendant le sommeil, la mouche à viande avait pondu ses œufs au grand angle, et qu'un de ceux-ci ayant éclos, la larve avait creusé sa niche pour y attendre sa période d'évolution. Mouche du Guajo, Muscaversicolor nobis. Sur le Guao [Euphorbia ferox) plante vénéneuse de l'île de Cuba, que quelques personnes considèrent comme une Eu- phorbe, et que M. Dezcourlilz prétend être la Comocla- ^rillo, vous êtes immédiatement enveloppé d'une atmos- phère acétique qui irrite la gorge, le nez et surtout les yeux. L'action irritante du liquide épanché est aussi active que celle de l'ammoniaque. Mais ce malaise n'est que passager. Il n'en est pas de même quand cet acide entre dans les yeux ; il produit une véritable cautérisa- tion, accompagnée de douleurs excessivement cruelle-. Cela arrive quelquefois aux enfants qui pressent le ven- tre de l'animal pour lui faire rendre son vinaigre. Plu- . «ours habitants de la Terre chaude el les Indiens m'ont coufirméce fait. J'ai seulement pu expérimenter l'action de ce liquide sur les chiens, chez lesquels il détermine à l'instant une douleur violente, se manifestant par des cris, le larmoiement des yeux et les efforts que fuit l'animal pour les débarrasser du corps étranger qui y a été intro- duit. Certes, si j'eusse habité le Mexique plus longtemps el tenu des vinagrillos â ma disposition, comme j'ai eu des crotales, j'aurais pu multiplier sur les premiers es essais et épreuves que j'ai faits sur les derniers. Je — °2l> — lègue ce soin à ceux qui tendent après moi à la recher- che de la vérité. Deuxième catégorie. La seconde catégorie des animaux nuisibles à l'œil et à ses annexes, n'est pas moins nombreuse que la pre- mière; elle comprend, comme je l'ai dit plus haut, les êtres animés qui piquant l'œil, y déposent leur venin, leurs œufs ou quelque partie de leur corps qui devien- nent des foyers d'accidents divers. Commençons par lesplusnombreux et les plus répan- dus sur la surface du globe, le genre Culex, compre- nant les cousins et leurs diverses variétés. Culex pipiens. C'est celui qui est le plus commun. Il se rencontre malheureusement dans les régions et les atitudes les plusopposées, car Regnard, dans son voyage en Laponie,* raconte que ce pays en est infesté, et que les Lapons, pour se débarrasser de cette peste et en préserver leurs troupeaux, sont obligés de se tenir dans une atmosphère imprégnée de fumée, au grand détri- ment de leurs yeux. Je doute cependant que l'on puisse comparer non cette peste, mais ce fléau de Laponie, à celui que l'on rencontre sur les rives du Sénégal, de la Gambie, du Mo- zambique, de l'Amazone, du Parana, de la Magdeleine et surtout du Mississipi. Malheur à l'Européen du nord * Ilegnard. Voyage en Laponie. Edition d'Amsterdam, année 1771, page 57. surtout, qui est forcé de vivre sur ces rivages funestes ; malheur surtout à ceux à cheveux blonds , à peau fine et délicate, sillonnée par des veines bleues, que les In- diens nomment sang bleu (sangre azul), car ils sont condamnés à être torturés jour et nuit, sans paix ni trêve, par desnuées de cousins, mosquites, maringouins et autres parasites suceurs, qui, non contents de pom- per leur sang, couvrent leur corps d'une éruption om- biliquée, élevée, occasionnant un prurit insupportable, analogue à celui de l'urticaire, et déterminant souvent comme celle-ciutie fièvre ardente. M. Raspail * dit que ces animaux sont pourvus d'un appareil suceur dont il donne une description exacte, comme toutes celles qui viennent de lui ; mais il pense que la forme et la construction de cet appareil suffisent seuls pour expliquer la phlyctène ombiliquée et le cer- cle inflammatoire qui l'entoure. Par un examen microscopique attentif, je me suis convaincu que les cousins instillent un liquide excessi- vement irritant, analogue à celui des abeilles et des guêpes. Les piquanls de l'ortie arborescente, Lamium arboreum, qui croît en quantité au Mexique et que l'on y nomme aussi Jf a/a rmyer, contiennent aussi un liquide qui, inoculé avec la pointe d'une aiguille de Saunders, produit une démangeaison brûlante, aussi vive que si le liquide eût été accompagné des aiguilles piquantes de l'ortie. Les espèces de cousins les plus connues et les plus * Raspail. Ouvrage cité, page 201. — su nuisibles après les culex pipiens, sont le Culex rcplans de Linnéeou Moustique de Suède qui diffère beaucoup de celui d'Amérique, le Culex mosquitos de Pocy, le Corassi culex giganleus très commun sur les côtes de la Havane, le Cousin êchassier, Culex longipes nobis, qui m'a dévoré sur les bords de. la Gambie, ïeJéjin, Culex luteus que l'on devrait nommer mieroscopieus, car il est à peine visible et sa piqûre est la plus douleureuse de toutes: on le rencontre par milliards à la Havana, Vera-Cruz, Alvarado,Tetuantopec otSan Blaz ; le Culex rodeador ou Ecchymosicus nobis, car il décrit des spira- les, se précipite sur vous, ne fait qu'une seule blessure, d'où surgit une gouttelette de sang, suivie d'une ecchy ■ mose ressemblant à une pétéchie. Al'exception du Jéjin et du culex pipiens, tous ces éternels ennemis de l'es- pèce humaine sont armés d'un suçoir tellement résis- tant, qu'il perce le drap, la toile la plus forte et la plus serrée, le cuir mince, les gants et culottes de daim. H y a sur les côtes sud de la Havana, à Ciem-Fuegos, San Juan de los Remedios, Sagua la Grande, Nueviîas, Santa-Cruz, Jibarra et Baracoa, des fermes que l'on est forcé d'abandonner pendant trois mois de l'année, car les hommes et les bestiaux ne peuvent résister aux atteintes de ces avides el insatiables parasites. J'ai vu grand nombre d'animaux des races ovine, bovine el chevaline, avoir les yeux dans un état épou- vantable, par suite de leurs piqûres. La même chose arrive aux hommes et surtout à ceux doués d'une peau vulnérable. Je me suis souvent réveillé presque aveu- gle, les paupières érésypéiateuses et ne pouvant être soulevées par le mouvement volontaire de leurs mus- cles élévateurs. Quelquefois les piqûres sont si fortes, qu'il se manifeste autour d'ellesune inflammationfuron- culeuse qui accomplit toutes ses périodes, y compris l'expulsion du bourbillon. Cet accident arrive chez les personnes à peau fine et surtout chez les cnfanis. Il y a eu pendant mon séjour à la Vera-Cruz une véritable épidémie de furoncles aux paupières qui n'avait pas d'autre cause. J'en ai des preuves irrécusables, puisque j'ai eu aussi ma part de furoncles aux paupières, après avoir tué les mosquites en flagrant délit de piqûres. A la Havane, en 1851, une dame anglaise me fit ap- peler pour ses trois petites filles dont les paupières étaient tellement enflammées et gonflées, qu'il me fallut de certains efforts pour les écarter et reconnaître que l'œil était complètement sain : des lotions froides am- monicales et un purgatif firent disparaître tous ces symptômes. Quelques jours après, je me rendis à bord du navire américain Éva, dont plusieurs matelots ayant couché sur le pontdans l'état d'ivresse, se réveillèrent le len- demain, les paupières et les joues tellement labourées par les piqûres des Jéjins, qu'ils étaient complètement aveugles. Des applications d'eau sédative allongée, les guérirent en vingt-quatre heures. Que d'Européens chassant sur les bords de la Gambie ou de la Magdeleine ne sont plus revenus chez eux à cause du même accident! ! ''liiisant mes voyaeespar la réroltcd'ohiH* M'h^<-: — 3*2 — naturelle, je ne chassais jamais dans les passages infes- tés par les cousins, que les mains couvertes de gants en caoutchouc et la figure préservée par un masque en fil de laiton très serré. Il n'y a pas d'autre moyen de se garantir de leurs piqûres, à moins de s'enfumer comme les Lapons, au risque d'étouffer et de devenir aveugle ; encore ce moyen est-il complètement insuffisant dans les pays chauds. En remontant l'Orénoque, mon ami le Dr Dubreuil fut horriblement tourmenté par ces impla- cables ennemis, bien que l'on tint le pont du navire couvert de fumée. J'ai fait préparer des onguents, des enduits, deslolions de toute espèce, sans le moindre résultat; il reste, il est vrai, l'enduit de poix employé par les Lapons,mais com- ment tenir un fusil, saisir un insecte ou enlever la peau d'un oiseau avec des mains couvertes de brai liquide : le remède est pire que le mal. Si l'on veut écrire, disséquer, faire quelques obser- vations microscopiques, il n'y a qu'un seul moyen d'ac- quérir la tranquillité, c'est de préserver ses extrémités inférieures par des pantalons en crinoline à la mame- louk, des bottes en carton et les supérieures par le bruit que fait un nègre avec deux grands fouets en papier, dont il frappe l'air alternativement. Les médecins qui travaillent dans leur cabinet, étendus sur un fauteuil à la Voltaire, le ventre réchauffé par un bon fen, doivent avoir un peu d'indulgence et même un peu de pitié, pour les pionniers laborieux,qui défrichent le champ de la science, avec de pareils ennemis et de semblables précautions,sans l'espoir d'autre récompense,que celle — 33 — que leur offrent et leur propre conscience et l'estime de quelques confrères justes et éclairés. J'ai supporté la faim, la soif, des chaleurs brûlantes, lèvent pulvérulent du désert, mais je ne puis endurer l'irritation que donne la piqûre des mosquit.es, qui ar- rive à se convertir pour moi, en de véritables accès de fièvre ortilière. Je me suis accoutumé aux cris noctur- nes des animaux du désert, au bruit du serpent à son- nettes aux glapissements incessants des chacals, mais je ne puis me familiariser avec le frôlement métallique acharné,d'un mosquito,qui m'agace et me meten fureur. Pour calmer la douleur et la cuisson, je n'ai trouvé que deux moyens : le premier consiste dans des lotions avec l'acétate d'ammoniaque contenant une infusion concentrée de tabac chloroformiséc; le second est l'ex- position de la partie à la chaleur active de la flamme de l'esprit-de-vin, d'un feu de bois sec; quand il s'agit de quelques piqûres seulement, un charbon ardent ou le feu d'un bon cigarre suffit. Ce moyen m'a été suggéré par le fait suivant : En 1843, descendant le Rhin depuis Strasbourg jusqu'à Dusseldorf, je mangeai une grande quantité de moules : dans la nuit, je fus pris d'une érup- tion ombiliquée confluenteau dos, àla poitrine et au ven- tre: j'employai, sans résultat, des frictions, des onctions de toute nature; la démangeaison ne faisait que s'ac- croître. Il me vint alors à l'idée de descendre près de la machine à vapeur et d'exposer mon dos à la chaleur du foyer de la chaudière; au bout d'un quart d'heure, je ruisselais de sueur, et la démangeaison, de même que l'éruption, disparaissaient comme par enchanle- ment. Souvent l'œdème des paupières est tel, qu'il faut l'effort du doigt pour les soulever, et que l'on rencontre sur la conjonctive oculaire un chémosis séreux, qu'il est urgent d'évacuer, au moyen de quelques mouchetures pratiquées avec la pointe d'une lancette ou d'un kéra- totome: sans cela, l'on court le risque de voir apparaî- tre une conjonctivite purulente. OEstres. Taons.—Qui ne connaîtcet insecte difforme, au vol sonore, qui, dans presque toutes las latitudes, tourmente les races bovine, ovine et chevaline. Le bruit de ses ailes, semblable à un bourdonnement sinistre, met en fuite ces animaux dès qu'il l'entendent, car ils savent que c'est un de leur plus cruels ennemis. C'est le taon que les Latins nommaient Aziles et que Virgile n'a pas oublié dans ses Géorgiques. Les Grecs lui don- nèrent le nom (YOEstrus. Il en existe plusieurs variétés, mais deux seulement,déposent leur œufs dans les tissus, les autres ne les placent que dans les cavités et les ori- fices : ce sont VOEstriisbovis deFabricius, OEstre cutané de Réaumur, et celui que M. Raspail a, avec l'admira- ble esprit d'induction qui le caractérise, nommé OEstrus hominis, Raspail. Cette mouche suce pour se nourrir le sang des animaux, mais sa femelle, au moyen delà forte tarière tubulée qu'elle porte à l'anus, perce le cuir de l'animal pour y déposer ses œufs, qui y incubent, y eclosent sous forme de larves, et s'y nourrissent aux dépens des tissus, jusqu'à ce qu'elles se transfor- ment en nymphes. Les ravages produits par ces lar- ves seraient bien plus grands, si la nature prévoyante n'avait mis le remède à côté du mal : il existe en Amé- — 35 — tique, en Afrique et en Europe un oiseau nommé Pi- quebœuf, Buphagus erythrorhyncha*, qui se nourrit presque exclusivement de larves d'œstres, qu'il extrait du cuir de ces animaux, avec son bec fort el tranchant. Qui empêche ce vilain insecte de percer aussi la peau humaine? M. Raspail répond à cette question en ces « termes: En tout ceci, on ne parie pas des hommes: « la médecine alors comme aujourd'hui, évitait avec « soin lesanalogies insultantes pour les hautes doctrines « de l'Ecole. Cependant, puisque les larves vivent de « plusieurs chairs, je ne vois pas pourquoi dans l'occa- « sion elles se feraient faute de la nôtre. » Les observations modernes prouvent qu'elles ne s'en font pas faute. M. De Humboldt a vu dans l'Amérique du Sud, des Indiens dont les membres, etsurtout les parties grasses du corps, étaient couvertes de petites tumeurs qu'il présumait être produites par des larves d'insecte. J'ai converti en certitude les présomptions de l'illus- tre voyageur prussien, en extrayant à Léon de los Al- damas, des paupières, des fesses, des seins, de l'abdo- men, ces larves des tumeurs dans lesquelles elles pré- paraient leur métamorphose : c'étaient des vers apodes, dont l'orifice anal était pourvu d'un appendix, que l'on pourrait prendre pour une queue, tandis que ce n'est que l'appareil respiratoire de la larve: leur bouche était armée de deux crochels mandibulaires. Dépourvu de microscope, je ne pus voir si ces animaux étaient, com- * Buphagus erythrorhyncha, Tcmmink. Janarjra erythrorhyncha. Sait. — 3G — rue ceux des œstres intestinaux, pourvus de poils. Les Indiens appellent la mouche qui fournit ces larves, MalaMuger,Mala Donzella,méchante femnw,méchante fille. Elle attaque surtout ceux qui dorment en plein vent dans les environs des lagunes. Les malheureux Français qu'une infâme tromperie, transporta en Amérique pour coloniser le Guazacolco, ne trouvèrent dans cet Eldorado tant vanté, que décep- tion, misère, maladies, famine et la mort. Parmi les fléaux de toute sorte qui les assaillirent, il faut mettre en première ligne les insectes parasites de toute espèce, car ils les trouvaient dans leur domaine classique, dans leur essence natale. Celui qui leur occasionna le plus de tourment, fut un OEstre nocturne qui les piquait de préférence aux pau- pières, aux sourcils, et y déposait un œuf qui, par son développement, occasionnait un phlegmon, au milieu de la suppuration duquel se trouvait une larve, J'en ai vu plusieurs conservées dans de l'eau-de-vie, et l'on ne pouvait méconnaître qu'elles n'appartinssent à des OEstres, étant en tout semblables à celles extraites à Léon : c'est donc bien le cas de les nommer avec Ras- pail, OEslrus hominis ou OEslrus Raspalii. Dès que les colons connurent la cause de ces tumeurs, ils s'empressèrent de les ouvrir,pour extraire avec une épingle crochuecette larve, avant son plus ample déve- loppement. Ceux qui s'apercevaient de la piqûre la sca- rifiaient, et y introduisaient du tabac mâché ou de la cendre de cigarre, remèdes que leur enseignèrent les Indiens du pays. — 37 — Dans les plaines de la Venezuela, et sur le bord des grands fleuves de ce pays, il existe un œstre, qui vous saigne en passant : vous sentez à la main, à la face, une piqûre et vous y portez la main, qui rencontre une goutte de sang. Mon ami le docteur Moreno m'a fait voir l'animal, et ses compatriotes m'ont confirmé ses habitudes. Je l'ai nommé OEstrus sanguinarius. La Mouche rouge des Florides. 11 existe dans les plaines sablonneuses des Florides, une petite mouche, ou plutôt un petit taon, qui a une prédilection toute spéciale pour s'attaquer aux yeux. Sa piqûre est extrê- mement douloureuse, et fait immédiatement enfler la paupière. On la rencontre aussi dans quelques plaines stîblonneuses de la Venezuela, à Coro et à Maracaïbo. Un jour, conversant dans mon cabinet,avec M. leVomte Philippe Maria de Tovar, dont le père avait été l'hôte el le guide du baron de Humboldl dans les savanes de la Venezuela je me sentis vivement piqué à la pau- pière, et y por tant rapidement la main je pris sur le fait mon assaillant : c'était une mouche, ou plutôt le taon des Florides : sa couleur était rouge vif, sa tête blanche et il était armé d'un suçoir excessivement résis- tant et affilé. Au Brésil, dans plusieurs localités et tout près de Rio de Janeiro, j'ai fait la triste connaissance d'un œstre nomméBorachudo,que l'habile entomologiste, M.Tru- qui, consul sarde m'ajlit être le Simulium 'perlinax, Perly. Piqué par lui en plusieurs endroits de la face, chaque piqûre s'est convertie en une furoncle de très mauvaise — 38 — nature, rebelleet douloureux, ce qui arrive à la plupart des Européens non acclimatés. Ichneumons. —Passionné dès mon enfance pour l'his- toire naturelle, je cherchaisaviderm nt tout ce qui pou- vait m'instruire et augmentermescollections. M. Junne, le célèbre chirurgien et naturaliste genevois, m'ayant conseillé d'élever les chenilles que je rencontrais, pour obtenir à la suite de leur diverses métamorphoses, des papillons bien conservés, quelle ne fut pas ma surprise de voir un jour éclater une énorme chenille du papillon du chou, et d'observer que de chaque crevasse sortait une infinité de petites larves qui le lendemain étaient converties en nymphes, d'où sortirent plus tard des pe- tites mouches. J'écrivis à M. Jurine pour lui exprimer mon étonneraient : pour unique réponse, il m'envoya un tome de Réaumur,où j'appris que tous ces phéno- mènes étaient produits, par un ichneumon qui, au moyen de sa longue tarière perçait le corps de la mal- heureuse chenille et y déposait ses œufs, qui éclosaient sous forme de larves et se nourrissaient aux dépens de l'animal, jusqu'à ce qu'ils l'eussent perforé de toute part pour en sortir. Mais il y a loin du corps d'une chenille à celui d'un homme, cependant l'ichneuumn ne le respecte pas : je ne pense pourtant pas avec M. Raspail, que trente larves d'ichneumon puissent déformer une face comme l'est celle de l'homme dont il donne la figure dans son ouvrage*. * Raspail, oimage cité p. 279. — 39 - J'ti yu bien souvent aux paupières, des tumeurs qui devaient être le résultat de la piqûre d'un ichneumon, car elles renfermaient des larves analogues à celles que j'ai vu sortir depuis, si souvent du corps des chenilles du papillon du chou. Mais ceci est resté dans mon es- prit pendant longtemps à l'état de doute, jusqu'au mo- ment où un de mes amisfie docteur Bado, m'affirma que dans les plaines humides de Venezuela (llanos), les Indiens étaient piqués en diverses parties de leur corps, et surtout aux paupières, par un petit insecte dont il m'envoya le dessin et les larves, que je recon- nus être un ichneumon, nommé par les gens du pays Pullion, et que je nomme Ichneumon Pullio, nobis. Les individus piqués par le Pullio, n'éprouvent point Ai douleur au moment de la piqûre, qui est presque toujours faite la nuit, ou tout au moins pen- dant le sommeil dans les lieux sombres. Huit à dix jours après, il se manifeste dans le sourcil et dans la paupière, une petite tumeur ovoïde, indolente, qui peu à peu, prend de l'accroissement, s'enflamme et devient le siège d'une démangeaison très-désagréable, passant rapidement à une inflammation phlegmoneuse circonscrite : c'est l'époque d'éclosion de la larve. Ya naceel Bicho : déjà naît le ver, disent les gens du pays. L'abcès se forme, et alors on dit : le ver mange et forme sa demeure. En ouvrant l'abcès avec une lancette, on rencontre immédiatement la larve, que l'on extrait du premier coup avec une aiguille, ou mieux avec une épingle recourbée en forme de crochet. Autant que je pus en juger après un séjour de six _ il) — semaines dans l'eau-de-vie, c'est une larve apode avec crochets mandibulaires, dont le corps est formée de sent ou huit anneaux rugueux sans appendice anal. Les Indiens des plaines n'attendent point l'évolution de la larve ; aussitôt que la tumeur parait, ils l'ouvrent avec la pointe d'un instrument aigu, et y introduisent de l'infusion concentrée de_labac dans de l'essence de térébenthine. C'est sans aucun doute à des ichneumons de la côte d'Afrique qu'il faut attribuer les larves que j'ai trouvées dans les paupières de quelques nègres. Mon amietca- marade le général Soto, m'a raconté que dans la cam- pagne du Sud, entreprise contre le traître Alvares, les soldats mexicains eurent beaucoup à souffrir des pouillons. Abeilles et Guêpes. — L'abeille [Apis Mellifera, Linn.), insecte de h famille des sociétaires, vit dans toutes les latitudes et supporte les températures les plus opposées, depuis celle que l'on trouve au pied du Mont-Blanc, sur les cimes du Grand-Mulet, jusqu'à celles des régions équatoriales. Partout j'ai man^é du miel pris sur les lieux, tel que le miel blanc de Cha- mouny, qui est parfumé parles fleurs de l'arlhemisia nivalis (Génépy), le miel safrané du Gatinais, le miel vert de Sphaclerie et de Caribussa, enfin le miel rose des montagnes de l'Atlas, que le Kabyle hospitalier offre à son hôte dans une feuille de mais. L'abeille n'est pas un être offensif, mais défonsif ; il tient à sa propriété, les utopies des so.inlistes n'ont pas pénétré jusqu'à lui; il considère son travail comme sa .-. 41 — propriété et non comme un vol. Malheur à celui qui y attente, un aiguillon aigu distillant un fluide véné- neux, le frappe à l'instant et luioccasio-ine une vive et intolérable douleur. Les enfants inquiets e! curieux qui désirent voir de trop près le travail de la ruche, les chasseurs de mie! de l'Amérique du Nord, guides par les coucous indi- cateurs, le Guavros de file de Cuba, qui font la récolte delà cire sauvage, sont tiès-oxposés à être piqués par les abeilles. J'ai vu un grand nombre de fois des acci- dents de cette nature, produire des. cécités momen- tanées, car non- eulemcnt les paupières., mais encore les conjonctives, deviennent le siège d'un œdème aigu qu'il est toujours prudent do dissiper par des scarifi- cations. M. Raspail pense que le venin des abeilles est acide et qu'il coagule iesang, et que c'est, pour celte raison que l'ammoniaque est, son antidote. Les piqûres d'a- beilles sont communes : il csl bien peu de praticiens qui n'en aient pas observé un grand nombre. Rarement elle-; sont suivies d'accidents graves; j'ai cependant vu aux Etats-Unis un chasseur d'abeilles qui avait perdu iesd'en débarrasser que de les toucher avec leur cip:are allumé ou avec une épinu'le chauffée. Pour moi, je les enlevais de même, avec une pince à panse- ment chauffée. Quand on a affaire à des nuées de pinollilos, on n'a d'autre ressource que celle de frotter les parties enva- hies par eiles avec du tabac h chiquer, infusé dans du rhum commun. Pou du pubis, Pediculus feroxpubis. Morpions.—Cet ignoble animal, enseigne de malpropreté et de fré- quentations peu élevées, quitte souvent les parties gé- nitales, son d miicile habituel, pour aller faire des ex- cursions sur la face où il se niche dans la barbe , les soumis et les cils. Les nègres sont fort sujets à abriter ce pas asile; comme eux, il est pourvu d'une peau noire, ce qui lui donne une phy ionomie toute spéciale, d'au- tant plus remarquable qu'il est trois fois plus gros que -on homonyme blanc. Déjà Celse avait parlé de hi phihiriase des sourcils et des paupières: j'en ai signalé plusieurs cas remarqua- bles dans mou Guide pratique* et qui se présentaient sous forme de blépharites ulcéreuses el sycoïdes. En revenant de Sierra Leone à Libéria, le docteur Kicl, mon secrétaire, ayant passé la nuit sur le pont du navire,où dormaient une série de noirs, citoyens de la république Libérienne, eut tous les cils garnis de ces hôtes aussi dégoùtantsqu'incommodes.Il était tour- menté par une démangeaison très-vive, et ne la voyant pas finir malgré des lavages répétés, il me pria d'exa- miner ses yeux, où je vis au milieu des cils une série des parasites africains sus-nommés; je lui conseillai d'ap- pliquer une onction d'onguent citrin, ce qui tua à l'in- stant cette repoussante vermine. Les gordiens, dragonneaux, vers de Médine, vers de Guinée. — J'ai séparé les gordiens des filaires, quoi- qu'en réalité ils appartiennent à la même famille, parce que l'un ne vit que dans les tissus cutanés et l'autre sous la conjonctive ou dans les chambres de l'œil. Le premier est le Gordius Medintnsis, Linn., le Filaria Medinensis Rudolphi; l'autre est le Filaria Papillosa. Le premier est blanc, le second rouge. Le gordien peut acquérir la longueur de plusieurs pieds; la filairc n'ex- cède jamais trente lignes. Comme je l'ai dit plus haut, le vrai gordien ne se trouve que sous la peau. En Amérique et en Afrique, je l'ai vu siéger au grand angle de l'œil et simuler, à s'y * Carron du Villards , ouvrage cite". — riO — méprendre, une tumeur lacrymale u'eérée. J'ai surtout noie un cas observé à Mezquines, sur un Arabe de l'in- térieur et qui me fut montré parle docteur Formento, i'ixé dans cette ville. Le Jeune, Daniel Lecler, Pechellini, Wandalent, Garmaan, Guersin , Bajon , Nordmann , Geischeidt, Guyon, rapportent une foule de faits analogues, que j'ai d'ailleurs consignés dans mon Guide pratique. J'ai souvent rencontré des filaria papillosa ch z les chevaux africains, mais je ne l'ai observé que deux fois chez l'homme, à Puerio-Principe , et chez une né- gresse Bossale récemment arrivée de Guinée. Dans les deux cas, j'avais pris dans le principe le ver pour une veine variqueuse de la conjonctive, mais le lende- main, l'ayant trouvée changée de place et deux jours après revenue à son gite primitif, j'augurai qu'il s'agis- sait d'un entozoaire à extraire, ce que je fis au mo- yen d'une légère incision à la conjonctive, qui, mettant l'animal à nu, me permit de l'extraire avec une pince à pupille artificielle. C'était un filaria papillosa couleur de sang, ayant la longueur de 28 à 30 lignes. Placé dans l'eau, il rampait lentement, attendu que les cro- chets de la pince l'avaient blessé dans l'action de le sai- sir. Dépourvu de microscope, je ne pus en faire un exa- men sérieux, et désirant l'envoyer à M. Robin, à Paris, je le plaçai dans de l'eau chloroformisée selon la formule de Boucbardat, mais il ne tarda pas à se décomposer. Je eonçois qu'en Afrique et dans quelques parties de l'Asie, les Glaires puissent déterminer des ophthalmies graves et retelles. Cela b'ohserve «urlout dans la roce — 51 — chevaline, el M. Tassy, vétérinaire en premier de h garde municipale de Paris, a publié l'histoire d'une ophthalmie entozoïquo * observée sur des chevaux. Contre ce genre d'entozoaires il n'y a pas d'autres moyens de guérir que leur extraction. Cependant, si l'on s'en rapportait à l'observation consignée par M. Alessi dans le Bulletin thérapeutique, tome XXXI, page 314, on pourrait espérer de les faire mourir par l'action combinée du calomel et de la sanlonine. Comme on le voit, je n'ai point parlé du Filaria oculi humain, ni du Monostoma lentis, ni du Distoma oculi humani du cristallin, parce que je ne les ai ja- mais ni vus ni observés, dans plus de deux cents cristal- lins cataractes que j'ai soumis à l'action des meilleurs microscopes. 11 en est de même des Cyslerques cellulosœ et de YEchinococus de l'homme, que je n'ai jamais rencon- trés dans trente-quatre ans de pratique. Les scoipions. — Tous les scorpions sont plus ou moins venimeux, selon les latitudes sous lesquelles ils vivent. Le grand scorpion d'Afrique, ceux de Durango, font des piqûies mortelles. A la Havane, ils occasion- nent des accidents graves mais rarement mortels. Dans cette île j'ai noté un symptôme qui suit cons- tamment leur piqûre et que je n'ai vu consigné dans aucun livre, c'est l'engourdissement de la langue. M. le docteur le Riverend, delà Havane, piqué deux fois de suite par un scorpion introduit dans sa chemise, * Rognetta, Annales de thérapeutique, janvier 1848, p* 398. éprouva ce symptôme d'une manière frappante : on eût dit un commencement d'une paralysie de la langue ou d'une giossile. Je n'ai vu qu'une seule personne piquée à l'œil par un scorpion, c'était un mulâtre qui s'était endormi dans des décombres et qui, sentant un animal courir sur sa figure, y porta la main. L'animal, irrité , le pi- qua au doigt et à la paupière inféiieure. En quelques minutes, toute la face fut envahie par une enflure éré- sipélateuse accompagnée de vomissements et de dé- faillances. Le malade pouvait à peine parler; il lui sem- blait avoir la langue aussi tuméfiée que la figure. Il y avait deux heures que l'accident était arrivé lorsque je le vis. Je lui prescrivis une saignée du bras et fis cou- vrir toute la face avec une onction mercurielle ammo- niacale. Les douleurs cessèrent presque, immédiate- ment, mais l'enflure et l'embarras de la langue persis- tèrent deux ou trois jours. C'est, dans les pays hantés par les scorpions, une croyance vulgaire enracinée, que le meilleur remède contre la morsure du scorpion est une huile dans la- quelle on fait macérer un certain nombre de ces ani- maux. Mais rien ne justifie la réputation de ce remède, qui ne la doit qu'au corps gras qui sert d'excipient aux scorpions. L'ammoniaque étendue,l'eau de Luce,l'acétate d'am- moniaque sont les seules substances sur l'action des- quelles on doive compter. Les applications froides, la pommade mercurielle ammoniacale, sont utiles pour combattre le gonflement érésipélateux de la peau. — 55 — Les araignées. Les araignées se trouvent sur loute la surface du globe ; elles hantent toutes les latitudes, et partout elles sont un objet de terreur et de dégoût. Souvent ce dernier sentiment est porté au point de donner des convulsions. Voici un fait singulier. Chaque année l'astronome Lalande venait passer les vacances à Bourg-en-Bresse, chez mon grand-père Tho- mas Riboud, président de la cour royale de Lyon, et chaque année les jeunes filles de la maison s'empres- saient de lui offrir pour son dessert quelques grosses araignées,renfermées dans un compotier en verre. For- fanterie ou perversion de goût, n'importe, ce qu'il y a de sûr, c'est (ju'il en avalait une demi-douzaine les unes après les autres. M. Raspail prétend qu'il avait soin de les écraser d'un coup de dent avant de les avaler, ce qui est difficile. Il vaut mieux admettre que c'étaient des araignées sans venin, car s'il avait eu affaire aux araignées venimeuses de la Sardaigne, du Mexique ou de l'Inde, il est probable que l'illustre Bressan eût été piqué [dus d'une fois. Il existe au Mexique une grosse araignée que l'on nomme Capulina, parce qu'elle a Je ventre gros, rouge et reluisant comme un fruit très-commun dans le pays, que i'uu nomme Capulino, provenant du Melia Azeda- rac Mexicanu. Cette araignée pique souvent les en- fants, qui en meurent Irès-promptement, car la morsure est suivie d'une large eschare gangreneuse. A l'hôpi- tal ophthalmique temporaire que la ville de Puebla avait établi pendant mon séjour, nous vîmes, le doc- - 5/i leur ïrUamanxi et moi, mourir sous nos yeux un en- fant d'un an, à la suite de la gangrène de la paupière produite par cette venimeuse araignée. Le père de l'en- fant apportait avec lui l'insecte qu'il avait pris suspendu à la paupière du petit malheureux. Il est hors de doute que ceux qui seraient piqués aux yeux par l'araignée de Sardaigne nommée Bargia, cou riaient la chance de per- dre cet organe, car elle détermine des accidents graves souvent suivis de la mort. Le docteur E. de Montmahon vit un homme qui, ayant été piqué à la paupière, fut atteint d'accidents graves qui l'enlevèrent en vingt-quatre heures. Au Mexique, il y a une araignée velue et noire que l'on nomme Tarentule, mais c'est une tarentule monstre qui ne fait pas, comme dans la Pouiile, danser ceux qui en sont piqués. Cette araignée, qui a souvent le vo- lume d'un crabe de terre, provoque eh z ceux qui en sont mordus des sueurs qui vont jusqu'à produire des défaillances. Les médecins mexicains ont profite de la connaissance de cette propriété pour faire préparer une teinture de tarentule qui jouit de la réputation méritée d'être excessivement sudurifique. En exami- nant au microscope un sirop antbyphililique breveté parle gouvernement mexicain, j'y ai trouvé des poils el différentes particules appartenant à la tarentule du Mexique. Les différentes espèces de fourmis. Comme les arai- * Eu Corse on la nomme Malmignalfe. M.Couro.médecin corse a fait clans sa thés.- une étude toute particulière d- celte araigné-- elle aD- partient an genre Latrodecîo. ' — 55 — gnées, les fourmis se rencontrent sur toute la surface du globe; partout elles portent le même esprit de travail de société et de destruction. La fourmi ne pique pas, mais elle mord vivement avec ses deux crochets man- dibulaires, si foi tement enfoncés dans les tissus qu'il est difficile de les lui faire lâcher. L'Europe n'a pas trop à se plaindre des fourmis, à part quelques piqûres que font les fourmis rouges aux bûcherons. Mais en Amérique ou en Afrique, c'est tout autre chose; non seulement elles s'attachent aux choses, mais aux hom- mes. La grande fourmi rouge du Sénégal, la fourmi héliophobe, fourmi blanche, le Termes destructeur de Geer, le Termes fatale deLinnée justifient toutes ces diverses appellations, car elles ont horreur de la lumière et ne procèdent que de nuit à leur œuvre de dévasta- tion. Malheur au pauvre noir qui se sera endormi à leur portée : elles détruisent tout ce qu'elles rencon- trent, percent les bois les plus forts, au point que dans l'Inde et les Antilles, on double les coffres et les armoi- res en fer blanc pour les mettre à l'abri de leurs attein- tes. On met les pieds des tables et des commodes dans des vases remplis d'eau pour empêcher leur ascension. J'ai vu un malheureux nègre abandonné vingt-quatre heures dans un bois, à la suite d'une fracture commi- nutive des deux jambes,et qui avait les paupières à demi dévorées par ces insectes enragés. Si l'on n'avait pas le soin d'is 1er les »"->f>.nts nouveau-nés et de les visiter plusieurs lois par nuit, ils auraient le même sort. Outre la morsure, la fourmi a une humeur acre cor- rosive qui monte aux yeux et y provoque une violente inflammation. Aux laits rapportés par divers auteurs, j'ajouterai le suivant : Les fourmis avaient envahi une maison à la Havane, extramuros: dans leur travaux de sape souterraine, el- les avaient soulevé les dalles en marbre d'une salie à manger; un maçon chargé de réparer leurs dégâts et de détruire leur repaire, à l'instant où il soulevait une énorme dalle qui recouvrait leur quartier générai, reçut une bouffée de vapeur acide qui l'aveugla presque et lui produisit une violante conjonctivite, dont il se débar- rassa promptement en se lavant, d'après mon conseil, avec de l'acétate d'ammoniaque allongé d'eau. Je pense que l'eau sédative aurait produit le même effet. Dans l'île de Cuba, pour se préserver des morsures des fourmis blanches, les nègres qui travaillent aux champs, s'enduisent les jambes avec de l'huile de Ma- nati (Phoca vitulina) ou avec la graisse du serpent Maja (Coluber epicrates), espèce de boa inoffensif, très-com- mun dans l'île de Cuba. Quant à moi, je préserve mes tables à collection en plaçant sur chaque pied deux gros fils de cuivre et de zinc placés à un pouce de distance l'un de l'autre et dont les bouts tordus se correspondent. Celle petite pile sèche, basée sur le système du physicien Bailly, fonc- tionne admirablement : c'est un spectacle vraiment curieux de voir tomber avec un mouvement convulsif chaque fourmi qui place les pattes sur le cercle magné- tique qui embrasse le pied de la table. Dans l'île de Puerto-Rico, il y a une fourmi à tête de bœuf (Termes bucephalus nobis) qui est excessivement — ru — féroce et qui mangerait les yeux des enfants nouveau nés, si l'on ne prenait la précaution de suspendre les berceaux. Les scarabées nocturnes, Blattes, ravets. — \\ existe dans quelques contrées de l'Europe et de l'Amérique un petit insecte nocturne appartenant à la famille des cerfs-volants. (Lî/ccrnws). Mais c'est un lucane moins gros qu'un charançon (Curculio vuIgaris), qui vole étourdi- raient à l'entrée de la nuit et vient se heurter contre les yeux, où il abandonne presque toujours ses deux petites cornes qui restent implantées soit dans la cornée, soit dans la conjonctive : elles sont si ténues, qu'elles pa- raissent une de ces particules de ter qui s'échappent sous l'action du marteau frappaut à froid un morceau de fer sur l'enclume. A plusieurs reprisesje lésai prises pour telles, et ce n'est qu'après avoir examiné avec soin ces parcelles avec une forte loupe, que je reconnus leur essence animale sans connaître encore quelle était leur origine. Mais un jour ce petit coléoptère était resté pris dans les plis falciformes de la conjonctive, el ayant laissé en même temps ses cornes dans la cornée, il me fui facile de reconnaître qu'elles lui appartenaient; dès lors, je fus fixé sur la nature de l'accident, ses causes et sa provenance. La Blatte, que l'on nomme aussi Ravet, Cancrela, est, de même que la fourmi, une des plaies des pay< équa- toriaux et iulertropieaux. Cet insecte nocturne salit, détruit, infecte tout ce qu'il lourho. Omnivore, il s'at- tache à tout : à bord des navires, il rouge la nuit le- cors et les durillons des pied>; il nettoie les Oi au'J-s.1 — 58 — bien que la fourmi,el j'ai souvent mis à profit son habi- leté pour la préparation de petits squelettes. Il lui ar- rive souvent de s'attaquer aux petits enfants qui ont les yeux chassieux, et j'en ai vu souvent avec des pertes de substance du bord tarsal produites par les morsures des blattes. Les sangsues. — Ces annelides, dont il existe une si «rande variété, sont aussi répandus sur tout le globe que les araignées. Les personnes qui ont voyagé en Afrique, en Egypte, dans quelques contrées de l'Amé- rique centrale, savent combien il est dangereux de se désaltérer à des fleuves, à des rivières, à des eaux sta- gnantes; on est presque sûr d'avaler de petites sang- sues, qui s'attachent à la gorge, pénètrent souvent dans l'estomac, et déterminent des hématéraèses traumali- quesqui deviendraient graves, si l'on en méconnaissait la cause. L'illustre et toujours regrettable baron Larrey, dans son histoire chirurgicale, nous fait connaître combien cet accident fut fréquent dans la mémorable campagne d'Egypte. M. Guyon a signalé les mêmes faits en Algérie, et pour mon compte, je les ai souvent obser- vés en Afrique, où je ne buvais mon eau que filtrée dans un petit sac de crin, ad hoc. Je me suis toujours élevé contre la routinière habi- tude d'appliquer les sangsues autour des yeux. Elles fluxionnent plus souvent qu'elles ne débarrassent les yeux. Ne vidant les vaisseaux qu'en aspirant, elles ont le grand désavantage d'attirer le sang sous les surfaces où on les applique; par leur piqûre etla nature de — 59 — l'instrument qui la produit, elles déterminent des ec- chymoses qui s'entourent d'un cercle inflammatoire souvent très-étendu. C'est surtout chez les enfants que ces accidents sont le plus notables et souvent suivis d'une petite escharre gangreneuse. Si de bonnes sang- sues peuvent produire des effets aussi nuisibles, qu'en scra-î-il de celles qui vivent dans des marais putrides"? Au Mexique, on n'a que très-peu de sangsues d'Europe, on emploie donc forcément celles du pays : il-faut en appliquer un très grand nombre pour produise un effet suffisant. Leurs morsures occasionnent souvent des accidents graves, parfois mortels, ainsi que l'on peut s'en convaincre en parcourant le Bulletin de T acadé- mie de médecine de Mexico. Elles provoquent surtout une éruption cutanée analogue à l'urticaire, qui e-ù fréquemment accompagnée d'accidents cérébraux for m ida blés. J'ai vu chez un enfant de trois ans la gangrène d'une paupière produite pur ces annelides. A la Havane, les personnes qui se baignent dautî le Zanea sont piquées par de petites sangsues blanches qui s'attachent à la peau avec beaucoup de force. J'ai vu plusieurs baigneurs avoir de ces petits annelides fixe à la caroncule lacrymale et aux paupières, il faut, [eu: leur faire lâcher prise, les frotter avec de la salue imprégnée de tabac mâché. Les Scolopendres, cent-pieds, mille-pieds (scolopen- dre morsicans), pullulent dans les pays chauds; les mai- sons basses et humidesen sont infestées. Si le mille-pieds d'Fjiropc inspire le dégoût et la crainte, qu'en serai il de ce hideux animal des pays chauds, qui atteint huit à dix pouces de longueur, qui rampe le long de vos rideaux, qui s'insinue dans vos habits et vous mord avec une véhémence, expliquée par ses énormes pince mandibulaires, qui entrent profondément dans les chairs? Cette morsure est excessivement douloureuse et suivie d'un gonflement intense, Une fille de couleur à mon service faillit perdre le doigt à la suite d'une morsure d'un énorme mille-pieds. Un Français, établi à la Havane et grand amateur d'horticulture, fut mordu à la paupière par une scolo- pendre qui y resta un moment suspendue par ses cro- chets; en moins de dix minutes toute la face fut enva- hie par un fort érysipèle phlycténoïde, dont la gravité me fit pratiquer une saignée d'urgence; puisrecourvant la face de compresses enduites d'onguent napolitain double, je me retirai. Il n'y avait pas deux heures que j'avais laissé le malade, que l'on vint me chercher en toute hâte, en me disant que son col enflait extraordi- nairement, et qu'il avait peine à respirer. Je me ren- dis aussitôt chez lui et fis pratiquer une nouvelle sai- gnée qui soulagea le malade, auquel je fis prendre en même temps de l'eau de Lucc étendue. Là se terminèrent tous les accidents, mais dans la eonvalescence, il y eut une complète exfoliation de la peau de la face. Que l'on vienne dire maintenant que les scolopen- dres ne sont pas venimeuses. Leur mauvaise réputation est depuis longtemps établie, carie père Lacuna, dont j'ai déjà cité les naïfs commentaires dans sa traduction — bl ^.u-uuiKies, dit n'avoiv jamais vu un uuuuut aussi petit, avoir tant de pieds et être si venimeux. Les scolopendres deMaracaïbo sont formidables,elles atteignent 20 et 22 pouces de longueur. J'en ai envoyé plusieurs spécimen aux musées de Turin et de Lisbonne. Deux de ces reptiles renfermés dans une caisse avec une gros rat, le tuent en quelques instants. Je crois que si, au moment de la morsure de la scolo- pendre, l'on pouvait immédiatement appliquer de l'huile ammoniacale, on neutraliserait les effets du venin. Les chenilles processionnaires. — On nomme ains1 les chenilles d'un papillon du genre Bombyx nommé parReaumur Bombyx processianaria, tona.IL page 179, parce que ces chenilles sociétaires vivent et travaillent à un gynécée commun, et qu'elles sortent de leur atelier en ordre très-régulier de procession,avec un ensemble admirable. Mais il faut se contenter de les admirer ainsi que leurs cocons, sans les toucher, car chenilles et cucons sont revêtus de poils fins, durs, qui pénètrent dans les tissus el y occasionnent une démangeaison aussi vive que celle que produit la piqûre des mosqui- tes et marriugouins.Lemème accident arrivent à ceux qui,en taillant les arbres, ébranlenl les nids, qui sont entourés des mêmes piquants. Les processionnaires dont je viens de parler appar- tiennent à l'Europe, les accidents que ces chenilles pro- duisent y sont rares. Mais dans l'Amérique il existe, au sud surtout, des chenilles qui.sans pouvoir être clas- sées parmi les processionnaires, sont cependant pour- — 62 — vues de poils piquants, mais encore chaque poil se- eréîe un fluide transparent , dont la causticité égale celle du lait des enphorbiacées les plus actives, celui du nnmcenillier et eu Palo Mulaîo. J'ai vu plusieurs personnes qui avaient les paupières recouvertes d'un . ;«'. ypè'e pblyclenoïde intense, sou- vent suivi de lâches gacrgreneuses pour avoir été tou- chées par ces diaboliques chenilles. Monsieur le chevalier de B**'* peintre distingué fixé au Brésil, porte sur le front et la paupière une cica- trice très-marquée, produite par le passage d'une de ces chenilles sur les tissus. Aussitôt après l'accident les natifs de la Venezuela frottent la partie attaquée avec un morceau de cire vier- ge, convenablement ramollie, qui arrache les piquants: après ils appliquent des feuilles de tabac frais, souvent renouvellées.Quand ces moyens sont insuffisants,il faut procéder comme dans les casd'érésypèles phlycténoïdes. '■lédmaircs. Medusariœ (Actinos.)--Q\ii croirait nue celte petite vessie en forme de nacelle, te.ulôt bleue, tantôt versicoîore, appartenant au dernier échelon des êtres vivants, et que l'on voit dans les mers des pays chauds, flotter autour des navires, comme des bulles de savon , porte avec elle une humeur très-caustique. J'avais pris une médusaire et l'examinais sans pré- caution,ignorant le danger, lorsque le capitaine du na- vire, me dit: lavez-vous bien vite avec de l'eau amo- nicale , sans cela , vos doigts vont être couverts d'am- poules, aussi douloureuses que celles produites par les orties. - 63 — Je suivis le conseil, ruais cela frappa mon imagina- lion, et me fit faire quelques recherches bibliographi- ques et je trouvai que Gohlfu, Peron, Dicqmare avaient signalé les accidents produits par le contact des médu- sai rcs, et que l'illustre Spallanzani ayant reçu dans l'œil une goutte du li.j .ido sécrété par une médusa ire à oreilles (Jïcduscria auntà) éprouva une douleur brû- lante qui dura vingt-quatre heures. Dicqmare a noté que ce liquide produit sur la peau une pustule ombi- liquée : aussi dans certains pays, la nomme-t-on laor- de mer. Je crois que les lotions huileuses conviendraient, car la partie caustique des médusaires doit provenir sans aucun doute du phosphore, qu'elles contiennent en si grande quantité, qu'une ruée! usa ire exprimée par moi dans un litre de lait lui communiqua une phosphores- cence telle qu'à trois pieds je pouvais compter les nu- méros des secondes de mon chronomètre de poche. Me voilà arrivé à la fin de mon travail, le navire aussi entre dans la rade, et je prie les lecteurs des Annales d'oculistique qui auront la patience et 1 indulgence de lire ce travail, de se rappeler que je me fais vieux, que la vieillesse est verbeuse et que surtout je leur offre ce faible tribut pour l'anniversaire de ma trente-quatriè- me année de doctorat. A bord du Soient, le ltr t-.cph-mbre 1854. — ni -- QUELQUES NOUVEAUX FAITS D'INSECTES ET AUTRES ANIMAUX VIVANTS QUI ATTAQUENT L'ŒIL ET SES ANNEXES. Si chaque pays a ses endémies (que l'on me permette ce mol), il a aussi ses animaux nuisibles et particu- liers à son sol et à son climat. Lorsque j'ai écrit la pre- mière partie du mémoire qui traite de la question des animaux nuisibles à l'œil, je n'avais encore fait qu'un court séjour dans l'île de Puerto-Rico, et ne connaissais point encore les animaux qui font le sujet de celte note. Les uns ont été découverts par moi, les autres m'ont été indiqués par les gens du pays. Quelques espè- ces ont été signalées à mon attention par M. le comte Vialis de Fontbel, qui a pendant longtemps exercé la médecine dans les Antilles. J'entre donc en matière par l'histoire de deux nou- veaux sarcoptes qui s'attachent aux paupières et y exer- cent de nombreux ravages. Le premier n'occupe que les bords libres des paupières, où il creuse dans la région des bulbes ciliaires de petites excavations dont le premier effet est la chute des cils; cette chute est accompagnée d'une démangeaison insupportable. Puis les petites cavités s'ulcèrent à leur surface et se con- vertissent en petits clapiers infundibuliforraes d'où l'on voit sourdre une matière épaisse, collante, qui, en se desséchant, forme des croûtes adhérentes comme dans hs Syrnv*marairtalispalpt>brfp Cette maladie réside à — 65 — lous les collyres, à toutes les pommades, excepté à l'on- guent napolitain étendu à plusieurs reprises sur les pau- pières, au moment du coucher, et que l'on conserve loule la nuit. Ce petit insecte que l'on nomme à Saint-Domingue et à Puerto-Rico, Azuro, est de la même grosseur que YAcarus scabiei humanœ, tel que l'a figuré le savant micrographe Haspail, avec la différence qu'il est rouge et que les pattes de devant sont armées de crochets comme certaine araignée du genre des Phrynés. Au reste, étant dépourvu de microscope, je n'ai pu l'exa- miner qu'avec une forte lentille. Je pense lui donner le nom A'Acaiis Viallisii, par reconnaissance pour la personne qui me l'a fait connaître. Un autre acare, mais bien plus grand et plus vigou- reux, exerce ses ravages sur le bord des paupières des bœufs et des chevaux, dans l'île de Puerto-Rico, et y détermine des ulcérations indurées, que l'on dirait cancéreuses, mais qui guérissent promptement par l'usage de l'onguent mercuriel. Je lui donnerai le nom A'Acarus palpebralis equinus ; mais les palfreniers et les gardeurs de troupeaux, sont souvent atteints de ce parasite, qu'ils ramassent en soignant les animaux. J'en ai envoyé un spécimen de chaque espèce en Euro- pe, afin d'en obtenir une spécification plus exacte. L'autre acare, qui a aussi pris élection de domicile dans les paupières, est bien connu des habitants de Puerto-Rico sous le nom A'Arador, car il trace sous la peau des paupières des sillons tortueux,racines,que l'on distingue à l'œil nu, et qui ne ressemblent pas mal aux -- î>6 -•■ vcrgel urcs que l'eu rencontre sur le sein et le bis-ven- tre de quelques femmes qui ont beaucoup nourri ou enfante. Ce petit parasite occasionne des démangeai- sons fort vives, et ne disparaît que par des frictions réi- térées avec l'onguent ciirin. Cl acare est en tout pareil à celui du cheval, mais il est bien plus petit et moins brun. Les femmes du pays savent l'extraire avec une grande habilité au moyen d'une petite aiguille crochue. Il existe dans l'île de Puert<»-Rico une grande arai- gnée très-redoutée des hommes et des animaux. Sa morsure entraine non-seulement des accidents géné- raux très-graves et communs à toutes les arachnides venimeu es, mais elle produit toujours une inflamma- tion phlegmoneuse locale, qui se résout très-difficile- ment et se termine par une forme lipomaleuse. C'est Y Araignée sauteuse, dite dans le pays Guaba; elle a quelquefois plusieurs pouces de long, des crochets mandibulaires énormes et des jambes de devant pé li- palpes. C'est «nus contredit un arachnide pédipalpe du genre Phrynê. Je la nommerai PhryncaGuab i, jus- qu'à ce que le célèbre entomologiste Guérin de Mene- vilie, à qui je l'ai adressée, me condamne à lui donner un autre baptême. J'ai vu plusieuis personnes attein'es de tumeurs produites par leur piqûre. Une d'entre elles avait été mordue a i'œil, et la paupière était comme éléphanliasique. L'individu atteint de cette dif- formité ne voulut point s'en laisser opérer, car c'est un préjugé enraciné dans le pays, de regarder comme mortelles toutes les opérations faites sur les hommes et les animaux pour enlever les (umeurs produites par la morsure du Guaba. J'ai, du reste, de cette tumeur un dessin au daguerréotype, que je publierai plus tard. Dans la première édition de ce mémoire, j'ai signa'é les accidents oculaires produits en Europe par un petit Lucane nocturne qui n'agit que comme corps étranger; mais à l'île de Puerto-Rico, il existe un coléop'ère de la même famille, qui voltige en grand nombre sur les grandes routes bordées de fossés remplis d'eau. Cet animal est une véritable peste, pour ceux qui se pro- mènent à (heval à S s nuit tombante, car non-seulement il agit comme corps étranger, mais encore son corps sécrète une matière aussi arden'e que la teinture de cantharides la plus concentrée. Sa présence donne lieu à des douleurs brûlantes, ainsi que j'ai pu m'en con- vaincre par ma propre expérience. Une jeune darne, que j'accompagnais à cheval, en ayant reçu un dans chaque œil, fut obligée de se jeter à bas de sa monture pour se laver les yeux dans une maie boueuse qui heureueement se trouvait là. L'in- secte e^t un petit lucane ayant àcux lignes de long; son corselet et ses é'ylressont bruns, sa tèle noire, armée de deux petites pinces, comme celle des cerfs-volants d'Europe. Quand on l'écrase entre les doigts, il exhale une odeur canlharidôe : je le nommerai Lucanus Urens. Je ne suis que depuis quelques jours à Venezuela, et déjà je puis signaler un insecte qui transporte sur les paupières le pollen du maïs au moment de sa féconda- tion. Cet animal, qui appartient à la famille des Dyp- tères, genre des Ichneumon*, va déposer ses œufs dans — 08 — les fleurs du mais; et quand il s'établit sur le bord des paupières des hommes et des animaux, pour en sucer les mucosités dont il est très-friand, il y dépose avec sa trompe du pollen de maïs, qui occasionne des ophthal- mies palpebralcs très-rebelles. M. le docteur D. L. de Beauperthuis de Cumana, ancien voyageur du Musée d'histoire naturelle de Paris, à la bonté de qui je dois ces détails, m'enverra l'insecte et le pollen du maïs. En attendant, je puis dire que ce naturaliste distingué a examiné ce pollen au microscope, et qu'il l'a trouvé composé de petites roues à dents crochues, qui, une fois fixées à la conjonctive oculo-palpébrale s'en déta- chent difficilement, ce qui explique la ténacité des oph- thalmies qui sont entretenues par son adhérence aux tissus. Il est presque probable que je ferai d'autres décou- vertes qui, comme celle-ci, viendront élargir les cadres de la pathologie animée. Bîi© de Janeiro IMPRIMERIE FRANÇAISE EE FI1ÉIÉRIC ARFVEKON il, place de la Carioca.