DE LA MÉTHODE LARYNGOSCOPIQUE AU POINT DE VUE PRATIQUE COMMUNICATION A L’ACADÉMIE DES SCIENCES ET A L’ACADÉMIE DE MÉDECINE EN RÉPONSE AUX RÉCLAMATIONS DE PRIORITÉ DE M. TURCK (1). En opposition avec la réclamation soulevée récemment par M.Türck (de Vienne), en ce qui a rapport à la laryngoscopie, ré- clamation que M. le professeur Czermak (de Pesth) a déjà réfutée une première fois dans un journal allemand (Wiener medici- nische Wochenschrift, n° 17 et n° 31, 1859), nous devons, dans l’intérêt de la vérité et pour assurer les droits de priorité de M. Czermak, faire ressortir les points suivants : I. — La première impulsion, la première instigation positive à généraliser l’emploi (lu laryngoscope 11e doit évidemment pas être attribuée à M. Türck, mais bien à M. Czermak, ainsi que cela ressort de l’article de M. Czermak « sur le laryngoscope »( Wiener medic. Wochenschrift, n° 13, du 27 mars 1858), dans lequel, pour la première fois, toute la portée et toute l’utilité de la méthode laryngoscopique, au point de vue pratique, ont été notoirement démontrées, et dans lequel l’emploi de cette méthode a été re- commandé instamment aux médecins praticiens. Evidemment, M. Türck, dont les publications les plus ancien- nes sont toutes d’une date postérieure à celles de M. Czermak, a été poussé, par les efforts si fructueux de M. Czermak, à re- prendre et à continuer ses anciennes expériences laryngoscopi- (1) Comptes rendus hebdomadaires des séances de l’Académie des sciences, t. L (4 juin 1860), p. 1049. CZF.RU AK. 106 DE LA MÉTHODE LARYISGOSCOP1QUË t]ues qu’il avait abandonnées, malgré les encouragements et les instigations de personnes compétentes (1). De ce que M. Türck s’est trouvé en possession de miroirs la- ryngoscopiques antérieurement à M. Czermak, et avait essayé, a ce qu’il prétend, dè3 l’année 1857,- à les employer dans son service d’hôpital dans un but de diagnostic, cela ne l’autorise pas à se considérer comme le véritable promoteur des nouvelles expériences laryngoscopiques, pas plus que la circonstance tout à l'ait, accidentelle que, pendant l’hiver de 1857-1858, il a prêté, sur sa demande, à M. Czermak, qui voulait s’occuper de répéter et d’étendre les expériences de Garcia, tous ses miroirs dont il ne savait plus que faire depuis longtemps. Le peu d’intention que M. Türck avait de continuer les recher- ches qu’il avait abandonnées, résulte de ce qu’il avait prêté ses miroirs sans aucune réserve relative à leur emploi. 11 n’a fait non plus à M. Czermak aucune observation, lorsque ce dernier (en mars 1858) lui a demandé la permission de prêter un des miroirs pour le service syphilitique de M. Primarius Sigmund. Lorsque M. Czermak a rencontré ensuite M. Türck chez le docteur Eltinger, qui dessinait précisément les planches pour le mémoire de M. Czermak, destiné à l’Académie des sciences de Vienne, il lui remit précisément, pour l’examiner, l’épreuve de ce premier article, destiné au n° 13 de la Gazette médicale hebdomadaire de Vienne, qu’il venait de corriger. (I) Dans une lettre à M. le professeur Czermak qui, jusqu’ici, n’a pas été publiée, M. le professeur Brücke s’exprime ainsi : « Mon honorable ami, » Je vous confirme que M. le docteur Tiirck m’ayant communiqué ses premières recherches sur le laryngoscope, je me suis informé ultérieurement s’il les continuait, et je l’ai engagé à ne pas les abandonner. » Après aussi longtemps, je ne puis plus me souvenir si cela a eu lieu uutf ou deux fois. Je ne puis pas non plus citer exactement la réponse de M. Türck, mais ce que je sais, c’est que j’cu ai conservé l’impression qu'il avait aban- donné la question : il ne m’a positivement communiqué aucun résultat ultérieur, » Tout en regrettant beaucoup de voir continuer une discussion entre deux savants que j’estime à un très haut degré, je dois vous autoriser, vous qui êtes la partie attaquée, à faire de cette lettre l'usage que vous jugerez conve- nable, si vous croyez en avoir besoin pour établir vos droits. » A vous, w E. Bruche. » Vienne, le 13 novembre 1859. » M. le professeur Ludwig s’est exprimé de même vis-à-vis deM. Czermak. M. Czermak pouvait-il agir plus ouvertement, 2plus loyale- ment ? Pour ce qui est de l’observation qüeM. Türck n’a pas examiné avec soin Cette épreuve,' pensant, ainsi qu’il l’a prétendu plus tard, qu’ü 'était seulement question de physiologie, et qu’après avoir vu, en la parcourant rapidement, la citation de son nom, il l’avait rendue, sans en faire un examen plâs approfondi, elle ne prouve qu’une chose, c’est queM. Türck n’avait vu alors aucune atteinte à ses droits dans les tentatives bien connues de lui, faites dans le service syplnlitique pour rendre possible l’emploi du laryngoscope dans la pratique usuelle : autrement il aurait exa- miné 1 épreuve avec plus de soin, et il aurait élevé des récla- mations publiques. Après la publication de l’article indiqué, que M. Czermak a même envoyé à M. Türck, M. Czermak a encore une fois voulu renvoyer à M. Türck, en le remerciant, les miroirs que M. Türck lui avait prêtés depuis si longtemps sur sa demande. Même alors, M. Türck n’a fait à l’auteur aucun reproche d’avoir porté atteinte à ses prétendus droits de priorité. Cependant M. Czermak avait dit, dans cet article, en citant M. Türck, qu’il le remerciait des miroirs qu’il lui avait prêtés. A cette époque, pendant que M. Czermak, sans cacher en au- cune manière le but qu’il se proposait, terminait les recherches qu’il avait commencées pendant l’hiver, M. Türck ne s’est op- posé en aucune manière, ni directement, ni indirectement, à ses tentatives. On partagera par suite et l’on comprendra l’étonne- ment indicible de M. Czermak, lorsque M. Türck, dans la séance de la Société impériale des médecins deViennedu 29 avril 1858, a cherché à faire valoir ses droits de priorité en protestant d’une voix irritée contre la violation déloyale de sa propriété intellec- tuelle. Si M. Czermak, au lieu de réfuter M. Türck, comme il était en mesure de le faire, a consenti à une explication amicale par considération pour d’anciens collègues et pour les membres du comité de direction de la Société des médecins de Vienne, dont quelques-uns désiraient beaucoup éviter une polémique dans les journaux, cette modération montre combien M. Czermak était sûr de son fait, et combien sa conduite a été conciliante par op- AU POINT DE VUE PRATIQUÉ. 107 108 DE LA. MÉTHODE L UiYNGOSCOHQlE position à celle de M. Türek, qui, au lieu de répondre franche- ment à cette loyauté par la confession de la vérité, a cherché à s’appuyer sur la concession bienveillante que M. Czermak, con- fiant dans sa loyauté, lui faisait par pure bonhomie, pour don- ner une apparence de raison à ses réclamations et à ses attaques ultérieures, qui cependant sont si peu fondées. Si M. Czermak avait eu assez mauvaise opinion de M. Türek pour penser qu’il en serait ainsi, il n’aurait jamais eu la complaisance de faire ressortir la valeur de l’explication de M. Türek, d’après laquelle « il n’avait pas abandonné ses anciennes expériences, mais il les avait seulement interrompues pendant l’hiver par suite du manque de lumière solaire dans les salles où se trouvaient ses malades », et d’admettre cette explication {Wiener m.ed. Wochenschrift, n°16, 1858, Beilage) dont M. Türek a abusé plus tard d’une ma- nière tout à fait peu convenable contre toute tentative d’accom- modement. Mais lors même qu’il en serait comme M. Türek le veut, cela suffirait encore pour prouver que la première impulsion réelle à de nouvelles expériences laryngoscopiques couronnées de succès ne vient pas de M. Türek, mais vient de M. Czermak. Du reste, ce mérite reviendrait encore à M. Czermak, même si M. Türek n avait réellement interrompu ses expériences que par manque de lumière solaire, et ne les avait pas abandonnées ainsi que cela a eu lieu par le fait. En effet, le premier article de M. Czer- mak porte la date du Tl mars 1858, tandis que la réclamation tout à fait mal fondée de M. Türek, de la séance du 9 avril, a paru le 26 avril, et son premier Mémoire a paru seulement le 28 juin 1858. (Voyez à cet égard le chapitre Historique, et la bibliographie exacte de la brochure de M. Czermak : Le laryngoscope, et son emploi en physiologie et en médecine, 1860). II. — Par l’emploi de miroirs concaves pour l’éclairage, con- formément au principe de l’ophthalmoscope, qui a rendu possible l’usage de la lumière artificielle dans les expériences laryngo- scopiques, M. le professeur Czermak a rendu la méthode Liston- Garcia indépendante des limites étroites qui la restreignaient, et a rendu son application possible dans la pratique usuelle. L’importance de cette amélioration, deM. Czermak qui doit du reste paraître tout à fait évidente à tous ceux qui examineront la question avec un peu d’attention, ressort encore de ce que M. Czermak a exécuté ses expériences pendant le même hiver pendant lequel M. Türck a interrompu les siennes par manque de lumière solaire ou, pour me servir du langage d’un critique qui s’est occupé de la brochure de M. Czermak, pendant l’hiver pendant lequel M. Türck a été